Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Par conséquent, le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi (AE).

[2] Il a quitté volontairement son emploi. Après avoir tenu compte de toutes les circonstances, je conclus qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Il a justifié sa démission par le fait de déménager dans une nouvelle province parce qu’il ne gagnait pas assez d’argent pour subvenir aux besoins de sa famille et par le fait qu’il était incapable de trouver un autre emploi convenable avant de démissionner.

Aperçu

[3] Le prestataire a présenté une demande de prestations régulières d’AE après avoir quitté ses deux emplois à temps partiel comme préposé à la réception d’hôtel.

[4] La Commission a examiné les raisons de la démission du prestataire pour l’un de ses emplois à temps partiel. Elle a conclu qu’il avait quitté son emploi sans justification et l’a exclu du bénéfice des prestations d’AE.

[5] Le prestataire affirme qu’il était fondé à quitter son emploi des trois dernières années lorsqu’il a déménagé du Manitoba en Ontario. Il affirme qu’il devait déménager pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille parce que le salaire minimum est beaucoup plus élevé en Ontario que le salaire minimum qu’il gagnait au Manitoba. Il affirme qu’il a essayé, sans succès, de trouver un emploi local convenable au Manitoba et qu’il n’a pas pu trouver un emploi en Ontario avant de prendre la décision de démissionner.

[6] Il soutient que d’autres raisons pour son départ étaient qu’il n’y avait pas de possibilités d’avancement professionnel ou d’augmentation de salaire pour son emploi; qu’il devait déménager dans une région au climat plus doux en raison de son état de santé; et qu’il s’inquiétait de sa sécurité personnelle lorsqu’il prenait les transports en commun pour se rendre au travail pour son quart de nuit à l’hôtel et pour retourner chez lui.

[7] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter volontairement son emploi puisqu’il avait des solutions raisonnables au départ de son emploi compte tenu de toutes les circonstances, comme trouver un emploi convenable en Ontario avant de faire le choix personnel de quitter son emploi au Manitoba. Quitter volontairement son emploi en raison d’un salaire insuffisant n’est pas suffisant pour prouver qu’il était fondé à démissionner.

[8] Je conclus que le prestataire a démontré qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi et que, compte tenu de toutes les circonstances, il n’avait aucune autre solution raisonnable que de démissionner.

Question en litige

[9] Je dois décider si le prestataire est exclu du bénéfice des prestations parce qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification. À cette fin, je dois d’abord me pencher sur la question du départ volontaire du prestataire. Je dois ensuite décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Le fait que le prestataire a quitté volontairement son emploi n’est pas contesté.

[10] Je reconnais que le prestataire a quitté volontairement son emploi. L’ancien employeur du prestataire a produit un relevé d’emploi indiquant que ce dernier avait démissionné. Le prestataire admet qu’il a quitté son emploi, mais affirme qu’il était fondé à le faire.

[11] Pour décider si l’appelant a quitté volontairement son emploi, il faut se demander s’il avait le choix de rester ou de quitter (Canada (Procureur général) c Peace, 2004 CAF 56).

[12] Je conclus que le prestataire a décidé de quitter volontairement son emploi. Il avait le choix de rester ou de quitter (Peace).

Les parties ne s’entendent pas sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi.

[13] Je conclus que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi.

[14] Les parties ne s’entendent pas sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi au moment de sa démission.

[15] La loi précise qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 1. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver qu’on est fondé à le faire.

[16] La loi prévoit également que pour être fondé à quitter son emploi, il faut, compte tenu de toutes les circonstances, ne pas avoir de solution raisonnable autre que celle de quitter son emploi au moment de le faireNote de bas de page 2. Il incombe au prestataire d’en faire la preuveNote de bas de page 3. Le prestataire doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable que de démissionner. Pour trancher cette question, je dois examiner toutes les circonstances qui existaient au moment où le prestataire a quitté son emploi.

[17] Le prestataire affirme qu’il était fondé à quitter son emploi. Il dit qu’il était fondé à quitter son emploi des trois dernières années lorsqu’il a déménagé du Manitoba en Ontario. Il affirme qu’il devait déménager pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille parce que le salaire minimum est beaucoup plus élevé en Ontario que le salaire minimum qu’il gagnait au Manitoba. Il affirme avoir essayé, sans succès, de trouver un emploi convenable au Manitoba pendant environ trois ans et n’avoir pas pu trouver un emploi en Ontario avant de prendre la décision de démissionner.

