Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale a commis des erreurs dans la façon dont elle est arrivée à sa décision. J’ai corrigé ces erreurs, mais je dois tout de même conclure que le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler.

Aperçu

[2] L’appelant, G. L. (prestataire) a omis de déclarer son emploi et sa rémunération à l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, pendant une période où il recevait des prestations. La Commission a mené une enquête et conclu que le prestataire avait fait de fausses déclarations par rapport à sa rémunération et à sa disponibilité à travailler. Elle a imposé une pénalité monétaire au prestataire et émis un avis de violation [traduction] « très grave ».

[3] La Commission a aussi conclu que le prestataire ne devrait pas être admissible à des prestations pendant la période du 2 au 13 juillet 2018, étant donné qu’il n’était pas disponible pour travailler, et elle a déclaré qu’il y avait eu un trop-payé. Lorsque le prestataire a demandé à la Commission de procéder à une révision, elle a réduit la pénalité de 1 969,00 $ à 943,00 $, mais elle a maintenu ses autres décisions.

[4] Le prestataire a interjeté appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a rejeté son appel sous réserve de modifications. Elle a conclu que la division générale n’avait pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon appropriée lorsqu’elle a évalué le montant de sa pénalité et la violation. Par conséquent, la division générale a réduit la pénalité à 471,00 $. Elle a aussi jugé que le prestataire aurait dû se voir émettre un avis de violation grave. La division générale a confirmé que le prestataire n’était pas admissible aux prestations du 2 au 13 juillet 2018, car il n’était pas disponible pour travailler. Le prestataire interjette maintenant appel à la division d’appel.

[5] L’appel du prestataire est rejeté. La division générale a commis une erreur de fait importante lorsqu’elle a conclu que le prestataire avait choisi de ne pas aller au travail, et elle a commis une erreur de droit en n’appliquant pas le bon critère juridique. J’ai corrigé ces erreurs, mais je dois tout de même confirmer que la division générale est arrivée à la bonne conclusion. Le prestataire était disponible pour travail du 2 au 13 juillet 2018.

Questions préliminaires

[6] Dans sa demande de permission d’en appeler, le prestataire a soulevé deux erreurs qu’il croyait que la division générale avait commises. La première concernait le fait que la division générale avait conclu que le prestataire n’avait pas fait de démarches pour trouver un emploi. Je comprends que le prestataire conteste la conclusion de la division générale selon laquelle il n’était pas disponible pour travailler du 2 au 13 juillet 2018 et qu’il n’est donc pas admissible au bénéfice des prestations pour cette période.

[7] L’autre question que le prestataire a soulevée dans son avis d’appel est qu’il avait plus que le nombre requis d’heures d’emploi assurable pour être admissible à des prestations dans sa région. Cette question ne figurait pas dans la décision découlant d’une révision et elle n’est pas non plus liée à une question abordée dans cette décision. La division générale n’était pas saisie de cette question et elle ne l’a pas tranchée, alors je ne vais pas l’examiner moi non plus.

[8] La décision de la division générale a aussi abordé d’autres questions liées à la pénalité et l’avis de violation découlant du fait que le prestataire a fait une fausse déclaration au sujet de sa rémunération. Le prestataire n’a pas indiqué qu’il souhaitait [sic] aspect de la division générale dans son avis d’appel, mais j’ai tenté de déterminer s’il avait une cause défendable dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler. Je n’ai pas été en mesure de trouver une cause défendable selon laquelle la division générale aurait commis une erreur lorsqu’elle a réduit sa pénalité, mais maintenu l’avis de violation. Je ne vais pas me pencher davantage sur cette question.

Quels moyens d’appel puis-je prendre en considération?

[9] Les « moyens d’appel » sont les motifs d’un appel. Pour que l’appel soit accueilli, je dois conclure que la division générale a commis l’un des types d’erreurs qui suiventNote de bas de page 1 :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable.
  2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher, ou elle a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a commis une erreur de droit au moment de rendre sa décision.

Questions en litige

[10] La division générale a-t-elle commis une erreur de fait importante en concluant que le prestataire avait choisi de ne pas aller au travail?

[11] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’appliquer le bon critère juridique pour décider si le prestataire était disponible pour travailler?

Analyse

La division générale a-t-elle commis une erreur de fait importante en concluant que le prestataire avait choisi de ne pas aller au travail?

