Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – La Division d’appel (DA) a déterminé que la division générale (DG) n’avait pas correctement appliqué le critère juridique relatif à l’inconduite aux faits de cette cause. La DG a concentré son attention sur l’authenticité de contrats de travail concurrents dont l’un était frauduleux selon l’employeur et a mené au congédiement de la prestataire. Cela n’est toutefois pas la question que la DG aurait dû aborder. La DG a omis de répondre à une question plus fondamentale. La prestataire savait-elle, ou aurait-elle dû savoir, que le fait de signer et d’appliquer le contrat présumé frauduleux pourrait entraîner son congédiement? La DG a plutôt commis une erreur de droit en concentrant son attention à déterminer quel contrat correspondait le mieux aux conditions d’emploi de la prestataire. La preuve de la Commission n’était pas suffisamment convaincante. Elle ne démontrait pas que la prestataire savait ou aurait dû savoir qu’elle risquait d’être congédiée pour avoir signé et appliqué ce contrat de travail. Par conséquent, la Commission n’a pas prouvé l’inconduite et n’avait pas de motifs pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations. La DA a accueilli l’appel.

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] S. S. est la prestataire en l’espèce. Elle travaillait pour l’employeur, X. Pendant que la prestataire était en congé de maladie, l’employeur a entrepris une enquête et a mis fin à son emploi par la suite. Plus précisément, l’employeur a prétendu que la prestataire avait comploté avec (l’ancienne) directrice générale intérimaire de créer un contrat d’emploi frauduleux. La prestataire a ensuite adhéré, de façon irrégulière, au régime collectif d’avantages sociaux de l’employeur, a changé son statut à celui d’employée salariée et s’est accordé une augmentation de salaire d’environ 1 800 $ par année. De plus, l’employeur a prétendu que la prestataire avait intimidé et harcelé ses collègues.

[3] Plus tard, la prestataire a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi (AE). Initialement, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a approuvé sa demande. Cependant, l’employeur a contesté la décision de la Commission, ce qui a amené celle-ci à procéder à un examen plus approfondi. Finalement, la Commission a conclu que la prestataire avait été congédiée en raison de son inconduite. Par conséquent, la Commission l’a exclue du bénéfice des prestations d’AE, ce qui a occasionné un trop-payé dans son compte.

[4] La prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant la division générale du Tribunal, mais son appel a été rejeté. L’employeur interjette maintenant appel de la décision de la division générale devant la division d’appel du Tribunal.

[5] J’ai conclu que la division générale n’avait pas appliqué correctement le critère juridique relatif à l’inconduite aux faits de la présente affaire. Dans ces circonstances, j’accueille l’appel et je rends la décision que la division générale aurait dû rendre. Selon moi, la Commission n’a pas prouvé que la prestataire était coupable d’inconduite. Par conséquent, la Commission n’a aucun motif pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations d’AE. Les raisons de ma décision sont exposées ci-dessous.

Questions en litige

[6] Pour rendre cette décision, je me suis concentré sur les questions suivantes :

  1. Devrais-je examiner les nouveaux éléments de preuve dans cette affaire?
  2. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit dans la façon dont elle a appliqué le critère relatif à l’inconduite aux faits de cette affaire?
  3. Dans l’affirmative, quelle est la meilleure façon de réparer l’erreur de la division générale?
  4. La Commission a-t-elle des motifs pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations d’AE?

Analyse

[7] Je dois suivre la loi et les procédures énoncées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). Par conséquent, je peux intervenir en l’espèce seulement si la division générale a commis au moins l’une des erreurs énoncées à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDSFootnote 1.

[8] En l’espèce, je me suis concentré sur la question de savoir si la décision de la division générale contient une erreur de droitFootnote 2. D’après le libellé de la Loi sur le MEDS, toute erreur de droit pourrait déclencher le recours à mon pouvoir d’intervenir dans cette causeFootnote 3. Dans les causes pour lesquelles je peux intervenir, la Loi sur le MEDS définit également les pouvoirs dont je dispose pour essayer de réparer l’erreur de la division généraleFootnote 4.

Question en litige no 1 : Devrais-je examiner les nouveaux éléments de preuve dans cette affaire?

[9] Non, je n’ai examiné aucun nouvel élément de preuve dans cette affaire.

[10] La prestataire a présenté de nouveaux éléments de preuve après que la division générale a finalisé sa décision. Cette nouvelle preuve comprend des arguments ainsi que des affirmations de la prestataireFootnote 5, des affirmations formulées par d’autres (avec des documents à l’appui)Footnote 6, des courriels et d’autres élémentsFootnote 7.