[18] Le prestataire affirme qu’il a postulé pour plusieurs postes au Manitoba, sans succès. Il a également postulé pour plusieurs postes en Ontario avant de déménager, mais les employeurs voulaient tenir des entretiens d’embauche en personne. Il dit qu’il est l’unique source de revenus de la famille et qu’il ne pouvait pas aller à des entretiens d’embauche en Ontario parce qu’il ne pouvait pas quitter sa conjointe handicapée qui a de la difficulté à vaquer à ses activités de la vie quotidienne et qui a besoin de son aide.

[19] Il affirme également qu’il n’y avait pas de possibilités d’avancement professionnel ou de hausse de salaire pour son emploi. Il devait déménager dans une région au climat plus doux en raison de son hypothyroïdie, ce qui le rendait très sensible au froid du Manitoba et l’exposait entre autres à un plus grand risque d’hypothermie. Il était préoccupé par sa sécurité personnelle lorsqu’il prenait les transports en commun pour se rendre au travail pour son quart de nuit à l’hôtel et pour retourner chez lui, et il a été victime de harcèlement à plusieurs reprises.

[20] Il a déclaré qu’il ne pouvait pas se rapprocher de son emploi au Manitoba en raison du prix élevé et inabordable des logements.

[21] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui au moment de sa démission. Plus précisément, elle dit que le prestataire aurait pu se rapprocher de son emploi au Manitoba pour améliorer sa sécurité personnelle la nuit et qu’il aurait pu trouver un emploi convenable en Ontario avant de décider de démissionner.

[22] Voici mes constatations :

  • Le prestataire a quitté volontairement son emploi au Manitoba. Toutefois, il était fondé à quitter son emploi sans avoir d’autres solutions raisonnables, compte tenu de toutes les circonstances;
  • Il n’est pas raisonnable de s’attendre à ce que le prestataire cherche constamment du travail au Manitoba alors qu’il a de la difficulté à subvenir aux besoins de sa conjointe handicapée et de son bébé;
  • Malgré les efforts considérables qu’il a déployés sur une période d’environ trois ans, il n’a pas été en mesure de trouver un emploi mieux rémunéré au Manitoba et il n’avait plus les moyens de vivre avec le salaire minimum, qui est bien inférieur au salaire minimum de l’Ontario. Il était l’unique source de revenus de sa famille;
  • Le prestataire n’avait pas d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi au moment où il a démissionné;
  • J’estime qu’il n’a pas pu trouver un nouvel emploi convenable au Manitoba et qu’il avait des préoccupations légitimes pour sa santé et sa sécurité personnelle au Manitoba puisqu’il devait utiliser les transports en commun pour les quarts de nuit. Il n’avait pas les moyens de se rapprocher de son lieu de travail au Manitoba pour apaiser ses inquiétudes en matière de sécurité personnelle à l’égard des transports en commun la nuit;
  • Le fait de quitter son emploi au Manitoba était la seule solution raisonnable qui s’offrait à lui, compte tenu de toutes les circonstances (Canada (Procureur général) c Imran, 2008 CAF 17; Canada (Procureur général) c Laughland, 2003 CAF 12);
  • Le prestataire n’a pas pu trouver un autre emploi en Ontario avant de démissionner de son emploi au Manitoba et de prendre la décision de déménager. Il n’aurait pas pu raisonnablement continuer de travailler jusqu’à ce qu’il trouve un emploi convenable en Ontario en raison de sa situation financière. Il avait de la difficulté à trouver un nouvel emploi en Ontario pendant qu’il vivait au Manitoba en raison de son incapacité à quitter sa conjointe handicapée et son bébé;
  • Je considère que le prestataire s’est déchargé de son fardeau de démontrer qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi au sens de la Loi sur l’assurance-emploi au moment de sa démission.

Conclusion

[23] Je conclus que le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations. Par conséquent, l’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Le 17 juin 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

R. K., prestataire

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