Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur de droit. J’ai corrigé l’erreur, mais je dois tout de même confirmer la décision de la division générale.

Aperçu

[2] L’intimée, A. K. (prestataire), a été congédiée de son emploi, car elle était partie en vacances sans la permission de son employeur. Elle a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi, mais la demanderesse, à savoir la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté sa demande. Elle a conclu que la prestataire avait été congédiée en raison de son inconduite.

[3] La prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, qui a accueilli son appel. La Commission interjette maintenant appel devant la division d’appel.

[4] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur de droit en n’appliquant pas correctement le critère relatif à une inconduite. Cependant, j’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre, et je dois maintenant conclure que la prestataire n’a pas été congédiée en raison de gestes qui correspondent à la définition d’inconduite.

Quels moyens d’appel puis-je considérer en l’espèce?

[5] Je peux seulement accueillir l’appel si j’estime que la division générale a commis une ou des erreurs en lien avec les « moyens d’appel ». Ces moyens d’appel sont décrits ci-dessousNote de bas de page 1 :

  1. La division générale n’a pas agi de manière équitable.
  2. La division générale n’a pas tranché une question alors qu’elle aurait dû le faire, ou elle a tranché une question alors qu’elle n’avait pas la compétence pour le faire.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a commis une erreur de droit en sa décision.

Question en litige

[6] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a évalué si l’employeur avait congédié la prestataire pour inconduite?

Analyse

Critère d’inconduite

[7] L’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) prévoit qu’une partie prestataire qui est congédiée pour inconduite est exclue du bénéfice des prestations. La Commission a le fardeau de prouver que la prestataire a été congédiée pour inconduite.

[8] Le concept d’« inconduite » n’est pas défini dans la loi, mais les tribunaux ont décrit l’inconduite de sorte que la Commission doit établir les éléments suivants :

  • Les actions ou inactions de la partie prestataire constituent le fondement de l’inconduite;
  • Le comportement de la partie prestataire était délibéré. Un comportement délibéré peut comprendre un comportement voulu ou insouciantFootnote 2;
  • Le comportement du prestataire était de sorte que la partie prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers l’employeurNote de bas de page 3;
  • En raison de son inconduite, il était réellement possible que la partie prestataire soit congédiéeNote de bas de page 4.

[9] La division générale n’a pas analysé clairement les éléments du critère juridique. Elle a conclu que la prestataire ne comprenait pas très bien les règles de l’employeur en ce qui concerne le processus d’approbation des congés, et qu’elle a cru, à tort, que son congé avait été approuvé jusqu’à la « dernière minute ». Cependant, la division générale n’a pas examiné si le choix de la prestataire de prendre des vacances après que celles-ci lui aient été refusées était un choix délibéré. Elle n’a pas non plus examiné si la prestataire savait ou aurait dû savoir que ses gestes allaient à l’encontre des obligations qu’elle avait envers son employeur, ou qu’il était possible qu’elle soit congédiée pour avoir agi ainsi.

[10] Je conviens avec la Commission que la division générale a omis d’appliquer le critère relatif à l’inconduite. Il s’agit d’une erreur de droit.

Éléments non pertinents

Pertinence des raisonnements erronés de la prestataire

[11] La Commission a également fait valoir que la division générale a commis une erreur en se fondant sur le raisonnement erroné de la prestataire selon lequel ses vacances étaient approuvées. Selon la Commission, le raisonnement erroné de la prestataire n’était pas pertinent, car elle ne souscrivait plus à ce raisonnement au moment où il a fait preuve du comportement en raison duquel elle a été congédiée. Nul ne conteste que l’employeur lui a dit qu’elle devait rentrer travailler comme prévu et qu’il l’a averti du fait qu’elle perdrait son emploi si elle ne rentrait pas.

[12] Cependant, je ne suis pas d’accord que le fait que la prestataire pensait seulement que son congé avec été approuvé avant de recevoir l’avertissement final n’est pas un fait pertinent. Pour qu’il y ait une inconduite, les gestes de la prestataire doivent avoir entravé l’exécution d’une obligation qu’elle avait envers son employeur. J’accepte le fait que les employés ont l’obligation générale de respecter les consignes légitimes de leur employeur en ce qui a trait à l’exercice de leurs fonctions. Toutefois, je ne conviens pas que cette obligation porte sur toute consigne de l’employeur, même lorsqu’elles sont déraisonnables.

