Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2020 TSS 1212

Numéro de dossier du Tribunal: GE-20-2281

ENTRE :

S. C.

Appelant (prestataire)

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée (Commission)


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Raelene R. Thomas
DATE DE L’AUDIENCE : Le 10 décembre 2020
DATE DE LA DÉCISION : Le 16 décembre 2020

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie.

[2] Les honoraires d’exécuteur testamentaire que le prestataire a reçus constituent une rémunération qui doit être répartie à l’encontre de (déduite de) ses prestations d’assurance-emploi.

[3] Toutefois, la Commission a mal réparti la rémunération. Celle-ci doit être répartie à raison de 28 $ par semaine du 11 janvier 2015 au 4 avril 2015.

Aperçu

[4] Le beau-père du prestataire est décédé le 14 janvier 2015. Le prestataire a été nommé exécuteur testamentaire. Il a reçu des honoraires d’exécuteur testamentaire de 2 719,80 $ le 18 novembre 2016. Ces honoraires correspondent à un pourcentage de la valeur de la succession. Le prestataire a reçu des prestations d’assurance-emploi de la semaine débutant le 15 janvier 2015 à la fin de la semaine débutant le 29 mars 2015. La Commission a décidé que les honoraires d’exécuteur testamentaire constituaient une rémunération. Elle a réparti cette rémunération à l’encontre des prestations d’assurance-emploi du prestataire selon un taux horaire. Pour calculer ce taux, la Commission a divisé le total des honoraires que le prestataire a reçus par le nombre d’heures qu’il dit avoir consacrées à remplir ses fonctions. Le prestataire conteste le fait que ses honoraires d’exécuteur testamentaire proviennent d’un emploi, car il n’a pas reçu de salaire horaire, mais des honoraires pour services rendus. Le prestataire ajoute que la somme qu’il a reçue était si petite qu’elle ne devrait pas être déduite de ses prestations d’assurance-emploi.

Questions en litige

[5] Je dois décider si les honoraires d’exécuteur testamentaire de 2 719,80 $ que le prestataire a reçus constituent une rémunération au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Si je décide qu’ils constituent une rémunération, je dois alors décider si la Commission les a bien répartis.

Analyse

[6] Selon la loi, la rémunération est le revenu intégral de la partie prestataire provenant de tout emploiNote de bas page 1. La loi définit les termes « emploi » et « revenu ». Un « emploi » comprend tout emploi faisant l’objet d’un contrat de louage de services ou de tout autre contrat de travailNote de bas page 2. Un « revenu » comprend tout revenu en espèces ou non que la partie prestataire reçoit ou recevra d’un employeur ou d’une autre personneNote de bas page 3.

Le prestataire a-t-il reçu une rémunération?

[7] Oui, les 2 719,80 $ que le prestataire a reçus pour agir à titre d’exécuteur testamentaire constituent une rémunération. Voici les motifs de ma décision.

[8] La Cour d’appel du Canada a décidé que les honoraires d’exécuteur testamentaire constituent une rémunération provenant d’un « emploi » au sens du Règlement sur l’assurance‑emploiNote de bas page 4. Le Règlement prévoit qu’un « emploi » comprend l’occupation d’une fonction ou d’une charge au sens de l’article 2(1) du Régime de pensions du CanadaNote de bas page 5. Le Régime de pensions du Canada définit une « fonction ou charge » comme étant « [l]e poste qu’occupe un particulier, lui donnant droit à un traitement ou à une rémunération déterminée ou constatableNote de bas page 6 ». Je suis tenue d’appliquer les décisions des tribunaux. Par conséquent, je conclus que les honoraires d’exécuteur testamentaire versés au prestataire constituent une rémunération provenant d’un emploi au sens du Règlement. La somme n’est pas visée par l’exception prévue à l’article 35(7) du Règlement et il existe un lien clair entre les services que le prestataire a fournis à titre d’exécuteur testamentaire et les honoraires d’exécuteur testamentaire qu’il a reçus.

[9] Le prestataire a dit qu’il avait été nommé exécuteur testamentaire dans le testament de son beau-père. Il a engagé un avocat pour l’aider à régler la succession. L’avocat lui a suggéré d’enregistrer une entreprise pour que la succession puisse lui verser des honoraires d’exécuteur testamentaire. C’est ce qu’il a fait et le 18 novembre 2016, il a reçu un chèque de 2 719,80 $ de la part de la succession à titre de rémunération pour avoir agi comme exécuteur testamentaire. La succession a également produit un feuillet T4 dans lequel la somme a été déclarée comme revenu pour l’année d’imposition 2016. Cet élément de preuve montre que le prestataire exerçait un emploi lorsqu’il remplissait les fonctions d’exécuteur testamentaire, car il occupait une fonction qui lui donnait droit à une somme d’argent constatable. La preuve montre aussi que le prestataire a reçu un revenu, sous forme d’honoraires correspondant à un pourcentage de la valeur de la succession, pour l’exécution de ces fonctions. Par conséquent, je conclus que les honoraires d’exécuteur testamentaire constituent une rémunération au sens du Règlement.

La Commission a-t-elle bien réparti la rémunération?

[10] La loi dit que la rémunération doit être répartie sur certaines semaines en fonction de la raison pour laquelle la rémunération a été verséeNote de bas page 7.

[11] Le prestataire a reçu une rémunération pour avoir agi comme exécuteur testamentaire de la succession de son beau-père. En acceptant d’exercer ces fonctions, le prestataire était lié par un contrat de travail. Par conséquent, je conclus que la rémunération a été versée au prestataire pour des services rendus aux termes d’un contrat de travail.

