Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

L’article 46.01 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) prévoit que des trop-payés n’ont pas à être remboursées à la Commission si deux conditions sont réunies : (1) s’il s’est écoulé plus de trente-six mois depuis la fin d’emploi du prestataire, et (2) si, selon la Commission, le coût administratif de la détermination du montant du remboursement est égal ou supérieur à la valeur du trop-payé. Pour la deuxième condition, la Commission considère un montant seuil de 346$ pour procéder à l’évaluation. Dans ce cas-ci, la division d’appel (DA) a conclu que la division générale (DG) n’a pas commis d’erreur en concluant que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. La Commission a validement conclu que le prestataire ne rencontrait pas le deuxième critère et devait rembourser les prestations. De plus, la DA a confirmé qu’elle n’avait pas compétence pour ordonner le versement d’indemnité ou pour annuler un trop-payé dans ce cas-ci. La DA ne peut pas considérer de dommages allégués par le prestataire des suites de son traitement par la Commission. La DA a rejeté l’appel.

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal rejette l’appel.

Aperçu

[2] L’appelant, V. B. (prestataire), a travaillé comme chauffeur de camion pour l’employeur jusqu’au 4 mai 2012. Le 19 avril 2017, l’employeur a émis un relevé d’emploi indiquant que le prestataire a reçu un montant de 69 144 $ à titre de règlement judiciaire.  La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a avisé le prestataire que la somme de 59 908,95 $ reçue à titre de salaire perdu et paie de vacances, provenant de son employeur était considérée comme un revenu et serait déduite de ses prestations du 19 août 2012 au 27 avril 2013. L’application des montants a généré un trop-payé au montant de 11 522 $. Le prestataire a demandé la révision de cette décision mais la Commission a maintenu sa décision initiale. Le prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès de la division générale du Tribunal.

[3] La division générale a déterminé que la somme d'argent reçue par le prestataire constitue une rémunération aux termes de l’article 35 du Règlement sur l'assurance-emploi (Règlement sur l’AE) et que cette rémunération a été répartie conformément aux dispositions prévues à l’article 36 du Règlement sur l’AE.

[4] Le prestataire s’est vu accordé la permission d’en appeler.  La division d’appel a accueilli en partie son appel et a retourné le dossier à la division générale afin qu’elle décide uniquement de la question soulevée par le prestataire concernant l’application de l’article 46.01 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[5] La division générale a déterminé que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a déterminé que le coût administratif pour la détermination du remboursement était inférieur à la valeur du remboursement. Elle a conclu que le prestataire ne rencontrait pas le deuxième critère de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE et qu’il devait rembourser les prestations reçues en trop.

[6] Le prestataire s’est vu accordé la permission d’en appeler.  Il soutient que la division générale a erré en présumant que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire et qu’elle a erré dans son interprétation de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE.

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que la division générale avait exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire et dans son interprétation de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE.

[8] Le Tribunal rejette l’appel du prestataire.

Questions en litige

[9] Est-ce que la division générale a erré en concluant que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire ?

[10] Est-ce que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE ?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[11] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.Note de bas de page 1

[12] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. 

[13] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Est-ce que la division générale a erré en concluant que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire ?

Est-ce que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE ?

[14] Le Tribunal est d’avis que l’appel est sans fondement.

[15] Le prestataire soutient que la division générale a erré en présumant que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire et a erré dans son interprétation de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE.

[16] Le prestataire adresse de nombreux reproches à la Commission lesquels sont plus amplement détaillés dans ses observations.  Il fait essentiellement valoir que la Commission a fait preuve de négligence dans le traitement de son dossier, ce qui lui a occasionné divers inconvénients et des dommages.  Il soutient que la Commission n’a pas respecté ses propres règles de service, soit de traiter son dossier dans les 30 jours.  Il soutient que la Commission n’a rien fait avant le mois d’avril 2017 après avoir été informé du jugement du Tribunal Administratif du Travail au mois d’août 2016. Il fait valoir que le montant de 346$ utilisé par la Commission ne tient pas compte du délai déraisonnable et du temps investi par la Commission dans le traitement de son dossier.

[17] Le prestataire soutient que, compte tenu des éléments portés à sa connaissance, la division générale a erré en concluant que la Commission avait agi de façon judiciaire et que les prestations reçues en trop devaient être remboursées selon l’article 46.01 de la Loi sur l’AE.

[18] La division générale devait décider si la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a déterminé que le prestataire devait rembourser le versement excédentaire de prestations selon les termes de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE.

