Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : GM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2020 TSS 1105

Numéros de dossier du Tribunal: GE-20-903 et GE-20-904

ENTRE :

G. M.

Prestataire

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Commission


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Audrey Mitchell
DATE DE LA DÉCISION : Le 31 juillet 2020

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Même si les salaires versés au prestataire ont valeur de rémunération, celle-ci a été mal répartie par la Commission. De plus, comme le prestataire n’a pas sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses, les pénalités que lui a infligées la Commission l'ont été à tort. Les avis de violation émis par la Commission étaient aussi injustifiés.

Aperçu

[2] Le prestataire travaille dans l’industrie de la construction depuis de nombreuses années. Chaque année, il demande des prestations d’assurance-emploi lorsqu'il est mis à pied. La Commission a mené une enquête puis conclu que le prestataire avait travaillé tout en recevant des prestations d’assurance-emploi. La Commission a permis au prestataire d’expliquer pourquoi il avait omis de déclarer sa rémunération alors que l'employeur avait fourni des renseignements contraires. Le prestataire s’est excusé pour l'erreur et a dit qu’il veillerait à ce que cette situation ne se reproduise plus.

[3] La Commission a réparti la rémunération du prestataire. Ayant conclu qu’il avait fait des déclarations fausses ou trompeuses au sujet de sa rémunération, elle lui a imposé deux pénalités et deux avis de violation.

[4] En appel, le prestataire a soutenu que son ex-épouse avait accédé à son dossier d'assurance-emploi, rempli à son insu ses déclarations bimensuelles alors qu’il travaillait, et détourné les prestations pour les faire déposer dans son compte à elle. La division générale du Tribunal de la sécurité sociale a rejeté son appel contre la décision de la Commission. La division d’appel du Tribunal a ensuite accueilli l’appel et renvoyé le dossier à la division générale pour qu’une nouvelle décision soit rendue.

Questions préliminaires

[5] Dans sa demande de révision datée du 26 septembre 2017, le prestataire a fait référence aux décisions du 5 et du 6 septembre 2017 de la Commission. Cependant, la décision de révision de la Commission fait uniquement référence à la décision du 6 septembre 2017. Le prestataire n’a soumis au Tribunal aucune décision de révision portant sur la décision initiale du 5 septembre 2017.

[6] En réponse à une requête du Tribunal, la Commission a soumis des éléments de preuve supplémentaires ainsi que sa décision de révision portant sur sa décision initiale du 5 septembre 2017. Je dispense donc le prestataire de fournir une copie de cette décision de révisionFootnote 1.

Questions en litige

[7] La Commission a-t-elle prouvé que le prestataire avait sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs dans ses déclarations?

[8] Si tel est le cas, les pénalités infligées par la Commission ont-elles lieu d’être?

[9] La Commission a-t-elle eu raison d’imposer des avis de violation?

[10] L’argent reçu par le prestataire a-t-il valeur de rémunération?

[11] Si oui, la Commission a-t-elle réparti correctement la rémunération du prestataire?

Analyse

Le prestataire a-t-il sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs?

[12] Je conclus que le prestataire n’a pas effectivement rempli ses déclarations du prestataire bimensuelles. Je conclus que ces déclarations ont été remplies par une tierce partie, possiblement son ex-épouse. Même si les renseignements fournis étaient faux ou trompeurs, comme le prestataire travaillait tout en touchant des prestations, je juge qu’ils n’ont pas été fournis sciemment par le prestataire.

[13] La Commission peut infliger une pénalité si elle est d’avis que le prestataire a fait une déclaration ou fourni un renseignement qu’il sait être faux ou trompeursFootnote 2.

[14] Pour imposer une pénalité, la Commission doit prouver que le prestataire a sciemment fourni des renseignements faux ou trompeursFootnote 3.