[11] Comme il a été mentionné précédemment, la Loi sur le MEDS confère un rôle limité à la division d’appel. La division d’appel n’est pas une instance où les parties peuvent consolider leur cause ou remédier aux lacunes qui auraient pu être relevées par la division générale.

[12] Le point de départ de mon analyse consiste à déterminer si la division générale a commis une erreur énoncée dans la Loi sur le MEDS. En règle générale, je fais cette évaluation uniquement sur le fondement de la preuve qui a été portée à la connaissance de la division générale. Je reconnais qu’il existe des exceptions à la règle générale d’exclusion des nouveaux éléments de preuveFootnote 8, toutefois aucune de ces exceptions ne s’applique en l’espèce.

[13] Plus précisément, les nouveaux éléments de preuve de la prestataire ne fournissent pas d’information sur le contexte général, ne mettent pas en lumière des conclusions que la division générale aurait tirées sans preuve à l’appui, ni ne révèlent des façons dont la division générale aurait agi de manière inéquitable. Ils abordent plutôt le cœur du conflit entre les parties.

[14] Par conséquent, j’ai refusé d’examiner les nouveaux éléments de preuve de la prestataire.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit?

[15] Oui, la division générale a commis une erreur de droit en appliquant incorrectement le critère relatif à l’inconduite aux faits de cette affaire.

[16] La division générale a commencé son analyse de la cause en soulignant à juste titre que l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) exclut une partie prestataire du bénéfice des prestations d’AE si elle perd un emploi en raison de son inconduite. Au titre de la Loi sur l’AE, l’inconduite n’exige pas que la personne ait de mauvaises intentions, mais elle exige un élément d’intentionnalité : la personne savait-elle, ou aurait-elle dû savoir, que ses actions pourraient entraîner son congédiementFootnote 9?

[17] La division générale a ensuite ciblé la raison pour laquelle l’employeur avait mis fin à l’emploi de la prestataire. Elle a établi que l’employeur était motivé par sa conviction selon laquelle la prestataire avait comploté avec la directrice générale intérimaire pour établir, signer et mettre en application un faux contrat d’emploi. L’employeur a prétendu que ce contrat avait permis à la prestataire de modifier son statut d’emploi, d’augmenter son salaire et d’accéder à des avantages aux employés avant d’effectuer une période d’attente obligatoire de trois mois. En somme, la prestataire a trahi la confiance de l’employeur.

[18] Bien que la lettre de congédiement de la prestataire précise aussi qu’elle était accusée d’avoir eu un comportement abusif envers les clients et les membres du personnel, la division générale a établi que ce n’était pas le véritable motif de son congédiement.

[19] La section suivante de l’analyse de la division générale est la plus longue. La division générale a analysé deux contrats d’emploi afin de déterminer lequel était le plus [traduction] « authentique ».

[20] La prestataire soutient que le premier contrat d’emploi, celui daté du 23 novembre 2017 et signé par la prestataire ainsi que par la directrice générale intérimaire, est légitimeFootnote 10. Selon ce contrat, la prestataire devait toucher un salaire annuel de 64 500 $ et devenait admissible au régime collectif d’avantages sociaux des employés en date du 1er décembre 2017.

[21] Le deuxième contrat d’emploi, celui daté du 27 novembre 2017 et signé seulement par l’ancienne directrice générale, est celui qui est légitime selon l’employeurFootnote 11. Selon ce contrat, la prestataire devait toucher 32 $ de l’heure et devait travailler pendant une période d’attente de trois mois avant d’adhérer au régime collectif d’avantages sociaux de l’employeur.

[22] Enfin, la division générale a examiné divers facteurs et a conclu que [traduction] « la lettre du 27 novembre est celle qui a été approuvée par l’employeur et les conditions de ce contrat sont les conditions que la prestataire a acceptées lorsqu’elle a commencé l’emploi »Footnote 12. Il s’ensuivait donc que la prestataire avait trahi la confiance de l’employeur et fait preuve d’inconduite en [traduction] « signant un faux contrat d’emploi, en accédant au régime d’avantages complémentaires avant d’y être admissible, et en modifiant son taux de rémunération sans l’approbation de l’organisme »Footnote 13.

[23] En se concentrant sur l’authenticité de deux contrats d’emploi concurrents, la division générale s’est posé la mauvaise question. De plus, lorsque la division générale a tiré une conclusion défavorable à l’égard de la prestataire sur la question du contrat le plus authentique, elle a conclu incorrectement que la prestataire était coupable d’inconduite. Il s’agit d’erreurs de droit au titre de l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS.

