Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelante, J. S. (prestataire) interjette appel de la décision de la division générale datée du 7 juin 2019.

[3] La division générale a conclu que la prestataire avait sciemment fait de fausses déclarations dans sa demande de prestations d’assurance-emploi. Plus particulièrement, la division générale a conclu qu’elle avait faussement prétendu avoir travaillé pour un cabinet de comptable du 7 mars au 29 avril 2011. Elle a conclu que la prestataire avait faussement prétendu avoir accumulé 312,3 heures d’emploi assurable dans le cadre de cet emploi. La prestataire avait besoin de ces heures, car sans celles-ci, elle n’avait pas suffisamment d’heures assurables pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Après avoir constaté que la prestataire avait fait de fausses déclarations, la division générale a conclu qu’elle était exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. La décision de la division générale signifiait que la prestataire devait rembourser les prestations qui lui avaient déjà été versées par l’intimée, soit la Commission de l’assurance-emploi du Canada.

[4] La prestataire soutient qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable devant la division générale le 12 juin 2018.

[5] Pour les motifs énoncés ci-dessous, je rejette l’appel.

Question en litige

[6] La seule question en litige dont je suis saisie est la suivante : la prestataire a-t-elle eu droit à une audience équitable devant la division générale?

Analyse

[7] La prestataire soutient qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable devant la division générale. Elle affirme avoir des problèmes médicaux qui ont affecté sa capacité à témoigner. Elle a déclaré devant la division générale qu’elle a 60 ans, qu’elle est diabétique et qu’elle a un problème au dos qui limite sa tolérance à la position assise. Son représentant a affirmé qu’ils étaient tous deux invalides et qu’ils recevaient des prestations de soutien pour personnes invalides.

[8] La prestataire soutient également qu’elle a dû quitter l’audience avant qu’elle ne puisse finir de présenter la preuve. Elle affirme que puisqu’elle a dû quitter l’audience plus tôt, le membre de la division générale aurait dû lui donner une autre chance de préciser ou de terminer ses réponses.

[9] La prestataire n’a pas demandé une pause ou un ajournement de l’instance afin qu’elle puisse fournir des éléments de preuve à une date ultérieure.

a) Faits contextuels

[10] J’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale. L’audience a duré moins d’une heure. La prestataire et son représentant (son époux) étaient présents durant toute la durée de l’audience.

[11] Le membre de la division générale a invité la prestataire et son représentant à témoigner librement. Avant de conclure l’audience, le membre a demandé à la prestataire et à son représentant s’ils avaient quelque chose à ajouter. Le représentant de la prestataire a réitéré le fait qu’ils souhaitaient obtenir l’aide du Tribunal de la sécurité sociale, car [traduction] « nous sommes vieuxNote de bas page 1 ».

[12] Il n’y a aucune allégation selon laquelle le membre de la division générale aurait privé la prestataire de toute occasion de présenter sa cause. Cependant, la prestataire a soulevé une objection quant à la nature des questions posées par le membre de la division générale. La prestataire estimait qu’elles étaient indiscrètes, embarrassantes, et qu’il était difficile d’y répondre.

[13] Pendant l’audience, le membre de la division générale a posé des questions à la prestataire au sujet de son travail pour un cabinet comptable. Les questions servaient à vérifier les connaissances de la prestataire relativement au cabinet. Si elle était en mesure de répondre aux questions, comme ses heures de travail, cela laisserait entendre que son emploi était légitime. Autrement, sa crédibilité serait mise en doute de façon générale si elle avait de la difficulté à répondre à l’un ou l’autre de ces types de questions ou si elle était incapable d’y répondre.

[14] Le représentant de la prestataire s’est opposé à ces questions. En effet, il a tenté à plusieurs reprises de témoigner au nom de la prestataire. La prestataire et son représentant ont demandé pourquoi le membre de la division générale devrait avoir le droit de savoir quoi que ce soit au sujet de son emploi pour le cabinet comptable. Le représentant de la prestataire a protesté aux questions :

[traduction]

Nous sommes vieux, nous sommes malades, et je souffre. Et c’est insultant pour nous aussi. La décision vous revient.