[15] Il ne suffit pas que les renseignements soient faux ou trompeurs. Pour que le prestataire soit passible d’une sanction, la Commission doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a sciemment fourni ces renseignements, tout en sachant qu’ils étaient faux ou trompeursFootnote 4.

[16] Le prestataire a affirmé que son ex-épouse avait rempli ses déclarations bimensuelles d'assurance-emploi en son nom et détourné les prestations vers son propre compte bancaire. Pour savoir si le prestataire a été victime de fraude, je dois déterminer si les actes frauduleux d'une tierce partie expliquent le versement de prestations de la part de la Commission et, si tel est le cas, déterminer si la fraude a été commise à l’insu du prestataire et sans son consentementFootnote 5.

[17] Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 1er janvier 2015 et le 22 décembre 2015. Selon la preuve déposée par la Commission, le prestataire a touché une rémunération entre la semaine du 24 mai 2015 et celle du 23 août 2015, et entre la semaine du 27 mars 2016 et celle du 19 juin 2016. La Commission a versé des prestations au prestataire durant ces périodes sur le fondement de ses déclarations bimensuelles.

[18] Le dossier de la Commission comprend un rapport créé par son logiciel de captures d’écran en texte intégral. Le rapport présente les questions et réponses des déclarations en ligne du prestataire du 20 mars 2016 au 25 juin 2016. Le prestataire affirme qu’il n’a pas rempli ces déclarations. Cependant, le rapport montre, pour chacune des déclarations, des réponses négatives à la question de savoir s’il avait travaillé ou touché un salaire pour la période visée par la déclaration. La Commission n’a pas fourni de rapport semblable pour les semaines allant du 24 mai 2015 au 23 août 2015.

[19] La Commission a permis au prestataire de répondre aux renseignements fournis par son employeur quant à la rémunération qu’il avait touchée alors qu’il recevait des prestations d’assurance-emploi. Avant de répondre aux questions posées, le prestataire a téléphoné à la Commission. Il a dit qu’il avait vérifié son compte bancaire, mais qu’aucun dépôt n’y paraissait. Après avoir parlé à la Commission, le prestataire a rempli un des formulaires qu’elle lui avait envoyés. Il s’est excusé pour l’erreur. Il a aussi avancé qu’une autre personne de son foyer pourrait avoir accédé à son dossier de déclarations.

Les actes frauduleux d’une tierce partie expliquent-ils les prestations versées par la Commission?

[20] Je conclus que les actes frauduleux d’une tierce partie ont amené la Commission à verser des prestations au prestataire.

[21] Le prestataire a soutenu que son ex-épouse avait rempli à son insu les déclarations bimensuelles en son nom. Selon son témoignage, son épouse ouvrait le courrier de la famille, et il pense que c’est ainsi qu’elle a dû obtenir son code d’accès. Il a affirmé que son épouse ne l’avait jamais aidé avec ses demandes de prestations ni ses déclarations bimensuelles avant 2014. Lors de l’audience devant la division générale en 2018, le prestataire a déclaré que son épouse avait rempli ses déclarations alors qu’il était au travail.

[22] La Commission a inclus une seule des déclarations bimensuelles dans son dossier. Parmi les sept déclarations remplies pour les périodes 20 mars 2016 et 26 juin 2016 [sic], le premier rapport avait été rempli à 20 h 57. Les autres l’avaient été durant les heures normales de bureau.

[23] J’ai interrogé le prestataire sur son horaire de travail. Il a dit qu’il travaillait de huit à 10 heures par jour, cinq jours par semaine. Il a aussi affirmé qu’il ne pouvait pas s’occuper d’affaires personnelles quand il était sur le chantier.

[24] Lors de son audience en 2018, il a été discuté qu’il était désormais possible de remplir les déclarations à l’aide d’un cellulaire, ce qui n’était pas le cas auparavant. Le membre a demandé au prestataire s’il avait fait ses déclarations en ligne. Il a répondu par l’affirmative, spécifiant que son épouse et lui partageait un ordinateur à la maison.

