Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : G. M. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2020 TSS 749

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-681

ENTRE :

G. M.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


DÉCISION RENDUE PAR : Melanie Petrunia
DATE DE LA DÉCISION : Le 1er septembre 2020

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée à la division générale pour réexamen.

Aperçu

[2] L’appelant, G. M. (prestataire), a été mis à pied le 14 février 2020. Il était également travailleur indépendant pour une entreprise de marketing en ligne tout en travaillant à temps plein. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire était exclu du bénéfice des prestations, car il n’avait pas prouvé qu’il était au chômage.

[3] La division générale a rejeté l’appel du prestataire, concluant qu’il n’avait pas réfuté la présomption selon laquelle il effectuait des semaines entières de travail en tant que travailleur indépendant. Le prestataire fait appel de la décision rendue par la division générale. Il soutient que la division générale a commis une erreur de compétence. La Commission reconnaît que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées et a omis de tenir compte de tous les faits pertinents. La Commission reconnaît également que la division générale a commis une erreur de droit en évaluant incorrectement les faits au titre de l’article 30(3) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE).

[4] La Commission demande que l’appel soit accueilli et que l’affaire soit renvoyée à la division générale pour réexamen. Le prestataire éprouve des difficultés financières et un stress importants, et demande que son appel soit accueilli et qu’une décision soit rendue en sa faveur.

Questions préliminaires

[5] Le prestataire a joint à sa demande de permission d’en appeler un courriel provenant d’un ancien employé et qui n’avait pas été fourni à la Commission ou au Tribunal auparavant. Le prestataire a également présenté au Tribunal un rapport médical, des relevés bancaires, des relevés de cartes de crédit, ainsi qu’un document attestant de sa participation à un programme de réorientation professionnelleNote de bas de page 1.

[6] Généralement, la division d’appel ne tient pas compte de nouveaux éléments de preuve lors d’un appel. Il y a quelques exceptions à cette règle, mais aucune de celles-ci ne s’applique en l’espèceNote de bas de page 2. Les exceptions s’appliquent lorsque les nouveaux renseignements fournissent un contexte général, sont nécessaires pour prouver des questions de procédure ou démontrent qu’il n’y avait pas de preuve devant le décideur. Les nouveaux éléments de preuve fournis par le prestataire ne correspondent à aucune de ces catégories.

[7] Je ne tiendrai pas compte des nouveaux éléments de preuve fournis par le prestataire pour trancher son appel.

Questions en litige

[8] Les questions en litige sont les suivantes :

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle commis une erreur en fondant sa décision sur une conclusion de fait tirée sans tenir compte des éléments dont elle était saisie?

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en n’expliquant pas les motifs pour lesquels elle n’a pas tenu compte de la preuve de l’appelant concernant les efforts qu’il a déployés pour chercher un emploi?

Analyse

[9] Aux termes de la Loi sur le Ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), la division d’appel peut intervenir à l’égard de la décision de la division générale dans des circonstances très limitées. L’article n’accorde pas à la division d’appel le pouvoir de procéder à une nouvelle évaluationNote de bas de page 3. La division d’appel peut seulement intervenir s’il y a eu un manquement à la justice naturelle, une erreur de droit ou si elle a fondé sa décision sur une erreur de fait, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle commis une erreur en fondant sa décision sur une conclusion de fait tirée sans tenir compte des éléments dont elle était saisie?

[10] Oui, j’estime que la division générale a commis une erreur en fondant sa décision sur une conclusion de fait tirée sans tenir compte des éléments dont elle est saisie.

[11] Le prestataire a déclaré dans son avis d’appel à la division générale qu’il cherche activement du travail. Il a également joint des documents provenant de Suncor et de WestJet confirmant sa candidature et a déclaré qu’il s’était entretenu avec WestJet et qu’il avait postulé auprès de Suncor et de ShellNote de bas de page 4. Le prestataire a précisé dans sa demande de prestations qu’il souhaitait travailler 30 heures ou plus par semaineNote de bas de page 5. Il a également déclaré qu’il cherchait un emploi à temps plein et qu’il avait assisté à trois entrevues, qu’il s’était inscrit auprès d’agences de recherche d’emploi et qu’il suivait des conseils en matière de réorientation professionnelle.

[12] Comme l’indique la Commission dans ses conclusions, la division générale a dû tenir compte de six circonstances pour évaluer si l’emploi ou l’implication du prestataire dans l’exploitation d’une entreprise est d’une importance mineure. Ces six circonstances sont énoncées à l’article 30(3) du Règlement sur l’AE. Il s’agit des circonstances suivantes :

  1. a) le temps qu’il y consacre;
  2. b) la nature et le montant du capital et des autres ressources investis;
  3. c) la réussite ou l’échec financiers de l’emploi ou de l’entreprise;
  4. d) le maintien de l’emploi ou de l’entreprise;
  5. e) la nature de l’emploi ou de l’entreprise;
  6. f) l’intention et la volonté du prestataire de chercher et d’accepter sans tarder un autre emploi.

