Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – Le prestataire a présenté avec succès une demande de prestations d’assurance-emploi (AE) et a commencé à recevoir des prestations. Par la suite, l’Agence du revenu du Canada a déterminé qu’il avait accumulé des heures de travail assurable en même temps qu’il recevait des prestations. En conséquence, la Commission a tenu pour acquis qu’il avait reçu une rémunération liée à ce travail et a réparti celle-ci sur des semaines pendant lesquelles il recevait également des prestations. Cela a entraîné un trop-payé que le prestataire devait rembourser. Il a interjeté appel de la décision de la Commission devant la division générale (DG) qui l’a rejeté.

Devant la division d’appel (DA), le prestataire a soutenu que l’employeur ne l’avait jamais payé pour le travail effectué et qu’il n’allait fort probablement jamais recevoir les sommes dues. L’employeur a quant à lui vigoureusement nié le fait qu’il doive quoi que ce soit au prestataire. La DA a conclu que la DG avait omis d’évaluer s’il y avait une probabilité réelle que le salaire manquant soit éventuellement versé au prestataire. Il était nécessaire de le faire pour que ces sommes soient considérées comme étant une rémunération « payable » aux termes du Règlement sur l’assurance emploi. La DA a conclu que cette omission de la part de la DG constituait une erreur de droit et elle a décidé d’intervenir. Elle a conclu que le salaire dû au prestataire n’allait jamais lui être versé et qu’il ne pouvait donc pas être considéré comme une rémunération à être répartie. La DA a accueilli l’appel et annulé le trop-payé.

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] L’appel du prestataire est accueilli.

Aperçu

[2] L’appelant, N. K. (prestataire), a demandé des prestations d’assurance-emploi. Une période de prestations débutant le 18 juin 2017 a été établie à son profit. On lui a versé des prestations. Par la suite, l’Agence du revenu du Canada (ARC) a établi qu’il avait accumulé des heures assurables du 19 juin 2017 au 15 juillet 2017. Compte tenu de cette décision, l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire avait touché une rémunération et elle a réparti cette rémunération sur les semaines du 18 juin, du 25 juin, du 2 juillet et du 9 juillet 2017. Il en est découlé un trop-payé.

[3] Le prestataire a contesté la décision de la Commission. Il a soutenu que la Commission savait dès le départ que le relevé d’emploi (RE) était inexact. Le prestataire a affirmé avoir déclaré dès le début qu’il avait une rémunération après le 16 juin 2017, même s’il n’a pas été payé. Il a soutenu qu’il ne devrait pas avoir à rembourser le trop-payé qui découle de la répartition de la rémunération du 19 juin 2017 au 15 juillet 2017.

[4] La division générale a conclu que le prestataire avait l’obligation de rembourser l’argent à la Commission puisqu’il avait touché cet argent par le versement de prestations auxquelles il n’avait pas droit. La division générale a décidé que seule la Commission avait le pouvoir d’effacer un trop-payé. La division générale a conclu qu’elle ne pouvait pas compenser une dette due à un trop-payé à cause de dommages-intérêts auxquels le prestataire prétend avoir droit.

[5] La division d’appel a accordé au prestataire la permission d’en appeler. Il avance que la question n’est pas entièrement réglée. Il soutient que la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que la rémunération devait être répartie. Le prestataire soutient que l’employeur ne l’a jamais payé et qu’il ne touchera probablement jamais l’argent qui lui est dû.

[6] Le Tribunal doit décider si la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’argent reçu pour les semaines du 18 juin, du 25 juin, du 2 juillet et du 9 juillet 2017 représentait une rémunération qu’il fallait répartir conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE).

[7] Le Tribunal accueille l’appel du prestataire.

Question en litige

[8] La division générale a-t-elle commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’argent reçu pour les semaines du 18 juin, du 25 juin, du 2 juillet et du 9 juillet 2017 représentait une rémunération qu’il fallait répartir conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’AE?

Analyse

Le mandat de la division d’appel

[9] La Cour d’appel fédérale a établi que quand la division d’appel juge des appels conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), le mandat de la division d’appel lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loiNote de bas page 1.