[25] Je ne remets pas en cause le témoignage du prestataire quant à son horaire de travail et à son incapacité de s’occuper d’affaires personnelles au travail, particulièrement comme il travaille dans l’industrie de la construction. Comme la majorité des déclarations bimensuelles pour la période visée par les déclarations au dossier de la Commission ont été faites alors que le prestataire était au travail, je conclus qu’il n’a pas rempli les sept déclarations bimensuelles. Même si je ne dispose pas des déclarations bimensuelles pour la période de 2015, je suis convaincue, d’après les événements de 2016 et les affirmations du prestataire, que les déclarations de 2015 avaient aussi sûrement été remplies alors qu’il était au travail, et n’avaient donc pas été faites par le prestataire. Le prestataire a témoigné que son épouse avait fait déposer les prestations d’assurance-emploi dans son compte bancaire à elle. Il a dit qu’il n’avait pas accès à ce compte. La preuve de la Commission révèle qu'un changement aux renseignements bancaires a été effectué en date du 7 mars 2014.

[26] Le prestataire a déposé deux lettres de sa banque pour appuyer son témoignage voulant qu'il n’avait pas accès au nouveau compte bancaire où la Commission avait déposé les prestations d’assurance-emploi. La première lettre confirme que le prestataire avait ouvert un compte auprès de la banque en juin 2007. Il avait ensuite ouvert un compte conjoint avec son épouse. La banque avait ensuite réacheminé au compte conjoint tous les dépôts qui étaient précédemment versés au compte original du prestataire.

[27] La seconde lettre confirme que le prestataire n’a jamais été titulaire ni utilisateur du compte bancaire indiqué dès le 7 mars 2014 pour le dépôt des prestations d’assurance-emploi. La banque ne pouvait cependant pas révéler, sans ordonnance d’un tribunal, le nom du titulaire ou la date de création du compte. D’après les deux lettres de la banque, je conclus que les prestations d’assurance-emploi n’ont pas été déposées dans un compte dont le prestataire était titulaire, à compter du 7 mars 2014 et jusqu’à ce qu’il mette à jour ses renseignements bancaires, le 22 décembre 2016.

[28] J’ai demandé au prestataire s’il avait reçu des prestations d’assurance-emploi pour la demande qu’il avait présentée le 22 décembre 2015. Le prestataire a confirmé que oui. Dans une question subséquente, je lui ai demandé de préciser sa réponse, comme il disait que son épouse avait changé ses renseignements bancaires auprès de la Commission en 2014. Par l’entremise de son représentant, le prestataire a fourni une réponse, puis une réponse modifiée. Dans sa première réponse, il a expliqué que son épouse avait, à son insu, rempli ses déclarations en son nom à compter de la semaine du 7 mars 2014, et fait déposer les prestations à son compte bancaire à elle. Dans sa réponse modifiée, le prestataire a réitéré qu’il avait reçu des prestations relativement à sa demande. Il a ajouté que son épouse avait rempli ses déclarations à son insu à partir de [traduction] « la semaine du 27 mars 2016 et jusqu'à celle du 19 juin 2016 ».

[29] Je ne trouve pas que la réponse modifiée ait du sens. Elle n’explique pas pourquoi le prestataire pouvait dire qu’il recevait des prestations d’assurance-emploi alors qu’il n’avait pas accès au compte bancaire où la Commission avait déposé les prestations depuis mars 2014. Je juge toutefois que son témoignage dans l’appel de 2018 fournit une explication raisonnable qui cadre davantage avec sa réponse initiale.

