Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : N. M. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2020 TSS 644

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-705

ENTRE :

N. M.

Demanderesse

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


Décision sur la demande de permission d’en
appeler rendue par :
Janet Lew
Date de la décision : Le 23 juillet 2020

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée parce que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Aperçu

[2] La demanderesse, N. M. (la prestataire), demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale. La permission d’en appeler signifie que les demandeurs doivent obtenir la permission de la division d’appel. Les demandeurs doivent obtenir cette autorisation avant de passer à l’étape suivante du processus d’appel. Les demandeurs doivent démontrer que l’appel a une chance raisonnable de succès. Cela équivaut à avoir une cause qui est défendable en droitNote de bas de page 1.

[3] La division générale a calculé que la prestataire avait droit à 36 semaines de prestations régulières d’assurance-emploi. La division générale a déterminé qu’en fait la prestataire renouvelait une demande antérieure. La division générale a donc fondé son calcul sur la date à laquelle la prestataire a présenté sa première demande de prestations. Elle a présenté sa première demande de prestations en novembre 2019.

[4] La prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit. Plus particulièrement, elle fait valoir que la division générale aurait dû fonder son calcul sur la date plus récente de sa demande d’avril 2020. Elle soutient que, si la division générale l’avait fait, elle aurait eu droit à plus de semaines de prestations.

[5] Je dois donc déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès. Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Je refuse donc la permission d’en appeler.

Questions en litige

[6] Les questions en litige sont les suivantes :

Question en litige no 1 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la prestataire n’a pas obtenu une audience équitable devant la division générale?

Question en litige no 2 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a utilisé la mauvaise date pour calculer les semaines de prestations auxquelles a droit la prestataire?

Analyse

[7] Avant que la prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue que ses motifs d’appel correspondent au moins à l’un des types d’erreurs énumérés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS). Ces erreurs seraient les suivantes :

  1. a) la division générale n’a pas tenu d’audience équitable ou le processus était injuste;
  2. b) elle n’a pas tranché une question qui aurait dû l’être ou elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher;
  3. c) elle a commis une erreur de droit en rendant une décision;
  4. d) elle a fondé sa décision sur une erreur de fait graveNote de bas de page 2.

[8] L’appel doit également avoir une chance raisonnable de succès. Il s’agit d’un critère relativement peu exigeant, car le demandeur n’a pas à prouver sa thèse à cette étape du processus d’appel. Si je suis convaincue qu’il existe une cause défendable, cela suffit pour accorder la permission d’en appeler.

Question en litige no 1 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la prestataire n’a pas obtenu une audience équitable devant la division générale?

[9] Non. Je conclus que la prestataire ne peut pas soutenir qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable devant la division générale.

[10] La prestataire soutient qu’elle n’a pas obtenu une audience équitable parce que la division générale a rendu sa décision deux jours après l’audience. J’en comprends que la prestataire affirme essentiellement que la division générale n’a pas soigneusement examiné son appel ou ne l’a pas traité adéquatement.

[11] Je ne vois rien de fondamentalement injuste au fait que la division générale a rendu sa décision peu de temps après l’audience.

[12] La preuve présentée à la division générale était relativement limitée. Le dossier d’audience était composé de l’avis d’appel de la prestataire, des observations de la Commission et d’un dossier de réexamen de 38 pages. Le dossier de réexamen comprenait les demandes de la prestataire et la correspondance de la Commission avec la prestataire. L’audience a été relativement courte. Elle a duré environ 18 minutes, incluant les observations préliminaires et finales du membre. La division générale a donné à la prestataire l’occasion de présenter sa preuve.

[13] Il n’y avait que deux questions en litige : (1) l’endroit où la prestataire avait son lieu de résidence habituel et (2) si la Commission avait correctement déterminé le nombre de semaines de prestations auxquelles la prestataire avait droit pendant sa période de prestations. La division générale a donné à la prestataire l’occasion de traiter des deux questions. La division générale a examiné les deux questions.

[14] La prestataire ne soutient pas qu’elle n’a pas eu l’occasion de présenter pleinement sa preuve. Elle ne prétend pas non plus que la division générale a fait abstraction de la preuve ou des questions en litige. D’après ce que je comprends, le membre de la division générale a traité les deux questions et a examiné la preuve dont il a été saisi.

