Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] La prestataire, A. M., a fait une demande de permission d’en appeler de la décision de la division générale concernant sa cause. Malheureusement, je dois rejeter sa demande. Voici les motifs de ma décision.

Aperçu

[2] La prestataire allait à l’école et travaillait à temps partiel à une épicerie. Elle travaillait environ 15 heures par semaine. À la venue de l’été, la prestataire souhaitait travailler un plus grand nombre d’heures, car elle avait besoin de plus d’argent pour aller à l’université.

[3] Elle a réussi à se trouver un emploi d’été à temps plein à un terrain de sport local. Toutefois, il était impossible de s’acquitter des deux emplois en même temps. Alors elle a pesé le pour et le contre et décidé de quitter son emploi à l’épicerie.

[4] Lorsqu’elle a été mise à pied à la fin de l’été, la prestataire a fait une demande de prestations régulières à l’assurance-emploi (AE). Mais la Commission de l’assurance-emploi du Canada a rejeté sa demande. Elle a affirmé que la prestataire avait laissé son emploi à l’épicerie « sans justification »Note de bas de page 1. La Commission l’a donc exclue du bénéfice des prestations d’AE.

[5] La prestataire a appelé de la décision de la Commission devant la division générale du Tribunal, mais elle n’a pas gagné sa cause. Elle souhaite maintenant appeler de la décision de la division générale devant la division d’appel du Tribunal. Toutefois, pour que le dossier aille de l’avant, il lui faut une permission d’en appeler.

[6] Malheureusement pour la prestataire, j’ai conclu que son appel n’a pas de chance raisonnable de succès. Par conséquent, je dois refuser la permission d’en appeler.

Question en litige

[7] La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que la prestataire n’a pas essayé de résoudre ses sources de préoccupation au travail avec son employeur?

Analyse

[8] Le Tribunal suit la loi et les procédures énoncées par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). De ce fait, cet appel suit un processus composé de deux étapes : celle de la permission d’en appeler et celle du mérite sur le fond.

[9] À l’étape de la permission d’en appeler, le critère juridique que doit satisfaire la prestataire est peu rigoureux : existe-t-il un motif défendable grâce auquel l’appel pourrait avoir une chance de succèsNote de bas de page 2? Pour trancher cette question, je dois m’intéresser tout particulièrement à la question de savoir si la division générale a pu commettre des erreurs importantes. En termes simples, les erreurs importantes mettent en cause le fait que la division généraleNote de bas de page 3 :

  1. a agi de manière inéquitable;
  2. a exercé son plein pouvoir, sans dépasser les limites de celui-ci;
  3. a appliqué la loi de manière incorrecte;
  4. a fondé sa décision sur une importante erreur se rapportant aux faits en cause.

La division générale n’a pas fondé sa décision sur une importante erreur se rapportant aux faits en cause.

[10] Dans cette affaire, la Commission a conclu que la prestataire a quitté volontairement son travail à l’épicerie sans justification. En conséquence de quoi, elle a exclu la prestataire du bénéfice des prestations d’AE, comme cela est énoncé dans l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[11] L’expression « sans justification » était la question principale dans la présente affaire. Autrement dit, après avoir examiné toutes les circonstances, peut-on en conclure que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi au moment où elle l’a faitNote de bas de page 4? L’article 29(c) de la Loi sur l’AE énumère les circonstances pertinentes dont doit tenir compte la division générale, et ce, même si elle était tenue aussi de considérer toute autre circonstance pertinente. Ici, l’accent est mis sur l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE : la prestataire avait-elle l’assurance raisonnable d’avoir un autre emploi dans un futur proche?

[12] Au paragraphe 18 de sa décision, la division générale a déterminé que l’article 29(c)(vi) ne pouvait être d’aucune utilité pour la prestataire dans les circonstances liées à sa cause, parce qu’elle a quitté un poste permanent pour un autre qui n’a duré que huit semaines.

[13] Selon la division générale, le fait que la prestataire travaillait 20 heures de plus par semaine à son nouvel emploi n’a aucune importance ou ni même le fait qu’elle aurait de toute façon quitté son emploi à l’épicerie en automne. Ce qui importait le plus pour la division générale était la certitude que la prestataire serait au chômage à la fin de son travail d’été.

