Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – La prestataire a quitté son emploi lorsque l’employeur lui a présenté un nouvel horaire de travail. La Commission a déterminé que la prestataire n’était pas justifié de quitter son emploi et l’a exclu du bénéfice des prestations. La division générale (DG) a plutôt conclu que l’employeur avait modifié ses fonctions de façon importante et que le départ de la prestaire était sa seule option raisonnable dans les circonstances. De son côté, la division d’appel (DA) a accueilli l’appel de la Commission. La DA a déterminé que la preuve ne supportait pas la conclusion de la DG que l’employeur avait modifié les fonctions de manière importante au sens de l’article 29c) (ix) de la Loi sur l’assurance-emploi. Selon la DA, l’employeur n’a pas modifié unilatéralement les fonctions. La prestataire a plutôt demandé à ce que ses fonctions soient adaptées afin de prioriser ses études. N’eut été de son retour aux études, elle aurait conservé les mêmes fonctions et son emploi. L’employeur a décidé de mettre fin à l’emploi de la prestataire car sa disponibilité ne concordait plus avec les besions opérationnels de l’entreprise. La preuve démontre que la prestataire est retournée aux études et qu’elle a demandé à son employeur un horaire de travail adapté à ses besoins scolaires. L’employeur a refusé l’horaire proposé et a plutôt mis fin à l’emploi. Lorsque les circonstances forcent une étudiante à se rendre moins disponible pour parfaire ses études, et si l’employeur refuse de l’accomoder, elle n’est pas justifiée à quitter son emploi au sens de la Loi.

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal accueille l’appel.

Aperçu

[2] L’intimée, K. M. (prestataire), a quitté son emploi lorsque l’employeur lui a présenté un nouvel horaire comprenant un travail à temps complet sur un quart de soir. La prestataire soutient qu’elle avait une entente avec l’employeur pour ne travailler qu’à temps partiel le matin à partir du mois de septembre. N’étant pas disponible pour travailler sur le quart de soir, notamment à cause d’un retour à l’école, la prestataire a quitté son emploi.

[3] L’appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission), a déterminé que la prestataire n’était pas justifiée d’avoir quitté volontairement son emploi. Après révision, la Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès de la division générale.

[4] La division générale a déterminé que l’employeur avait modifié de façon importante les fonctions de la prestataire. Elle a déterminé que le départ de la prestataire se voulait la seule solution raisonnable dans les circonstances.

[5] La Commission a obtenu la permission d’en appeler. Elle fait valoir que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 29(c) (ix) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). Elle soutient également que la division générale a ignoré la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et ainsi erré en droit en concluant qu’il n’y avait pas eu départ volontaire de la prestataire au sens de l’article 29 de la Loi sur l’AE.

[6] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré dans son interprétation de l’article 29(c) (ix) de la Loi sur l’AE. Il doit également décider si la division générale a erré en concluant que la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi sur l’AE.

[7] Le Tribunal accueille l’appel de la Commission.

Questions en litige

[8] Est-ce que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 29(c) (ix) de la Loi sur l’AE ?

[9] Est-ce que la division générale a erré en concluant que la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi sur l’AE ?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[10] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).Note de bas de page 1

[11] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[12] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Question en litige no 1 : Est-ce que la division générale a erré dans son interprétation de l’article 29(c) (ix) de la Loi sur l’AE ?

Question en litige no 2 : Est-ce que la division générale a erré en droit en concluant que la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi sur l’AE?

[13] La Commission fait valoir que la division générale a erré dans son interprétation du terme « fonctions » prévu à l’article 29(c) (ix) de la Loi sur l’AE. Elle soutient également que la division générale a ignoré la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale qui nous indique que de quitter son emploi dans le but de se consacrer à ses études révèle d’une décision personnelle et ne constitue pas une justification au sens des articles 29 et 30 de la Loi sur l’AE.

[14] Le Tribunal est d’avis que la preuve ne supporte par la conclusion de la division générale à l’effet que l'employeur a apporté une modification importante aux fonctions de la prestataire au sens de l’article 29c) (ix) de la Loi sur l’AE. L’employeur n’a pas modifié unilatéralement les fonctions de la prestataire. La prestataire a plutôt demandé à ce que ses fonctions soient adaptées afin de prioriser ses études. N’eut été de son retour aux études, elle aurait manifestement conservé les mêmes fonctions.

[15] Le Tribunal est également d’avis que la division générale a ignoré la jurisprudence constante de la Cour d’appel fédérale et a ainsi erré en droit en concluant qu’il n’y avait pas eu départ volontaire de la prestataire au sens de la Loi sur l’AE.Note de bas de page 2

[16] Le Tribunal rendra donc la décision qui aurait dû être rendue par la division générale.Note de bas de page 3

[17] La prestataire a été engagé à temps partiel. Elle a cependant travaillé à temps plein durant la période estivale. Lors de son embauche, la prestataire a avisé son employeur de son intention de fréquenter l’école à temps plein au mois de septembre. Vers le début du mois de septembre, la prestataire a demandé à l’employeur de travailler à temps partiel parce qu’elle retournait à l’école. L’employeur a décidé de mettre fin à son emploi car la disponibilité de la prestataire ne concordait pas avec les besoins opérationnels de l’entreprise.

[18] La prestataire a tenté de discuter avec son employeur afin de trouver une solution. Aucune entente n’était cependant possible avec son employeur. L’employeur a alors décidé de mettre un terme à l’emploi de la prestataire. Elle a commencé ses études au mois de septembre 2019.

[19] La preuve non contestée démontre que la prestataire est retournée aux études et qu’elle a demandé à son employeur d’accepter un horaire adapté à ses besoins scolaires.

[20] L’employeur n’a cependant pas accepté l’horaire proposé par la prestataire et a plutôt décidé de mettre un terme à l’emploi. La prestataire aurait pu conserver son emploi n’eût été de son choix de prioriser ses études. L’employeur a procédé à embaucher un autre employé.

[21] La Cour d’appel fédérale a établi qu’un employé qui informe son employeur qu'il est moins disponible qu'auparavant invite à toutes fins utiles l'employeur à mettre fin au contrat de travail si l'employeur ne peut s'accommoder de sa disponibilité réduite. Le congédiement n'est alors que la sanction de la cause réelle de la perte d'emploi, soit la décision de l'employé de poursuivre ses études dans des conditions qui ne lui permettent plus d'être disponible. Le congédiement n'est en fait que la conséquence logique de l'acte délibéré de l'employé et ne saurait faire oublier qu'il y a eu, d'abord et avant tout, départ volontaire de l'employé.Note de bas de page 4

[22] La division générale a erré en droit en ne respectant pas la jurisprudence constante de la Cour d’appel fédérale selon laquelle le fait pour un prestataire de quitter volontairement son emploi pour retourner aux études ou suivre une formation ne constitue pas une justification au sens des articles 29 et 30 de la Loi sur l’AE.Note de bas de page 5

[23] La cause de la prestataire est sympathique. L’employeur aurait certes pu démontré plus de flexibilité. Cependant, dès lors que les circonstances forcent cette étudiante à se rendre moins disponible pour parfaire ses études, et devant le refus de l’employeur d’accepter cette réduction de disponibilité, elle perd le bénéfice des heures de travail accumulées dans le cadre de cet emploi.

[24] Pour les motifs susmentionnés, il y a lieu d’accueillir l’appel de la Commission.

Conclusion

[25] L’appel est accueilli.

 

Date de l’audience :

Le 14 février 2020

Mode d’audience :

Téléconférence

Comparutions :

Julie Meilleur, représentante de l’appelante

K. M., intimée

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