[30] Le prestataire a affirmé que son épouse s’occupait des finances, et payait notamment les factures et le loyer. Elle lui donnait une allocation. Le prestataire a dit que son horaire de travail lui permettait difficilement d’aller à la banque pour voir où allaient ses prestations. J’ai déjà conclu que la Commission avait déposé les prestations dans un compte qui n'appartenait pas au prestataire. De plus, rien ne me permet de douter de son témoignage précédent voulant que son épouse s’occupait de l’argent. Par conséquent, je conclus que son affirmation selon laquelle il avait reçu des prestations découlant de sa demande de décembre 2015 n’est pas en contradiction avec le fait que les prestations avaient été déposées dans un compte qui n’était pas le sien.

[31] Le prestataire a soumis des copies de relevés bancaires pour le compte conjoint partagé avec son épouse afin de montrer qu’aucune prestation d’assurance-emploi n’y avait été déposée. Les relevés incluent des dépôts intitulés « CANADA », dont certains sont compris dans l’une des périodes en cause. Lors de son audience devant la division d’appel, le prestataire a affirmé que ces dépôts étaient sûrement des prestations fiscales pour enfants. Il a souligné que leurs montants ne correspondaient pas à ceux de ses prestations d’assurance-emploi. Il a aussi souligné des virements qui avaient été faits depuis le compte conjoint vers le nouveau compte indiqué pour le dépôt des prestations d’assurance-emploi dès le 7 mars 2014 et dont il n’était pas titulaire.

[32] Je conclus d’après les relevés bancaires que les dépôts portant le titre « CANADA » ne sont pas des prestations d’assurance-emploi versées par la Commission. Selon la preuve déposée par la Commission, le taux hebdomadaire de ses prestations s’élevait à 524 $, ce qui n’est pas du tout le montant des dépôts mensuels, même si l’on tient compte des déductions. Qui plus est, les dates de certains des dépôts ne sont pas comprises dans les périodes en cause, et tombent à des moments où le prestataire n’aurait pas autrement touché des prestations d’assurance-emploi.

[33] J’ai déjà conclu que les déclarations bimensuelles pour les périodes en cause n’avaient pas été remplies par le prestataire. J’accepte son témoignage voulant que son épouse avait probablement obtenu son code d’accès en ouvrant le courrier, et non parce qu’elle l’avait déjà aidé à soumettre une demande de prestations ou ses déclarations bimensuelles. J’estime aussi que le prestataire ignorait que des prestations avaient été versées et qu'il ne les avait jamais reçues comme la Commission les avait versées dans un compte dont il n’était pas titulaire. Je conclus que la Commission a versé des prestations sur la base de déclarations bimensuelles remplies frauduleusement par une tierce partie.

Le prestataire savait-il qu’une tierce partie remplissait ses déclarations bimensuelles en son nom ou y avait-il consenti?

[34] Je conclus que le prestataire ignorait qu’une tierce partie remplissait ses déclarations bimensuelles en son nom et qu’il n’y avait pas consenti.

[35] Lors de son audience devant la division générale en 2018, le prestataire a déclaré qu’il avait travaillé pour différentes entreprises de constructions, mais qu’il était représenté par le même syndicat depuis 20 ans. Il a affirmé qu’il était habituellement mis à pied l’hiver, à moins qu’il y ait du travail, et qu’il demandait donc des prestations d’assurance-emploi. Il a expliqué qu’il mettait fin à ses prestations quand il recommençait à travailler et qu’il les réactivait à sa mise à pied l’année suivante. Il a ajouté qu’il procédait ainsi depuis les 20 dernières années et que tout s’était toujours passé rondement, jusqu’à récemment.

[36] Le prestataire a affirmé qu’il avait partagé 16 années de vie avec son ex-épouse, dont 10 années de mariage. Il a dit que son épouse et lui étaient aux prises avec des problèmes conjugaux vers l’époque où des problèmes avec son assurance-emploi sont survenus. Ils ne sont pas ensemble à l’heure actuelle.

[37] Comme la Commission a seulement communiqué avec le prestataire en 2017 au sujet de la rémunération qu’il touchait concurremment à ses prestations, je lui ai demandé ce qui l’avait motivé à modifier ses renseignements bancaires auprès de la Commission en décembre 2016. Le prestataire a dit qu’il l’avait fait à cause de sa rupture conjugale. Il a affirmé qu’il ignorait alors que ses renseignements bancaires avaient été modifiés précédemment.

