Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] L’appelante a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi. Elle avait un certificat médical indiquant qu’elle était incapable de travailler pour des raisons de santé à compter du 4 mars 2018. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a initialement calculé que sa période de référence allait du 5 mars 2017 au 3 mars 2018 et qu’elle avait suffisamment d’heures pour établir sa demande de prestations. L’appelante a reçu neuf semaines de prestations de maladie.

[2] Toutefois, la Commission a ensuite annulé sa décision et a décidé qu’elle n’était pas, en fait, en mesure d’établir une période de prestations parce qu’elle avait accumulé 590 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence et devait avoir 600 heures pour être admissible aux prestations de maladie. Cela signifiait que l’appelante aurait à rembourser les prestations de maladie qu’elle avait reçues. L’appelante a fait appel de cette décision auprès du Tribunal de la sécurité sociale. Le 8 août 2018, le Tribunal a accueilli son appel et a conclu qu’elle avait suffisamment d’heures pour être admissible en prolongeant sa période de référence de deux semaines de sorte qu’elle commence le 19 février 2017.

[3] La Commission a fait appel de cette décision auprès de la division d’appel du Tribunal, soutenant que le Tribunal avait commis des erreurs dans son calcul de la période de référence prolongée de l’appelante. Le 27 août 2019, la division d’appel a accueilli l’appel de la Commission et a renvoyé l’affaire à la division générale aux fins de réexamen.

Question en litige

[4] Le Tribunal doit décider s’il faut rejeter l’appel de façon sommaire.

Droit applicable

[5] Selon l’article 53(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la division générale rejette un appel de façon sommaire si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

[6] Selon l’article 22 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, avant de rejeter un appel de façon sommaire, la division générale doit en aviser la partie appelante par écrit et lui accorder un délai raisonnable pour présenter ses observations.

[7] L’article 93(1) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE) énonce les conditions que l’appelante doit remplir afin de recevoir des prestations de maladie :

  1. il y a eu arrêt de la rémunération;
  2. elle a accumulé, au cours de sa période de référence, au moins 600 heures d’emploi assurable.

[8] L’article 8(1) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) précise que, sous réserve des paragraphes (2) à (7), la période de référence d’une personne assurée est la plus courte des périodes suivantes :

  1. la période de 52 semaines qui précède le début d’une période de prestations prévue au paragraphe 10(1);
  2. la période qui débute en même temps que la période de prestations précédente et se termine à la fin de la semaine précédant le début d’une période de prestations prévue au paragraphe 10(1).

[9] L’article 8(2) de la Loi sur l’AE permet la prolongation d’une période de référence si certaines conditions sont remplies. Les conditions incluent le cas d’une personne incapable de travailler par suite d’une maladie au cours de la période de référence prévue à l’article 8(1) de la Loi sur l’AE.

Preuve

[10] L’appelante cherche à obtenir des prestations de maladie à partir de son dernier jour de travail rémunéré, soit le 4 mars 2018 (voir la demande de prestations à GD3-6 et son relevé d’emploi à GD3-15).

[11] Sa période de référence est la période de 52 semaines précédant le début de sa période de prestations le 4 mars 2018. Elle s’étend donc du 5 mars 2017 au 3 mars 2018.

[12] L’Agence du revenu du Canada (ARC) a rendu une décision relative à l’assurabilité qui détermine le nombre d’heures assurables accumulées par l’appelante (voir la décision rendue le 30 juillet 2019 à RGD4-3 et RGD4-4).

[13] D’après la décision de l’ARC, l’appelante avait accumulé 567,25 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence du 5 mars 2017 au 3 mars 2018 (voir RGD3-1 et RGD3-2).

[14] Le dernier jour de travail de l’appelante a été le 18 février 2018 (GD2-3), mais son relevé d’emploi montre qu’elle a été payée jusqu’au 4 mars 2018 (GD3-15). Selon l’appelante, son employeur lui a versé [traduction] « un type de paiement en reconnaissance d’un deuil » (RGD4-7) pour ces deux semaines parce qu’elle était absente du travail en raison du décès de son fils.