[12] Le Règlement prévoit que la rémunération payable à une partie prestataire aux termes d’un contrat de travail en échange des services rendus est répartie sur la période pendant laquelle ces services ont été fournisNote de bas page 8. J’estime que la période pendant laquelle les services ont été fournis va du 14 janvier 2015 au 22 novembre 2016. Voici les raisons pour lesquelles j’en arrive à cette conclusion.

[13] Le dossier d’appel montre que la Commission a demandé au prestataire de fournir un rapport détaillé du temps qu’il a passé à régler la succession. Le prestataire a soumis deux documents indiquant diverses activités, réunions et périodes qu’il a consacrées au règlement de la succession. À l’audience, le prestataire a dit que l’information qu’il avait soumise n’était pas complète parce qu’elle était basée uniquement sur les courriels qu’il avait pour appuyer le temps déclaré. Il a dit qu’il avait passé plus de temps à parler aux bénéficiaires et à essayer de les retrouver. Le prestataire ne se souvenait pas de quand l’Agence du revenu du Canada (ARC) lui avait accordé une décharge pour la succession de son beau-père. Il a estimé que l’ARC lui avait accordé la décharge peu de temps avant que les chèques soient émis aux bénéficiaires en novembre 2016. Il a dit qu’il avait accompli quelques petites tâches après novembre 2016, comme la liquidation finale des sommes détenues en fiducie par l’avocat, mais que la majeure partie des tâches était terminée au moment où il a reçu les honoraires.

[14] Le prestataire soutient que l’approche de la Commission consistant à calculer un taux horaire pour déterminer la part des honoraires à répartir pendant la période où il recevait des prestations d’assurance‑emploi est erronée. Il dit qu’il n’a pas reçu de salaire horaire pour avoir agi comme exécuteur testamentaire. Il a reçu un pourcentage de la valeur de la succession. Les honoraires ne dépendaient pas du nombre d’heures consacrées au règlement de la succession. Il aurait alors passé du temps à régler la succession sans recevoir de prestations d’assurance‑emploi. Il ne pouvait pas dire comment les honoraires d’exécuteur testamentaire étaient calculés, mais il savait qu’ils correspondaient à un pourcentage de la valeur de la succession. Le testament ne contenait aucune disposition particulière sur la somme devant être payée à l’exécuteur testamentaire. Le prestataire a dit que l’avocat avait sans doute calculé les honoraires d’exécuteur testamentaire en se basant sur la somme minimale permise par le gouvernement. Il a également fait valoir que si ses honoraires d’exécuteur testamentaire étaient considérés comme étant une rémunération, ils devraient être répartis en totalité sur la semaine au cours de laquelle ils les avaient reçus.

[15] Je ne suis pas d’accord avec l’argument du prestataire selon lequel la totalité de ses honoraires d’exécuteur testamentaire devrait être répartie sur la semaine au cours de laquelle il les a reçus. Le Règlement permet la répartition de montants forfaitaires sur une semaine de prestations d’assurance-emploi lorsque la rémunération résulte d’une opération et qu’aucune autre méthode de répartition n’est précisée. Dans le cas présent, cependant, je juge que la rémunération a été versée pour des services rendus au cours d’une période donnée. Par conséquent, elle ne peut être considérée comme résultant d’une opération et l’argument du prestataire doit être rejeté.

[16] Je suis d’accord avec le prestataire : l’utilisation par la Commission d’un taux horaire pour déterminer le montant à répartir est incorrecte. Le prestataire a reçu des honoraires pour avoir exercé les fonctions d’exécuteur testamentaire une fois qu’il s’était en grande partie acquitté de sa tâche. Ces honoraires étaient basés sur la valeur de la succession et non sur les heures de travail effectuées chaque semaine. Selon la loi, la rémunération versée en échange de services rendus doit être répartie sur la période pendant laquelle les services ont été fournisNote de bas page 9. Pour répartir la rémunération payée en vertu d’un contrat de louage de services au cours duquel des services n’ont pas toujours été rendus, il faut avoir égard à la période pour laquelle la rémunération était payable plutôt qu’aux dates où l’employé a exécuté ses fonctionsNote de bas page 10. Par conséquent, je conclus que la bonne période sur laquelle les honoraires d’exécuteur testamentaire doivent être répartis a commencé le jour du décès du beau-père du prestataire, lorsque ce dernier a accepté la nomination d’exécuteur testamentaire, et s’est terminée à la date à laquelle les fonds de la succession ont été remis aux bénéficiaires. Ainsi, je conclus que la période pendant laquelle les services ont été fournis par le prestataire va du 14 janvier 2015 au 22 novembre 2016Note de bas page 11.

[17] La loi dit que la répartition de la rémunération se fait sur une base hebdomadaireNote de bas page 12. Par conséquent, je conclus que le montant hebdomadaire à répartir est calculé en divisant les honoraires d’exécuteur testamentaire par le nombre de jours de la période et en multipliant le résultat par 7 jours. Comme nous l’avons vu ci-dessus, la période va du 14 janvier 2015 au 22 novembre 2016. Il y a 679 jours dans cette période. Ainsi, 2 719,80 $ ÷ 679 jours x 7 jours = 28,03 $. Les sommes à répartir étant arrondies au dollar inférieur si elles comportent une fraction plus petite que 50 centsNote de bas page 13, le montant hebdomadaire de la répartition est donc de 28 $.

Conclusion

[18] L’appel est accueilli en partie. Les honoraires reçus par le prestataire pour les services rendus en tant qu’exécuteur testamentaire constituent une rémunération. Une rémunération hebdomadaire de 28 $ doit être répartie sur chacune des semaines de prestations d’assurance-emploi du prestataire du 11 janvier 2015 au 4 avril 2015.

Date de l’audience :

Le 10 décembre 2020

Mode d’audience :

Téléconférence

Comparution :

S. C., appelant

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