[15] Je ne suis pas convaincue que la prestataire n’a pas obtenu une audience équitable devant la division générale.

Question en litige no 2 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a utilisé la mauvaise date pour calculer les semaines de prestations auxquelles a droit la prestataire?

[16] Non. Je conclus que la prestataire ne peut pas soutenir que la division générale a utilisé la mauvaise date pour calculer le nombre de semaines de prestations qu’elle pouvait obtenir.

Contexte

[17] La prestataire a présenté une demande de prestations d’assurance‑emploi en novembre 2019. La prestataire a reçu une rémunération après sa cessation d’emploi. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission), a réparti cette rémunération. Cela signifie qu’elle a appliqué cette rémunération à la demande de la prestataire du 24 novembre 2019 au 11 avril 2020Note de bas de page 3. En raison de la répartition, la prestataire n’a reçu aucune prestation pendant cette période.

[18] La Commission a laissé entendre qu’à moins que la prestataire souhaite continuer à produire des déclarations d’assurance-emploi hebdomadaires elle pouvait renouveler sa demande de prestations à la fin de la répartition. La Commission a invité la prestataire à présenter une nouvelle demande de prestations dans la semaine du 12 avril 2020.

[19] La prestataire a présenté de nouveau sa demande de prestations en avril 2020. La Commission a déterminé qu’elle avait droit à 36 semaines de prestations d’assurance-emploi.

[20] La prestataire soutient qu’elle devrait obtenir plus de semaines de prestations. Le nombre de semaines de prestations est fondé sur le taux de chômage. Plus le taux de chômage est élevé, plus le nombre de semaines de prestations est élevé. La prestataire a affirmé que le taux de chômage en avril 2020 était plus élevé qu’en novembre 2019.

La Loi sur l’assurance-emploi

[21] Le paragraphe 12(2) de la Loi sur l’assurance-emploi (la Loi) établit le nombre maximal de semaines pour lesquelles des prestations peuvent être versées. Le nombre maximal de semaines est déterminé à l’aide de l’annexe I en fonction du taux régional de chômage qui s’applique au prestataire et du nombre d’heures d’emploi assurable de ce prestataire au cours de sa période de référence.

[22] Il s’agit d’une échelle croissante. L’augmentation du nombre d’heures d’emploi assurable (jusqu’à un maximum de 1 820 heures) ou du taux régional de chômage, ou de ces deux facteurs, peut donner lieu à un plus grand nombre de semaines de prestations, jusqu’à un maximum de 45 semaines.

[23] Dans le cas de la prestataire, elle comptait 2 019 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence, soit du 25 novembre 2018 au 24 novembre 2019.

[24] À l’époque, le taux régional de chômage était de 5,7 %. Pour un taux régional de chômage de 6 % et moins, un prestataire qui compte plus de 1 820 heures d’emploi assurable a droit à 36 semaines de prestations.

Calcul de la division générale

[25] La division générale a déterminé que le taux régional de chômage applicable à la prestataire était le taux établi à la date à laquelle elle a présenté une demande initiale de prestations en novembre 2019. La prestataire habitait dans la région de Montréal. Le taux de chômage y était de 5,7 % à ce moment-là. La division générale a calculé que la prestataire avait donc droit à 36 semaines de prestations.

[26] La prestataire a fait valoir que le taux régional de chômage applicable devrait être le taux établi à la date à laquelle elle a présenté une nouvelle demande de prestations en avril 2020. Le taux régional de chômage était beaucoup plus élevé à cette époque en raison des répercussions de la COVID-19. La prestataire a fait valoir que, si le taux régional de chômage était plus élevé, elle serait admissible à un plus grand nombre de semaines de prestations.

[27] La division générale a rejeté cet argument. La division générale a conclu que la prestataire renouvelait sa demande du 25 novembre 2019. Elle ne présentait pas de nouvelle demande. Elle devait donc se fonder sur le taux régional de chômage qui existait en novembre 2019 pour calculer le nombre de semaines de prestations auxquelles elle avait droit. Elle ne pouvait pas se fonder sur les taux de chômage d’avril 2020.