[12] La décision de la division générale selon laquelle le prestataire n’était pas disponible pour travailler du 2 au 13 juillet 2018 était fondée sur deux conclusions. Elle a conclu que le prestataire avait un emploi durant cette période, mais qu’il avait choisi de ne pas aller travaillerNote de bas de page 2.

[13] Il ne fait aucun doute que le prestataire avait un emploi du 2 au 13 juillet 2018, et qu’il n’est pas allé au travail durant cette période.  Toutefois, la preuve n’appuie pas une conclusion selon laquelle le prestataire aurait « choisi » de ne pas aller au travail, car elle ne confirme pas que l’employeur avait du travail pour lui chaque jour de cette période.

[14] Selon la Commission, l’employeur a dit que le prestataire ne s’était pas présenté au travail les 9, 10 et 17 juillet 2018Note de bas de page 3. Le prestataire ne semble pas avoir contesté le fait qu’il n’est pas allé au travail les 9 et 10 juillet. Il n’a pas non plus contesté le fait qu’il avait téléphoné à son employeur le 17 juillet 2018 pour lui dire qu’il n’allait pas pouvoir entrer parce que sa copine avait des complications liées à sa grossesse. (Il n’est pas clair s’il tentait d’expliquer pourquoi il avait dû s’absenter, ou pourquoi il allait devoir manquer du travail.) Cependant, l’agent de la Commission n’a pas signalé que l’employeur s’était plaint que le prestataire avait manqué d’autres quarts de travail. L’employeur n’a pas dit que le prestataire ne s’était pas non plus présenté au travail les 2, 3, 4, 5 ou 6 juillet, les 11, 12 et 13 juillet, ou toute journée de fin de semaine où on aurait pu s’attendre à ce qu’il travaille. Le dossier ne contient aucune déclaration et aucun document confirmant que le prestataire a manqué des quarts de travail durant la semaine du 2 au 13 juillet, à l’exception des 9 et 10 juillet.

[15] Le fait que l’employeur se soit concentré sur les 9, 10 et 17 juillet pourrait indiquer que ces jours étaient les seuls où l’employeur s’attendait à ce que le prestataire rentre travailler.  Il est clair que cela n’appuie pas l’inférence contraire selon laquelle on s’attendait aussi à ce que le prestataire travaille durant les autres jours de travail entre le 2 et le 13 juillet.

[16] L’employeur a fourni de l’information provenant du registre de paieNote de bas de page 4 qui confirme les jours où le prestataire a travaillé. Cette information ne précise pas quels jours le prestataire devait travailler ni quel était son régime de travail. Il est impossible d’inférer à partir des registres de paie que le prestataire aurait pu avoir plus de travail entre le 2 et le 13 juillet que le travail qu’il a effectué. En fait, le prestataire n’a pas travaillé pour l’employeur assez longtemps pour que le registre de paie décrive un régime de travail.

[17] Selon le registre de paie, le prestataire a travaillé 52,5 heures durant la semaine du 24 au 30 juin (y compris 1.5 heure de « paie de conducteur »), aucune heure durant la semaine du 1er au 7 juillet, aucune heure durant la semaine du 8 au 14 juillet et 13 heures durant la semaine du 16 au 20 juillet (y compris 3 heures de paie de conducteur). La seule semaine dans le registre de paie qui ressemble à une semaine de travail de 40 heures est la semaine du 24 au 30 juin. Cependant, il ne semble pas s’agir d’une semaine normale ou représentative. Elle comprend 16 heures « d’orientation » échelonnée sur trois jours et un autre 35 heures de travail régulier sur quatre jours comprenant la fin de semaine.

[18] Seul un élément de preuve pourrait porter à croire qu’il y avait du travail pour le prestataire chaque jour de travail entre le 2 et le 13 juillet. Il s’agit de l’affirmation de l’agent de la Commission selon laquelle l’employeur a dit à la Commission qu’il avait embauché le prestataire comme employé à temps plein et qu’il lui avait donné un horaire de plus de 40 heures par semaineNote de bas de page 5. Toutefois, cela n’aborde toujours pas directement la question à savoir si l’employeur lui a donné accès à suffisamment de travail pour qu’il puisse travailler à temps plein.

[19] Pour sa part, le prestataire a nié avoir été embauché pour un poste à temps plein, et il a dit qu’il travaillait seulement sur appel. La division générale n’a pas cerné cela comme une différence pertinente entre la preuve de l’employeur et celle du prestataire, et elle n’a pas dit quelle preuve elle préférait ou pourquoi.