[38] Je juge plausible son explication selon laquelle ses demandes d’assurance-emploi ne posaient aucun problème avant que son mariage se mette à chanceler. Je trouve que le prestataire, en changeant ses renseignements bancaires en modifiant ce qu’il croyait être le compte conjoint partagé avec son épouse, donne crédit à ses propos selon lesquels il ignorait que son épouse réclamait des prestations d’assurance-emploi en son nom et qu’il n’y avait pas consenti.

[39] Je souligne que le prestataire s’est excusé et a assumé l’entière responsabilité pour [traduction] « l’erreur » quand la Commission lui a demandé de clarifier les renseignements que lui avait fournis son employeur sur sa rémunération. La Commission soutient que le prestataire a admis qu'il avait fait des demandes de prestations et rempli ses déclarations bimensuelles, et s’est excusé pour ses actes.

[40] J’ai interrogé le prestataire sur la réponse qu’il a donnée à la Commission. Il a dit qu’il n’avait pas vraiment compris à l’époque la question sur les écarts comme étant une erreur. Encore une fois, sa réponse ne me convainc pas. Toutefois, dans sa réponse à la Commission, le prestataire a avancé qu’une autre personne dans son foyer aurait pu avoir accès à son dossier d’assurance-emploi. J’en conclus que, même s’il s’est excusé pour [traduction] « l’erreur », le prestataire a signalé qu’il n’était pas la personne l’ayant commise. Par conséquent, je juge qu’il n’a pas admis, en présentant ses excuses, qu’il avait rempli les déclarations bimensuelles pour les périodes en cause.

[41] J’ai demandé au prestataire ce qu’il avait signifié en disant à la Commission qu’il avait présenté sa propre demande et rempli ses déclarations bimensuelles. Le prestataire a affirmé qu’il l’avait fait en ligne, mais qu’il avait arrêté de le faire quand il avait recommencé à travailler. Je juge que la déclaration du prestataire ne correspond pas une admission selon laquelle il aurait rempli ses déclarations bimensuelles pour les périodes en cause. La Commission lui avait posé une question générale sans préciser de dates. Après sa mise à pied, le prestataire avait effectivement présenté une demande de prestations, comme le montrent les dossiers de la Commission. Rien ne me permet de douter qu’il cessait de faire ses déclarations après chacun de ses retours au travail.

[42] Le prestataire a soumis un rapport de police sur une fraude présumée de ses prestations d’assurance-emploi. Environ trois mois plus tard, la police avait clos le dossier, ayant conclu qu’aucune infraction n’avait été commise. Le prestataire a avancé qu’il pourrait faire rouvrir un dossier après la conclusion de cet appel.

[43] Je remarque que les renseignements qui ont été donnés à la police sur les comptes bancaires, les services financiers et son utilisation du compte conjoint partagé avec son épouse correspondent aux déclarations qu’il a faites à la Commission et dans cet appel. Si l’enquête policière n’a manifestement abouti à aucune accusation, les informations dont je dispose ne me permettent pas de conclure que le prestataire était au courant des gestes qu’il reproche à son épouse ou qu’il y avait consenti. J’accorde beaucoup d’importance à la procédure qu’il a entamée contre elle auprès de la police. J’estime qu’elle confère de la crédibilité à ses propos selon lesquels les agissements de son épouse avaient eu lieu à son insu et sans son consentement.

[44] D’après l’analyse qui précède, je conclus que le prestataire ignorait qu’une tierce partie remplissait ses déclarations en son nom et qu’il n’y avait pas consenti.