[13] En l’espèce, la prestataire avait réservé des billets d’avion à un moment où elle avait cru que son congé avait été approuvé. La prestataire a présenté sa demande de congé plus de deux mois avant sa date prévue de départ. Selon le formulaire de demande de congé de l’employeur, celui-ci a décidé de rejeter la demande de congé dans les deux semaines suivant la réception de la demande, mais il n’a avisé la prestataire qu’il rejetait sa demande que la journée avant le début prévu de son congé.

[14] La prestataire a affirmé qu’elle a travaillé pour l’employeur pendant 30 ans et qu’elle a eu la même rotation de quarts pendant 14 ans. Pendant tout ce temps, elle n’a jamais reçu de réponse quelconque à aucune de ses demandes de congé, que ce soit pour approuver ou rejeter une de ses demandes. Cependant, elle a toujours pris les journées de congé qu’elle demandait, et il n’y a jamais eu de problèmeNote de bas de page 5. La prestataire a affirmé que ses collègues ont également été en mesure de supposer que leurs demandes de congé étaient approuvéesNote de bas de page 6. Elle a soutenu que la seule façon de confirmer si leur congé avait été approuvé était de vérifier l’horaire à venir afin de voir s’ils apparaissaient sur l’horaire de travail. La prestataire a affirmé que cela avait été la pratique avec l’ancien employeurNote de bas de page 7 et que cela avait également été la pratique pendant les 5 à 7 années pendant lesquelles elle a travaillé pour son superviseur actuelNote de bas de page 8.

[15] Peu de temps avant ses journées de congé demandées, la prestataire a vérifié l’horaire à venir, comme elle l’a toujours fait dans le passé, et a remarqué qu’elle était à l’horaire les jours où elle planifiait être en congé. Elle a parlé avec sa gestionnaire, et sa gestionnaire l’a avisé du fait que personne d’autre ne pouvait faire son quart de travail et que son congé n’était pas approuvé. Sa gestionnaire est restée insensible lorsque la prestataire lui a expliqué qu’elle avait déjà réservé ses billets. La gestionnaire a dit à la prestataire que si elle ne se présentait pas à ses quarts de travail, cela serait considéré comme des absences et que cela pourrait entraîner son congédiement.

[16] J’accepte le fait que la prestataire a appris que son congé avait été refusé seulement la journée avant le début prévu de celui-ci. Cela est conforme à ce qu’elle a dit à la Commission dans sa demande et à la déclaration qu’elle a faite à la Commission. Lors de sa première communication avec la Commission, soit dans sa demande de prestations, la prestataire avait dit que cette conversation avec la gestionnaire avec eu lieu le 14 juinNote de bas de page 9. Lors de la discussion qu’elle a eue avec la Commission le 22 août, elle a dit que sa dispute avait eu lieu le [traduction] « lendemain » (c.-à-d. la journée après qu’elle ait parlé avec sa gestionnaire)Note de bas de page 10. La prestataire a également affirmé à la division générale qu’elle avait dit à l’employeur au cours de cette conversation qu’elle [traduction] « partait le lendemain »Note de bas de page 11. L’employeur a confirmé que les journées de congé demandées étaient du 15 au 18 juinNote de bas de page 12, et la Commission a confirmé qu’elle avait une copie de cette demande de congéNote de bas de page 13. Si le 15 juin était le [traduction] « lendemain » suivant sa conversation avec l’employeur, la conversation a alors eu lieu le 14 juin 2019.

[17] Je reconnais qu’il y a des divergences en ce qui a trait à la question à savoir si cette discussion entre la prestataire et sa gestionnaire a eu lieu le 12 ou le 14 juin. Bien que l’employeur reconnait que la conversation a eu lieu, elle a dit que cela avait eu lieu [traduction] « environ un jour ou deux » avant la période de congé demandée, admettant qu’elle avait les dates précises de disponibles, y compris la date de cette rencontreNote de bas de page 14. Dans l’une des notes de la Commission, elle a consigné que la prestataire avait dit que la conversation avec sa gestionnaire avait eu lieu le 12 juinNote de bas de page 15. Cependant, l’ensemble de la preuve de la prestataire établit clairement un lien entre la date de son départ et le jour suivant sa conversation avec l’employeur, laquelle aurait eu lieu le 14 juin 2019. La preuve de l’employeur en ce qui a trait à la date est vague en comparaison. J’accepte que la prestataire ait peut-être commis une erreur lorsqu’elle a inscrit comme date le 12 juin, ou encore, que la Commission a consigné ses renseignements incorrectement.

