Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli. La division générale a commis des erreurs de droit et de fait. Le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi à temps partiel. Il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[2] L’appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, interjette appel de la décision de la division générale.

[3] La division générale a conclu que l’intimé, Joseph Richardson (prestataire), était fondé à quitter volontairement son emploi à temps partiel. Elle a donc conclu qu’il était admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[4] La Commission soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait. Elle affirme que la division générale n’a pas correctement examiné si le prestataire était « fondé » à quitter son emploi en vertu de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’assurance‑emploi (Loi sur l’AE). Plus précisément, elle soutient que la division générale n’a pas examiné si le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. La Commission affirme également que la division générale a commis deux erreurs de fait : la première concerne les explications du prestataire visant à justifier le fait qu’il ait quitté son emploi à temps partiel, et la deuxième porte sur l’assurance d’un autre emploi dans un « avenir immédiat ».

[5] J’accueille l’appel. La division générale n’a pas réussi à effectuer une analyse complète pour savoir si le prestataire était « fondé » à quitter son emploi à temps partiel. Elle n’a pas examiné si le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. La division générale n’a pas non plus examiné si le prestataire avait quitté son emploi à temps partiel lorsqu’il l’a fait pour se concentrer sur ses études, et le cas échéant, si cela constituait une « justification ». Enfin, elle n’a pas tenu compte du contexte dans lequel le prestataire a quitté son emploi lorsqu’elle a évalué si son travail était dans un « avenir immédiat ».

[6] La preuve révèle que le prestataire a quitté un emploi stable à temps partiel pour un emploi saisonnier d’une durée limitée qui commençait des semaines plus tard. Cela ne correspond pas à un « avenir immédiat ». Le prestataire a quitté son emploi à temps partiel lorsqu’il l’a fait, pas parce qu’il avait un emploi garanti ailleurs, mais parce qu’il avait l’intention de se concentrer sur ses études. L’une des solutions raisonnables du prestataire aurait été de conserver son emploi à temps partiel.

Question préliminaire

[7] La Commission a tenté de présenter de nouveaux éléments de preuve concernant les antécédents professionnels du prestataireNote de bas de page 1. Toutefois, je peux seulement tenir compte des éléments de preuve portés à la connaissance de la division générale. Tout nouvel élément de preuve n’est pas pertinent en l’espèce. Je n’ai examiné aucun nouvel élément de preuve.

Questions en litige

[8] Les questions à trancher sont les suivantes :

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle omis d’analyser ce qui constitue une « justification » au titre de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE?
Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait quitté son emploi à temps partiel parce qu’il avait trouvé un autre emploi?
Question en litige no 3 : La division générale a-t-elle commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prochain emploi du prestataire était dans un « avenir immédiat »?

Analyse

Faits contextuels

[9] Depuis quelques années, le prestataire quitte son emploi à temps partiel dans un marché de viande pour un emploi d’été à temps plein au gouvernement fédéral. Le prestataire a laissé entendre qu’il effectuait suffisamment d’heures de travail pendant l’été pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Toutefois, en 2019, le ministère qui l’emploie a retardé sa date de début d’une semaine. Le prestataire n’a été informé du retard qu’après avoir quitté son emploi à temps partiel au marché de viande.

[10] En commençant à travailler une semaine plus tard que prévu, le prestataire n’a pas pu accumuler assez d’heures d’emploi assurable pendant l’été pour présenter une demande de prestations d’assurance-emploi. Il devrait compter sur les heures d’emploi assurable accumulées lorsqu’il occupait son emploi à temps partiel pour en avoir assez.

[11] Cependant, la Commission a déterminé que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi à temps partiel. Pour cette raison, il ne pouvait pas compter sur les heures de son emploi à temps partiel. La Commission a déterminé que le prestataire avait quitté son emploi à temps partiel pour pouvoir se concentrer sur ses examens scolaires. La Commission a également déterminé que le prestataire n’avait pas examiné s’il avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi à temps partiel. Elle a rejeté la demande de prestations du prestataire.

[12] Le prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant la division générale. La division générale a accueilli l’appel. Elle a conclu que si la date de début de l’emploi d’été du prestataire n’avait pas été retardée d’une semaine, le prestataire aurait accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations. La division générale a écrit ce qui suit :

[traduction]
Je ne pénaliserai pas [le prestataire] pour avoir voulu réussir ses examens alors que sa décision de quitter son emploi lorsqu’il l’a fait n’aurait eu, à ce moment-là, aucun effet sur son prochain emploi ni sur le nombre d’heures d’emploi assurable dont il disposait. Ce n’est que quelques semaines avant sa date de début prévue [au gouvernement fédéral] qu’il a été informé du retard. 

