Assurance-emploi (AE)

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Citation : JB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 79

Numéro de dossier du Tribunal: GE-21-74

ENTRE :

J. B.

Appelante

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Josée Langlois
DATE DE L’AUDIENCE : 3 février 2021
DATE DE LA DÉCISION : 4 février 2021

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] Je conclus que l’appelante n’a pas quitté volontairement son emploi à la X.

Aperçu

[3] L’appelante a commencé à travailler à la X le 10 juillet 2020. Elle a d’abord été embauchée comme préposée de nuit, mais elle a occupé d’autres postes et d’autres quarts de travail jusqu’au 31 août 2020, date à laquelle elle a cessé d’occuper son emploi. L’employeur a indiqué la mention « k-autre » comme motif de cessation d’emploi sur le relevé. Il précise que l’appelante a quitté volontairement son emploi parce qu’elle refuse de travailler les quarts de travail proposés et qu’elle veut recevoir de l’assurance-emploi.

[4] L’appelante soutient qu’elle n’a jamais quitté son emploi et que l’employeur, qui ne voulait pas la congédier parce que son travail ne le satisfaisait pas, a cessé de lui fournir un horaire de travail.

[5] Le 22 décembre 2020, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a avisé l’appelante qu’elle ne pouvait lui verser des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a quitté volontairement son emploi le 31 août 2020 et que ce n’était pas la seule solution raisonnable dans ce cas.

[6] Je dois déterminer si l’appelante a quitté volontairement son emploi et, dans l’affirmative, si elle était justifiée de le faire.

Questions en litige

[7] L’appelante a-t-elle quitté volontairement son emploi ?

[8] Si oui, le fait de quitter son emploi constituait-il la seule solution raisonnable pour l’appelante ?

Analyse

L’appelante a-t-elle quitté volontairement son emploi?

[9] Pour déterminer si l’appelante a quitté volontairement son emploi, je dois répondre à la question suivante : est-ce que l’appelante avait le choix de rester ou de quitter son emploi ?Note de bas page 1

[10] La Commission affirme qu’il est évident que le motif de cessation d’emploi est un départ volontaire. Elle indique qu’un départ volontaire peut être assimilé à une situation où la prestataire refuse d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi habituel. Elle fait valoir que l’appelante avait de la difficulté à travailler dans le département des soins ce qui a poussé l’employeur à l’affecter à la salle-à-manger, que l’appelante aurait omis de manifester son accord à ce transfert et qu’elle n’était pas justifiée de quitter son emploi dans ces circonstances.

[11] L’employeur a d’abord déclaré à la Commission que l’appelante avait quitté volontairement son emploi parce qu’il était prévu qu’elle travaille certaines journées, par exemple le 1er, le 5, le 6, le 7, le 10, le 11, le 14 et le 15 septembre 2020 et qu’elle ne s’est pas présentée.

[12] Des courriels, transmis à la Commission par l’appelante, démontrent que la directrice a transféré l’appelante sur un quart de soir. Le 31 août 2020, l’appelante était en formation sur ce quart de travail. Le courriel de la directrice, datée du 1er septembre 2020, indique que :

(…) Malgré le fait que tu m’as dit que tout avait bien été, les commentaires de cette soirée ne sont pas positifs. Je souhaitais faire un essai avec toi de soir afin de te permettre d’observer d’autres tâches, une routine différente et une équipe de travail diverse. Il est difficile pour moi de te donner des quarts de travail au soins. Tu restes sur la liste de rappel et comme au départ, tu avais postulé dans le département de la salle à manger, je te transfère dans ce département. Si nous avons des quarts de travail à comblés, nous communiquerons avec toi. (…)

[13] Ce courriel démontre que l’employeur a pris cette décision et qu’aucun quart de travail n’était prévu pour l’appelante. La directrice indique à l’appelante qu’elle communiquera avec elle si elle a un quart de travail à lui proposer.

[14] L’appelante a témoigné que l’employeur ne l’a jamais rappelé pour lui proposer un quart de travail. Elle a expliqué que l’horaire de travail prévu en septembre 2020 et d’abord mentionné par l’employeur à la Commission correspondait à l’horaire qu’elle devait faire avant d’être transférée sur le poste de soir au département des soins. Par la suite, comme le démontrent les courriels transmis par la directrice, aucun horaire de travail n’a été proposé à l’appelante. Un courriel démontre même que l’appelante a demandé son horaire, mais on lui a répondu qu’il n’était pas encore disponible.

[15] L’appelante a expliqué avoir demandé un relevé d’emploi dans le but de demander des prestations d’assurance-emploi en raison d’une diminution de ses heures de travail qu’elle présumait, mais qu’elle n’a pas quitté son emploi. Elle était sur la liste de rappel et elle attendait que l’employeur la rappelle.

[16] Même si la Commission fait valoir que l’appelante a quitté son emploi parce qu’elle a refusé des heures de travail ou qu’elle a omis d’indiquer à la directrice qu’elle acceptait ce transfert, il apparaît que l’appelante ne satisfaisait pas à la tâche chez l’employeur et qu’il l’a transféré à quatre reprises d’un département à un autre sur des quarts de travail différents entre le 10 juillet 2020 et le 31 août 2020. Le courriel de la directrice demande à l’appelante de l’aviser si le transfert sur appel à la cafétéria ne lui convient pas. Après la mise à l’essai sur un quart de travail de soir le 31 août 2020, la directrice a avisé l’appelante que les commentaires n’étaient pas positifs et qu’elle ne pouvait pas lui offrir ce poste lui disant qu’elle était dès lors sur la liste de rappel.

