Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. J’estime que S. V. (prestataire) n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable pour le retard du dépôt de sa demande de prestations régulières d’assurance-emploi (AE).

Questions préliminaires

[2] Le prestataire a envoyé d’autres renseignements après l’audience. Je lui ai posé une série de questions supplémentaires pour mieux comprendre les renseignements qu’il a envoyés. Il a répondu à mes questions. La Commission de l’assurance-emploi du Canada n’a pas formulé d’observations sur les renseignements supplémentaires.  

[3] J’ai tenu compte des renseignements reçus après l’audience parce qu’ils présentent un intérêt pour l’appel. 

Aperçu

[4] Le prestataire a travaillé pendant un peu plus de deux mois avant que son poste ne soit supprimé le 13 mai 2019. Il a reçu un montant forfaitaire en indemnité de départ équivalent à trois mois de salaire. Il a aussi reçu une indemnité de vacances qui équivalait à environ la moitié d’une semaine de paie.   

[5] Le prestataire n’a pas fait sa demande de prestations d’AE immédiatement après avoir quitté son emploi. Il l’a fait le 9 septembre 2019. Le prestataire a appris que, compte tenu de la date de sa demande, il n’avait pas travaillé assez d’heures assurables pendant sa période d’admissibilité pour recevoir des prestations. Il a demandé que l’on considère sa demande comme ayant été présentée le 13 mai 2019. On appelle « antidater » le processus qui consiste à considérer une demande de prestations comme ayant été faite à une date antérieure. 

[6] La Commission n’a pas antidaté la demande du prestataire, parce qu’elle a décidé que le prestataire n’a pas démontré de motif valable pour avoir tardé pendant toute cette période à faire sa demande de prestations d’AE. Le prestataire a appelé de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

Faits convenus

[7] Les parties ont convenu du fait que le prestataire a retardé d’environ 4 mois la déposition de sa demande de prestations d’AE. Ils ont aussi convenu que si sa demande est antidatée, il aura accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurables travaillées pour être admissible aux prestations. 

Questions en litige dans le présent appel

[8] La Commission affirme que le prestataire n’a pas démontré de motif valable pour toute la période où il a tardé à déposer sa demande de prestations. La Commission affirme que rien n’indique que le prestataire a fait des efforts pour s’informer de ses droits. De plus, la Commission soutient que même si le prestataire avait un motif valable pour la période allant du 13 mai à la mi-août 2019, il n’a pas démontré qu’il avait un motif valable pour la période allant de la mi-août au 9 septembre 2019. La Commission soutient que rien n’avait empêché le prestataire de faire sa demande de prestations à la mi-août. 

[9] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme qu’il avait un motif valable pour toute la période du retard parce que le représentant des ressources humaines lui a dit d’attendre d’avoir reçu tous ses versements d’indemnité de départ avant de faire sa demande d’AE. Il dit qu’il ne savait que le fait d’attendre avant de présenter sa demande aurait un impact son admissibilité aux prestations d’AE. Il a suivi les instructions du représentant des ressources humaines et il a fait sa demande de prestations en septembre lorsqu’il était certain qu’il avait terminé ses indemnités de départ et de vacances.  

Ce que je dois décider

[10] Je dois décider s’il est possible de traiter la demande de prestations du prestataire comme si elle avait été faite le 13 mai 2019. Cela signifie que je dois décider si le prestataire a prouvé qu’il avait un motif valable pour toute la période durant laquelle il a attendu avant de faire sa demande de prestations, soit entre le 13 mai 2019 et le 9 septembre 2019.

Motifs

[11] Pour démontrer qu’il avait un motif valable, le prestataire doit prouver qu’il a agi comme une personne prudente et raisonnable. Je dois décider si le comportement du prestataire se compare à celui qu’aurait eu une personne prudente et raisonnable dans des circonstances similairesNote de bas de page 1. Cela signifie que le prestataire doit également démontrer qu’il a pris des mesures relativement rapides pour comprendre son admissibilité aux prestations et ses obligations selon la loiNote de bas de page 2.

[12] Si le prestataire n’a pas pris de telles mesures, il doit démontrer que des circonstances exceptionnelles l’en ont empêchéNote de bas de page 3.

[13] Le prestataire doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valableNote de bas de page 4.

Le prestataire avait-il un motif valable pour toute la période du retard de sa demande de prestations d’AE?

[14] Non, j’estime que le prestataire n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable pour toute la période du retard de sa demande de prestations d’AE

[15] Le prestataire affirme qu’il avait un motif valable pour son retard pour trois raisons :

  • le représentant des ressources humaines de l’entreprise lui a dit d’attendre l’épuisement des versements de son indemnité de départ avant de faire une demande de prestations;
  • il a attendu de bonne foi la fin de la période de versement de ses indemnités avant de faire sa demande;
  • il ne savait pas que le fait d’attendre avant de faire sa demande aurait un impact sur son admissibilité aux prestations. 