[15] L’ARC a décidé qu’il y avait 37,5 heures assurables dans sa période de paie finale du 20 février 2018 au 4 mars 2018 (voir la décision à RG4-3).

[16] L’appelante n’a pas fait appel de la décision de l’ARC relative à l’assurabilité (voir sa déclaration à RGD4-9).

[17] L’appelante a été avisée par écrit de l’intention du Tribunal de rejeter son appel de façon sommaire parce qu’elle ne satisfaisait pas aux exigences législatives pour être admissible à des prestations de maladie. Conformément à l’article 22 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, on lui a donné un délai raisonnable pour présenter d’autres observations (RGD5). Ses autres observations (RGD6) ont été soumises dans le temps qui lui était alloué et remises à la Commission, qui a confirmé n’avoir aucune autre observation pour y donner suite.

Observations

[18] L’appelante a soutenu ce qui suit :

  1. La décision de l’ARC relative à l’assurabilité est incorrecte.
  2. Sa période de référence comprend les 52 semaines du 5 mars 2017 au 3 mars 2018. Elle est cependant admissible à une prolongation de deux semaines de sa période de référence parce qu’elle n’était pas au travail pendant les deux dernières semaines.
  3. Elle a accumulé 619,9 heures d’emploi assurable durant la période de référence prolongée, ce qui est suffisant pour établir une période de prestations et recevoir des prestations de maladie.

[19] La Commission a soutenu que l’appelante doit avoir accumulé 600 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour établir une période de prestations et recevoir des prestations de maladie. Malheureusement, elle a seulement 567,25 heures. Il n’y a aucune circonstance à l’appui d’une prolongation de sa période de référence aux termes de l’article 8(2) de la Loi sur l’AE. Ainsi, elle ne peut établir une période de prestations et recevoir des prestations de maladie à compter du 4 mars 2018.

Analyse

[20] L’appelante convient que sa période de référence est la période de 52 semaines allant du 5 mars 2017 au 3 mars 2018 (RGD6-4).

[21] L’appelante est également d’accord pour dire qu’elle a besoin de 600 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour être admissible à des prestations de maladie (RGD6-2 et RGD6-3).

[22] L’ARC a compétence exclusive pour ce qui est de la détermination du nombre d’heures d’emploi assurable accumulées au cours d’une période d’emploi donnée.

[23] L’appelante n’a pas fait appel de la décision relative à l’assurabilité rendue par l’ARC le 30 juillet 2019 (à RGD4-3 et RGD4-4).

[24] Par conséquent, la décision relative à l’assurabilité rendue par l’ARC est la réponse définitive concernant le nombre d’heures d’emploi assurable que l’appelante a accumulées durant les périodes que l’ARC a examinées.

[25] Le Tribunal est d’accord avec l’analyse de la décision de l’ARC relative à l’assurabilité faite par la Commission (à RGD3-1). La répartition des heures assurables est la suivante :

  • du 5 mars 2017 au 19 février 2018 : 537,25 heures;
  • du 20 février 2018 au 4 mars 2018 : 37,5 heures;
  • les heures du dimanche 4 mars 2018 ne doivent pas être incluses, cette journée étant à l’extérieur de la période de référence. L’employeur a déclaré que l’appelante avait travaillé 7,5 heures ce jour-là. Ainsi, le total des heures accumulées du 5 mars 2017 au 3 mars 2018 est de 567,25 (574,75 – 7,5 = 567,25).

[26] Le Tribunal ne peut ignorer la décision de l’ARC relative à l’assurabilité ni la modifier unilatéralement comme le suggère l’appelante dans le document RGD6.

[27] Compte tenu de la décision de l’ARC, l’appelante n’a pas accumulé suffisamment d’heures au cours de sa période de référence pour établir une période de prestations et, en conséquence, n’est pas admissible aux prestations de maladie.

[28] Contrairement à l’affirmation de l’appelante selon laquelle l’ARC a confirmé qu’elle est admissible à une prolongation de sa période de référence (voir sa déclaration à RGD4-9), la décision relative à l’assurabilité ne fait rien de tel. Elle quantifie seulement le nombre d’heures d’emploi assurable dans une période donnée.

