Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal accueille l’appel. Le dossier est renvoyé à la division générale aux fins de réexamen de l’ensemble des questions.

Aperçu

[2] Une enquête a révélé que, durant trois périodes de prestations, l’appelant G. M. (prestataire) a travaillé et perçu un salaire. La rémunération fournie par l’employeur, une fois comparée aux déclarations du prestataire, a révélé que le prestataire n’avait pas déclaré de rémunération pendant qu’il recevait des prestations.

[3] L’intimée (Commission) a informé le prestataire que les sommes qu’il avait reçues de son employeur à titre de salaire constituaient une rémunération, et elle les a réparties sur les semaines travaillées. De plus, la Commission a imposé des pénalités au prestataire, car il avait fait de fausses déclarations en fournissant sciemment de l’information fausse ou trompeuse. Elle a également émis un avis de violation. Il n’y a eu aucune pénalité et aucun avis de violation pour la période du 16 mars 2014 au 17 août 2014.

[4] Le prestataire a soutenu que son ex-épouse, sans son consentement et sans qu’il le sache, a frauduleusement obtenu son numéro d’accès pour 2014, 2015 et 2016. Elle a ensuite transféré les fonds provenant des prestations dans son compte, auquel il n’avait pas accès. Il a maintenant approché la police régionale de Niagara afin qu’elle mène une enquête. Après révision, la Commission a maintenu sa décision initiale.

[5] Le prestataire a porté en appel la décision de la Commission devant la division générale. La division générale a conclu que les montants que le prestataire a reçus de son employeur constituaient une rémunération. J’ai conclu que la Commission avait correctement réparti cette rémunération sur les semaines travaillées conformément à l’article 36(4) du Règlement sur l’assurance-emploi. La division générale a aussi conclu que le prestataire avait sciemment fait de fausses déclarations à la Commission et que celle-ci avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a émis un avis de violation.

[6] La division d’appel a accordé au prestataire la permission de faire appel de la décision à la division d’appel. Il soutient que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle puisqu’il n’a pas eu l’occasion de présenter sa cause en entier. Il fait aussi valoir que la division générale a commis une erreur de fait en concluant qu’il était au courant de ce que son ex-épouse avait fait et qu’il y avait consenti, et qu’il avait sciemment fait de fausses déclarations à la Commission.

[7] Le Tribunal accueille l’appel du prestataire.

Questions en litige

[8] La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle en n’obtenant pas de preuve objective de la police régionale et en refusant d’envoyer une assignation à comparaître à l’ex-épouse du prestataire?

[9] La division générale a-t-elle commis une erreur en concluant qu’il savait ce que son ex-épouse avait fait et qu’il y avait consenti, et qu’il avait sciemment fait de fausses déclarations à la Commission?

Analyse

[10] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs susceptibles d’une révision sont les suivantes : la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; ou elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige n1 : La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle en n’obtenant pas de preuve objective de la police régionale et en refusant d’envoyer une assignation à comparaître à l’ex-épouse du prestataire?

[11] Ce moyen d’appel n’est pas fondé.

[12] Ce n’est pas le rôle de la division générale d’enquêter sur les allégations formulées par une partie prestataire. C’est la responsabilité d’une partie prestataire de préparer son dossier et de le présenter à la division générale. 

[13] De plus, si une partie prestataire souhaite interroger une personne, c’est à elle de demander à cette personne de comparaître comme témoin. La division générale n’a pas le pouvoir de délivrer une assignation de comparaître afin de contraindre une personne à témoigner au nom d’une partie. 

[14] Le rôle de la division générale est d’examiner la preuve présentée par les deux parties afin de cerner les faits pertinents, dont les faits qui concernent le litige particulier qu’elle doit régler, et d’expliquer par écrit la décision qu’elle a rendue concernant ces faits.

[15] Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que la division générale n’a pas omis d’observer un principe de justice naturelle.

Question en litige n2 : La division générale a-t-elle commis une erreur en concluant que le prestataire savait ce que son ex-épouse avait fait et qu’il y avait consenti, et qu’il avait sciemment fait de fausses déclarations à la Commission?

