Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : A. O. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2020 TSS 769

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-614

ENTRE :

A. O.

Demandeur

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Défenderesse


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


Décision relative à une demande de
permission d’en appeler rendue par :
Stephen Bergen
Date de la décision : Le 10 septembre 2020

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, A. O. (prestataire), a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi en septembre 2008. Certaines indemnités de départ versées par son employeur ont dû être réparties par la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada. Le prestataire n’a donc reçu aucune prestation à ce moment-là. Il a cependant fini par retourner au travail, puis a de nouveau été mis à pied.

[3] Le 9 mai 2019, le prestataire a demandé que sa demande de prestations soit réactivée. Environ deux mois s’étaient écoulés sans qu’il reçoive des prestations. Le prestataire a donc appelé la Commission. C’est ainsi qu’il a appris qu’il ne recevait pas de prestations du fait qu’il n’avait pas soumis ses déclarations. Il a demandé à la Commission d’antidater ses déclarations au 5 mai 2019. La Commission a cependant refusé, soutenant que le prestataire ne disposait pas d’un motif valable justifiant ses déclarations tardives. La Commission n’a pas changé sa décision à la suite d’une révision demandée par le prestataire.

[4] Le prestataire a fait appel de la décision de révision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a néanmoins rejeté son appel. Le prestataire demande maintenant la permission d’en appeler à la division d’appel.

[5] Le prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès en appel. Il n’est pas parvenu à défendre que la division générale avait fait l’une des erreurs décrites dans les moyens d’appel.

Questions préliminaires

[6] Dans le formulaire de demande de permission d’en appeler, le prestataire a uniquement sélectionné le moyen d’appel qui concerne la justice naturelle et la compétenceNote de bas de page 1. Il n’a pas expliqué pourquoi il croyait que la division générale avait commis l’erreur que décrit ce moyen d’appel. Aucun autre moyen d’appel n’a été invoqué ou expliqué. Le prestataire a cependant dit qu’il se renseignait pour obtenir des avis juridiques.

[7] Pour cette raison, j’ai écrit au prestataire le 23 avril 2020. Je lui ai expliqué les moyens d’appel et demandé de préciser pourquoi il faisait appelNote de bas de page 2. Il avait jusqu’au 22 mai 2019 pour me répondre. Il s’est manifesté le 21 mai 2020 pour demander un plus long délai. Il a affirmé qu’il avait besoin de l’aide d’un représentant pour répondre. Le 27 mai 2020, je lui ai accordé du temps supplémentaire sans toutefois lui imposer d’échéance. Aucune réponse ni communication n’est ensuite venue du prestataire. Je lui ai donc écrit de nouveau le 7 juillet 2020 pour lui rappeler que le Tribunal attendait toujours, lui donnant cette fois jusqu’au 30 juillet 2020 pour répondre. Le prestataire a écrit au Tribunal le 25 juillet 2020 pour demander un autre délai additionnel. Il a dit qu’il n’avait toujours pas trouvé de représentant. J’ai convenu de proroger le délai jusqu’au 21 août 2020. Je lui ai également fait savoir que je rendrais une décision après cette date, même si je ne recevais aucune observation de sa part.

[8] Le 21 août 2020, le prestataire a encore demandé de proroger le délai. Il a fourni des documents montrant qu’il avait trouvé un avocat pour examiner son dossier. Cependant, la correspondance ne laissait pas penser que l’avocat avait convenu de le représenter. J’ai écrit au prestataire le 27 août 2020 pour l’informer que je refusais de proroger le délai et que je rendrais une décision sans autre préavis.

[9] En même temps, j’ai fait savoir au prestataire que je tiendrais compte de toute observation qui me serait soumise avant que ma décision soit finalisée. Près de deux semaines se sont depuis écoulées sans que je reçoive d’observations de la part du prestataire ou d’un représentant. J’ai donc rendu ma décision en fonction de la demande de permission d’en appeler du prestataire, reçue par le Tribunal le 18 avril 2020.

Quels motifs puis-je considérer pour l’appel?

[10] Pour que l’appel continue, je dois conclure qu’au moins l’un des « moyens d’appel » décrits dans la loi donne à l’appel une chance raisonnable de succès. Une chance raisonnable de succès équivaut à une cause défendable. Une cause est défendable quand le prestataire dispose d’un argument grâce auquel il pourrait avoir gain de cause en appelNote de bas de page 3.

[11] Les motifs d’appel du prestataire doivent se rattacher aux « moyens d’appel », car ceux-ci décrivent les seules erreurs que je suis autorisé à prendre en compte. Mon rôle me permet seulement de considérer les erreurs suivantes de la division généraleNote de bas de page 4 :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une certaine façon.
  2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question sans pouvoir de le faire.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a commis une erreur de droit dans sa décision.

Questions en litige

[12] Est-il défendable que la division générale a manqué à un principe de justice naturelle ou commis une erreur de compétence?

Analyse

Justice naturelle  

[13] Il n’est pas défendable que la division générale a commis une erreur en manquant à un principe de justice naturelle.