[24] L’authenticité du contrat d’emploi de la prestataire est une question très controversée entre la prestataire et l’employeur. En tout respect, cependant, ce n’est pas une question que la division générale aurait dû trancherFootnote 14.

[25] Pour déterminer si la prestataire était coupable d’inconduite, la division générale aurait dû examiner ce que la prestataire savait et comprenait au moment où elle a signé le contrat d’emploi daté du 23 novembre 2017. La signature et l’exécution du contrat étaient des actes conscients. Cependant, la prestataire n’aurait pas su que cela entraînerait son congédiement si ce contrat reflétait avec exactitude les conditions de son emploi comme elles avaient été négociées avec une personne qui selon elle avait le degré d’autorité nécessaire.

[26] Les croyances de la prestataire sont importantes dans une cause comme celle-ci, où on affirme que l’employeur aurait été dysfonctionnel et n’aurait pas eu de structure de gouvernance claire et efficace.

[27] En résumé, la division générale n’a pas répondu à la question pertinente : La prestataire savait-elle, ou aurait-elle dû savoir, que le fait de signer et d’exécuter le contrat daté du 23 novembre 2017 pourrait entraîner son congédiement? La division générale a commis une erreur de droit en se concentrant plutôt sur la question de savoir quel contrat correspondait le mieux aux circonstances environnantes, puis en concluant que la prestataire savait quelles étaient les conditions de son emploi.

Question en litige no 3 : Quelle est la meilleure façon de réparer l’erreur de la division générale?

[28] En l’espèce, il convient de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[29] J’ai conclu que j’ai la capacité et l’information nécessaire pour rendre une décision finale dans cette affaireFootnote 15. De plus, j’ai examiné tous les éléments dans le dossier et j’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience de la division générale. Par conséquent, il ne serait pas très utile de renvoyer l’affaire à la division générale.

Question en litige no 4 : La Commission a-t-elle des motifs pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations d’AE?

[30] Non, la Commission n’a pas démontré qu’elle avait des motifs pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations d’AE.

[31] Pour avoir gain de cause, la Commission doit prouver que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduiteFootnote 16. En effet, la Commission doit prouver sa thèse selon la prépondérance des probabilités, ce qui signifie qu’il est plus probable que le contraire que sa version des événements soit vraie.

[32] Compte tenu de la gravité des allégations et des conséquences importantes associées à une conclusion d’inconduite, la Commission a besoin d’une preuve claire pour étayer son argumentationFootnote 17. Selon moi, elle n’y est pas parvenue : la Commission n’a pas établi les motifs permettant d’exclure la prestataire du bénéfice des prestations d’AE.

[33] Comme la division générale, j’estime aussi que les allégations d’intimidation et de harcèlement formulées par l’employeur ne sont pas les véritables raisons pour lesquelles il a mis fin à l’emploi de la prestataireFootnote 18. Ces allégations concernent des événements qui se sont produits en février 2018, et la prestataire n’a été congédiée que plusieurs mois plus tard. En effet, en mars 2018, l’employeur a versé des prestations à la prestataire et lui a remis un relevé d’emploi portant la mention [traduction] « maladie ou blessure » comme raison de l’émission du relevéFootnote 19. C’est l’enquête menée ultérieurement par l’employeur qui a véritablement mené à sa décision de mettre fin à l’emploi de la prestataireFootnote 20.

[34] Je me concentrerai donc sur les allégations de fraude, de collusion et de rupture du lien de confiance formulées par l’employeur.

[35] D’une part, la prestataire a fourni une explication tout à fait de bonne foi de ce qui s’est passé dans cette affaire.

[36] D’après la prestataire, la directrice générale intérimaire et une consultante en ressources humaines l’ont reçue en entrevue pour le poste de gestionnaire des finances. Étant donné que l’employeur n’était pas en mesure de satisfaire à ses attentes salariales, elle a demandé d’adhérer au régime collectif d’avantages sociaux de l’employeur sans avoir à satisfaire à l’exigence de la période d’attente régulière de trois mois. Après l’entrevue, la directrice générale intérimaire a vérifié si elle avait le pouvoir d’annuler la période d’attente, puis a confirmé à la prestataire qu’elle le ferait effectivementFootnote 21.