[16] Le prestataire a expliqué que quand son poste a été supprimé, le représentant des ressources humaines lui a dit qu’il recevrait une indemnité de départ équivalant à trois mois de travail en plus de quelques jours d’indemnité de vacances. On lui a aussi dit d’attendre la fin la période des versements de son indemnité avant de faire sa demande de prestations d’AE, parce qu’il ne serait pas admissible avant la fin de ses versements. Le prestataire affirme qu’il a reçu ses indemnités de départ et de vacances. Il a fait un calcul approximatif de la période d’attente pour s’assurer qu’il avait reçu tous ses versements avant de faire sa demande. Il était en vacances avec sa famille à la fin du mois d’août et il a fait sa demande le 9 septembre 2019 quand il était certain que sa période de versements était terminée.    

[17] Le prestataire soutient qu’il avait toujours eu l’intention de faire une demande de prestations. Il fait valoir que d’un point de vue pratique, son retard est sans importance parce qu’il n’aurait pas pu recevoir ses prestations pendant la plus grande partie de la durée de son retard parce qu’il recevait une indemnité. 

[18] J’accepte la preuve du prestataire. Il était clair et franc dans ses raisons expliquant sa décision d’attendre avant de faire sa demande. Cela dit, je ne peux admettre les arguments du prestataire parce qu’ils ne permettent pas de prouver qu’il avait un motif valable pour toute la période de son retard.   

[19] L’information erronée fournie par le représentant des ressources humaines permet bien d’expliquer l’inaction du prestataire pour la période se terminant la première semaine d’août seulement, mais pas pour la période du retard au grand complet. Les indemnités de départ et de vacances du prestataire se sont terminées vers la première semaine d’août 2019.  

[20] Je conclus donc que le reste du retard, soit la période s’échelonnant de la première semaine d’août jusqu’au 9 septembre 2019, est dû à deux facteurs. Ces facteurs sont les suivants : la décision prise de bonne foi du prestataire d’attendre la toute fin du versement de son indemnité avant de faire une demande de réparation[sic] et son manque de connaissance sur l’effet qu’aurait son retard sur son admissibilité aux prestations d’AE

[21] La jurisprudence reconnaît que ni les intentions de bonne foi d’une personne prestataire ni son ignorance de la loi ne constituent des motifs valables pour avoir fait une demande de prestations en retardNote de bas de page 5. Le prestataire avait beau avoir depuis le début toutes les intentions de faire de bonne foi une demande de prestations après la fin du versement de son indemnité de départ, cette raison ne soutient pas l’argument qu’il avait un motif valable. 

[22] De plus, je suis d’avis que le prestataire n’a pas agi comme le ferait une personne prudente et raisonnable dans les mêmes circonstances. J’estime qu’une personne prudente et raisonnable aurait communiqué avec la Commission, ne serait-ce que quelques jours avant la date de fin de sa période de versement de son indemnité de départ pour savoir quand il devrait faire sa demande de prestations. 

[23] Je constate également que le prestataire a déjà reçu des prestations d’AE par le passé. Il a affirmé que quand il a fait sa demande de prestations la dernière fois à la fin de son emploi, il savait clairement quand la faire. À l’époque, son employeur avait des problèmes financiers et il ne lui a pas versé son indemnité, il a donc fait une demande peu de temps après avoir quitté son emploi. J’admets que la situation entourant sa demande de prestations actuelle est différente de celle de la fois précédente. Cependant, je trouve que cette différence soutient la conclusion qu’une personne prudente et raisonnable se serait renseignée davantage sur le moment où elle pouvait faire une demande, pour éviter un retard.     

[24] Le fait que le prestataire était parti en vacances avec sa famille à la fin du mois d’août ne constitue pas, à mon avis, une circonstance exceptionnelle ayant empêché le prestataire d’agir rapidement. Le prestataire a déclaré qu’il a continué à chercher de l’emploi même en vacances. Le fait qu’il a continué à chercher de l’emploi démontre qu’il lui était possible de faire sa demande de prestations en ligne ou à tout le moins de communiquer par téléphone avec la Commission pour faire sa demande.

[25] Je compatis avec le prestataire et je reconnais que ces quelques semaines de retard pour faire sa demande ont des conséquences lourdes. Toutefois, le facteur le plus important de mon évaluation doit être les raisons du retard et non la durée de celui-ciNote de bas de page 6. Malheureusement, le prestataire n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable pour toute la période du retard, pour la partie s’échelonnant de la mi-août jusqu’au 9 septembre 2019.  

Conclusion

[26] L’appel est rejeté.

Date de d’audience :

Le 4 décembre 2019

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

S. V., Appelant

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