Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – La Commission a exclu le prestataire du bénéfice des prestations d’assurance emploi après avoir conclu qu’il avait quitté son emploi sans justification et la division générale (DG) était d’accord avec cette décision. Le prestataire a quitté son emploi pour suivre sa conjointe de fait dans une autre résidence. La DG n’a pas cru que le prestataire vivait en union de fait au moment de quitter son emploi puisqu’il ne vivait pas avec sa conjointe. La division d’appel (DA) a conclu que la DG avait commis une erreur en établissant un lien entre une cohabitation et une résidence commune. Selon la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, deux personnes peuvent cohabiter même si elles ne vivent pas sous le même toit. Pour cohabiter, les parties doivent avoir l’intention commune de poursuivre leur relation. Cela signifie qu’il fallait examiner plusieurs facteurs que la DG a ignorés. Le prestataire a fait valoir qu’il existait de la preuve à ce sujet mais que la DG avait ignoré ces facteurs. Cette preuve démontrait que sa conjointe et lui avaient l’intention commune de poursuivre leur relation. La DA a conclu que la DG avait commis une erreur de droit en ignorant cette preuve. La Commission a proposé que l’affaire soit renvoyée à la DG pour que celle-ci puisse réexaminer si les parties vivaient toujours en union de fait. Cela permettra également à la DG d’examiner tout nouvel élément de preuve. Les parties ont convenu qu’il s’agissait de la réparation appropriée. La DA a accueilli l’appel et renvoyé l’affaire à la DG pour réexamen.

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli. L’affaire est renvoyée à la division générale pour un réexamen.

Aperçu

[2] L’appelant, M. J. (prestataire) interjette appel de la décision de la division générale selon laquelle il était exclu du bénéfice de prestations d’assurance-emploi. La division générale l’a exclu, car elle a conclu qu’il avait quitté son emploi sans justification. La division générale a rejeté l’affirmation du prestataire selon laquelle il avait quitté son emploi afin d’accompagner sa conjointe de fait vers un autre lieu de résidence. Elle avait déjà déménagé plusieurs mois avant que le prestataire ne quitte son emploi. La division générale n’a pas accepté l’affirmation du prestataire selon laquelle ils ont continué d’être des conjoints de fait après qu’elle a déménagé.

[3] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a déterminé qu’ils n’étaient plus des conjoints de fait après qu’ils ont arrêté de cohabiter. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, convient que la division générale a commis une erreur. Les deux parties s’entendent sur le fait que je devrais ordonner que l’affaire soit renvoyée à la division générale.

[4] J’accueille l’appel. J’estime que la division générale a commis une erreur de droit en déterminant que le prestataire et sa copine n’étaient plus en union de fait. Elle a omis d’examiner la question de savoir s’il y avait une intention commune de continuer leur relation. L’affaire doit être renvoyée devant la division générale pour un réexamen de la question de savoir si le prestataire et sa copine sont demeurés en union de fait.

Question en litige

[5] La question en litige consiste à déterminer si la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a établi que le prestataire et sa copine n’étaient plus en union de fait.

Analyse

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a déterminé que le prestataire et sa copine n’étaient plus en union de fait?

[6] Oui. J’estime que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a déterminé que le prestataire et sa copine n’étaient plus en union de fait.

[7] Si le prestataire avait l’obligation d’accompagner sa conjointe de fait vers un autre lieu de résidence, alors il est possible qu’il ait été fondé à quitter son emploi. Cependant, la division générale a conclu qu’il n’était pas possible que le prestataire ait été un conjoint de fait au moment où il a quitté son emploi, puisque lui et sa copine avaient déjà arrêté de cohabiter. L’appel soulève la question de savoir si la division générale a appliqué correctement la définition de conjoint de fait à la situation du prestataire et de sa copine.

[8] La division générale a noté que la Loi sur l’assurance-emploi établit la définition d’un « conjoint de fait » comme étant la « personne qui vit avec la personne en cause dans une relation conjugale depuis au moins un an » (mise en évidence par la division générale).