[13] La division générale a conclu que le prestataire était fondé à quitter son emploi parce qu’il avait [traduction] « trouvé un autre emploi dans un avenir immédiatNote de bas de page 2 ».

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle omis d’analyser ce qui constitue une « justification » au titre de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE?

[14] Selon l’article 29(c)(iv) de la Loi sur l’AE, toute partie prestataire est fondée à quitter son emploi « si […] son départ […] constitue la seule solution raisonnable dans son cas : assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat ». Une partie prestataire n’est pas fondée à quitter son emploi si d’autres solutions raisonnables s’offrent à elle.

[15] La Commission soutient que la division générale n’a pas analysé la preuve de manière concrète. Plus précisément, elle prétend que la division générale n’a pas correctement appliqué l’article 29(c)(iv) de la Loi sur l’AE parce qu’elle n’a pas examiné si le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi.

[16] Dans son aperçu, la division générale a renvoyé à l’argument de la Commission selon lequel le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi.

[17] La division générale a également souligné que selon l’article 29(c) de la Loi sur l’AE, toute partie prestataire est fondée à quitter volontairement son emploi si, compte tenu de toutes les circonstances, aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à elle. Pour établir qu’il était fondé à quitter son emploi, le prestataire devait remplir les conditions prévues à l’article 29(c) de la Loi sur l’AE. C’est pour cette raison que la division générale a précisé que pour prouver qu’il était fondé à quitter son emploi, le prestataire devait démontrer qu’aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à luiNote de bas de page 3.

[18] En dépit du fait d’avoir énoncé la position de la Commission et d’avoir déterminé ce qui constitue une « justification » au titre de l’article 29(c) de la Loi sur l’AE, la division générale n’a pas examiné si le prestataire avait répondu aux exigences de la Loi sur l’AE. La division générale n’a pas analysé si le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi à temps partiel. La division générale n’a pas entièrement tenu compte de l’article 29(c) de la Loi sur l’AE et ne l’a pas pleinement appliqué aux faits en l’espèce.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait quitté son emploi à temps partiel parce qu’il avait trouvé un autre emploi?

[19] Si le prestataire a quitté son emploi à temps partiel au marché de viande pour se concentrer sur ses études, il n’aurait alors pas été fondé à quitter cet emploi.

[20] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait quitté son emploi à temps partiel pour un emploi d’été au gouvernement fédéral. Bien que le fait que le prestataire avait trouvé un autre emploi ne soit pas contesté, cet autre travail devait d’abord commencer à la fin d’avril 2019. Cela signifiait qu’il y avait plusieurs semaines entre le dernier jour de travail du prestataire au marché de viande et la date de début de l’autre emploi.

[21] La Commission soutient que cet élément de preuve (les sept semaines précédant la date de début de l’emploi d’été) montre en fait que le prestataire a quitté son emploi à temps partiel au début de mars 2019 pour se concentrer sur ses études.

[22] Lors de son premier appel téléphonique avec la Commission, le prestataire a rapporté qu’il avait quitté son emploi à temps partiel plus tôt cette année-là. Il l’avait fait parce qu’il devait étudier pour ses examens de fin d’année et qu’il savait qu’il ne pouvait pas travailler en même tempsNote de bas de page 4. Lors d’un autre appel téléphonique avec la Commission, le prestataire a confirmé qu’il avait quitté son emploi plus tôt pour se concentrer sur ses [traduction] « études, [ses] examens et sur l’obtention des meilleures notes possiblesNote de bas de page 5 ». Il a déclaré qu’il souhaitait se consacrer exclusivement à ses examens postsecondaires. Il n’y avait aucune autre raison pour laquelle il avait démissionné à ce moment-làNote de bas de page 6. La Commission soutient que la division générale a ignoré cet élément de preuve.

[23] La division générale a souligné que le prestataire avait passé ses examens pendant la période de chômage entre le début de mars 2019 et le début de mai 2019. Toutefois, elle n’a tenu compte d’aucun élément de preuve laissant croire que le prestataire avait quitté son emploi au marché de viande pour se concentrer sur ses études. La division générale semble plutôt avoir accepté les affirmations du prestataire selon lesquelles il avait quitté son emploi à temps partiel pour un emploi d’été à temps plein, même si celui-ci commençait des semaines plus tard.