Pertinence de la conduite de l’employeur

[18] La Commission a fait valoir que les tribunaux ont soutenu que la conduite de l’employeur n’a rien à voir avec l’inconduite d’une partie prestataire.

[19] Je reconnais qu’il existe de la jurisprudence laissant entendre que la conduite de l’employeur n’est pas pertinenteNote de bas de page 16. Cependant, dans la récente décision Astolfi c Canada (Procureur général)Note de bas de page 17, la Cour fédérale a fourni des explications au sujet de cette jurisprudence. Elle a soutenu que dans certaines circonstances, la conduite de l’employeur peut être pertinente. Dans l’affaire Astolifi, l’employeur a averti le prestataire qu’il serait congédié s’il ne se présentait pas au bureau. Le prestataire a refusé de rentrer travailler, car il se sentait harcelé par l’employeur. La Cour fédérale a affirmé que la conduite du prestataire découlait directement des actions de l’employeur, et que l’on devrait tenir compte de la conduite de l’employeur avant que l’inconduite ait eu lieu.

[20] En l’espèce, la prestataire a refusé de rentrer travailler les jours où elle estimait avoir pris congé, car elle estimait que l’employeur agissait de manière déraisonnable en refusant ou en retirant son approbation. Cela représente, de deux façons, une conséquence de la conduite de l’employeur. Premièrement, la pratique de longue date de l’employeur était d’approuver les congés sans fournir d’approbation officielle. Deuxièmement, l’employeur n’a pas avisé la prestataire que son congé était refusé dans les 14 jours suivant la date de sa demande, conformément à son obligation en vertu de l’entente syndicale de l’employeur (convention collective).

[21] J’accepte le fait que les circonstances pertinentes comprennent les pratiques antérieures de l’employeur, les dispositions de la convention collective, la mauvaise communication entre l’employeur et la prestataire et la date tardive à laquelle la prestataire a compris que son congé était refusé. Toutes ces circonstances sont pertinentes afin de déterminer s’il était raisonnable de la part de l’employeur de demander que la prestataire rentre travailler après que cette dernière ait pris des dispositions de voyages parce qu’elle croyait que sa demande de congé avait été approuvée. Ces circonstances sont pertinentes afin de déterminer si la prestataire avait l’obligation d’obéir aux directives de l’employeur, puisque suivre ces directives ferait en sorte que la prestataire subirait un préjudice important.

[22] La division générale n’a pas commis d’erreur de droit en tenant compte des circonstances entourant le raisonnement de la prestataire selon lequel son congé était approuvé, la façon dont la conduite de l’employeur a contribué à ce raisonnement, ou le préjudice qu’aurait subi la prestataire si elle avait suivi les directives de l’employeur.

Résumé des erreurs

[23] J’estime que la division générale n’a pas fondé sa décision sur des éléments non pertinents, mais qu’elle a tout de même commis une erreur de droit lorsqu’elle a omis d’évaluer les actions de la prestataire en fonction du critère juridique relatif à une inconduite. Cela signifie que je dois déterminer la réparation appropriée.

Réparation

Nature de la réparation

[24] J’ai le pouvoir de modifier la décision de la division générale ou de rendre la décision que la division générale aurait dû rendreNote de bas de page 18. Je pourrais renvoyer l’affaire à la division générale afin qu’elle réexamine sa décision.

[25] J’estime que le dossier est complet. Cela signifie que j’accepte que la division générale ait déjà considéré toutes les questions soulevées dans le cas présent et que je peux rendre une décision fondée sur la preuve reçue par la division générale.