[45] J’ai conclu que le prestataire n’a pas rempli ses déclarations bimensuelles à compter de la semaine du 24 mai 2015 à celle du 23 août 2015, et de la semaine du 27 mars 2016 à celle du 19 juin 2016. J’ai également conclu que les gestes posés par une tierce partie, possiblement son ex-épouse, sont à l’origine des prestations que lui a versées la Commission, et que le prestataire ignorait ses gestes et n’y avait pas consenti. Pour cette raison, je conclus que le prestataire n’a pas sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses.

Question 2 : Les pénalités infligées par la Commission ont-elles lieu d’être?

[46] Comme j’ai conclu que le prestataire n’avait pas sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses, je conclus qu’il n’est pas passible des pénalités que lui a infligées la Commission.

Question 3 : La Commission a-t-elle eu raison d’imposer des avis de violation?

[47] Puisque j’ai conclu que le prestataire n’est sujet à aucune pénalité, je conclus aussi qu’aucun avis de violation ne doit lui être imposé.

Question 4 : L’argent reçu par le prestataire a-t-il valeur de rémunération?

[48] Je juge que l’argent reçu par le prestataire est une rémunération.

[49] Selon la loi, la rémunération correspond au revenu intégral du prestataire provenant de tout emploiFootnote 6. La loi définit les termes « revenu » et « emploi ». Un « revenu » comprend tout revenu en espèces ou non que le prestataire reçoit ou recevra d’un employeur ou d’une autre personneFootnote 7. Un « emploi » comprend tout emploi faisant l’objet de tout contrat de travailFootnote 8.

[50] Le revenu d’un prestataire a valeur de rémunération s’il est accordé pour un travail rendu et s’il existe un lien suffisant entre l’emploi du prestataire et la somme reçueFootnote 9.

[51] Le prestataire n'a pas contesté les sommes que l’employeur a révélé à la Commission lui avoir versées. La rémunération indiquée par l’employeur concerne trois périodes. Celles-ci courent de la semaine du 16 mars 2014 à celle du 17 août 2014, de la semaine du 24 mai 2015 à celle du 23 août 2015, et de la semaine du 27 mars 2016 à celle du 19 juin 2016.

[52] Étant donné que le prestataire ne conteste pas la preuve de la Commission voulant que l’employeur l’a payé pour des services fournis au cours de périodes susmentionnées, je juge qu’il existe un lien suffisant entre l’emploi du prestataire et les sommes lui ayant été versées. Pour cette même raison, je juge que cet argent a été tiré de l’emploi qu’il occupait auprès de l’employeur. Par conséquent, je conclus que ces sommes ont valeur de rémunération.

Question en litige 5 : La Commission a-t-elle réparti correctement la rémunération du prestataire?

[53] Même si j’ai conclu que l’argent que l’employeur a versé au prestataire a valeur de rémunération, je constate que la Commission n’a pas correctement réparti cette rémunération.

[54] La rémunération payable au prestataire aux termes d’un contrat de travail en échange des services rendus est répartie sur la période pendant laquelle ces services ont été fournisFootnote 10.

[55] La Commission a réparti la rémunération sur les périodes courant de la semaine du 16 mars 2014 à celle du 3 août 2014, de la semaine du 24 avril 2015 à celle du 23 août 2015, et de la semaine du 27 mars 2016 à celle du 19 juin 2016.

[56] Le prestataire n’a pas contesté qu’il avait touché cette rémunération. Toutefois, j’ai conclu que les actes frauduleux d’une tierce partie ont conduit la Commission à lui verser des prestations auxquelles il n’était pas admissible. J’ai également conclu que la tierce partie a agi ainsi à son insu et sans son consentement. Par conséquent, je ne puis tirer une conclusion qui oblige le prestataire à rembourser les prestations en imputant sa rémunération aux semaines susmentionnées.

[57] Sur le fondement de ce qui précède, je conclus que la Commission n’a pas correctement réparti la rémunération du prestataire.

Conclusion

[58] L’appel est accueilli.

Mode d’instruction :

Questions et réponses

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