Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli. L’affaire est renvoyée devant la division générale aux fins de réexamen.

Aperçu

[2] L’appelant, Z. Y. (prestataire) a été congédié de son emploi parce qu’il a refusé d’exécuter une tâche que son employeur lui avait demandé de faire, ce qui, selon l’employeur, constituait une insubordination. La Commission a accepté les raisons fournies par l’employeur pour le congédiement et a exclu le prestataire du bénéfice des prestations parce qu’il a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. La Commission a maintenu sa décision après une demande de révision.

[3] Le prestataire a interjeté appel auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, soutenant qu’il n’avait jamais refusé d’exécuter la tâche et que l’employeur voulait simplement se débarrasser de lui. La division générale a rejeté l’appel du prestataire, concluant que la raison du congédiement du prestataire était son refus d’exécuter une tâche de réparation électrique qu’on lui avait demandé de faire, et que son refus était considéré comme une inconduite au sens de la loi. Le prestataire interjette maintenant appel de cette décision devant la division d’appel.

[4] L’appel est accueilli. La division générale a commis une importante erreur de fait en omettant de tenir compte de la preuve relative à la conduite de l’employeur. Elle a également omis d’observer un principe de justice naturelle en empêchant le prestataire de présenter la preuve concernant la conduite de l’employeur comme il y avait droit.

Questions préliminaires

[5] Le prestataire n’a pas comparu à la téléconférence de l’appel devant la division d’appel. L’avis d’appel du 24 février 2020 indiquait que l’audience aurait lieu à 10 h HNR, le 23 avril 2020. L’avis d’appel a été livré au prestataire le 26 février 2020 et la preuve de signification est au dossier. De plus, le Tribunal a téléphoné le prestataire le 16 avril 2020 pour lui rappeler l’heure et de la date de l’audience. Je suis convaincu que le prestataire a reçu l’avis d’appel.

[6] En vertu de l’article 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, j’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire et j’ai décidé de tenir l’audience malgré l’absence du prestataire. Je reconnais que de nombreuses raisons peuvent expliquer pourquoi le prestataire n’a pas pu se joindre à la téléconférence, notamment en raison de la pandémie de COVID-19, et j’ai tenu de compte de cela. Toutefois, compte tenu de la position de la Commission et de ma décision, je suis convaincu que le prestataire ne subira pas de préjudice important si je tiens l’audience en son absence.

Quels moyens d’appel puis-je prendre en considération dans le présent appel?

[7] Un « moyen d’appel » est un motif pour interjeter appel. Pour accueillir l’appel, je dois conclure que la division générale a commis l’un de ces types d’erreursNote de bas de page 1 :

  1. Le processus d’appel de la division générale n’était pas équitable à certains égards.
  2. La division générale n’a pas tranché une question alors qu’elle aurait dû le faire ou a tranché une question qui excédait ses compétences.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une importante erreur de fait.
  4. La division générale a commis une erreur de droit en rendant sa décision.

Questions en litige

[8] La division générale a-t-elle commis une importante erreur de fait en omettant de tenir compte de la preuve relative à la conduite de l’employeur et à ses répercussions sur les actions du prestataire?

[9] La division générale a-t-elle omis d’observer un principe de justice naturelle en empêchant le prestataire d’être entendu, comme il y a droit?

Analyse

Preuve relative à la conduite de l’employeur

[10] La division générale a reconnu que le prestataire avait soulevé de multiples questions relatives à ce qu’il pensait être un mauvais traitement de la part de son employeur, caractérisé par le prestataire comme étant du harcèlement et de la discriminationNote de bas de page 2. La division générale a indiqué que ces arguments n’étaient pas pertinents à la question de l’inconduite du prestataireNote de bas de page 3.

[11] Toutefois, la Cour fédérale a récemment reconnu que la preuve entourant la conduite d’un employeur ne peut pas être négligée si elle a pu provoquer l’inconduite du prestataireNote de bas de page 4. Ainsi, la division générale aurait dû au moins tenir compte de la preuve relative à la conduite de l’employeur, qui aurait pu provoquer le comportement décrit par l’employeur comme étant une insubordination, ou en tout cas y contribuer.

[12] La Commission a reconnu que la division générale a commis une importante erreur de fait lorsqu’elle a conclu que la conduite du prestataire était une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi sans tenir compte de la preuve relative à la conduite de l’employeur. Je suis d’accord.

Justice naturelle

[13] Les principes de justice naturelle portent sur l’équité procédurale et visent notamment à garantir que les parties ont une occasion raisonnable d’être entendues.

[14] Le prestataire croyait apparemment qu’il était important que la division générale entende la preuve selon laquelle son employeur s’adonnait à du harcèlement et à de la discrimination à son égardNote de bas de page 5. Dans sa décision, la division générale a répondu au prestataire ainsi : « Pendant le témoignage du prestataire, j’ai dû lui rappeler à de nombreuses reprises que je n’étais pas là pour juger des actes de l’employeur, mais pour examiner sa propre conduite. »

[15] Il n’y a pas d’enregistrement audio de l’audience devant la division générale. Le prestataire n’a pas comparu à l’audience et n’a pas pu m’expliquer ce qui s’était produit pendant l’audience. Je ne peux donc déterminer si la division générale a causé préjudice au prestataire en l’empêchant d’être entendu à partir du contenu de la décision. La Commission n’a pas pris position au sujet de la question de savoir si la division générale a commis une erreur relative à l’application des principes de justice naturelle, mais je suis convaincu que le membre de la division générale a empêché le prestataire de se faire entendre, comme il y a droit, lorsque celui-ci a tenté de livrer son témoignage au sujet de la conduite de l’employeur. Je conclus que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle.

[16] Ayant conclu que la division générale a commis une importante erreur de fait et qu’elle n’a pas observé un principe de justice naturelle, je dois maintenant déterminer quelle est la réparation la plus appropriée.

Réparation

Nature de la réparation

[17] J’ai la compétence de modifier la décision de la division générale ou de rendre la décision que la division générale aurait dû rendreNote de bas de page 6. Je peux également renvoyer l’affaire à la division générale aux fins de réexamen.

[18] La Commission est d’avis que l’affaire devrait être renvoyée devant la division générale aux fins de réexamen. Le prestataire n’a pas comparu à l’audience et n’a donc pas pu indiquer quelle était sa position quant à la réparation.

[19] À mon avis, l’affaire doit être renvoyée à la division générale aux fins de réexamen. Il est évident que le dossier n’est pas complet. Sans un enregistrement audio de l’audience, je ne peux pas évaluer le témoignage du prestataire. Ainsi, je ne peux pas bien comprendre la nature et l’importance de la conduite de l’employeur et je ne peux donc pas déterminer quel effet elle a pu avoir sur la conduite du prestataire. De plus, la division d’appel ne peut pas recevoir ou tenir compte d’éléments de preuve qui n’ont pas été présentés à la division généraleNote de bas de page 7. Cela signifie que je ne serais pas en mesure d’entendre les éléments de preuve que le prestataire aurait pu présenter s’il n’en avait pas été empêché par le membre de la division générale.

Conclusion

[20] L’appel est accueilli. L’affaire est renvoyée devant la division générale aux fins de réexamen.

[21] Un membre de la division générale différent de celui qui a entendu l’appel en première instance doit tenir une audience orale, si c’est la préférence du prestataire, et pourvu que cela soit faisable dans les circonstances.

Date de l’audience :

Le 23 avril 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

Josée Lachance, représentante de l’intimée

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