[10] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel pour les décisions rendues par la division générale. Elle n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui exercé par une cour supérieureNote de bas page 2.

[11] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait commis une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal n’a d’autre choix que de rejeter l’appel.

Questions préliminaires

[12] Une conférence de règlement a eu lieu pour discuter des appels du prestataire dans les dossiers AD-19-889, AD-19-890, AD-19-891 et AD-19-644. Le 2 mars 2020, un autre membre de la division d’appel a rendu une décision fondée sur l’entente conclue entre les parties dans les dossiers AD-19-889, AD-19-890 et AD-19-891. Cependant, les parties ne s’étaient pas entendues dans le présent dossier. Ainsi, le Tribunal tranchera la question toujours en litige.

La division générale a-t-elle commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’argent reçu pour les semaines du 18 juin, du 25 juin, du 2 juillet et du 9 juillet 2017 représentait une rémunération qu’il fallait répartir conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’AE?

[13] La présente décision porte sur la période de prestations établie le 18 juin 2017. La seule question dont le Tribunal est saisi est la question de savoir si la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’argent reçu pour les semaines du 18 juin, du 25 juin, du 2 juillet et du 9 juillet 2017 représentait une rémunération qu’il fallait répartir conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’AE.

[14] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur quand elle a conclu qu’il fallait répartir la rémunération. Il soutient que la division générale n’a pas tenu compte du fait que son employeur ne l’a pas payé et qu’il ne touchera probablement jamais l’argent qui lui est dû.

[15] Le Tribunal remarque que la division générale a reconnu que le prestataire n’avait toujours pas été payé par son employeur au moment de l’audience. Elle n’a cependant pas décidé s’il y avait une chance réelle que l’argent en question soit versé au prestataire de façon à être considéré comme « payable » aux termes de l’article 35(2)(a) du Règlement sur l’AE. Cela constitue une erreur de droit, et le Tribunal doit intervenir.

[16] Conformément à l’article 59(1) de la Loi sur le MEDS, le Tribunal rendra la décision qui aurait dû être rendue.

[17] Pour qu’une somme soit considérée comme payable aux termes du Règlement sur l’AE, elle doit avoir des chances d’être versée. Il est bien établi que la répartition de la rémunération vise à empêcher les prestataires de recevoir une indemnité de départ ou une autre forme de rémunération de la part de leur employeur en même temps que les prestations, et ce, même si la rémunération n’est pas versée au même moment que les prestations.

[18] L’objectif des prestations d’assurance-emploi est d’indemniser les prestataires qui perdent leur emploi. Si la perte a déjà été indemnisée (ou le sera), le versement des prestations n’est pas nécessaire. À l’inverse, si la rémunération risque de ne jamais être réellement versée, il serait contraire à cet objectif de dire que la rémunération peut encore être considérée comme « payable » même si la perte de rémunération n’est toujours pas indemnisée.

[19] La preuve prépondérante portée à la connaissance de la division générale montre que l’employeur nie vigoureusement que le prestataire a travaillé pour lui après le 16 juin 2017 et qu’il lui doit quelque salaire que ce soit après cette date. L’employeur refuse de coopérer avec le prestataire même si une décision de l’ARC a établi que ce dernier a bel et bien travaillé du 19 juin au 15 juillet 2017. De plus, l’employeur n’a pas corrigé le RE qu’il avait initialement produit. Lors de son témoignage du 25 juillet 2019, le prestataire a déclaré devant la division générale que son employeur ne l’avait pas payé après le 16 juin 2017.

[20] Considérant la preuve prépondérante présentée à la division générale, le Tribunal conclut que le prestataire ne touchera pas le salaire impayé. Cette rémunération n’est donc pas « payable » au sens du Règlement sur l’AE.

[21] Par conséquent, il ne faut pas répartir la rémunération.

Conclusion

[22] L’appel du prestataire est accueilli.

[23] Pour ce qui est de la période de prestations débutant le 18 juin 2017, l’argent reçu par le prestataire pour les semaines du 18 juin, du 25 juin, du 2 juillet et du 9 juillet 2017 ne doit pas être réparti.

Date de l’audience :

Le 6 mai 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

N. K., appelant
Louise Laviolette, représentante de l’intimée

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.