[...]

Après cela, je ne répondrai à aucune question, la façon dont vous posez des questions à moi et à ma femme. Nous souffrons. Nous sommes maladesNote de bas page 2.

[...]

Nous ne voulons plus répondre à aucune autre question. [...] Vous faites votre travail, mais étant donné qu’au moins, nous sommes vieux et malade. Nous nous sentons très embarrassés et [inaudible - plusieurs voix qui parlent simultanément]Note de bas page 3.

[15] La prestataire a dit qu’elle ne se sentait pas bien au moment de l’audience devant la division générale. Elle a affirmé qu’elle n’était pas capable de témoigner convenablement en raison de ses problèmes médicaux. La prestataire s’est procuré un rapport sur son état de santé de son médecin une semaine après l’audience. Le médecin a préparé le rapport afin d’appuyer la demande de prestations du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées de la prestataireNote de bas page 4.

[16] Le médecin a indiqué que la prestataire avait peu de symptômes ou de signes affectant son fonctionnement intellectuel, son jugement, sa mémoire et son raisonnementNote de bas page 5. Cependant, dans le même rapport, le médecin était également d’avis que la prestataire avait des limitations moyennes ou modérées au chapitre de la mémoire. Le médecin était également d’avis qu’il était possible que la prestataire ait besoin d’un peu plus de temps pour comprendre les choses, s’exprimer ou communiquer verbalement. Il est possible qu’à l’occasion, elle ne soit pas capable d’effectuer une tâche, que ce soit avec ou sans mesure d’adaptation et avec ou sans douleur modéréeNote de bas page 6.

[17] Comme je l’ai mentionné dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, d’habitude, la division d’appel n’accepte pas de nouveaux éléments de preuve. Cependant, il existe des exceptions à cette règle générale. Par exemple, si le nouvel élément de preuve porte sur l’un des moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, alors il est possible que je puisse tenir compte de cet élément. C’est dans ce but que la prestataire s’est servi du rapport du médecin. Elle se fonde sur le rapport, car elle affirme que celui-ci démontre qu’elle n’a pas la capacité nécessaire pour témoigner.

[18] J’ai noté dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler que le rapport sur l’état de santé fourni par le médecin de déterminait pas clairement que la prestataire n’avait pas la capacité de témoigner. Néanmoins, j’ai accordé la permission d’en appeler parce que j’étais convaincue que le rapport laissait entendre que les problèmes médicaux de la prestataire auraient pu affecter sa mémoire pendant l’audience et nuire à sa capacité de témoigner. J’ai invité la prestataire à fournir des éléments de preuve à l’appui de son allégation selon laquelle elle n’a pas pu témoigner.

b) Questions posées par le Tribunal à la prestataire

[19] La prestataire a demandé que cet appel ait lieu par questions et réponses écrites. Elle n’a demandé aucun autre type d’audience, comme une audience en personne ou une téléconférence. J’ai accepté sa demande, et je lui ai posé les questions suivantes :

  1. La prestataire a-t-elle d’autres éléments de preuve à l’appui de son allégation selon laquelle elle était incapable de témoigner à l’audience devant la division générale le 12 juin 2018? Si oui, la prestataire devrait fournir ces éléments de preuve.
  2. La prestataire a affirmé qu’elle n’a pas répondu correctement aux questions de la division générale parce qu’elle ne se sentait pas bien. À quelles questions n’a-t-elle pas répondu correctement, et comment aurait-elle répondu si elle s’était sentie mieux?
  3. La prestataire voulait-elle présenter d’autres éléments de preuve concernant son emploi auprès du cabinet comptable? Si oui, quels étaient ces éléments de preuve?
  4. Compte tenu du fait qu’elle avait occupé son emploi auprès du cabinet comptable en 2011, la prestataire avait utilisé quels documents ou éléments de preuve pour se rafraîchir la mémoire?
  5. La prestataire a entendu parler pour la première fois de l’enquête de la Commission sur son emploi auprès du cabinet comptable autour de 2013. La Commission a interviewé la prestataire en 2015. Cela se rapprochait manifestement de la période pendant laquelle elle a travaillé pour le cabinet comptable. Les renseignements fournis par la prestataire à cette époque-là étaient-ils fiables? Si oui, pourquoi est-ce que la division générale ne serait pas en mesure de se fonder sur ces renseignements antérieurs concernant l’emploi qu’elle a occupé un 2011 plutôt que sur tout nouvel élément de preuve qu’elle serait maintenant en mesure de produire?