[37] En ce qui concerne sa paye, la prestataire a reconnu qu’elle avait d’abord été embauchée sur une base horaire, mais elle a dit que l’employeur avait modifié par la suite le poste de gestionnaire des finances pour en faire un poste salarié. Plus précisément, la prestataire faisait de nombreuses heures supplémentaires pour les raisons suivantes :

  1. l’état des registres de l’employeur;
  2. sa situation financière précaire;
  3. les difficultés de la prestataire à accéder aux dossiers électroniques de l’employeur (l’ancien gestionnaire des finances n’avait laissé aucun de ses mots de passe);
  4. des affaires urgentes, comme la paye, qu’elle devait traiter aussi rapidement que possible.

[38] La directrice générale intérimaire et l’ancienne trésorière ont toutefois commencé à se demander si l’employeur serait en mesure de payer les heures supplémentaires de la prestataire si elle commençait à réclamer toutes les heures qu’elle avait travaillées. Par conséquent, la décision a été prise de verser à la gestionnaire des finances un salaire annuel au lieu d’un salaire horaire.

[39] Au moment de faire ce changement, la directrice générale intérimaire et l’ancienne trésorière ont décidé de donner à la gestionnaire des finances une petite augmentation de salaire, puisqu’elles s’attendaient à ce qu’elle travaille un peu plus d’heures par semaine. Devant la division générale, la prestataire a insisté sur le fait que c’était l’employeur qui avait apporté ce changement et que, compte tenu du nombre d’heures supplémentaires qu’elle avait travaillées, il l’avait fait dans son propre intérêt.

[40] L’ancienne directrice générale intérimaire de l’employeur, la personne avec qui la prestataire avait négocié les conditions de son emploi, a présenté une preuve écrite et orale devant la division générale. Elle était tout à fait d’accord avec la preuve de la prestataireFootnote 22. En particulier, elle a convenu qu’elle avait le pouvoir d’établir les conditions d’emploi de la prestataire et que le contrat d’emploi daté du 23 novembre 2017 représentait le mieux ces conditions d’emploi. La prestataire a aussi fourni un avis envoyé à tout le personnel par le conseil d’administration de l’employeur comme élément de preuve de l’autorité de la directrice générale intérimaireFootnote 23.

[41] La prestataire et la directrice générale intérimaire ont reconnu qu’il y avait des problèmes avec le contrat d’emploi daté du 23 novembre 2017, mais les ont imputés à des erreurs involontaires et attribuables à l’inexpérience de l’adjointe de la directrice générale intérimaire. La prestataire et la directrice générale intérimaire ont aussi souligné l’environnement chaotique et dysfonctionnel dans lequel elles travaillaientFootnote 24. Par exemple, l’employeur était passé récemment d’un conseil opérationnel à un conseil de gestion, et certains membres du conseil trouvaient cela difficile de céder le contrôle.

[42] La Commission, d’autre part, a accepté les allégations de l’employeur selon lesquelles la prestataire était coupable de fraude, de collusion, de harcèlement et de rupture du lien de confiance.

[43] Pour soutenir sa position, la Commission s’est appuyée fortement sur :

  1. des notes de conversations téléphoniques entre les agentes et agents de la Commission et la nouvelle gestionnaire des finances de l’employeurFootnote 25;
  2. les documents que l’employeur a soumis à différents tribunaux tout en défendant d’autres procédures intentées par la prestataire, notamment un affidavit assermenté par le nouveau gestionnaire des financesFootnote 26.

[44] Selon moi, la Commission n’a pas fourni la preuve manifeste nécessaire pour prouver l’inconduite dans cette affaire. J’en suis arrivé à cette conclusion parce que :