[24] J’estime que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte de la preuve dont elle disposait, parce qu’elle n’a pas examiné si le prestataire avait pu quitter son emploi à temps partiel lorsqu’il l’avait fait pour se concentrer sur ses études.

Question en litige no 3 : La division générale a-t-elle commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prochain emploi du prestataire était dans un « avenir immédiat »?

[25] Pour qu’une personne soit fondée à quitter son emploi en vertu de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE, elle doit avoir l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un « avenir immédiat ».

[26] Selon la Commission, bien que le prestataire avait clairement l’assurance raisonnable d’un autre emploi, celui-ci n’était pas dans un « avenir immédiat ». La Commission soutient que lorsque le prestataire a quitté son emploi à temps partiel au début de mars 2019, il n’occuperait son emploi d’été que plusieurs semaines plus tard. La Commission affirme que cela ne représente pas un « avenir immédiat », d’autant plus qu’il existait des éléments de preuve selon lesquels le prestataire avait l’intention de se concentrer sur ses examens entre-temps.

[27] La Commission soutient que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait l’assurance d’un autre emploi dans un « avenir immédiat ».

[28] Le prestataire fait remarquer que la Loi sur l’AE ne définit pas le terme « avenir immédiat ». À son avis, une période de sept semaines avant de commencer à occuper son emploi d’été n’était pas si loin dans l’avenirNote de bas de page 7. La Commission reconnaît que la Loi sur l’AE ne définit pas le terme « avenir immédiat ». Néanmoins, elle fait valoir qu’une période de sept semaines ne correspond pas à l’idée d’un « avenir immédiat ».

Comparaison avec d’autres cas

[29] La Commission a fait référence à deux décisions pour étayer son argument selon lequel une période de sept semaines ne représente pas un « avenir immédiat ». L’un de ces cas, CUB 73482, renvoyait à une autre décision du juge-arbitre :

  • Dans CUB 65463, le prestataire a quitté volontairement son emploi le 20 mai 2005. Il avait trouvé un autre emploi qu’il devait occuper à compter du 4 juillet. Le conseil arbitral a conclu que le prestataire n’avait pas agi comme une personne raisonnable parce qu’il avait quitté son emploi et qu’il n’occuperait son nouveau poste que 45 jours plus tard, soit l’équivalent d’environ sept semaines. Le juge-arbitre a convenu avec le conseil arbitral que 45 jours ne représentaient pas un emploi immédiat. Il a également conclu que le prestataire aurait pu conserver son ancien poste jusqu’à ce qu’il commence son nouvel emploi.
  • Dans Canada (Procureur général) c LessardNote de bas de page 8, la Cour d’appel fédérale a conclu que l’emploi était conditionnel à la réussite d’un cours de formation qui n’avait pas encore commencé et qui devait durer 13 semaines. La Cour d’appel a conclu que cela ne représentait pas un emploi dans un « avenir immédiat ».

[30] Les décisions du juge-arbitre, ou en l’espèce, de la division générale, ne lient pas la division d’appel. Malgré tout, j’ai examiné les décisions de la division générale. Dans AP c Commission de l’assurance-emploi du CanadaNote de bas de page 9, le membre a déterminé que, selon les faits en l’espèce, sept semaines « [correspondaient] à la notion d’avenir immédiat ».

[31] La division générale a souligné que ce qui constitue un « avenir immédiat » dépendrait des faits de chaque cas. Même si A. P. est partie en vacances après avoir quitté son premier emploi, la division générale a déterminé qu’aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à elle. A. P. n’avait d’autre choix que de quitter son emploi lorsqu’elle l’a fait parce qu’elle travaillerait pour une entreprise concurrente. La division générale a accepté l’argument d’A. P. voulant qu’en « acceptant d’aller travailler pour un nouveau compétiteur, elle devait donner sa démission sans plus tarder ». La division générale a conclu qu’il s’agissait de la seule solution conforme à l’éthique dans le cas d’A. P.

[32] La division générale a également été influencée par le fait qu’A. P. n’avait pas demandé de prestations lorsqu’elle était en vacances. La division générale a conclu que cela démontrait qu’A. P. n’avait pas quitté son premier emploi plus tôt pour prendre des vacances. Elle a également conclu que des retards liés à la construction étaient un élément important à prendre en considération.