[20] Il en va de soi que la prestataire a été invitée à fournir des réponses et des renseignements supplémentaires.

c) Réponses de la prestataire aux questions du Tribunal

[21] La prestataire a soumis plusieurs dossiers médicaux. Ces derniers confirment un diagnostic de diabète type 2, d’ostéoporose, d’arthrose et de trouble de l’humeur. Elle éprouvait de la douleur chronique au dos et au couNote de bas page 7.

[22] La prestataire a également soumis une copie de la carte professionnelle du cabinet comptable. La prestataire soutient que son relevé d’emploi, son feuillet T4, son talon de paye et sa déclaration de revenus de 2011 constituent des éléments de preuve convaincants selon lesquels elle travaillait bel et bien au cabinet comptable en 2011. La division générale avait ces dossiers en sa possession.

d) Examen des dossiers médicaux

[23] La prestataire soutient qu’elle n’était pas en mesure de témoigner pendant l’audience devant la division générale en raison de problèmes médicaux. Je reconnais que la prestataire a plusieurs problèmes de santé, mais l’existence de ces problèmes ne suffit pas à déterminer l’aptitude de cette dernière.

[24] En plus des dossiers que j’ai décrits précédemment, la prestataire se fonde sur les dossiers suivants :

  • Un certificat de maladie daté du 19 juillet 2011Note de bas page 8 – confirme que la prestataire a un problème au dos.
  • Une imagerie diagnostique du rachis lombaire datée du 17 juin 2015Note de bas page 9 – révèle des modifications dégénératives légères au bas du dos.
  • Un rapport de consultation daté du 9 novembre 2015 et préparé par un spécialiste de la médecine de réadaptationNote de bas page 10 – aiguillage de la prestataire en raison de douleur chronique au bas du dos. Plan de traitement recommandé. Aucune discussion au sujet de l’aptitude de la prestataire à témoigner.
  • Un rapport daté du 17 avril 2017 d’un endocrinologueNote de bas page 11 – diagnostic de diabète sucré de type 2 et d’ostéoporose. Aucune discussion sur les symptômes.
  • Un résumé de laboratoire / une évaluation du diabète datés du 17 avril 2017 – encore une fois, aucune discussion sur les symptômes.
  • Des radiographies du rachis lombaire prises le 25 mai 2018Note de bas page 12 – le radiologue était d’avis que les radiographies révélaient des ostéophytes antérieurs.
  • Un rapport de la densité osseuse effectué le 25 mai 2018Note de bas page 13 révélait une faible densité osseuse.
  • Un rapport de consultation daté du 13 juin 2018, préparé par un spécialiste de la médecine de réadaptationNote de bas page 14 qui a vu la prestataire lors d’un rendez-vous de suivi. La prestataire s’est plainte de douleurs au cou qui irradiaient jusque dans ses pieds. La prestataire a signalé une humeur changeante et de la fatigue chronique. Elle a signalé que de marcher durant 15 à 20 minutes intensifiait sa douleur. Elle a déclaré souffrir de vertige lorsqu’elle était en position couchée. De plus, elle n’avait pas beaucoup d’heures de sommeil à moins qu’elle ne prenne du Lyrica. Elle avait reçu un diagnostic d’ostéopénie. Autrement, elle n’avait pas de nouvelle préoccupation. Le spécialiste a diagnostiqué chez l’appelante de la douleur corporelle diffuse, un trouble de l’humeur et possiblement de la fibromyalgie qui avaient une incidence sur son humeur. Le spécialiste a recommandé qu’elle participe à des séances de physiothérapie.
  • La liste des médicaments que la prestataire a pris du 31 mai au 30 octobre 2018.

