Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Le prestataire est admissible à des prestations de maladie du 23 juillet au 5 août 2019.

Aperçu

[2] Alors qu’elle recevait des prestations régulières d’assurance-emploi (AE), la prestataire a informé la Commission qu’elle se rendrait au Sri Lanka du 22 juillet au 6 août 2019. Le but de ce voyage était de terminer un implant dentaire qui avait été commencé dans ce pays en 2018. La Commission a décidé qu’elle n’avait pas droit aux prestations parce qu’elle était à l’extérieur du Canada et qu’elle n’avait pas prouvé qu’elle y était pour recevoir un traitement médical qui n’était pas offert facilement dans la région où elle vivait au Canada. La Commission a estimé que les implants dentaires sont offerts facilement dans la région où réside la prestataire au Canada. La prestataire a estimé que le traitement comprend les matériaux nécessaires à celui-ci. Comme la partie nécessaire pour terminer le procédé n’était pas disponible au Canada, le traitement n’était pas disponible au Canada.

Question en litige

[3] La prestataire avait-elle le droit de recevoir des prestations d’AE même si elle se trouvait à l’extérieur du Canada pour recevoir un traitement médical qui n’était pas offert facilement ou immédiatement dans sa région de résidence au Canada?

Analyse

[4] Une personne prestataire n’a pas le droit de recevoir des prestations d’AE lorsqu’elle se trouve à l’étrangerFootnote 1. Mais il existe un certain nombre d’exceptions à cette règleFootnote 2. L’exception appropriée dans le cas de la prestataire concerne le traitement médical. La prestataire doit prouver trois choses. Premièrement, qu’elle était à l’étranger pour recevoir un traitement médical qui n’était pas offert facilement ou immédiatement dans sa région de résidence au Canada. Elle n’est pas tenue de prouver que le traitement [traduction] « n’était pas offert facilement et immédiatementFootnote 3 ». Deuxièmement, que le traitement a été donné dans un hôpital, une clinique ou un établissement similaire à l’étranger. Troisièmement, que l’hôpital, la clinique ou l’établissement était agréé par l’autorité gouvernementale étrangère pour fournir le traitement en questionFootnote 4.

[5] La prestataire vit au Canada depuis 2012. Elle a de la famille au Sri Lanka et leur rend visite dans ce pays. C’est ce qu’elle a fait en avril 2018. Pendant son séjour, elle a développé de graves douleurs dentaires. Elle a consulté un dentiste local, qui lui a diagnostiqué une dent cassée. La prestataire ne savait pas jusqu’alors qu’elle avait une dent cassée. La dent devait être soignée immédiatement. Le dentiste a extrait la dent et a posé un implant dentaire dans la mâchoire. Le traitement ne pouvait pas être terminé avant un an. La prestataire se retrouvait donc avec un trou dans les dents à l’endroit où se trouvait la dent cassée. La fin du traitement comprenait la pose d’une couronne sur l’implant après l’année d’attente. À l’époque, la prestataire s’est concentrée sur la nécessité d’un traitement immédiat. Elle ne pensait pas au suivi pour la pose de la couronne.

[6] Après son retour au Canada, la prestataire souhaitait que la dernière étape du traitement se fasse au Canada le moment venu. Cela s’expliquait en raison du coût d’un voyage au Sri Lanka. Elle a consulté un dentiste de sa communauté, spécialiste des implants dentaires. Il était disposé à faire le traitement, mais avait besoin d’informations du dentiste sri-lankais sur l’implant qu’il a utilisé. Lorsque la prestataire a donné ces informations au dentiste canadien, celui-ci a affirmé qu’il ne pouvait pas terminer le traitement. Cela s’expliquait par le fait que l’implant utilisé par le dentiste sri-lankais n’était pas disponible au Canada. La couronne ne devait pas non plus être posée sur l’implant. Le dentiste canadien a informé la prestataire qu’elle devait retourner au Sri Lanka pour terminer le traitement. C’est la raison pour laquelle la prestataire s’est rendue au Sri Lanka pour y subir un traitement en juillet 2019.

[7] La première question à répondre est de savoir si le traitement médical lié à l’implant dentaire n’était pas offert facilement ou immédiatement dans la région où la prestataire résidait. La réponse est que le traitement n’était pas offert facilement ou immédiatement.

[8] La Commission a adopté la position selon laquelle, étant donné que les implants dentaires sont accessibles et offerts facilement au Canada, l’exception prévue à l’article 55(1)(a) du Règlement ne s’applique pas à la prestataire. La Commission fait valoir que,

[traduction] […] le type de couronne particulier et l’achèvement du procédé en général peuvent ne pas pouvoir être réalisés en raison d’un accès aux matériaux impossible; toutefois, la base générale de la performance d’un implant de couronne dentaire n’est pas de celle qui serait susceptible d’être considérée comme un traitement unique et inaccessible qui ne serait pas accessible ou offert facilement au Canada. (GD4-6)

Cependant, la Commission conteste en affirmant que ce n’est pas le procédé qui n’est pas offert facilement, mais seulement les matériaux qui sont implantés […] La Commission conteste que ce sont les matériaux non disponibles au Canada qui sont en cause et non le procédé en tant que tel. (GD6-2)