[33] Je reconnais que ce qui constitue un « avenir immédiat » dépend des faits. Autrement dit, la durée d’un délai avant de commencer un deuxième emploi est importante. Toutefois, d’autres éléments à considérer peuvent avoir une influence sur le fait de savoir si un emploi peut être dans un « avenir immédiat ». Dans certaines circonstances, si la date de début d’un emploi est dans sept semaines, celui-ci n’est peut-être pas considéré comme dans un « avenir immédiat ». Toutefois, il peut y avoir d’autres circonstances dans lesquelles un emploi dont la date de début est dans sept semaines pourrait être considéré dans un « avenir immédiat ».

[34] Les circonstances de fait énoncées dans AP se distinguent de celles en l’espèce. Dans AP, la division générale a conclu qu’A. P. n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi lorsqu’elle l’a fait. Par conséquent, bien qu’A. P. ne commencerait pas son nouvel emploi avant des semaines, la division générale a convenu que celui-ci était dans un « avenir immédiat ».

[35] Contrairement à A. P., rien ne donne à penser que le prestataire était soumis à une quelconque obligation éthique de démissionner parce qu’il partait travailler pour une entreprise concurrente. Rien n’indique que le prestataire n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi. Comme le soutient la Commission, il n’y avait aucune raison pour laquelle le prestataire n’aurait pas pu continuer à travailler au marché de viande, mis à part le fait que cela aurait nui à ses études.

[36] La date de début du deuxième emploi du prestataire a également été retardée. Toutefois, je n’estime pas que ce retard ait fait une grande différence quant au fait de savoir si le deuxième emploi était dans un « avenir immédiat ». Cela signifiait qu’au lieu de commencer à travailler dans sept semaines, le prestataire n’a commencé à occuper son emploi d’été que huit semaines plus tard.

[37] Une fois le contexte général pris en compte, j’estime que la division générale a commis une erreur en acceptant que le prochain emploi du prestataire était dans un « avenir immédiat ». Une période de sept semaines n’est pas précisément longue, mais il n’y avait aucune raison impérieuse pour laquelle le prestataire devait nécessairement quitter son emploi lorsqu’il l’a fait ni pour laquelle il n’aurait pas pu conserver son emploi, mis à part le fait de se concentrer sur ses examens. Dans cette optique, l’emploi d’été n’était pas dans un « avenir immédiat ».

Conclusions

[38] J’ai déjà reconnu qu’il y avait des éléments manquants dans l’analyse de la division générale. La division générale n’a pas examiné si le prestataire aurait pu avoir quitté son emploi à temps partiel pour d’autres motifs. Elle n’a pas non plus examiné s’il avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. Je rendrai donc la décision que la division générale aurait dû rendre. Je note qu’il y a suffisamment d’éléments de preuve au dossier d’audience pour me permettre de rendre ma propre décision.

[39] Il y a trois éléments essentiels pour établir une justification au titre de l’article 29(c)(vi) de la Loi sur l’AE : 1) il y a l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat; 2) il s’agit du principal motif du départ anticipé d’une partie prestataire; et 3) aucune autre solution raisonnable ne s’offre à la partie prestataire.

[40] Le fait que le prestataire avait trouvé un autre emploi n’est pas contesté. Le prestataire reprendrait le même emploi d’été qu’il occupait depuis les quatre dernières années. Entre ses deux emplois, il a pris congé pour passer ses examensNote de bas de page 10. Pendant cette période, le ministère a retardé la date de début de son contrat d’une semaine. Cette situation était indépendante de sa volonté.

[41] Selon le prestataire, la période entre les deux emplois n’était pas très longue. Il soutient que la Loi sur l’AE ne définit pas le terme « avenir immédiat ». Pour ce motif, il propose que j’accepte le fait que son emploi d’été était dans un « avenir immédiat ». Il suggère également que je me concentre sur le fait qu’il avait trouvé un autre emploi.

[42] La Commission soutient que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi au marché de viande. Elle a fourni différents motifs à l’appui de sa position :

  • Le prestataire a quitté son emploi au marché de viande pour se concentrer sur ses études. La Commission soutient que le motif de départ de son emploi à temps partiel en mars n’avait rien à voir avec le fait qu’un emploi d’été l’attendait.
  • Le prestataire n’avait pas l’assurance raisonnable d’un autre emploi. La Commission soutient que le prestataire a quitté un emploi continu et [traduction] « permanent » pour un autre qui ne durerait que pendant l’été. Si le prestataire était resté au marché de viande, il aurait pu conserver cet emploi indéfiniment (même si ce n’était que pour quelques heures par semaine). En acceptant un emploi d’été, il était assuré d’être sans emploi après la fin de son contrat avec le gouvernement.
  • Même si le prestataire avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi, celui-ci n’était pas dans un « avenir immédiat ». La Commission soutient que son emploi d’été était dans un avenir lointain.
  • Le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. La Commission soutient qu’il aurait pu conserver son emploi au marché de viande. Il aurait pu continuer de travailler là-bas jusqu’à l’approche de la date de début de son emploi au gouvernement fédéral.