e) Aptitude de la prestataire à témoigner à l’audience devant la division générale

[25] J’accepte le fait que ces dossiers médicaux démontrent que la prestataire est atteinte de douleurs chroniques au dos et au cou, d’un trouble de l’humeur et possiblement de fibromyalgie. Cependant, j’estime que, pris ensemble, les dossiers médicaux ne permettent pas d’établir que les problèmes médicaux de la prestataire affectaient sa mémoire ou sa concentration à un point tel que cela l’avait rendue inapte à témoigner ou incapable de le faire.

[26] La prestataire n’a pas fourni d’avis médicaux selon lesquels elle ne peut pas ou ne devrait pas témoigner ou qui laisseraient entendre qu’elle a des problèmes de concentration ou de mémoire. Les dossiers initiaux sur lesquels la prestataire s’est fondée étaient contradictoires, et le médecin n’a pas expliqué la raison pour laquelle il en est arrivé à ses opinions contradictoires.

[27] La prestataire a vu un spécialiste dans la semaine qui a suivi l’audience devant la division générale. Elle a été en mesure de rencontrer le spécialiste et de fournir ses antécédents médicaux. Il ne semble pas y avoir eu de discussion et aucune préoccupation ne semble avoir été soulevée au sujet de problèmes de mémoire ou de concentration dont serait atteinte la prestataire à un tel point qu’elle ne serait pas en mesure de fournir un historique, et encore moins de témoigner.

[28] Je n’ai aucun doute que la prestataire est atteinte de fatigue chronique et qu’elle dort très peu, mais il n’y a pas de preuve démontrant que cela l’affecte à un point tel qu’elle n’était pas en mesure de témoigner à l’audience devant la division générale. Par exemple, rien ne démontre que la mémoire à court et à long terme de la prestataire ainsi que son orientation spatio-temporelle est gravement altérée. De plus, rien ne laisse entendre que la prestataire n’est pas en mesure de comprendre des questions simples ou de donner des réponses cohérentes.

[29] J’estime qu’il n’y a tout simplement pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir que la prestataire était incapable de témoigner en son propre nom à l’audience devant la division générale. De plus, j’estime que le membre de la division générale a donné à la prestataire une occasion équitable de présenter sa cause. En somme, j’estime qu’elle a eu droit à une audience équitable devant la division générale.

f) La tenue d’une nouvelle audience était-elle appropriée?

[30] Si la prestataire avait établi qu’elle n’avait pas eu droit à une audience équitable, la réparation appropriée consiste d’habitude à offrir la tenue d’une nouvelle audience.

[31] Cependant, si la prestataire n’est pas en mesure de fournir des éléments de preuve qu’elle n’a pas déjà fournis, et si ses éléments de preuve et ses arguments demeurent inchangés, alors il y aurait eu peu d’intérêt à ordonner une nouvelle audience en l’espèce.

[32] Dans l’éventualité où la prestataire aurait produit suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer qu’elle avait été inapte à témoigner, je lui ai donné l’occasion de répondre à certaines questions que la division générale lui avait posées. Je lui ai donné la chance de faire cela sans la pression d’une audience en personne.

[33] J’ai demandé à la prestataire quels éléments de preuve elle aurait fournis au sujet de son emploi pour le cabinet comptable. La prestataire a eu plus d’un moins pour réfléchir aux questions. Durant cette période, la prestataire aurait pu consulter ses dossiers ou toutes notes au sujet de son emploi pour le cabinet comptable. Elle aurait pu consulter son époux, sa famille, ses amis ou quelqu’un d’autre afin de voir s’ils auraient pu l’aider à se souvenir de quoi que ce soit concernant son emploi.

