Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2020 TSS 784

Numéro de dossier du Tribunal: GE-20-1779

ENTRE :

C. F.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Charlotte McQuade
DATE DE L’AUDIENCE : Le 12 août 2020
DATE DE LA DÉCISION : Le 17 août 2020

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie. C. F. (le prestataire) est admissible aux prestations parentales pour la semaine du 31 mai 2020 au 6 juin 2020.

Aperçu

[2] L’épouse du prestataire a donné naissance à un fils le 27 mai 2019. Elle et son époux ont décidé de se partager 40 semaines combinées de prestations parentales standards. L’épouse du prestataire a touché des prestations de maternité, puis a touché 35 semaines de prestations parentales standards de l’assurance-emploi (AE), qui ont pris fin le 30 mai 2020. Le 27 mai 2019, le prestataire a présenté une demande de prestations parentales pour les cinq semaines suivant la période de prestations parentales de son épouse. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a établi que le prestataire n’était pas admissible à des prestations parentales parce qu’il avait présenté sa demande après la fin de la période maximale d’un an accordée pour présenter une demande de prestations parentales.

[3] Le prestataire a déclaré que la Commission avait informé lui et son épouse qu’ils pouvaient demander cinq semaines de prestations parentales à la fin de la période de prestations parentales de son épouse. Il affirme qu’on ne lui a rien dit au sujet de la période maximale pour présenter une demande de prestations parentales. Le prestataire affirme qu’il est inéquitable et illégal que la Commission refuse de lui payer ses prestations parentales.

[4] J’ai décidé, pour les raisons fournies ci-dessous, que le prestataire est admissible aux prestations parentales pour la semaine du 31 mai 2020 au 6 juin 2020 parce que le prestataire répond à une des conditions pour la prolongation de sa période d’admissibilité aux prestations parentales d’une semaine. Le prestataire n’est pas admissible aux quatre autres semaines de prestations parentales qu’il demande, puisqu’il les a demandées alors que sa période d’admissibilité aux prestations parentales était terminée.

Questions préliminaires

[5] Le prestataire n’était pas présent à l’audience. L’épouse du prestataire, qui a reçu l’autorisation du prestataire d’agir comme sa représentante, a participé en son nom. L’épouse du prestataire souhaitait également présenter des éléments de preuve. J’ai permis à l’épouse du prestataire d’agir comme sa représentante et de présenter des éléments de preuve, puisqu’elle a une connaissance directe de l’affaire.

Question en litige

[6] Le prestataire peut-il toucher des prestations parentales?

Analyse

Le prestataire peut-il toucher des prestations parentales?

[7] Le prestataire est admissible aux prestations parentales pour la semaine du 31 mai 2020 au 6 juin 2020, mais pas pour les semaines suivantes.

[8] Depuis décembre 2017, les parties prestataires doivent choisir entre les deux types de prestations parentalesNote de bas de page 1. Elles doivent choisir entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongées.

[9] Les prestations parentales standards sont versées à une partie prestataire pour une période allant jusqu’à 35 semaines, au taux de 55 % des gains hebdomadaires assurables et jusqu’à un montant maximalNote de bas de page 2. Si une partie prestataire choisit de partager ses prestations parentales standards avec un autre parent, il est possible de demander cinq semaines de prestations additionnellesNote de bas de page 3.

[10] Les prestations parentales prolongées sont versées à une partie prestataire pour une période allant jusqu’à 61 semaines, au taux de 33 % des gains hebdomadaires assurables et jusqu’à un montant maximal. Si une partie prestataire choisit de partager ses prestations parentales prolongées avec un autre parent, il est possible de demander huit semaines de prestations parentales prolongées additionnellesNote de bas de page 4.

[11] Le choix du type de prestations (standards ou prolongées) ne peut pas être modifié une fois que le paiement des prestations a commencéNote de bas de page 5. Les parents qui décident de se partager les prestations parentales doivent choisir le même type de prestations parentales.

[12] Lorsque des parents se partagent des prestations parentales, ils peuvent toucher les prestations parentales en même temps, ou l’un après l’autre, mais ils doivent demander ses prestations à l’intérieur de la [traduction] « période d’admissibilité aux prestations parentales ». Une personne ne peut pas toucher de prestations parentales après la période d’admissibilité aux prestations parentales Note de bas de page 6.

[13] La période d’admissibilité aux prestations parentales pour les prestations parentales prolongées commence la semaine de la naissance de l’enfant ou de son placement réel en adoption et prend fin 78 semaines après la semaine de la naissance de l’enfant ou de son placement réel en adoptionNote de bas de page 7.

[14] La période d’admissibilité aux prestations parentales pour les prestations parentales standards [sic] commence la semaine de la naissance de l’enfant ou de son placement réel en adoptionNote de bas de page 8 et prend fin 52 semaines après la semaine de la naissance de l’enfant ou de son placement réel en adoptionNote de bas de page 9.