Nouvelle décision

[26] La prestataire ne réfute pas le fait que son employeur l’ait congédiée, car elle a pris un congé non autorisé. Elle ne réfute pas non plus le fait qu’elle savait que son congé n’était pas autorisé au moment où elle est partie en congé, et que son employeur l’avait avertie qu’elle serait congédiée si elle ne rentrait pas travailler comme prévu. Elle a reconnu qu’elle a répondu à l’employeur en lui disant qu’elle partirait quand même en vacances et que le fait qu’elle serait congédiée ou non lui importait peuNote de bas de page 19. Autrement dit, la prestataire a admis avoir adopté la conduite impliquant qu’elle ait pris un congé non autorisé, avoir été congédiée à cause de cette conduite et avoir su que ce congédiement était à tout le moins une possibilité réelle.

[27] Pour déterminer si les actions de la prestataire représentent une inconduite, je dois également déterminer si elle avait une obligation envers son employeur de suivre ses directives selon lesquelles elle devait rentrer travailler comme prévu. La prestataire soutient qu’elle avait le droit de présumer que son congé était approuvé sans l’obtention d’une réponse formelle, compte tenu des pratiques antérieures de l’employeur. Elle affirme également que l’employeur avait le devoir de se conformer à la convention collective et de l’aviser de sa décision de refuser son congé par écrit, et ce, dans les 14 jours suivant la date de sa demande. Elle laisse entendre qu’elle a agi raisonnablement et que les directives de son employeur qu’elle a reçues à la dernière minute et selon lesquelles elle devait abandonner ses plans de vacances étaient déraisonnables. Essentiellement, la prestataire soutient qu’elle n’avait pas le devoir ou l’obligation de suivre les directives de l’employeur puisqu’elles étaient déraisonnables et portaient préjudice.

[28] La prestataire a présenté sa demande de congé par écrit le 8 avril 2019, ce qui est conforme à l’article 22(a) de la convention collectiveNote de bas de page 20. La convention collective exige que l’employeur répondre par écrit dans les 14 jours suivant. Son employeur a apparemment rempli un avis écrit dans lequel il refusait sa demande et qui était daté du 16 avril 2019Note de bas de page 21, mais il n’a pas donné cet avis de refus à la prestataire. La gestionnaire de la prestataire a dit à la Commission qu’elle s’attendait à ce que la prestataire vienne la voir (la gestionnaire) pour obtenir une réponse à sa demandeNote de bas de page 22.

[29] L’employeur a affirmé qu’il a tenu des réunions du personnel les 23 avril et 8 mai 2019, au cours desquelles il a fait part d’un nouveau processus qui exigerait de ses employés qu’ils viennent en personne recevoir leur réponse à leur demande de congé. Les procès-verbaux partiellement caviardés de ces réunions indiquent, le 23 avril, qu’ils devraient [traduction] « voir D. au sujet des “demandes de congé” » et que ce ne sera [traduction] « plus fait de façon détournéeNote de bas de page 23 ». Les procès-verbaux ne sont pas clairs sur la question à savoir si cela était une discussion au sujet des demandes en suspens ou au sujet des futures demandes, ou si c’était les formulaires de demande ou les réponses aux demandes qui ne seraient plus disponibles.

[30] Selon le procès-verbal de la rencontre qui a eu lieu le 8 mai, le personnel a été avisé de vérifier avec « D » afin de [traduction] « vérifier si le congé est approuvé ou nonNote de bas de page 24 ». Les présences n’ont pas été prises lors de cette rencontre, mais une personne ayant le même prénom et la même première lettre du nom de famille que la prestataire était présente à la réunion du 23 avril. La prestataire ne peut ni confirmer ni nier le fait qu’elle était présente à cette réunion. Cependant, elle se souvient avoir été présente lors d’une réunion du personnel, mais devoir partir plus tôt. Elle ne se souvient pas d’une discussion au sujet d’un nouveau processus d’approbation des congés lors de la réunion à laquelle elle était présente.

[31] J’estime que l’employeur n’a pas respecté les dispositions de la convention collective. La tenue d’une réunion au cours de laquelle l’employeur explique au personnel présent la façon dont il a l’intention de répondre aux demandes de congé, et répondre réellement à une demande de congé précise sont deux choses différentes. Je n’accepte pas le fait que l’employeur a « répondu » à la demande de congé de la prestataire avant qu’elle ne lui ait communiqué cette réponse.

