Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 146

Numéro de dossier du Tribunal: GE-20-2349

ENTRE :

S. A.

Prestataire

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Commission


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Audrey Mitchell
DATE DE L’AUDIENCE : Le 5 janvier 2021
DATE DE LA DÉCISION : Le 6 janvier 2021

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. La prestataire n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations. Par conséquent, on ne peut pas traiter sa demande comme si elle l’avait présentée à une date antérieure. La prestataire n’a pas accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestations.

Aperçu

[2] La prestataire a quitté son emploi après avoir subi une blessure au travail. Elle n’a obtenu aucun relevé d’emploi (RE) de l’employeur. Elle a reçu un RE environ deux ans après avoir quitté son emploi. La prestataire a demandé des prestations régulières environ deux ans et cinq mois après avoir quitté son emploi. La Commission a rejeté la demande de prestations d’assurance-emploi présentée par la prestataire et a refusé d’antidater sa demande. Pour cette raison, la Commission a également décidé que la prestataire avait accumulé un nombre insuffisant d’heures d’emploi assurable pour avoir droit aux prestations. La prestataire a fait valoir que son employeur a refusé de produire un RE jusqu’à ce qu’elle communique avec le siège social.

Questions préliminaires

[3] Les prestataires peuvent porter en appel au Tribunal de la sécurité sociale une décision de révision rendue par la CommissionNote de bas de page 1.

[4] Dans son avis de décision révisée, la Commission a mentionné une seule question en litige : le fait qu’aucune période de prestations n’a été établie au profit de la prestataire. En effet, la prestataire avait accumulé un nombre insuffisant d’heures d’emploi assurable. Dans ses observations, la Commission affirme qu’elle aurait dû inclure la question de l’antidatation dans l’avis de révision. Elle soutient avoir informé de vive voix la prestataire qu’il n’y avait aucun motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations. La Commission fait valoir que cela reflète le fait qu’elle a révisé deux questions même si une seule figure dans l’avis de révision.

[5] Après avoir examiné les notes de la Commission, je constate qu’elle a révisé deux questions. Les notes résument les motifs de sa décision de révision. La Commission mentionne à la fois le fait que la prestataire a accumulé un nombre d’heures insuffisant pour établir une période de prestations et le fait qu’elle n’a aucun motif valable de présenter sa demande de prestations plus tôt [sic]. Par conséquent, je suis convaincue que la Commission a révisé sa décision portant sur le retard de la demande de prestations de la prestataire. Je conclus donc que je peux instruire l’appel en examinant deux questions. La première est la question de savoir si la prestataire a un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations. La deuxième est de savoir si elle a accumulé suffisamment d’heures pour avoir droit aux prestations.

Questions en litige

[6] La prestataire avait-elle un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi?

[7] Si oui, la prestataire remplissait-elle les conditions requises pour recevoir des prestations le 26 mai 2018?

[8] La prestataire a-t-elle accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestations?

Analyse

Question en litige no 1 : La prestataire avait-elle un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi?

[9] Je juge que la prestataire n’avait aucun motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi.

[10] On peut considérer une demande de prestations comme ayant été présentée à une date antérieure. Pour ce faire, la personne qui présente la demande doit démontrer qu’elle remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations à la date antérieure. Elle doit aussi montrer qu’elle avait un motif valable justifiant son retard durant toute la période du retardNote de bas de page 2.

[11] Il incombe à la prestataire de démontrer l’existence d’un motif valableNote de bas de page 3. Pour ce faire, elle doit prouver qu’elle a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente ferait dans les mêmes circonstances pour vérifier ses droits et obligations au titre de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 4.

[12] La prestataire s’est blessée au travail en 2018. En conséquence, elle ne pouvait pas travailler. Toutefois, elle a demandé des prestations d’assurance-emploi seulement le 7 octobre 2020. Elle a dit à la Commission que sa demande était en retard parce que son employeur refusait de lui donner un RE.

[13] À l’audience, j’ai demandé à la prestataire pourquoi elle n’avait pas demandé de prestations après avoir quitté son emploi en 2018. Elle a expliqué que son employeur lui avait offert de faire des travaux légers. Cependant, elle était incapable de continuer à travailler. La prestataire a vu son médecin. Par la suite, son employeur lui a demandé si elle avait présenté une demande à la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (WSIB). La prestataire a déclaré que son employeur lui avait dit qu’il l’aiderait. Il lui a fait signer un formulaire pour qu’elle retire sa demande à la WSIB et lui a versé un paiement pour la période de juin à juillet 2018. Il lui a dit qu’il lui enverrait des documents pour les prochains paiements, mais elle n’a rien reçu.

[14] La prestataire a décrit ses tentatives infructueuses de communiquer avec son employeur après avoir cessé de travailler et obtenu le paiement pour la période de juin à juillet 2018. Elle a dit que son gestionnaire était parti et que personne d’autre à son travail n’était au courant de sa situation. J’ai demandé à la prestataire si elle avait expressément demandé un RE à son employeur. La prestataire a dit l’avoir fait en janvier 2019. Elle a déclaré que, par la suite, elle appelait son employeur tous les jours. Elle a déclaré s’être rendue au service des ressources humaines situé au siège social de son employeur et avoir finalement obtenu un RE. L’employeur a produit le RE le 19 mai 2020. Le document précise que le dernier jour pour lequel l’employeur a payé la prestataire était le 25 mai 2018. Je remarque que l’employeur ne rend compte d’aucun paiement pour la période de juin à juillet 2018.