  1. la Commission a obtenu la majeure partie de sa preuve auprès du nouveau gestionnaire des finances de l’employeur, alors que ce dernier ne travaillait pas pour l’employeur au moment pertinent. Il a donc fondé sa preuve en grande partie sur des hypothèses et des ouï-dire;
  2. l’affidavit du nouveau gestionnaire des finances de l’employeur est incomplet. Il ne tente pas de fournir tous les documents pertinents, mais seulement ceux qui appuient la cause de l’employeur dans une procédure différente. De plus, l’employeur n’a pas fourni à la Commission toutes les pièces de l’affidavit;
  3. l’affidavit du nouveau gestionnaire des finances fournit peu ou pas de preuve permettant de diminuer l’autorité de la directrice générale intérimaire pour négocier les conditions d’emploi de la prestataire, pas plus qu’il ne semble reconnaître que les conditions de son emploi auraient pu changer au fil du temps;
  4. de plus, l’affidavit n’explique pas pourquoi la personne responsable de l’administration du régime collectif d’avantages sociaux de l’employeur a inscrit la prestataire au régime si cela constituait une violation des critères d’admissibilité. Dans sa demande au régime, la prestataire n’a pas prétendu avoir trois mois d’emploi continu auprès de l’employeurFootnote 27.
  5. de la même façon, le nouveau gestionnaire des finances laisse entendre que la prestataire s’est accordé de manière inappropriée une augmentation de salaire. Cependant, le nouveau gestionnaire des finances semble ignorer le risque que courrait l’employeur si la prestataire faisait des heures supplémentaires. En effet, la prestataire et la directrice générale ont dit que la prestataire faisait de nombreuses heures supplémentaires, mais qu’elle choisissait de ne pas réclamer ces heures, parce qu’elle était préoccupée par la santé financière de l’employeur;
  6. la preuve de la Commission n’aborde pas les questions clés comme les négociations concernant les conditions d’emploi de la prestataire et l’état d’esprit de la prestataire lorsqu’elle a signé le contrat d’emploi daté du 23 novembre 2017. Pour les besoins de cette affaire, il importe moins de savoir si la directrice générale intérimaire avait l’autorité réelle d’établir les conditions d’emploi de la prestataire que de savoir si la prestataire croyait sincèrement qu’elle avait ces pouvoirs;
  7. la prestataire a nommé au moins deux témoins indépendants qui auraient eu des éléments de preuve pertinents dans cette affaire : l’ancienne conseillère en ressources humaines et l’ancienne trésorière de l’employeur. Cependant, la Commission n’a pas tenté de communiquer avec ces personnes;
  8. la Commission n’a pas participé à l’audience devant la division générale. La prestataire n’a donc pas été en mesure de vérifier la preuve de la Commission.

[45] Pour toutes ces raisons, la preuve de la Commission ne m’a pas convaincu. Cette preuve n’était pas suffisamment solide pour contrer l’explication de bonne foi de la prestataire et de la directrice générale intérimaire, qui ont toutes les deux fourni une preuve sous serment. Elles ont aussi produit un élément de preuve de l’autorité de la directrice générale intérimaire et ont fourni des réponses simples, cohérentes et crédibles aux questions de la membre de la division générale. Finalement, la preuve orale concordait avec les affirmations antérieures qu’elles avaient formulées par écrit et à l’intention des agentes et agents de la Commission.

[46] Compte tenu des questions en litige dans cette affaire, j’ai été quelque peu troublé par le fait que la division générale a permis à la prestataire et à la directive générale intérimaire de présenter leur preuve ensemble. Il aurait été préférable que la directrice générale intérimaire soit à l’extérieur de la salle d’audience pendant que la prestataire présentait sa preuve. La division générale aurait pu à tout le moins informer la prestataire de cette possibilité.

[47] Je reconnais cependant que la division générale n’est pas tenue de suivre rigoureusement les procédures des salles des tribunaux et que l’audience s’est déroulée sans la participation de la Commission, et était donc de nature moins conflictuelle. Pour les motifs que j’ai déjà mentionnés, la preuve orale de la prestataire et de l’ancienne directrice générale intérimaire montrait aussi de nombreux signes de crédibilité.

[48] Dans l’ensemble, la Commission n’a pas réussi à prouver qu’il y avait eu inconduite en l’espèce. Sa preuve n’était pas suffisamment convaincante pour montrer que la prestataire savait ou aurait dû savoir qu’elle serait vraisemblablement congédiée pour avoir signé et exécuté le contrat d’emploi daté du 23 novembre 2017. Par conséquent, la Commission n’a aucun motif pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations d’AE.

Conclusion

[49] En l’espèce, la division générale a commis une erreur de droit en appliquant incorrectement le critère juridique relatif à l’inconduite. L’erreur de la division générale m’a permis d’intervenir en l’espèce, et j’ai décidé de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. La Commission n’a pas démontré que la prestataire était coupable d’inconduite au sens de la Loi sur l’AE. Par conséquent, elle n’a aucun motif pour exclure la prestataire du bénéfice des prestations.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 7 novembre 2019

Téléconférence

S. S., appelante
Rachel Paquette, représentante de l’intimée

Articles pertinents de la loi

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

Moyens d’appel

58(1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

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Décision

59(1) La division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

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Pouvoir du Tribunal

64(1) Le Tribunal peut trancher toute question de droit ou de fait pour statuer sur une demande présentée sous le régime de la présente loi.

Loi sur l’assurance-emploi

Exclusion : inconduite ou départ sans justification

30(1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins [...].

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