[16] Le prestataire fait valoir que son ex-épouse a fait une demande de prestations d’assurance-emploi pour lui et rempli ses déclarations, puis transféré les prestations dans son propre compte bancaire pour son usage personnel, sans qu’il le sache et sans qu’il y ait consenti.

[17] La Commission affirme que dans les cas où une partie prestataire prétend avoir été victime de fraude, comme dans le présent cas, la division générale doit examiner et trancher deux questions : une tierce partie a-t-elle frauduleusement amené la Commission à effectuer des versements excédentaires et, si oui, la fraude a-t-elle été commise à la connaissance de la partie prestataire et avec son consentementNote de bas de page 1?

[18] La Commission soutient respectueusement que la décision de la division générale est erronée puisqu’elle a omis de prendre en considération ou d’appliquer la jurisprudence citée. Par conséquent, elle est d’avis qu’une erreur de droit a été commise.

[19] De plus, la Commission soutient respectueusement que la division générale n’a pas justifié ses décisions, abordé les questions présentées attentivement et expliqué ses conclusions de manière cohérente et uniforme.

[20] Le rôle de la division générale est d’examiner les éléments de preuve que lui présentent les deux parties pour déterminer les faits pertinents, soit les faits qui concernent le litige particulier qu’elle doit trancher, et d’expliquer, dans sa décision écrite, la décision qu’elle rend concernant ces faits.

[21] La division générale doit justifier ses conclusions de façon claire. Lorsqu’elle est confrontée à des éléments de preuve contradictoires, la division générale ne peut les ignorer. Elle doit les considérer. Si elle décide qu’il y a lieu de les écarter ou de ne leur attribuer que peu de poids ou pas de poids du tout, elle doit en expliquer les raisons de façon claireNote de bas de page 2.

[22] Dans ce dossier, la division générale a ignoré, dans son analyse, les éléments de preuve du prestataire. Le prestataire a tenté de démontrer qu’il n’était pas au courant de ce qu’avait fait son ex-épouse. La division générale a ignoré la déclaration initiale du prestataire selon laquelle il croyait qu’il était le seul dans son foyer à avoir accès à l’information relative à sa demande et qu’il avait pris les mesures nécessaires pour éviter toute répétition. La preuve démontre que la plupart des déclarations ont été soumises pendant qu’il était au travail. Le prestataire a aussi affirmé qu’il avait vérifié son compte bancaire et qu’il ne voyait aucun versement de prestations d’AE. Il a fourni des relevés bancaires pour appuyer sa position selon laquelle il n’avait pas reçu de prestations d’AE. Le prestataire a aussi présenté une lettre de son ex-épouse indiquant qu’elle l’aiderait avec sa dette.

[23] Le Tribunal est d’avis que la division générale a commis une erreur de droit en écartant la preuve du prestataire sans explication et en ne tenant pas entièrement compte, dans son analyse, de la question soulevée par le prestataire, à savoir, si la fraude a été commise sans qu’il le sache et sans son consentement. Le Tribunal est aussi d’avis que la division générale a rendu une décision sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[24] Pour les raisons susmentionnées, et puisque le Tribunal est convaincu que les conclusions factuelles sont incomplètes, le Tribunal est justifié de renvoyer l’affaire à la division générale afin que toutes les questions fassent l’objet d’un réexamen.

Conclusion

[25] Le Tribunal accueille l’appel. Le dossier est renvoyé à la division générale aux fins de réexamen de l’ensemble des questions.

[26] Puisqu’il y a trois (3) décisions distinctes découlant d’une révision, la division d’appel recommande que la division générale attribue un numéro de dossier séparé à chacune d’entre elles (GD3-78 et GD3-79, et GD7-12 et GD7-13).

Date de l’audience :

Le 1er mars 2019
Le 8 octobre 2019
Le 4 mars 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

G. M., appelant

D. R., représentant de l’appelant

Suzanne Prud’homme, représentante de l’intimée

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