[43] La preuve dans le dossier d’audience révèle que le prestataire avait un emploi d’été qui l’attendait lorsqu’il a quitté son emploi à temps partiel. Il aurait quand même quitté son emploi à temps partiel au marché de viande puisqu’il avait un emploi à temps plein au gouvernement fédéral.

[44] Toutefois, comme je l’ai mentionné précédemment, j’estime que l’emploi d’été n’était pas dans un « avenir immédiat ». Lorsqu’il a quitté son emploi à temps partiel, le prestataire devait attendre sept semaines avant d’occuper son emploi d’été. De plus, il n’y avait aucun besoin urgent ni aucune obligation de quitter son emploi à temps partiel lorsqu’il l’a fait.

[45] De plus, j’estime qu’il est probable que le prestataire ait quitté son emploi au marché de viande – bien plus tôt qu’il n’aurait réellement pu le faire – parce qu’il voulait se concentrer sur ses examens, et non parce qu’un autre emploi l’attendait. Le prestataire a dit à la Commission qu’il souhaitait se concentrer sur ses examens. Il semble aussi que le prestataire ait dit à son employeur au marché de viande qu’il quittait son emploi parce qu’il retournait aux étudesNote de bas de page 11.

[46] Selon d’autres éléments de preuve, le prestataire souhaitait se concentrer sur ses examens plutôt que sur son emploi d’été. Ces éléments de preuve laissent croire que son emploi d’été était secondaire par rapport à la fin de ses examens. Le prestataire affirme avoir dit à son nouvel employeur qu’il pouvait commencer à travailler tout de suite après la fin de ses examens, soit autour du 25 avril 2019Note de bas de page 12. Cela montrait que ses examens étaient bien plus importants.

[47] Il y a également la question de savoir si le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. La Commission soutient que d’autres solutions raisonnables s’offraient au prestataire. La Cour d’appel fédérale a établi que le fait de conserver un emploi est généralement une autre solution raisonnable que celle de le quitterNote de bas de page 13.

[48] Je ne vois pas très bien pourquoi le fait de prendre congé au marché de viande n’était pas une optionNote de bas de page 14. Le prestataire a dit à la Commission qu’au lieu de prendre congé au marché de viande, il estimait qu’il serait plus facile de quitter son emploiNote de bas de page 15. Il n’a pas envisagé de travailler pour son employeur jusqu’à l’approche de la date de début de son nouveau poste parce qu’il se concentrait sur ses examens. Il n’a pas non plus demandé de prendre congé puisqu’il savait qu’il ne retournerait pas au marché de viande après la fin de ses examensNote de bas de page 16.

[49] Le prestataire n’a donné aucune autre raison pour justifier le fait qu’il n’aurait pas pu continuer de travailler au marché de viande. J’estime que le prestataire aurait pu au moins explorer d’autres solutions que celle de démissionner, comme le fait de conserver son emploi ou de prendre congé. J’estime que la preuve montre que le prestataire avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi au marché de viande.

Exclusion au titre de la Loi sur l’AE

[50] Le prestataire a quitté volontairement son emploi sans justification. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 17.

[51] L’article 30(1)(a) de la Loi sur l’AE prévoit toutefois une exception : toute partie prestataire qui accumule suffisamment d’heures d’emploi assurable après avoir quitté son emploi peut être admissible aux prestations.

[52] Selon le relevé d’emploi d’été du prestataire, celui-ci a accumulé 638 heures d’emploi assurableNote de bas de page 18. Au titre de l’article 7(2) de la Loi sur l’AE, le prestataire devait avoir accumulé 665 heures d’emploi assurable selon le taux de chômage régional. Le prestataire n’a pas accumulé assez d’heures après avoir quitté son emploi à temps partiel pour être admissible aux prestations.

Conclusion

[53] L’appel de la Commission est accueilli. J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. Le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi à temps partiel au marché de viande. Il est donc exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. En plus d’avoir quitté son emploi sans justification, le prestataire n’a pas accumulé suffisamment d’heures après avoir quitté son emploi pour être admissible aux prestations au titre de l’article 7(2) de la Loi sur l’AE.

 

Date de l’audience :

Le 22 avril 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

Louise Laviolette, représentante de l’appelante

J. R., intimé

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