[17] Les courriels transmis à la Commission par l’appelante démontrent également qu’elle ne trouvait pas son horaire et qu’elle a écrit à la directrice pour l’obtenir. La directrice lui a répondu qu’il y avait un problème avec les horaires et qu’ils seraient disponibles le lendemain. Comme la directrice l’a mentionné dans son courriel, elle indique à l’appelante qu’elle va la rappeler si elle a un quart de travail à lui offrir.

[18] En ce sens, je suis d’accord avec la version fournie par l’appelante. Elle n’a pas quitté son emploi. Même si elle a demandé son relevé d’emploi parce qu’elle présumait une baisse d’heures de travail à venir après le courriel transmis par la directrice, elle attendait que l’employeur lui offre un prochain quart de travail, ce qui ne s’est pas produit.

[19] Comme l’appelante en a témoigné, elle a le sentiment que lorsqu’elle a demandé d’obtenir un relevé d’emploi pour ses heures travaillées, la directrice a profité de cette occasion pour lui fournir un relevé d’emploi indiquant un départ volontaire « pour se débarrasser » d’elle parce qu’elle ne convenait pas à l’emploi.

[20] D’ailleurs, ce relevé d’emploi fourni par l’employeur indique que l’appelante refuse de travailler les quarts de travail proposés. Une version de l’employeur fournie à la Commission indique également que l’appelante refuse de travailler les quarts proposés. Or, ce n’est pas ce que les courriels échangés entre l’appelante et la directrice démontrent. Comme l’appelante l’a expliqué, cet horaire prévu en septembre 2020 avait été annulé puisqu’elle avait été transférée sur l’équipe de soir et, elle attendait un nouvel horaire qui n’est jamais venu. Il est clair, dans la série de courriels fournie par l’appelante que la directrice n’a pas fourni un nouvel horaire à l’appelante, qu’elle lui a dit qu’elle allait la contacter si elle avait un quart de travail à lui offrir et qu’elle ne lui a pas offert un quart de travail après le 31 août 2020.

[21] La directrice a fourni un relevé d’emploi à l’appelante avec la mention « k » notant que l’appelante ne voulait pas travailler les heures proposées et je ne retiens pas cette version de l’employeur. Cette version n’est pas cohérente avec la série de courriels présentée par l’appelante et les faits ne démontrent pas que des heures de travail ont été proposées à l’appelante après le 31 août 2020.

[22] Même si un relevé d’emploi a été fourni à l’appelante, elle croyait toujours travailler pour l’employeur d’abord parce que son « 4% », soit sa paie de vacances, ne lui avait pas été remis et aussi parce qu’elle avait toujours en sa possession la clef du casier. L’employeur avait expliqué au moment de l’embauche que si elle ne remettait pas la clef au moment de la cessation d’emploi, un montant de 250 $ lui serait facturé.

[23] L’appelante n’avait pas reçu sa paie de vacances et la clef ne lui avait pas été réclamée ni facturée au moment où elle a présenté une demande de prestations le 4 novembre 2020. L’appelante attendait d’être rappelée par l’employeur même si elle trouvait les conditions de travail difficiles et qu’elle en avait fait part à l’employeur. Entre autres choses, il y avait un contexte de harcèlement sur le quart de nuit à son arrivée. Une personne était en congé de maladie puis celle qui alléguait le harcèlement a quitté son emploi. L’appelante explique que l’ambiance de travail était difficile et qu’elle a eu de la difficulté à s’adapter. Cependant, elle est travaillante et elle souhaitait conserver son emploi.

[24] Je dois rendre cette décision suivant la balance des probabilités. Ce qui veut dire que s’il est plus probable que l’appelante n’a pas quitté son emploi, je dois conclure en ce sens. Même si le contenu de la conversation téléphonique ou des échanges sur les boîtes vocales n’a pas été présenté en preuve et que la directrice indique qu’elle note le refus de l’appelante de travailler au secteur alimentaire, l’employeur n’était pas présent pour présenter sa version des faits lors de l’audience et expliquer les contradictions issues de ses versions fournies à la Commission et des courriels transmis à l’appelante.

[25] Bien que la Commission soutienne que l’appelante a refusé ou a omis de manifester son accord pour le transfert à la salle-à-manger, l’appelante explique plutôt qu’elle a justement été engagée au départ pour travailler sur un poste de nuit à la salle-à-manger et qu’elle était d’accord pour travailler dans ce département. Elle explique que son travail ne satisfaisait pas l’employeur et qu’il ne voulait pas la retourner dans ce département.

[26] Je conclus que l’appelante n’a pas quitté volontairement son emploi. Les faits ne démontrent pas que l’appelante a refusé un quart de travail comme le soutient l’employeur. L’appelante n’avait pas le choix de rester à l’emploi puisque la directrice ne lui a pas fourni un horaire de travail lorsqu’elle l’a demandé, elle lui a fourni un relevé d’emploi indiquant une cessation d’emploi, soit un départ volontaire, et elle n’a jamais recontacté l’appelante pour lui offrir un quart de travail comme elle l’indiquait.

[27] Puisque l’appelante n’a pas quitté volontairement son emploi le 31 août 2020, elle n’a pas à démontrer qu’elle était fondée à le quitter.

Conclusion

[28] L’appel est accueilli.

Date de l’audience :

3 février 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

J. B., appelante

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