[20] Avant de pouvoir conclure que le prestataire avait choisi de ne pas rentrer au travail, il aurait fallu que la division générale détermine que l’employeur offrait du travail au prestataire. La division générale n’a pas vérifié si l’employeur avait effectivement du travail pour le prestataire, ou s’il avait offert du travail au prestataire pour chaque jour de travail entre le 2 et le 13 juillet.

[21] Je juge que la division générale a commis une erreur de fait importante en concluant que le prestataire avait choisi de ne pas se présenter à son travail du 2 au 13 juillet 2018. Cette conclusion était abusive ou arbitraire, ou elle était le résultat d’une mauvaise interprétation de la preuve concernant le travail que l’employeur avait mis à la disposition du prestataire.

La division générale a-t-elle omis d’appliquer le bon critère juridique?

[22] Selon la loi, une partie prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour chaque jour où elle ne démontre pas qu’elle était disponible pour travailler et incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 6. La Cour d’appel fédérale a déclaré que trois facteurs doivent être pris en considération pour établir la disponibilité (le critère FaucherNote de bas de page 7). Elle a dit qu’une partie prestataire doit désirer retourner à un emploi convenable le plus tôt possible; elle doit exprimer ce désir en faisant des démarches pour obtenir un emploi convenable; et elle ne doit pas se fixer des conditions personnelles qui limitent indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[23] La division générale a choisi de ne pas appliquer le critère Faucher. Elle a décidé que le critère n’était pas approprié parce que le prestataire avait déjà un emploi, mais qu’il avait simplement choisi de ne pas rentrer travaillerNote de bas de page 8.

[24] Le prestataire a conservé son emploi du 2 au 13 juillet, mais la question dont la division générale était saisie était celle de savoir si le prestataire était disponible durant les jours où il n’est pas rentré au travail. Par conséquent, les facteurs dans Faucher auraient quand même été pertinents pour déterminer sa disponibilité durant les jours où il n’a pas travaillé.

[25] La question à savoir si le prestataire souhaitait rentrer au travail demeure pertinente. La division générale a conclu que le prestataire avait choisi de ne pas rentrer au travail, mais elle a fondé cette conclusion sur une supposition selon laquelle du travail était disponible, mais que le prestataire n’en avait pas tiré avantage. La division générale n’a pas vérifié si le prestataire souhaitait rentrer au travail. Elle n’aurait pas pu blâmer le prestataire de ne pas s’être présenté au travail si celui-ci avait un motif raisonnable de croire que l’employeur n’avait pas de travail pour lui.

[26] La division générale n’a tiré aucune conclusion quant à l’affirmation du prestataire selon laquelle il travaillait sur appel. Si le prestataire était sur appel, la façon dont il confirmait la disponibilité quotidienne de quarts pourrait être considérée comme équivalente à des [traduction] « démarches de recherche d’emploi ». La division générale aurait pu prendre en considération la suffisance de ces démarches.

[27] Finalement, la division générale n’a pas vérifié si le prestataire avait fixé des conditions indûment limitantes sur le type de travail qu’il accepterait. La preuve au dossier porte à croire que le prestataire avait des inquiétudes liées à la grossesse de sa copine aux dates où il n’est pas rentré au travail, ou près de ces dates. Toutefois, il y avait aussi des éléments de preuve qui démontraient que le prestataire était père monoparental et qu’il devait retourner à la maison chaque soir pour s’occuper de ses enfants, et qu’il s’était opposé à ce que l’employeur exige qu’il reste au travail la nuit. Il a dit à la Commission qu’il avait accepté son emploi à la condition expresse qu’il n’ait pas à travailler la nuit. En appliquant Faucher, la division générale aurait pu vérifier s’il y avait des éléments de preuve qui démontraient que le prestataire avait refusé les quarts qui ne lui permettraient pas de retourner à la maison chaque soir. Dans l’affirmative, il aurait fallu qu’elle décide si le fait que le prestataire avait refusé de prendre des quarts de nuit constituait une limite raisonnable ou indue de ses perspectives d’emploiNote de bas de page 9.

[28] Je reconnais que la division générale a réfléchi au critère dans Faucher, et qu’elle a conclu qu’il ne s’appliquait pas aux circonstances. Toutefois, je ne suis pas d’accord. Je juge que la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’analyser la disponibilité à travailler du prestataire par rapport aux facteurs applicables dans Faucher.