Argumentation de la prestataire

[28] La prestataire souligne que la lettre de la Commission datée du 11 décembre 2019 ne précisait pas combien de semaines de prestations elle recevrait. La lettre l’invitait également à présenter une nouvelle demande de prestations dans la semaine du 12 avril 2020.

[29] La prestataire soutient que, parce que la Commission n’a pas initialement calculé le nombre de semaines de prestations qu’elle recevrait, la division générale le calculerait lorsqu’elle présenterait une nouvelle demande en avril 2020. C’est pourquoi elle soutient que le taux de chômage qui devrait s’appliquer est le taux qui existait en avril 2020 lorsqu’elle a présenté une nouvelle demande de prestations.

Quel est le taux régional de chômage applicable?

[30] Le paragraphe 17(1) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) établit le taux régional de chômage applicable. La division générale a reproduit une partie de cette disposition. Elle indique que le taux régional qui s’applique est la « moyenne des taux de chômage mensuels désaisonnalisés de la dernière période de trois mois pour laquelle des statistiques ont été produites par Statistique Canada qui précède la semaine visée au paragraphe 10(1) de la [Loi sur l’assurance-emploi]… » [Ajout de la soussignée.]

[31] Bref, le taux qui s’applique est une moyenne des taux établis avant la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi. Cela nous oblige à examiner le libellé du paragraphe 10(1) de la Loi.

[32] Le paragraphe 10(1) de la Loi définit ce qu’est une période de prestations. La période de prestations débute, selon le cas : a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération; b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine est postérieure à celle de l’arrêt de rémunération.

[33] Pour l’application du paragraphe 17(1) du Règlement, la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi est la semaine au cours de laquelle commence la période de prestations.

[34] Aux termes de l’alinéa 10(1)a) du Règlement, la prestataire a travaillé pour la dernière fois le 20 novembre 2019. Donc, le dimanche de la semaine où est survenu l’arrêt de rémunération était le 17 novembre 2019.

[35] Aux termes de l’alinéa 10(1)b) du Règlement, la prestataire a présenté une demande de prestations le 25 novembre 2019. Le dimanche de la semaine au cours de laquelle a été faite la demande initiale de prestations est le 24 novembre 2019.

[36] La dernière des deux dates entre a) et b) est le 24 novembre 2019.

[37] Dans le cas de la prestataire, aux termes du paragraphe 10(1) de la Loi, sa période de prestations a commencé le dimanche 24 novembre 2019. Par conséquent, aux termes du paragraphe 17(1) du Règlement, il s’agit de la date de calcul du taux régional de chômage. Et selon les taux de chômage désaisonnalisés sur trois mois, le taux régional de chômage qui s’applique à la prestataire est de 5,7 %Note de bas de page 4.

[38] Il est évident que la division générale a calculé le taux régional de chômage applicable en tenant compte du paragraphe 10(1) de la Loi et du paragraphe 17(1) du Règlement. Je ne suis pas convaincue qu’il existe une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a utilisé la mauvaise date pour calculer le nombre de semaines de prestations auxquelles a droit la prestataire.

La prestataire pourrait-elle prolonger la période de référence?

[39] Bien que la prestataire n’ait pas soulevé cette question, j’ai également examiné la question de savoir si la prestataire aurait pu se fonder sur la répartition des indemnités de départ pour prolonger la période de référence en application du paragraphe 8(3) de la Loi. La division générale n’a pas examiné cette question.

[40] Si la prestataire était en mesure de prolonger la période de référence, cela pourrait modifier le nombre de semaines de prestations. (Il faudrait d’abord tenir compte du nombre d’heures d’emploi assurable au cours de la période de référence pour s’assurer que la prestataire est admissible aux prestations.)

[41] Le paragraphe 8(3) de la Loi prévoit une prolongation de la période de référence à certaines conditions. L’une de ces conditions est que la répartition empêche un prestataire d’établir un arrêt de rémunération. S’il y a arrêt de rémunération, la prestataire n’est pas admissible à une prolongation de la période de référence.

[42] Le paragraphe 14(1) du Règlement décrit le moment où survient un arrêt de rémunération. Il indique qu’un arrêt de rémunération se produit lorsque l’assuré cesse d’être au service de son employeur et se trouve à ne pas travailler pour cet employeur pendant une période d’au moins sept jours consécutifs, et qu’aucune rémunération ne provient de cet emploi.