[15] Le prestataire et son épouse ont choisi les prestations parentales standards. Ainsi, la période d’admissibilité pour les prestations parentales standards s’applique.

[16] Il n’existe que très peu de raisons pour lesquelles il peut être possible de prolonger la période d’admissibilité aux prestations parentales standards de 52 semaines. L’une de ces raisons est si le nouveau-né ou l’enfant adopté est hospitalisé au cours cette période. Dans cette situation, la période peut être prolongée du nombre de semaines que dure l’hospitalisation à l’intérieur de la période d’admissibilité aux prestations parentalesNote de bas de page 10. Aussi, il est possible que la période de prestations parentales soit prolongée si un ou une membre des Forces canadiennes voit la date de début de son congé parental être reportée ou s’il ou elle est rappelé en service pendant ce congéNote de bas de page 11. La période d’admissibilité aux prestations parentales peut être prolongée si une partie prestataire a touché plus d’un type de prestations spéciales (prestations de maternité, prestations parentales, prestations de maladie ou de quarantaine, prestations de soutien à un membre de la famille ou prestations pour un adulte ou un enfant gravement malade), dans le cas où le nombre maximal total de semaines de prestations pour ces semaines est supérieur à 50 et que des prestations parentales lui ont été versées pendant un nombre de semaines inférieur au nombre maximal de semaines applicablesNote de bas de page 12.

[17] Le fils du prestataire et de son épouse est né le 27 mai 2019. Son épouse a touché 35 semaines de prestations parentales, qui ont pris fin, selon elle, le 31 mai 2020. Une semaine de prestation de l’AE s’étale du dimanche au samedi. Ainsi, les prestations parentales de l’épouse du prestataire auraient plutôt pris fin le 30 mai 2020. Le dernier jour de travail du prestataire avant son congé parental était le 29 mai 2019. Il a présenté une demande de prestations parentales pour cinq semaines cette même journée. Sa période de prestations a été établie par la Commission à partir du dimanche de cette semaine, soit le 31 mai 2020.

[18] La Commission affirme que le prestataire n’est pas admissible à des prestations parentales puisqu’il a présenté sa demande de prestations après la période de prestations parentales. Elle affirme que l’enfant du prestataire est né le 27 mai 2019 et qu’il a demandé des prestations parentales pour le 31 mai 2020, soit plus de 52 semaines après la semaine de la naissance de son enfant. La Commission a imposé une inadmissibilité entrant en vigueur le 1er juin 2020.

[19] Le prestataire affirme, dans ses documents, que lui et sa femme ont consulté la Commission pour savoir quand il pourrait prendre son congé parental, et qu’on ne lui a jamais parlé de la période de prestations parentales. Le prestataire affirme qu’ils ont communiqué avec Service Canada à de nombreuses reprises à divers sujets, et qu’ils avaient parlé du partage des prestations parentales de cinq semaines. Chaque fois, on l’a informé qu’il serait admissible pour ce congé, en plus du congé parental de 12 mois de son épouse. Le prestataire affirme qu’ils ont téléphoné à la Commission à la fin avril ou au début mai dans le but précis de connaître la date exacte de la fin du congé de son épouse et la date à laquelle il pourrait présenter sa demande de congé parental. On leur a dit que le congé de son épouse prenait fin le 31 mai 2020 et qu’il commencerait son congé le 1er juin 2020. Le prestataire a raconté qu’on leur avait indiqué comment présenter leur demande en ligne et qu’on leur avait assuré que son congé lui serait accordé tant qu’il fournirait les documents requis. Le prestataire affirme qu’après qu’on lui a refusé ses prestations parentales, toutefois, il a été forcé de retourner au travail deux semaines plus tôt que prévu et qu’il n’était pas admissible aux prestations d’appoint offertes par son employeur pour les trois semaines pendant lesquelles il avait été congé. Le prestataire souligne que lui et son épouse ont vécu énormément de stress parce qu’ils ont dû trouver un service de garde pour leur fils. Le prestataire affirme qu’il a planifié son congé parental selon les renseignements fournis par la Commission. Il dit qu’il est inéquitable et illégal qu’on lui refuse ses prestations parentales. Il avance qu’il ne devrait pas être pénalisé pour une erreur commise par des employés de la Commission.