[29] J’ai conclu que la division générale a commis une erreur de fait importante et une erreur de droit. Cela signifie que je dois trouver la réparation appropriée.

Réparation

Nature de la réparation

[30] J’ai le pouvoir de modifier la décision de la division générale ou de rendre la décision qu’elle aurait dû rendreNote de bas de page 10. Je peux aussi renvoyer l’affaire à la division générale afin qu’elle procède à une révision de sa décision.

[31] Je reconnais que la division générale a déjà pris en considération toutes les questions soulevées par cette affaire et que je peux rendre ma décision en me fondant sur la preuve qui était devant la division générale. Je vais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

Nouvelle décision

[32] Comme je l’ai déjà mentionné, la loi précise qu’une partie prestataire n’a pas le droit de recevoir des prestations pour les jours où elle n’a pas démontré sa disponibilité. Autrement dit, c’est au prestataire de fournir des éléments de preuve pour démontrer qu’il était disponible pour travailler chaque jour pendant la période du 2 au 13 juillet.

[33] Le prestataire n’a fourni aucun élément de preuve à la Commission ou à la division générale qui démontre qu’il était disponible pour travailler chaque jour. Il n’a pas en fait nié que l’employeur avait prévu qu’il travaillerait pendant une journée ou une autre entre le 2 et le 13 juillet. Il n’a pas non plus dit que l’employeur l’avait informé qu’il n’y avait pas de travail pendant une ou l’autre de ces journées.

[34] À mon avis, le prestataire n’a pas démontré sa disponibilité conformément aux facteurs dans Faucher. Le prestataire n’a pas prouvé qu’il désirait retourner à son emploi durant la période du 2 au 13 juillet. Il est possible que le prestataire ait accordé plus d’importance aux difficultés de sa copine durant sa grossesse qu’au besoin de rentrer au travail ou de vérifier s’il y avait du travail, mais cela se comprend. Toutefois, je ne suis pas convaincu que du 2 au 13 juillet, le prestataire aurait accepté du travail si on lui en avait offert. Je ne crois pas qu’il avait un réel désir de travail.

[35] De plus, le prestataire n’a pas démontré qu’il a fait ce qui était raisonnable dans les circonstances pour obtenir du travail entre le 2 et le 13 juillet. Il a prétendu que l’employeur ne lui avait jamais téléphoné pour lui offrir des quarts. Cependant, il n’y a aucune preuve qui démontre que le prestataire s’est rendu disponible pour prendre les appels de l’employeur pendant une ou plusieurs journées de travail durant la période du 2 au 13 juillet. Il n’y a pas non plus de preuve qui démontre que le prestataire a pris l’initiative d’appeler l’employeur. Si le prestataire croyait que son employeur n’avait aucun travail convenable à lui offrir, il n’a pas décrit d’autres démarches qu’il aurait fait pour obtenir un autre emploi ou du travail supplémentaire.

[36] Finalement, je ne juge pas que le manque de volonté ou de capacité du prestataire à travailler entre le 2 et le 13 juillet ait quoi que ce soit à voir avec des limitations raisonnables qu’il aurait pu se fixer pour le travail qu’il était prêt à accepter.  Le prestataire ne voulait pas prendre des quarts qui l’empêcheraient de retourner à la maison le soir, en raison de ses enfants et peut-être aussi des complications de grossesse de sa copine. Toutefois, il n’y avait aucune preuve qui démontrait que l’employeur avait offert des quarts de nuit au prestataire entre le 2 et le 13 juillet, ou que le prestataire avait refusé des quarts durant cette période parce qu’il s’agissait de quarts de nuit.

[37] Je juge que le prestataire n’était pas disponible pour travailler et incapable d’obtenir un emploi convenable au sens de la Loi sur l’assurance-emploi entre le 2 et le 13 juillet 2018.

Conclusion

[38] L’appel est rejeté. La division générale a commis des erreurs dans la façon dont elle est arrivée à sa décision, mais j’ai corrigé ces erreurs. Je confirme la conclusion et le résultat de la division générale. Le prestataire n’était pas disponible pour travailler entre le 2 et le 13 juillet 2018.

Date de l’audience :

Le 6 mai 2020

Mode d’instruction :

Vidéoconférence

Comparutions :

G. L., appelant

J. V., personne représentant
l’intimée

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