[14] Dans le cadre de sa décision, la division générale a aussi examiné les solutions raisonnables autres que celle de quitter son emploi à l’épicerie qui s’offraient à la prestataire. En particulier, elle a jugé que la prestataire aurait pu tenter de résoudre ses sources de préoccupation avec son employeurNote de bas de page 5.

[15] La prestataire conteste cette conclusion. Elle soutient qu’elle a fait part de ses préoccupations à son superviseur et au gérant de l’épicerie au début de 2019. Elle a demandé au gérant de l’épicerie s’il pouvait la changer de département puisque ses quarts de travail entraient parfois en conflit avec ses activités scolaires. Mais rien n’a changé. La prestataire veut savoir pourquoi le fait qu’elle ait fait part de ses préoccupations au début de janvier au lieu d’en juin, soit quelques mois plus tard, est important.

[16] Selon moi, il existe deux raisons expliquant pourquoi il ne s’agit pas d’un argument défendable sur lequel l’appel pourrait avoir une chance de succès.

[17] Premièrement, la conclusion de la division générale était manifestement ouverte à cet argument en fonction de la preuve. La division générale a admis les conversations qui ont eu lieu entre la prestataire et son employeur au début de 2019. Toutefois, ces conversations portaient sur l’adaptation de l’horaire de travail de la prestataire à celui de l’école. Sauf qu’en juin 2019, le calendrier scolaire de la prestataire achevait. Elle a donc plutôt quitté son emploi en raison d’un manque d’heures de travail. Elle n’en a pourtant pas parlé avec son employeur.

[18] Autrement dit, la division générale ne s’intéressait pas seulement au moment où la conversation a eu lieu entre la prestataire et son employeur, mais aussi à son contenu.

[19] Deuxièmement, l’analyse des solutions raisonnables par la division générale, qui a commencé au paragraphe 18 de la décision, n’était pas essentielle pour qu’elle tire sa conclusion.

[20] Au début de sa décision, la division générale s’est référée aux décisions exécutoires de la Cour d’appel fédéraleNote de bas de page 6. Dans ces décisions, la Cour a décrit la difficulté d’appliquer la notion « aucune solution raisonnable » pour les cas où une personne change d’emploi. Elle conclut aussi que le programme d’AE ne peut être utilisé pour financer des décisions personnelles, même si elles sont motivées par le désir d’améliorer son sort, ses conditions de travail ou de gagner plus d’argent.

[21] De ce fait, il peut paraître très logique que la prestataire quitte son emploi pour un autre. Toutefois, dans l’optique du programme d’AE, la prestataire n’a pas pu justifier son acte de quitter un emploi permanent pour un emploi qui durerait seulement deux mois. En d’autres mots, la prestataire « n’était pas fondée à » quitter son emploi, à tout le moins, pas dans le sens que les tribunaux ont interprété cette expression.

[22] La division générale n’avait pas besoin d’examiner aussi les autres solutions raisonnables éventuelles s’offrant à la prestataire, telles que celle de discuter avec son employeur. D’après les décisions de la Cour d’appel fédérale mentionnées ci-haut, une seule solution évidente et adéquate qui s’offrait à la prestataire était de simplement conserver son emploi permanent.

[23] En plus des arguments de la prestataire, j’ai aussi examiné le dossier et la décision faisant l’objet d’un appel. En bref, la division générale a exposé le bon critère juridique et nommé le facteur principal, soit la brièveté de l’emploi d’été de la prestataire.

[24] La preuve soutient la décision de la division générale. De plus, l’examen du dossier ne m’a pas révélé de preuve pertinente qui aurait pu avoir été ignorée ou mal interprétée par la division généraleNote de bas de page 7. Enfin, la prestataire n’a pas soutenu que la division générale a agi de manière inéquitable d’une quelconque façon.

[25] En conséquence, l’appel de la prestataire n’a pas de chance raisonnable de succès.

Conclusion

[26] J’ai de la sympathie pour la situation de la prestataire. Néanmoins, j’ai conclu que son appel n’a pas de chance raisonnable de succès. Je n’ai pas d’autre choix que de refuser la permission d’en appeler.

Représentante :

K. C., pour la demanderesse

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.