[34] J’estime important de noter que le représentant de la prestataire affirme que le cabinet comptable continue de fonctionner et d’exercer ses activitésNote de bas page 15. Et pourtant, aucun effort n’a été déployé pour obtenir plus de renseignements au sujet ce cabinet afin de démontrer que la prestataire travaillait bien à cet endroit.

[35] Plusieurs années ont passé entre la période au cours de laquelle la prestataire a prétendument travaillé pour le cabinet comptable et la date à laquelle elle s’est présentée devant la division générale. Elle a déjà fourni quelques dossiers. La Commission a également interviewé la prestataire en novembre 2015. La Commission a enregistré les réponses de la prestataire aux questions d’entrevueNote de bas page 16.

[36] La prestataire a écrit à la Commission après l’entrevue de novembre 2015Note de bas page 17. Elle lui a écrit une autre fois en octobre 2016Note de bas page 18. Elle a contesté les conclusions de la Commission selon lesquelles le relevé d’emploi contenait des renseignements faux ou trompeurs. Elle a soutenu que la Commission devrait fournir une preuve écrite selon laquelle le relevé d’emploi était faux. Elle a nié avoir été impliquée de quelque façon que ce soit dans la présentation du relevé d’emploi. Donc, elle a soutenu que si le relevé d’emploi se révélait « faux » ou s’il contenait des erreurs, elle ne devrait pas être pénalisée ou tenue responsable.

[37] La Commission a rappelé encore une fois la prestataire en décembre 2016 afin de revenir sur certaines des questions qu’elle avait posées en novembre 2015 au sujet du prétendu emploi de la prestataireNote de bas page 19. La Commission a parlé au conjoint de la prestataire. La Commission a enregistré ces réponses.

[38] Le représentant de la prestataire soutient qu’aucun renseignement enregistré par la Commission lors de l’entrevue de novembre 2015 n’est véridique. Il dit que toute allégation est sans fondement et que la preuve de la Commission n’est pas fiable.

[39] Pourtant, ni lui ni la prestataire n’a jamais offert d’autres réponses aux questions de la Commission. Ils n’ont fourni aucun élément de preuve pour tenter de réfuter les sommaires d’entrevues de novembre 2015 et de décembre 2016, autre que le relevé d’emploi, le feuillet T4, les talons de paye et la déclaration de revenus de 2011 de la prestataireNote de bas page 20.

[40] Lorsque la prestataire a comparu devant la division générale, le membre lui a demandé le même genre de questions, entre autres, que lui avait posé la Commission. Le membre s’est efforcé de mettre à l’épreuve la véracité des documents sur lesquels s’est fondée la prestataire pour prouver qu’elle avait travaillé au cabinet comptable.

[41] Comme le membre l’a noté, la prestataire avait initialement déclaré que son travail pour le cabinet comptable n’était pas stable. Son époux avait confirmé que la prestataire travaillait à temps partiel. Elle avait aussi déclaré qu’elle n’avait jamais reçu de talons de paye et que l’employeur payait en argent comptant. La prestataire a par la suite soumis les talons de paye provenant du cabinet comptable. Les talons de paye laissaient entendre que la prestataire avait travaillé à temps plein pour le cabinet comptable, soit une moyenne de 40 heures par semaineNote de bas page 21. Cela était en plus de son autre emploi à temps plein qu’elle occupait ailleurs. Pourtant, la prestataire avait initialement affirmé que ce travail n’était pas stable et qu’elle avait travaillé là uniquement à temps partiel. Le membre de la division générale a également interrogé la prestataire au sujet de la nature de son travail.

[42] Je constate que la prestataire n’a jamais été en mesure de répondre à des questions plus précises au sujet de l’emploi qu’elle a prétendument exercé au cabinet comptable. Je constate également qu’elle n’a jamais été en mesure de traiter de la preuve contradictoire qu’elle a elle-même fournie au sujet du moment où elle a travaillé pour le cabinet comptable et de ses heures de travail.