[13] En ce qui concerne ces critères, la division générale a examiné l’intention et la volonté du prestataire de chercher et d’accepter immédiatement un autre emploi. Le membre a conclu que le prestataire avait d’abord indiqué qu’il cherchait un emploi à temps partiel en plus de travailler pour X et a ensuite déclaré qu’il cherchait un emploi à temps plein et qu’il ne s’occupait de X qu’en tant que participant à un programme de transition. Le membre fait ensuite référence au « paragraphe 9 de la décision », qui consiste en une citation d’une décision de la Cour d’appel fédérale indiquant que les déclarations initiales d’un prestataire sont plus crédiblesNote de bas de page 6. Le membre constate ensuite qu’il n’y a aucune autre preuve à l’appui d’une activité de recherche d’emploi qui pourrait être considérée comme un effort continu pour obtenir un emploi à temps pleinNote de bas de page 7.

[14] La division générale n’a pas tenu compte de la preuve de recherche d’emploi incluse dans l’avis d’appel du prestataire ni de son témoignage selon lequel il cherchait un emploi à temps plein. La division générale n’a pas examiné objectivement tous les éléments de preuve du prestataire pour déterminer son intention et sa volonté de chercher et d’accepter sans tarder un autre emploi. Par conséquent, la division générale a fondé sa décision selon laquelle l’implication du prestataire dans son entreprise n’était pas d’une importance mineure sur une conclusion de fait erronée, tirée sans tenir compte des éléments dont elle disposait.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en n’expliquant pas les motifs pour lesquels elle n’a pas tenu compte de la preuve de l’appelant concernant les efforts qu’il a déployés pour chercher un emploi?

[15] Comme nous l’avons vu précédemment, la division générale n’a pas tenu compte d’éléments de preuve présentés par le prestataire concernant les efforts qu’il a déployés pour trouver un emploi. Si le membre de la division générale a examiné les éléments de preuve, mais les a rejetés ou leur a accordé peu ou pas de poids, il doit en expliquer les motifs. La division générale ne peut pas ignorer les éléments de preuve contradictoiresNote de bas de page 8. La Commission fait valoir qu’en n’examinant pas ces éléments de preuve, la division générale n’a pas considéré et apprécié tous les éléments de preuve dont elle disposait.

[16] Je suis d’accord avec la Commission. J’estime que la division générale a tiré des conclusions de fait erronées et n’a pas tenu compte des éléments de preuve contradictoires. La division générale n’a pas évalué de façon appropriée les six circonstances décrites ci-dessus. La division générale indique ce qui suit dans sa décision :

L’appelant ne cherchait pas un emploi à temps plein. Par conséquent, il n’a pas réfuté la présomption selon laquelle il fait des semaines de travail complètes parce qu’il ne satisfait pas à l’exception prévue au paragraphe 30(2) du Règlement sur l’AE.

[17] La Cour d’appel fédérale a conclu que le critère de l’article 30(2) du Règlement sur l’AE exige un examen objectif de la question de savoir si le niveau de travail indépendant est celui d’un prestataire qui dépendrait normalement de ce niveau de travail indépendant comme principal moyen de subsistance, lorsqu’il est considéré à la lumière des six facteurs susmentionnésNote de bas de page 9. La division générale a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de ce critère.

Réparation

[18] La Commission soutient que l’appréciation des faits par la division générale dans cette affaire était inadéquate et a conduit à une erreur de droit. Pour ce motif, et afin de donner au prestataire la possibilité de fournir des éléments de preuve supplémentaires au Tribunal pour clarifier sa situation de travailleur indépendant et ses efforts en matière de recherche d’emploi, l’affaire doit être renvoyée à la division générale pour réexamen. Le prestataire éprouve un stress financier et une anxiété importants et souhaite que la question soit résolue le plus rapidement possible.

[19] Je compatis avec le prestataire et comprends son désir d’obtenir une décision rapide. Cependant, il y a des éléments de preuve contradictoires non résolus dans le dossier d’audience en raison de l’évaluation inadéquate des faits effectuée par la division générale. Compte tenu de ce dossier incomplet et des renseignements supplémentaires que le prestataire a fournis et sur lesquels il pourrait vouloir s’appuyer, je suis d’accord avec la Commission pour que l’affaire soit renvoyée à la division générale pour réexamen.

Conclusion

[20] L’appel est accueilli, et l’affaire est renvoyée à la division générale aux fins de réexamen.

 

Date de l’audience :

Le 25 août 2020

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

G. M., appelant

M. Allen, représentant de l’intimée

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