[9] La division générale a accepté le fait que le prestataire et sa copine ont vécu ensemble pendant plus de trois ans, jusqu’au moment où elle a déménagé dans une autre ville en janvier 2018. Cela a eu lieu cinq mois avant que le prestataire ne quitte son emploi. La division générale a déterminé que, puisque le prestataire et sa copine avaient arrêté de cohabiter, il n’était pas possible qu’ils vivent ensemble à l’heure actuelle. Par conséquent, ils ne pouvaient pas être des conjoints de fait.

[10] Comme je l’ai noté dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, la division générale a défini une « cohabitation » comme étant une « corésidence ». Cependant, « [d]eux personnes peuvent cohabiter même si elles ne vivent pas sous le même toit [...] »Note de bas de page 1. La Cour suprême du Canada a soutenu que le critère de cohabitation consistait à savoir si les parties avaient une intention commune de continuer leur relation. Cela peut comporter l’examen de plusieurs facteurs.

[11] La Commission soutient que cette affaire est semblable à la décision CUB 65175. Tout comme en l’espèce, les parties ne vivaient pas ensemble. Le juge-arbitre a conclu qu’il ne s’agissait que d’une situation temporaire, puisqu’ils ont par la suite réglé la question de leurs modalités de logement. Le juge-arbitre était convaincu que le conseil arbitral avait commis une erreur.

[12] Je reconnais que les faits en l’espèce sont semblables. Dans les deux cas, le juge des faits a omis de tenir compte de la nature temporaire des modalités de logement des parties. Les parties avaient toutes deux l’intention de recommencer à vivre ensemble et s’attendaient à le faire, même si ce n’était qu’à un certain moment donné dans le futur.

[13] Le prestataire affirme que des éléments de preuve selon lesquels lui et sa copine avaient l’intention mutuelle de continuer leur relation, et qu’ils ont bel et bien continué leur relation, avaient été portés à la connaissance de la division généraleNote de bas de page 2. Par exemple, il note que sa copine n’a pas vécu toute seule dans un nouveau logement, puisqu’elle vivait en alternance avec ses parents et les parents du prestataire. De plus, ils passaient chaque fin de semaine ensemble, soit à Barrie ou à North Bay, en Ontario. Il note également s’être cherché du travail à North Bay, en Ontario, bien avant que sa formation en apprentissage n’ait pris fin à Barrie et avant qu’il ne retourne à North Bay.

[14] Certains détails relatifs à cette preuve représentent de nouveaux éléments de preuve que la division générale n’avait pas en sa possession. En général, la division d’appel ne prend pas en considération les nouveaux éléments de preuve, à quelques exceptions près.

[15] Malgré cela, il n’est pas évident de déterminer si la division générale s’est penchée sur la question de savoir si le prestataire et sa copine avaient une intention mutuelle de continuer leur relation. Pour cette raison, j’estime que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a déterminé qu’il n’était pas possible qu’ils soient en union de fait. La division générale a omis de déterminer si le prestataire et sa copine avaient une intention mutuelle de continuer d’être des conjoints de fait lorsqu’elle a déménagé dans une autre ville. Plutôt, elle s’est concentrée sur la question de savoir s’ils habitaient toujours ensemble.

[16] La Commission suggère que l’affaire soit renvoyée à la division générale. De cette façon, elle peut examiner à nouveau si le prestataire et sa copine étaient et sont demeurés en union de fait, tout en tenant compte de nouveaux éléments de preuve, le cas échéant. Les parties conviennent que cette réparation est appropriée.

[17] Selon la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, j’ai le pouvoir nécessaire pour rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Cependant, le prestataire prévoit se fonder sur de nouveaux éléments de preuve afin d’appuyer sa déclaration selon laquelle lui et sa copine avaient l’intention mutuelle de continuer leur relation. Il est possible que cela puisse comprendre l’ajout de témoins supplémentaires qui peuvent témoigner des agissements du prestataire et de sa copine ou de leurs intentions après le déménagement de cette dernière en janvier 2018. Je renvoie l’affaire à la division générale afin qu’elle soit réexaminée dans son ensemble.

Conclusion

[18] L’appel est accueilli. L’affaire est renvoyée à la division générale pour qu’elle soit examinée à nouveau.

Mode d’instruction :

Sur la foi du dossier

Comparutions :

M. J., appelant

Lynne Johnston, représentante de l’appelant

Melanie Allen, représentante de l’intimée

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