[43] La preuve portant sur la question à savoir si elle travaillait à temps plein ou à temps partiel, et à savoir les jours où elle a travaillé, ses heures de travail et si elle travaillait le jour ou le soir lorsqu’elle travaillait prétendument était vague et contradictoire. Elle a d’abord affirmé qu’elle était sur appel pour le cabinet comptable, et ce, pour quelques heures le jour ou le soir. Au cours de la même conversation, elle a travaillé de manière constante pendant le jour. Plus tard, cela a changé et elle a affirmé avoir travaillé 8 heures les soirsNote de bas page 22.

[44] Au cours de l’entrevue survenue en décembre 2016, la prestataire (par l’intermédiaire de son époux) a signalé qu’elle n’avait pas d’emploi stable et qu’elle travaillait à temps partiel. Pourtant, cette information était contraire à ce que révélaient les talons de paye, soit qu’elle avait un emploi stable et qu’elle travaillait à temps plein. Cela était en plus de son autre emploi à temps plein qu’elle occupait ailleurs.  

[45] Ni la prestataire ni son époux n’ont été en mesure d’expliquer ces divergences flagrantes. Essentiellement, l’argument de la prestataire est tout simplement que l’ensemble des renseignements portant sur l’emploi de la prestataire se trouvent dans le relevé d’emploi, le feuillet T4, l’avis de cotisation et les talons de paye.

[46] L’époux de la prestataire confirme qu’à l’heure actuelle, la prestataire n’est pas en mesure de se rappeler quoi que ce soit de son passéNote de bas page 23.

[47] Compte tenu de ces considérations, même s’il y avait eu suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que la prestataire n’était pas apte à témoigner à l’audience devant la division générale, je n’aurais pas ordonné la tenue d’une nouvelle audience. J’ai donné l’occasion à la prestataire de justifier la tenue d’une nouvelle audience. Je lui ai donné la chance d’expliquer quels autres éléments de preuve elle avait.

[48] Puisque je suis préoccupée par le temps qui s’est écoulé depuis qu’elle a prétendument travaillé pour le cabinet comptable, j’ai demandé à la prestataire ce dont elle aurait besoin pour l’aider à se rafraîchir la mémoire. Il n’y a rien d’autre que ce qu’elle a déjà fourni. Elle se fonde sur les mêmes talons de paye, relevé d’emploi, feuillet T4 de 2011 et avis de cotisation de 2011.

[49] La prestataire ne m’a pas fourni de preuve qui laisserait entendre qu’une nouvelle audience serait appropriée. Elle n’a rien de nouveau ou de supplémentaire à fournir en plus de ce qu’elle a déjà fourni. Elle a soumis la carte professionnelle de la firme comptable, mais cela ne répond pas à la question de savoir si elle a travaillé là-bas en 2011. Son représentant confirme que la prestataire ne se souvient de rien de son passé et ne serait pas en mesure de répondre aux questions.

[50] Quoi qu’il en soit, la prestataire n’a pas demandé la tenue d’une nouvelle audience. Elle me demande essentiellement d’accepter le feuillet T4 de 2011, l’avis de cotisation de 2011, les talons de paye et le relevé d’emploi. Elle me demande d’accepter le fait que ces documents prouvent qu’elle a travaillé 312 heures au cabinet comptable. Elle me demande également de rejeter les arguments de la Commission qui portait sur le fait de rejeter la véracité de ces documents.

g) Réévaluation fondée sur la preuve existante

[51] Si j’avais conclu que la prestataire n’avait pas eu droit à une audience équitable, au lieu de renvoyer l’affaire à la division générale pour la tenue d’une nouvelle audience, j’aurais pu mener ma propre évaluation, compte tenu des circonstances. La prestataire n’a pas cherché à avoir une nouvelle audience et a dit qu’elle ne se souvient plus du passé.

[52] La prestataire voulait une évaluation fondée sur les dossiers. Pour cette raison, j’aurais choisi de mener une évaluation fondée sur les dossiers. Le dossier de preuve est aussi complet qu’il ne le sera jamais. La prestataire n’est pas capable de se souvenir de grand-chose ou de rien, et il n’y a aucun nouveau dossier ou témoin. Toute évaluation aurait été fondée sur la preuve existante.