[14] La justice naturelle se rapporte à l’équité procédurale, et comprend des protections telles que le droit d’une personne d’être entendue et de connaître les preuves à réfuter, tout comme le droit à un décideur impartial.

[15] Le prestataire n’a pas dit que la division générale ne l’avait pas bien avisé de la tenue de l’audience ni que la divulgation ou l’échange de documents avant l’audience avait posé problème. Il ne s’est pas plaint de la manière dont la division générale avait tenu l’audience ni soutenu qu’il n’avait pas compris le processus. Il n’a soulevé aucun problème particulier par rapport à d’autres actions ou procédures qui auraient nui à son droit d’être entendu ou de réfuter la preuve pesant contre lui.

[16] Enfin, le prestataire n’a pas laissé entendre que la membre de la division générale aurait fait ou dit quoi que ce soit qui l’aurait amené à croire qu’elle était partiale ou aurait préjugé de l’affaire.

Compétence

[17] Il n’est pas défendable que la division générale a commis une erreur de droit parce qu’elle aurait refusé d’exercer sa compétence ou excédé sa compétence.

[18] La division générale devait trancher une seule question découlant de la décision de révision du 10 octobre 2019. Cette question était de savoir s’il fallait autoriser le prestataire à antidater ses déclarations au 5 mai 2019. La division générale a tranché cette question. De plus, elle ne s’est prononcée sur aucune autre question qu’elle n’était pas censée considérer.

Erreur de fait ou de droit importante

[19] Le seul moyen d’appel choisi par le prestataire concerne son affirmation selon laquelle il y a eu erreur de justice naturelle ou de compétence. Il n’a relevé aucune erreur de fait ou de droit importante.

[20] Cependant, la Cour fédérale a sommé la division d’appel de fouiller au-delà des moyens d’appel prévus par la loi quand elle examine la demande de permission d’en appeler d’une partie non représentée, comme le prestataireNote de bas de page 5. Conformément à la directive de la Cour fédérale, j’ai examiné le dossier pour savoir si certaines conclusions auraient été tirées sans égard pour des éléments de preuve importants, ou basées sur une mauvaise compréhension de ceux-ci. J’ai également gardé l’œil ouvert pour toute erreur de droit évidente.

[21] Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait ou de droit importante.

[22] La division générale a apprécié la preuve et décidé qu’elle ne permettait pas de conclure que le prestataire disposait d’un motif valable justifiant son retard. Elle a tenu compte des déclarations du prestataire, qui a dit qu’il ignorait qu’il lui fallait remplir les déclarations. Elle a considéré que le prestataire ne s’attendait pas à recevoir de prestations pendant un ou deux mois après la réactivation de sa demande, compte tenu de ce que ses amis et son superviseur lui avaient dit. La division générale a aussi considéré que sa fille l’avait aidé à présenter sa demande de septembre 2018. Elle a reconnu qu’il avait égaré certaines lettres de la Commission du fait qu’il faisait des rénovations chez lui. Elle a aussi compris qu’il avait immédiatement appelé la Commission quand il avait mis la main sur la lettre de décision du 10 octobre 2018.

[23] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit. Elle a noté que, selon la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE), une demande peut seulement être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retardNote de bas de page 6. La division générale a également fait référence à des décisions de la Cour d’appel fédérale, selon lesquelles un prestataire doit agir comme le ferait une personne raisonnable et prudente dans une situation semblable. Il lui faut également prendre des dispositions raisonnables et rapides pour comprendre son admissibilité aux prestations et ses obligations selon la Loi sur l’AE, à moins de circonstances exceptionnellesNote de bas de page 7. La division générale a aussi suivi d’autres décisions de la Cour d’appel fédérale voulant que l’ignorance de la loi ne représente pas un motif valable pour justifier un retard, et qu’un prestataire qui se fie à des renseignements non vérifiésNote de bas de page 8 ne dispose pas non plus d’un motif valableNote de bas de page 9.

[24] La division générale a tiré des conclusions de fait conformes à la loi et à la preuve. Elle a conclu qu’il n’avait pas été raisonnable que le prestataire se fie à des renseignements non vérifiés provenant de ses amis et de son superviseur, et qu’il n’avait pas agi prudemment en attendant deux mois avant de se renseigner sur son admissibilité et ses prestations. La division générale a jugé que les rénovations chez le prestataire et les lettres égarées ne correspondaient pas à des circonstances exceptionnelles qui l’auraient empêché de comprendre ses droits en vertu de la Loi sur l’AE.

[25] Même s’il est possible que le prestataire ne soit pas d’accord avec la façon dont la division générale a apprécié la preuve ou avec les conclusions qu’elle a tirées, mon rôle se limite à considérer les erreurs éventuelles qu’elle commet et qui sont décrites par les moyens d’appel. Je ne peux pas évaluer ou apprécier la preuve à nouveauNote de bas de page 10.

[26] Le prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès dans cet appel.

Conclusion

[27] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

 

Représentant :

A. O., non représentée

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