[32] J’accepte le fait que l’employeur avait eu l’intention de modifier une pratique de longue date selon laquelle les employés avaient simplement supposé que leurs demandes de congé étaient approuvées sauf indication contraire. Il semblerait que les refus étaient rares, puisque la prestataire ne s’était jamais fait refuser une demande de congé. Dans de telles circonstances, je m’attendrais à ce que l’employeur veille à ce que son changement ne cause pas de préjudice aux demandes de congé en suspens. À tout le moins, l’employeur aurait dû avoir donné aux employés qui avaient des demandes en suspens la directive de recueillir immédiatement ou le plus rapidement possible les décisions relatives à leurs demandes de congé. Cela permettrait aux employés d’atténuer les pertes en lien avec le fait d’annuler leurs plans et d’éviter les pertes de temps et d’argent supplémentaires en ce qui a trait à leurs plans.

[33] Même si l’on ne tient pas compte des nouvelles procédures que l’employeur a peut-être mises en place à sa convenance, l’employeur avait tout de même l’obligation au titre de la convention collective de répondre aux demandes de congé de ses employés dans un délai de 14 jours. Au moment de la réunion du 23 avril, plus de 14 jours s’étaient déjà écoulés depuis que l’employeur avait reçu la demande de la prestataire, et il n’y avait pas « répondu » de quelque manière que ce soit. Si la demande de la prestataire avait été rejetée le 16 avril, j’estime qu’il n’était pas raisonnable de la part de l’employeur de ne pas aviser la prestataire que cette demande en particulier était refusée en même temps ou à peu près en même temps qu’il avise le personnel qu’il changeait ses procédures.

[34] La prestataire a également demandé la raison pour laquelle l’employeur avait rejeté sa demande de congé. L’employeur n’a pas dit à la Commission pourquoi il avait rejeté la demande de la prestataire, mais cette dernière a soutenu à la Commission que l’employeur lui avait dit que personne ne pouvait la remplacer pour son quart de travailNote de bas de page 25. Cela est conforme à son témoignage dans lequel elle a réitéré que sa gestionnaire lui avait dit qu’elle ne trouvait personne pour travailler dans sa section.Note de bas de page 26 Elle a affirmé que sa gestionnaire lui avait également dit qu’elle n’approuvait aucun congé pour tout l’été parce qu’il manquait de personnel.

[35] Si l’employeur a rejeté la demande de la prestataire le 16 avril et que sa raison était qu’elle s’attendait à ne pas avoir assez de personnel, il aurait alors pu facilement éviter toute confusion en expliquant à son personnel qu’il rejetait tous les congés annuels d’été lors de la première réunion qui a eu lieu le 23 avril. Selon le procès-verbal, l’employeur a seulement dit que les employés devaient demander à D. pour tout ce qui a trait à leurs demandes de congé. Lors de la réunion du personnel qui a eu lieu le 8 mai, l’employeur n’a encore rien dit au sujet de sa décision de rejeter toutes les demandes des congés annuels d’été. Le personnel a seulement été avisé de vérifier auprès de D. si leurs vacances étaient approuvées.

[36] Cependant, il est également possible que l’employeur n’ait pas anticipé un manque de personnel ou qu’il ait décidé de rejeter les demandes de congé annuel d’été jusqu’à une date antérieure. Je tiens à noter que certaines parties du témoignage de la prestataire mettent en cause la date inscrite dans son propre formulaire de demande de congé, soit le 16 avril, qui représenterait la date à laquelle son congé a été rejeté. La prestataire a dit qu’elle croit que quelqu’un aurait pu la remplacer pour au moins deux des trois journées de congé annuel qu’elle a prises. La prestataire a affirmé que l’une de ses collègues lui avait mentionné travailler à la place de la prestataire pendant la fin de semaineNote de bas de page 27. Selon la prestataire, la collègue en question lui a également dit que lorsqu’elle est rentrée travailler le samedi, son nom n’était plus à l’horaire (et le nom de la prestataire avait [traduction] « réapparu »)Note de bas de page 28. La collègue a dit qu’elle était certaine qu’elle était censée travailler ces jours-làNote de bas de page 29. Ce témoignage laisse entendre que l’employeur a pu initialement la remplacer par une autre travailleuse sur l’horaire de la semaine au cours de laquelle la prestataire devait s’absenter du travail, mais qu’il l’a ensuite remise à l’horaire à la dernière minute. Si cela était vrai, cela signifierait que l’employeur n’avait pas refusé son congé et avait même prévu de lui accorder son congé, jusqu’à un certain temps après l’affichage de l’horaire de la semaine en question.