[53] La prestataire se fonde sur les mêmes documents. Elle soutient que je devrais accepter le fait que le relevé d’emploi, le feuillet T4 de 2011 et l’avis de cotisation de l’impôt sur le revenu de 2011 constituent une preuve concluante de son emploi en 2011.

[54] Pourtant, même si je mets de côté les arguments de la prestataire au sujet des entrevues avec la Commission en novembre 2015 et en décembre 2016, je n’aurais pas été en mesure d’ignorer le fait que les documents soulèvent des questions. J’aurais soumis ces documents à un examen aussi minutieux que celui effectué par le membre de la division générale. J’aurais également posé les mêmes questions afin de m’assurer de la véracité de ces documents. La prestataire ne serait pas plus avancée.

[55] Les divergences dans l’horaire et les heures de travail de la prestataire auraient été trop flagrantes pour être ignorées. La prestataire rejetait les renseignements que la Commission avait enregistrés lors des deux entrevues, mais elle n’a offert aucune réponse autre que de nier complètement que les renseignements de la Commission étaient exacts.

[56] La prestataire soutient que le relevé d’emploi, les talons de paye et les renseignements fiscaux sont plus fiables. Le fait que la prestataire n’était pas en mesure de fournir des détails importants (et ne l’a jamais fait) au sujet de son travail, ou qu’elle n’a jamais expliqué les incohérences qu’elle a fournies porteraient gravement atteintes à la véracité des documents. Sans l’obtention d’autres éléments de preuve à l’appui des documents, j’aurais rejeté le fait que les documents reflètent bien l’emploi de la prestataire au cabinet comptable, tout comme l’a fait la division générale.

Conclusion

[57] En résumé, j’estime que la preuve n’établit pas que la prestataire n’était pas apte à témoigner ou qu’elle était incapable de le faire. Je suis convaincue que la prestataire a eu droit à une audience équitable et qu’elle a été en mesure de témoigner et de présenter sa version des faits.

[58] Même si la prestataire n’avait pas eu droit à une audience équitable, je conclus que la tenue d’une nouvelle audience n’aurait pas été justifiée, car la prestataire confirme qu’elle n’a pas de preuve à offrir, à l’exception des documents qu’elle a déjà présentés. Elle dit qu’elle ne se souvient plus du passé. Sa preuve et ses arguments seraient demeurés inchangés.

[59] Si j’avais conclu que la prestataire n’était pas apte à témoigner à l’audience devant la division générale, j’aurais réévalué la preuve au dossier.

[60] La prestataire se fonde sur le relevé d’emploi, les talons de paye et les renseignements fiscaux de 2011 pour plaider à nouveau sa cause et établir qu’elle a travaillé pour le cabinet comptable en 2011. Cependant, je conclus que ces documents n’établissent pas fermement l’emploi de la prestataire au cabinet comptable. Plutôt, ils mettent en doute le fait qu’elle ait travaillé ou non pour l’entreprise. À tout le moins, l’emploi qu’elle aurait eu a été grandement exagéré selon les dossiers. Les documents soulèvent des questions auxquelles la prestataire n’a pas été capable de répondre pour lesquelles elle n’était pas préparée. Si elle a répondu à ces questions, elle a dit que l’on ne pouvait pas se fonder sur l’information qu’elle a fournie initialement. La preuve documentaire concernant le prétendu emploi de la prestataire n’est tout simplement pas satisfaisante. Par conséquent, même si j’avais mené mon propre examen, j’aurais conclu que les documents ne prouvent pas les allégations de la prestataire selon lesquelles elle a travaillé pour le cabinet comptable.

[61] Compte tenu des considérations susmentionnées, l’appel est rejeté.

Date d’instruction :

Questions et réponses

Comparutions :

J. S., appelante
R. S., représentant de l’appelante
A. Fricker, représentante de l’intimée

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