[9] La Commission interprète l’expression « traitement médical » dans le Règlement de manière à exclure les matériaux qui peuvent être nécessaires dans le cadre du traitement. Cela ne peut être acceptable. Un traitement médical n’est pas seulement un diagnostic et un conseil. Cela comprend les médicaments, les thérapies, les opérations chirurgicales et les fournitures nécessaires à la réalisation du traitement. Les médicaments peuvent nécessiter des seringues. Les thérapies peuvent nécessiter des appareils fonctionnels. Les opérations chirurgicales peuvent nécessiter des plaques de métal et des vis pour lier les os cassés. Des pansements, des appareils orthopédiques et du plâtre peuvent être nécessaires pour compléter le traitement. L’expression « traitement médical » doit comprendre toutes les étapes et tous les matériaux nécessaires pour compléter le traitement. On peut répondre à cette conclusion en affirmant que l’expression « traitement médical » est ambiguë, de sorte que l’interprétation de la Commission est correcte. Cela ne soutient pas la position de la Commission. Le principe applicable est que dans l’interprétation de la langage de la législation sur l’AE, « tout doute découlant de l’ambiguïté des textes doit se résoudre en faveur [de la] prestataireFootnote 5 ». Si l’expression « traitement médical » est ambiguë, l’interprétation favorisant la prestataire doit être adoptée.

[10] Dans ce cas, la prestataire a fait faire la première étape de son implant au Sri Lanka en 2018, en raison de la douleur intense qu’elle a ressentie pendant ses vacances dans ce pays. La deuxième étape a consisté à poser une couronne sur l’implant. La couronne était un élément essentiel du traitement. Le traitement est resté inachevé jusqu’à ce que la couronne soit posée sur l’implant. La couronne n’étant pas disponible au Canada, le traitement ne pouvait donc pas se terminer ici, comme l’a déclaré le chirurgien dentaire canadien. Par conséquent, il a donc été nécessaire que la prestataire retourne au Sri Lanka pour terminer le traitement. On peut ainsi conclure que le traitement n’était pas offert facilement au Canada. Il s’agissait, pour renverser la thèse de la Commission « d’un traitement unique et inaccessible qui ne serait pas accessible ou offert facilement au Canada ».

[11] La Commission a également soutenu que la prestataire avait choisi d’avoir un implant qui n’était pas disponible, ce qui représentait une décision personnelle. Aucune preuve ne soutient l’affirmation selon laquelle elle savait que l’implant n’était pas disponible au Canada. Elle a essayé de faire compléter le traitement au Canada, et ce n’est qu’ensuite qu’elle a constaté que ce n’était pas possible.  

[12] La deuxième question à résoudre est de savoir si le traitement a été administré dans un hôpital, une clinique ou un établissement similaire en dehors du Canada. La réponse à cette question est oui. Les seuls éléments de preuve concernant cette question sont le témoignage livré par la prestataire selon lequel elle a reçu l’implant dans un hôpital et la lettre du chirurgien dentaire au Sri Lanka qui a décrit le traitement comme ayant eu lieu dans un hôpital. La Commission n’a fait aucune observation sur cette question. Elle a accepté la lettre du chirurgien dentaire sri-lankais comme preuve pour cette question.

[13] La troisième question à résoudre est celle de savoir si l’hôpital, la clinique ou l’établissement était agréé par l’autorité gouvernementale étrangère à fournir le traitement. La réponse à cette question est oui. La preuve à cet égard est mince. La prestataire a répondu au questionnaire de la Commission concernant son séjour à l’extérieur du Canada. On lui a demandé de choisir une explication qui décrivait le mieux la raison pour laquelle elle se trouvait à l’étranger. Elle a coché [traduction] « Pour suivre auprès d’une institution agréée un traitement médical qui n’est pas offert facilement dans ma région de résidence ». La prestataire a fourni la lettre du chirurgien dentaire du Sri Lanka, confirmant ainsi que le traitement a eu lieu dans un hôpital. La lettre n’indique pas à première vue que cet hôpital a reçu l’agrément d’une autorité gouvernementale. La Commission n’a pas demandé spécifiquement à la prestataire de fournir la preuve de l’agrément de l’hôpital. Elle lui a par contre demandé de fournir des preuves sur le traitement, sa disponibilité au Canada et l’établissement du Sri Lanka. La Commission a renvoyé la question de son admissibilité à l’équipe de conseil et d’orientation en matière d’appel pour qu’elle l’examine de manière approfondie. L’équipe a répondu que la prestataire n’était pas admissible parce que les implants dentaires sont offerts facilement au Canada. La Commission n’a pas pris la position qu’elle n’était pas admissible parce que le traitement avait eu lieu dans un hôpital non agréé. Il est raisonnable de déduire que la Commission a accepté la lettre du chirurgien dentaire du Sri Lanka comme preuve pour cette question. Cette déduction, combinée aux éléments de preuves du questionnaire et à la lettre du chirurgien dentaire, permet de conclure que l’hôpital était agréé par une autorité gouvernementale.

[14] En conséquence, le prestataire a prouvé les trois éléments nécessaires pour obtenir gain de cause dans le cadre de cet appel.

Conclusion

[15] L’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Le 20 janvier 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

R. K., appelante

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