[43] La prestataire a touché une rémunération de cessation d’emploi. Toutefois, cette rémunération de cessation d’emploi ne peut être prise en compte pour déterminer s’il y a un arrêt de rémunération. Le paragraphe 35(6) du Règlement indique que la rémunération visée au paragraphe 36(9) du Règlement ne peut pas être comptée pour déterminer s’il y a un arrêt de rémunération. Le paragraphe 36(9) du Règlement fait référence à la rémunération versée en raison de la cessation d’emploi.

[44] Les indemnités de départ de la prestataire ne constituaient pas une rémunération aux fins du paragraphe 14(1) du Règlement.

[45] En raison du paragraphe 35(6) du Règlement, il y a eu un arrêt de rémunération lorsque la prestataire a cessé de travailler pour son employeur en novembre 2019. La prestataire n’a pas rempli toutes les conditions énoncées au paragraphe 8(3) de la Loi. Par conséquent, elle n’est pas admissible à une prolongation de la période de référence en vertu du paragraphe 8(3) de la Loi.

[46] Je ne suis pas convaincue qu’il existe une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’appliquer le paragraphe 8(3) de la Loi. La prestataire ne pouvait pas se prévaloir de la prolongation parce qu’elle n’a pas rempli toutes les conditions énoncées au paragraphe 8(3) de la Loi.

Le taux régional de chômage en avril 2020

[47] Même si la prestataire n’avait jamais présenté de demande de prestations en novembre 2019 et avait présenté une première demande de prestations en avril 2020, il est peu probable que celle-ci aurait donné lieu à un plus grand nombre de semaines de prestations. Il est plus probable qu’elle aurait effectivement eu droit à un moins grand nombre de semaines de prestations.

[48] Conformément au paragraphe 10(1) de la Loi, la période de prestations de la prestataire aurait commencé le dimanche de la semaine au cours de laquelle la demande initiale de prestations a été présentée. Cette date est postérieure au dimanche de la semaine au cours de laquelle est survenu l’arrêt de rémunération;

[49] La prestataire a présenté une demande de prestations le 8 avril 2020. Le dimanche de la semaine en question est le 5 avril 2020.

[50] Aux termes du paragraphe 17(1) du Règlement, le taux moyen qui précède cette semaine est utilisé pour déterminer le taux régional de chômage. Selon les taux de chômage désaisonnalisés sur trois mois, le taux régional de chômage qui s’applique à la prestataire est de 5,6 %Note de bas de page 5.

[51] La période de référence est la période de 52 semaines qui a pris fin le 4 avril 2020. Je ne sais pas combien d’heures assurables la prestataire avait au cours de sa période de référence, mais elle a cessé de travailler le 20 novembre 2019. Elle a donc touché une rémunération assurable pendant environ 7,5 mois. Cela serait beaucoup moins élevé que le nombre d’heures assurables qu’elle a effectuées de novembre 2018 à novembre 2019, et elle comptait 2 019 heures assurables.

[52] La prestataire a effectué beaucoup moins que 1 820 heures assurables d’avril 2019 à avril 2020. Selon l’annexe I et le taux régional de chômage de 5,6 %, la prestataire aurait pu recevoir le nombre suivant de semaines de prestations, selon les heures d’emploi assurable qu’elle avait accumulées du 7 avril 2019 au 4 avril 2020.

Nombre d’heures d’emploi assurable au cours de la période de référence avec un taux régional de chômage de 5,6 % Semaines de prestations d’assurance-emploi
1 200 21
1 300 22
1 400 24
1 500 26
1 600 29
1 700 32
1 820 et plus 36

[53] Bref, la prestataire aurait reçu moins de semaines de prestations si elle s’était fondée sur sa demande d’avril 2020 qu’en utilisant la date de novembre 2019. Cela s’explique par le fait que le taux régional de chômage a en fait diminué dans la région de Montréal durant la période en question et par le fait qu’elle comptait moins d’heures d’emploi assurable.

Conclusion

[54] Je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, je refuse la demande de permission d’en appeler.

 

Représentant :

P. W., pour la demanderesse

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