Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : GG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 10

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-791

ENTRE :

G. G.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


DÉCISION RENDUE PAR : Pierre Lafontaine
DATE DE LA DÉCISION : Le 22 janvier 2021

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal accueille l’appel du prestataire. L’affaire est renvoyée à la division générale pour qu’elle réexamine la contestation fondée sur la Charte.

Aperçu

[2] L’appelant (prestataire) a touché toutes ses prestations de maladie et a demandé que l’on convertisse sa demande en prestations régulières. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a refusé se demande parce qu’il ne cherchait et ne postulait pas des emplois pour des raisons de santé. Le prestataire a demandé une révision, mais la Commission a rejeté sa demande de nouveau pour les mêmes motifs. Le prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal.

[3] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas prouvé qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable. Par conséquent, le prestataire a été jugé inadmissible au bénéfice des prestations au titre de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[4] À l’appui de sa première demande de permission d’en appeler, le prestataire a fait valoir que la division générale avait refusé d’exercer sa compétence en ne tranchant pas les questions qu’il avait soulevées au regard de la Charte canadienne des droits et libertés.

[5] La division d’appel a fini par accueillir cet appel et renvoyer l’affaire à la division générale pour qu’elle tranche l’appel du prestataire fondé sur la Charte.

[6] La division générale a ensuite conclu que l’appel du prestataire ne satisfaisait pas aux exigences relatives à la présentation d’un appel fondé sur la Charte au titre de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement sur le TSS). Par conséquent, elle a rejeté l’appel du prestataire fondé sur la Charte.

[7] La division d’appel a accordé au prestataire la permission de faire appel de la décision de la division générale. Le prestataire soutient qu’il a soulevé une question constitutionnelle devant la division générale qui satisfait aux exigences de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS. Il soutient que la division générale a commis une erreur en rejetant son appel fondé sur la Charte pour ce motif.

[8] Je dois décider si la division générale a commis une erreur de fait ou de droit dans son interprétation de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS.

[9] J’accueille l’appel du prestataire. L’affaire est renvoyée à la division générale pour qu’elle réexamine la contestation fondée sur la Charte.

Question en litige

[10] La division générale a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit dans son interprétation de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS?

Question préliminaire

[11] Sur la base d’un accord entre les parties, je rends ma décision sur la foi du dossier écrit.

Analyse

Mandat de la division d’appel

[12] La Cour d’appel fédérale a jugé que la division d’appel instruit des appels conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et que son mandat en la matière émane des articles 55 à 69 de cette loiFootnote 1.

[13] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieureFootnote 2.

[14] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait rendu une décision entachée d’une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

La division générale a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit dans son interprétation de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS?

[15] Aux termes de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS, lorsque la validité, l’applicabilité ou l’effet, sur le plan constitutionnel, d’une disposition de la Loi sur l’AE est mise en cause devant le Tribunal, la partie qui soulève la question doit déposer auprès du Tribunal un avis qui contient :

  1. la disposition visée;
  2. toutes observations à l’appui de la question soulevée.

[16] Le prestataire soutient qu’il a soulevé une question constitutionnelle devant de la division générale qui satisfait aux exigences de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS. Il soutient que la division générale a commis une erreur en rejetant son appel fondé sur la Charte pour ce motif.

[17] La Commission est d’avis que la division générale n’a pas commis d’erreur de droit en appliquant le critère juridique prévu à l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS. Elle soutient que la division d’appel ne peut intervenir au sujet d’une erreur dans l’application du droit aux faits, ce que le prestataire demande au Tribunal de faire.

[18] Dans sa décision, la division générale a convenu avec la Commission que le prestataire ne s’était pas conformé à l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS. Ce faisant, la division générale a commis ce que je considère être une erreur de droit. Selon moi, le prestataire a fait le nécessaire pour invoquer un argument fondé sur la Charte.

[19] Le prestataire a fait valoir devant la division générale qu’il est victime de discrimination et qu’il a droit à une protection égale en vertu de la Charte.

[20] Le prestataire a soutenu que la Commission permet aux parties prestataires en bonne santé de passer des prestations de maladie aux prestations régulières. En revanche, les parties prestataires malades sont limitées à 15 semaines de prestations parce qu’elles sont incapables de chercher un autre emploi.

[21] Le prestataire a allégué que le régime d’assurance-emploi actuel contrevient à la Charte depuis des années en permettant seulement aux parties prestataires en bonne santé de convertir leurs prestations. Il a soutenu qu’il devrait avoir droit à 50 semaines ou plus de prestations, tout comme les parties prestataires en santé.

[22] Le prestataire a invoqué devant la division générale l’article 18 de la Loi sur l’AE et l’article 15(1) de la Charte.

[23] Je conclus que l’idée générale derrière les arguments du prestataire est que l’application de la limite de 15 semaines équivaut à un déni de son droit à des prestations égales en vertu de la Loi sur l’AE et qu’elle constitue une discrimination à son encontre fondée sur les déficiences mentales ou physiques contraire à la CharteFootnote 3.

[24] Je remarque que les décisions précédentes rendues par la division d’appel en ce qui a trait à l’interprétation de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS n’imposent pas un fardeau indûment lourd aux parties prestataires qui souhaitent contester la constitutionnalité de certains aspects de lois conférant des prestationsFootnote 4.

[25] Cette interprétation de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS est conforme à la directive de la Cour fédérale selon laquelle le Tribunal doit tenir compte de la nature générale de la clientèle qui peut faire appel d’une décision au Tribunal. Les parties prestataires sont souvent non représentées et ne connaissent pas nécessairement les termes juridiques appropriésFootnote 5.

[26] Je suis d’avis que la division générale a commis une erreur dans son interprétation de l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS.

[27] Je conclus que le prestataire a bel et bien soumis un argument fondé sur la Charte d’une certaine manière, et que bien qu’il manquait peut‑être de finesse, il ne revenait pas à la division générale d’en évaluer la qualité à ce stadeFootnote 6.

[28] Pour les motifs exposés ci-dessus, j’accueille l’appel du prestataire et je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle réexamine la contestation fondée sur la Charte.

Conclusion

[29] Pour les motifs qui précèdent, j’accueille l’appel parce que la division générale a commis une erreur en écartant l’argument du prestataire fondé sur la Charte, alors que celui-ci avait rempli les exigences prévues à l’article 20(1)(a) du Règlement sur le TSS. L’affaire est renvoyée à la division générale pour qu’elle réexamine la contestation fondée sur la Charte.

Mode d’instruction :

Sur la base d’un accord, décision rendue sur la foi du dossier écrit

Comparutions :

G. G., appelant

Tiffany Glover, représentante de l’intimée

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