[19] Tel que souligné par la division générale, l’article 46.01 de la Loi sur l’AE prévoit que les prestations excédentaires n’ont pas à être remboursées si les deux conditions suivantes sont réunies :

  1. a) Il s’est écoulé plus de trente-six mois depuis le licenciement ou la cessation d’emploi du prestataire pour lequel la rémunération est payée ou à payer.
  2. b) Selon la Commission, le coût administratif pour la détermination du remboursement est vraisemblablement égal ou supérieur à sa valeur.

[20] La preuve non contestée devant la division générale démontre que plus de trente-six mois se sont écoulés entre le licenciement ou la cessation d’emploi du prestataire pour lequel la rémunération a été payée et l’avis de dette expédié au prestataire. En effet, l’emploi du prestataire a pris fin en mai 2012 et la Commission a fait parvenir le premier avis de dette au prestataire en avril 2017. Le prestataire rencontre donc le premier critère de l’article 46.01 de la Loi sur l’AE.

[21] Suite au règlement du litige contre son ex-employeur, la Commission a avisé le prestataire que la somme de 59 908,95 $ reçue à titre de salaire perdu et paie de vacances, soit 58 436,42 $ à titre de salaire perdu et 1 472,53 $ à titres de paie de vacances, provenant de son employeur était considérée comme un revenu et serait déduite de ses prestations du 19 août 2012 au 27 avril 2013. L’application des montants a généré un trop-payé au montant de 11 522 $.

[22] La Commission a considéré que le montant seuil pour 2018 était de 346$ selon l’Enquête sur la population active –salaire horaire moyen -Employés permanents (X). Selon la Commission, l'estimation du trop payé était suffisamment élevée pour aller de l'avant avec l'application des gains du prestataire.

[23] La division générale a considéré que l’article 46.01 de la Loi sur l’AE mentionne que l’on doit considérer « le coût administratif pour la détermination du remboursement » et non le coût administratif associé au traitement du dossier et au recouvrement du montant en jeu.  La seule chose qui importe est le coût administratif pour établir ce qui doit être remboursé.

[24] La division générale a déterminé que la Commission utilise une règle assez simple pour déterminer si un montant doit être réclamé : elle considère un montant seuil de 346$, qui correspond aux coûts administratifs généralement associés à la détermination d’un remboursement. Si le montant à récupérer est supérieur à ceci, elle procède à la demande de remboursement. Sinon, le montant n’est pas réclamé au prestataire.

[25] La division générale a déterminé que l’utilisation d’une telle règle est justifiable puisqu’il est raisonnable de penser que les coûts administratifs pour la détermination d’un remboursement sont à peu près les mêmes entre chaque dossier de ce genre, puisque le processus est généralement similaire d’un cas à l’autre : 1- Le prestataire reçoit des prestations d’assurance-emploi. 2- Quelques années plus tard, le prestataire reçoit des montants d’argents de son ex-employeur en vertu d’un règlement. 3-Les détails du règlement sont présentés à la Commission. 4- Le montant des prestations à rembourser est calculé à partir des montants de rémunération versés au prestataire.

[26] La division générale a considéré que le montant du trop-payé au prestataire était relativement élevé et que le coût administratif pour la détermination du remboursement était véritablement inférieur à sa valeur.

[27] La division générale a conclu que la Commission avait utilisé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a déterminé que le coût administratif pour la détermination du remboursement était inférieur à la valeur du remboursement. Puisque le prestataire ne rencontrait pas les deux critères prévus par la Loi sur l’AE, la division générale a conclu que l’article 46.01 ne pouvait recevoir application et les prestations reçues en trop devaient être remboursées.

[28] Le Tribunal en vient à la conclusion que la décision de la division générale repose sur les éléments de preuve portés à sa connaissance, et il s’agit d’une décision qui est conforme aux dispositions législatives. 

[29] Rien ne justifie l’intervention du Tribunal.

[30] Compte tenu des observations et des représentations verbales du prestataire lors de l’audience, le Tribunal désire souligner qu’il n’a pas la compétence nécessaire afin d’ordonner le versement d’une indemnité ou pour annuler un trop-payé pour les inconvénients et dommages qu’il allègue avoir subi suite au traitement de son dossier par la Commission. Il s’agit d’un débat qui relève d’un autre forum.Note de bas de page 2

Conclusion

[31] Pour les motifs ci-dessus mentionnés, le Tribunal rejette l’appel.

 

Date de l’audience :

16 janvier 2020

Mode d’audience :

Téléconférence

Comparutions :

V. B., appelant

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