[37] En l’absence de preuve contraire de la part de l’employeur, j’accepte la preuve de la prestataire concernant ce que l’employeur lui a dit sur les raisons pour lesquelles sa demande de congé a été rejetée. Je reconnais que l’employeur s’attendait à avoir des difficultés à trouver des remplaçants et ne voulait pas que le personnel prenne des congés pendant l’été. C’est probablement la raison pour laquelle il a modifié son processus pour parler individuellement aux employés. D’autres employés peuvent également avoir voulu prendre des congés en été et peuvent également supposer que leurs demandes de congé seront approuvées compte tenu des pratiques antérieures de l’employeur.

[38] Je reconnais également que l’employeur a fait un effort pour couvrir les heures de travail de la prestataire pendant son congé, mais qu’il n’a pas été en mesure de le faire, comme il l’a dit à la prestataire. Cela expliquerait pourquoi la collègue de la prestataire devait initialement prendre les quarts de travail de la prestataire au cours de la fin de semaine, mais qu’elle a ensuite été retirée de l’horaire entre le moment où elle a vérifié l’horaire et celui où elle s’est présentée pour le quart de travail le samedi.

[39] Je reconnais que l’avis de refus du congé est daté du 16 avril, mais je n’accepte pas le fait que l’employeur avait déjà décidé de rejeter la demande de congé de la prestataire en avril. L’employeur n’a rien dit à la prestataire avant le 14 juin, semble avoir essayé de couvrir au moins une partie des heures de travail de la prestataire, puis lui a dit qu’il n’approuvait pas son congé parce qu’il ne pouvait pas trouver quelqu’un pour travail à sa place. J’estime que l’employeur n’a en fait décidé de refuser le congé de la prestataire que quelque temps après avoir affiché l’horaire qui comprenait la semaine au cours de laquelle la prestataire prévoyait prendre congé.

[40] Je reconnais qu’il aurait été plus prudent de la part de la prestataire de confirmer que l’employeur lui avait accordé un congé avant qu’elle ne fasse des projets de voyage. Toutefois, l’employeur n’a pas répondu à sa demande à l’aide d’un avis de refus écrit dans le délai imparti par la convention collective, et la prestataire s’appuyait sur une longue expérience et sur la pratique bien établie de l’employeur. Compte tenu de ces faits, j’estime que la prestataire a agi de manière raisonnable lorsqu’elle a fait des projets de vacances et réservé son voyage. Soit l’employeur n’a pas pris la décision finale de rejeter la demande de congé de la prestataire avant que celle-ci ne soit prête à partir en congé, soit il a pris la décision, mais n’a pas communiqué sa décision en temps opportun. Quoi qu’il en soit, il était déraisonnable de la part de l’employeur d’exiger que la prestataire renonce à ses projets de voyage la veille de son départ, sans tenir compte des coûts ou autres conséquences pour la prestataire.

[41] Il doit y avoir une limite à ce qu’un employeur peut exiger de ses employés et une limite au devoir qu’un employé a envers son employeur. Dans la plupart des cas, un employeur peut s’attendre à ce qu’un employé obéisse à ses directives et ne soit pas absent du travail sans excuse. Toutefois, en l’espèce, les actions ou l’inaction de l’employeur auraient été largement responsables du préjudice réel et important subi par la prestataire si elle avait suivi les directives de l’employeur. Compte tenu de ces faits particuliers, j’estime que la prestataire n’avait pas l’obligation d’obéir à la directive de l’employeur de rentrer travailler. J’estime également qu’elle avait une excuse raisonnable pour s’absenter pendant ses heures de travail prévues.

[42] Il incombe à la Commission de prouver que la prestataire a été congédiée pour inconduite. J’estime qu’elle n’a pas établi que la prestataire a manqué à un devoir ou à une obligation envers son employeur et qu’elle n’a donc pas démontré que les actions de la prestataire constituent une inconduite.

Conclusion

[43] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur de droit. J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre, mais je conclus quand même que la prestataire n’a pas été congédiée pour inconduite au titre de l’article 30 de la Loi sur l’AE.

Date de l’audience :

Le 11 février 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions:

Anick Dumoulin, représentante de l’appelante.

A. K., intimée

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