[29] L’appelante n’a pas démontré qu’elle est admissible à une prolongation de sa période de référence.

[30] La prolongation prévue à l’article 8(2) de la Loi sur l’AE s’applique seulement lorsqu’une partie prestataire a un manque d’heures d’emploi assurable pour cause de maladie pendant sa période de référence. Par conséquent, l’appelante ne pouvait être admissible à une prolongation de sa période de référence que si elle était incapable de travailler pour raison de santé au cours de sa période de référence et si elle n’a pas été payée pendant sa période d’absence du travail.

[31] L’appelante a soutenu qu’elle n’exerçait pas d’emploi assurable au cours des deux dernières semaines de sa période de référence parce qu’elle était en congé pour raison de santé pendant ces deux semaines et n’a pas reçu de salaire. L’employeur lui a plutôt versé une indemnité de deuil pendant sa période d’absence du travail. Et c’est pour cette raison qu’elle croit être admissible à une prolongation de deux semaines.

[32] L’ARC était en désaccord et a jugé que l’appelante avait 37,5 heures d’emploi assurable au cours des deux dernières semaines de sa période de référence.

[33] Bien que l’appelante n’ait pas reçu un salaire à proprement parler, elle a reçu de l’argent de son employeur pour les deux dernières semaines de sa période de référence, même si elle était en congé. Parce qu’elle a été rémunérée par son employeur pour une période de congé, elle est réputée avoir exercé un emploi assurable pendant ce temps conformément à l’article 10.1(1) du Règlement sur l’AE. Puisque ces deux semaines étaient considérées comme assurables, rien ne justifie une prolongation de la période de référence de l’appelante au titre de l’article 8(2) de la Loi sur l’AE.

[34] À la lumière de la décision de l’ARC, l’appelante n’est pas admissible à une prolongation de sa période de référence.

[35] Par conséquent, le Tribunal ne peut tenir compte des heures d’emploi assurable qu’elle peut avoir accumulées à l’extérieur de la période de 52 semaines allant du 5 mars 2017 au 3 mars 2018.

[36] L’appelante a accumulé 567,25 heures d’emploi assurable du 5 mars 2017 au 3 mars 2018. Elle a besoin de 600 heures pour être admissible à des prestations de maladie. Ainsi, le Tribunal est d’avis que l’appelante n’a pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour établir une période de prestations et recevoir des prestations de maladie.

[37] Le Tribunal est extrêmement compatissant à l’égard de la situation de l’appelante, en particulier la perte tragique de son fils. Le Tribunal reconnaît également la frustration justifiée de l’appelante quant au versement de prestations de maladie qu’elle doit maintenant rembourser.

[38] Néanmoins, l’appelante doit satisfaire aux exigences législatives pour être admissible à des prestations de maladie. La Loi sur l’AE et le Règlement sur l’AE n’accordent aucun pouvoir discrétionnaire en ce qui a trait au nombre d’heures requis pour qu’une partie prestataire soit admissible à des prestations, et le Tribunal n’a pas le pouvoir discrétionnaire de modifier le langage clair employé dans la loi, peu importe les circonstances atténuantes. La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe selon lequel les conditions d’admissibilité prévues par la Loi sur l’AE ne peuvent être modifiées à la discrétion d’une personne qui rend une décision, et ce, même s’il manque une heure aux prestataires pour remplir les conditions requises (Canada (Procureur général) c Lévesque, 2001 CAF 304). Ce principe s’applique quelques impérieuses que soient les circonstances (Pannu, 2004 CAF 90).

[39] Malheureusement pour l’appelante, le Tribunal ne peut modifier ces exigences et n’est pas habilité à faire une exception dans son cas de sorte qu’elle reçoive des prestations de maladie à compter du 4 mars 2018.

[40] L’échec de l’appel de l’appelante est inéluctable, quels que soient les éléments de preuve ou arguments pouvant être présentés à une audience, et il convient de le rejeter de façon sommaire conformément à l’article 53(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

Conclusion

[41] L’appel n’a aucune chance raisonnable de succès et est, par conséquent, rejeté de façon sommaire.

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