[15] La prestataire a confirmé ce qu’elle avait dit à la Commission : elle n’a pas communiqué avec Service Canada pour demander de l’aide dans le but d’obtenir son RE. Elle a également déclaré ne pas savoir qu’elle pouvait demander des prestations sans un RE. J’ai demandé à la prestataire si elle avait déjà présenté une demande de prestations. Elle a dit avoir demandé des prestations de maternité en 2014. Je lui ai fait remarquer que la deuxième page (le verso) du RE indique qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un RE pour demander des prestations d’assurance-emploi. La prestataire a dit qu’elle n’a pas lu le RE qu’elle a obtenu en 2014.

[16] Le mari de la prestataire, qui a agi comme représentant et témoin, a dit que son épouse avait travaillé pour l’employeur pendant 10 ans. Il a laissé entendre que l’employeur devrait guider les membres du personnel qui ont récemment immigré et qui peuvent avoir des problèmes de communication. Le mari de la prestataire a déclaré qu’on ne lui avait fourni aucun soutien. Il a déclaré qu’ils ont peut-être fait une erreur en ne demandant pas de prestations sans le RE.

[17] Je juge que les témoignages de la prestataire et de son mari étaient clairs, directs et sincères. J’ai de la sympathie pour eux, compte tenu de la blessure dont la prestataire n’est toujours pas rétablie et de son désir de retourner au travail. Je trouve malheureux que l’employeur de la prestataire lui ait fait croire qu’elle obtiendrait un soutien financier de sa part. Je juge que cela a retardé la présentation de la demande de prestations jusqu’en janvier 2019, date à laquelle la prestataire a demandé un RE pour la première fois.

[18] Le mari de la prestataire a laissé entendre qu’ils sont de nouveaux immigrants. Toutefois, étant donné la période durant laquelle la prestataire a travaillé pour l’employeur, j’admets qu’ils sont au Canada depuis au moins 10 ans. De plus, elle a déjà demandé des prestations d’assurance-emploi. Pour ces motifs, je juge que la prestataire aurait pu en faire plus pour comprendre ses droits et ses obligations en ce qui a trait à la présentation d’une demande de prestations d’assurance-emploi. Malheureusement, elle ne l’a pas fait.

[19] L’employeur de la prestataire a produit le RE en mai 2020. Cependant, elle a attendu plus de quatre mois avant de demander des prestations. Je l’ai interrogée sur ce retard. La prestataire a dit qu’elle pensait retourner au travail en avril 2020, mais que la pandémie a commencé. Elle a dit que ses enfants étaient à la maison et qu’elle devait faire l’école à la maison.

[20] Je tiens à le dire, je ne doute pas que la période qui s’est écoulée entre le moment où elle a obtenu son RE et celui où elle a demandé des prestations d’assurance-emploi a été très occupée et stressante étant donné la pandémie. Cependant, je ne suis pas convaincue que cela constitue un motif valable justifiant un retard supplémentaire de quatre mois.

[21] Compte tenu de ce qui précède, je juge que la prestataire n’a pas démontré l’existence d’un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi.

Question en litige no 2 : La prestataire remplissait-elle les conditions requises pour recevoir des prestations le 26 mai 2018?

[22] J’ai conclu que la prestataire n’a pas démontré l’existence d’un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner si elle était admissible aux prestations le 26 mai 2018.

Question en litige no 3 : La prestataire a-t-elle accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestations?

[23] Je constate que la prestataire a accumulé trop peu d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestations.

[24] La période de référence des prestataires peut être la période de 52 semaines qui précède la période durant laquelle les prestations sont verséesNote de bas de page 5. La Commission peut prolonger la période de référence si les prestataires sont incapables de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessureNote de bas de page 6.

[25] Pour remplir les conditions requises pour recevoir des prestations, la prestataire doit avoir accumulé le nombre requis d’heures d’emploi assurable. Le nombre d’heures requis dépend du taux de chômage régionalNote de bas de page 7. Je n’ai aucun pouvoir discrétionnaire quant au nombre d’heures requisNote de bas de page 8.

[26] La prestataire n’a pas contesté le fait qu’elle vit dans la région économique de X. Pour cette raison, je conclus que, comme le taux de chômage était de 13,7 % lorsqu’elle a demandé des prestations, elle avait besoin de 420 heures d’emploi assurable pour avoir droit aux prestations.

[27] La Commission a déclaré que, comme la prestataire était incapable de travailler jusqu’au 7 octobre 2020, elle a prolongé sa période de référence du maximum de 52 semaines. En me fondant sur la demande du 7 octobre 2020, je conclus que la Commission a établi à juste titre que la période de référence de la prestataire allait du 7 octobre 2018 au 3 octobre 2020.

[28] La prestataire a confirmé qu’elle n’a pas travaillé depuis qu’elle a quitté son emploi en 2018. Elle a déclaré avoir quitté son emploi au cours de la première semaine de juin 2018. Toutefois, le RE indique que la dernière date pour laquelle son employeur l’a payée était le 25 mai 2018. Même si j’admets que la prestataire a travaillé pour la dernière fois en juin 2018, je constate qu’elle n’a pas travaillé pendant sa période de référence. Par conséquent, je conclus qu’elle n’a accumulé aucune heure d’emploi assurable durant sa période de référence. Ainsi, je juge que la prestataire a accumulé un nombre insuffisant d’heures d’emploi assurable durant sa période de référence pour établir une période de prestations et recevoir des prestations régulières.

[29] Je conclus que la prestataire a accumulé un nombre insuffisant d’heures d’emploi assurable pour avoir droit aux prestations.

Conclusion

[30] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Le 5 janvier 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

S. A., prestataire

Ahmad Javeed Munir, représentant de la prestataire

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