[20] L’épouse du prestataire a témoigné dans le même sens. Elle a expliqué qu’elle avait eu plusieurs conversations avec la Commission pour s’assurer que les documents étaient remplis adéquatement. Elle affirme que la Commission n’a pas respecté ses droits et responsabilités, qui sont énoncés dans le formulaire de demande. Elle souligne que la Commission lui a payé ses prestations en retard et qu’elle ne lui a pas expliqué adéquatement la loi. L’épouse du prestataire affirme qu’une personne ne prendrait pas cinq semaines de congé si elle savait qu’elle ne serait pas payée. Elle dit que la Commission ne leur a pas donné les bons renseignements sur la façon de demander des prestations. Elle a témoigné qu’elle et son époux avaient téléphoné à la Commission à la fin d’avril précisément pour confirmer cette information. L’épouse du prestataire affirme qu’ils ont fait preuve de diligence. Elle affirme que le refus de la Commission de verser des prestations parentales à son époux a été un choc total. Elle affirme qu’il leur manque 5 011,12 $, qu’ils ont subi beaucoup de stress, qu’ils ont dû payer les frais des services de garde, et que son époux n’a pas pu prendre de congé parental auquel il avait droit avec leur premier enfant. Il a dû retourner au travail plus tôt que prévu parce qu’on leur a refusé les prestations.

[21] Le prestataire soutient également que la période de prestations parentales de l’AE est incohérente avec les dispositions relatives au congé du Code canadien du travail. Elle affirme que selon cette loi, son époux serait admissible à un congé parental après son propre congé.

[22] Je dois établir quelle est la période de prestations parentales du prestataire. Le fils du prestataire est né le 27 mai 2019. J’estime que la période de prestations parentales du prestataire commence le dimanche de cette semaine, soit le 26 mai 2019Footnote 13. La période de prestations parentales du prestataire se termine 52 semaines après cette semaine, soit le 30 mai 2020Note de bas de page 14. Cela signifie que le prestataire ne peut demander des prestations parentales qu’entre le 26 mai 2019 et le 30 mai 2020, sauf s’il satisfait à l’une des conditions pour une prolongation de cette période.

[23] J’ai interrogé l’épouse du prestataire au sujet des conditions permettant de prolonger une période d’admissibilité aux prestations parentales. Elle a confirmé que le prestataire n’était pas un membre des Forces canadiennes et qu’il n’avait pas présenté de demande pour un autre type de prestation spéciale. L’épouse du prestataire a témoigné que son fils avait été hospitalisé après sa naissance. Il est né le 27 mai 2019 et a quitté l’hôpital pour la maison le 28 mai 2019. Toutefois, son fils a été admis dans un autre hôpital, où il est resté du 29 mai 2019 au 2 juin 2019.

[24] J’accepte le témoignage crédible du prestataire concernant l’hospitalisation de son fils et j’estime qu’il a été hospitalisé pendant une semaine au cours de la période de prestations parentales, soit celle du 27 mai 2019 au 2 juin 2019.

[25] Puisque l’enfant du prestataire a été hospitalisé pendant une semaine au cours de la période de prestations parentales, je conclus que la période de prestations parentales peut être prolongée d’une semaine, du 30 mai 2020 au 6 juin 2020. Puisque le prestataire a demandé des prestations à partir du 31 mai 2020, il est admissible aux prestations parentales pour la semaine du 31 mai 2020 au 6 juin 2020.

[26] L’épouse du prestataire a fait référence aux dispositions relatives aux congés du Code canadien du travail. Elle affirme que ces dispositions contredisent celles de l’AE. Il se peut que l’admissibilité du prestataire à des congés parentaux de son employeur soit régie par d’autres lois. Toutefois, les lois sur l’AE ne concernent que les prestations, et pas les congés de travail. Le Code canadien du travail n’est pas pertinent à la question que je dois trancher, soit celle de savoir si le prestataire est admissible aux prestations parentales.

[27] Je comprends que le prestataire soit frustré. Je crois que ni lui ni son épouse n’ont été informés au sujet de la période de prestations parentales lors de leurs conversations avec le personnel de la Commission. Je crois qu’il a reçu de mauvaises informations quant au fait qu’il pourrait toucher cinq semaines de prestations parentales après la fin des prestations parentales de son épouse.

[28] Il est regrettable que la Commission n’ait pas informé le prestataire ou son épouse de la période de prestations parentales lors de leurs conversations afin que ceux-ci puissent prendre une décision éclairée sur les semaines pendant lesquelles ils devraient demander des prestations. Le formulaire de demande de prestations de l’AE n’explique aucunement la période de prestations parentales, ce qui vient aggraver le problème. Il est compréhensible que le prestataire ait tiré la conclusion qu’il pouvait demander cinq semaines de prestations parentales après la fin de la 35e semaine de prestations parentales de son épouse.

[29] Bien que j’éprouve de la sympathie pour le prestataire, je suis tenue de faire appliquer la loi. Je ne peux pas m’écarter des limites de la loi, même en présence de circonstances convaincantesNote de bas de page 15. Dans ce cas-ci, le prestataire n’est admissible qu’à une semaine de prestations parentales.

Conclusion

[30] L’appel est accueilli en partie. Le prestataire est admissible à une semaine de prestations parentales pour la semaine du 31 mai 2020 au 6 juin 2020. Il n’est pas admissible à des prestations parentales après le 6 juin 2020.

 

Date de l’audience :

Le 12 août 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

L. D., représentante de l’appelant

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