Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SJ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 90

Numéro de dossier du Tribunal: GE-21-102

ENTRE :

S. J.

Appelant/Prestataire

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : John Noonan
DATE DE L’AUDIENCE : Le 10 février 2021
DATE DE LA DÉCISION : Le 15 février 2021

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] Le prestataire, S. J. recevait initialement une indemnité de vacances et des indemnités de départ totalisant 67 750 $, somme qui a été répartie sur sa période de prestations pour sa demande du 17 juin 2018. Un relevé d’emploi révisé soumis par l’employeur montrait une augmentation importante des indemnités de départ, ce qui a entraîné des changements aux dates de répartition. Le prestataire a fait l’objet d’une révision par la Commission. On l’a avisé que ses indemnités de départ et de vacances de 264 408 $ reçues de son employeur étaient considérées comme étant une rémunération aux fins de l’assurance-emploi (AE) et que la somme serait répartie sur sa période de prestations du 17 juin 2018 au 16 novembre 2019, et que sa période serait prolongée jusqu’au 30 juin 2020. Cela a entraîné un versement excédentaire important. Lorsque sa période de prestations a été modifiée pour ce qui semble être la Prestation canadienne d’urgence (PCU) en mars 2020, le statut du versement excédentaire a été retiré et il a touché la pleine somme de prestations d’AE possible dans son cas, pour un total de 7 111 $, entraînant un versement excédentaire de la même somme. Le prestataire affirme qu’il a suivi toutes les directives de la Commission. Il a notamment remboursé le versement excédentaire de prestations calculé, mais il doit de nouveau rembourser un autre versement excédentaire. Pourquoi lui a-t-on versé des prestations s’il n’y était pas admissible? La Commission affirme que lorsque les indemnités de départ d’une personne sont modifiées, la répartition des sommes reçues doit être ajustée. Souvent, il en résulte, comme dans le présent cas, un versement excédentaire de prestations. Le Tribunal doit décider si les indemnités de départ et de vacances modifiées du prestataire sont considérées comme une rémunération au titre des articles 35(2) et 35(7) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE). Dans l’affirmative, le Tribunal doit établir si cette comme doit être répartie au titre de l’article 36(12) du Règlement sur l’AE.

[3] Selon la loi, toute rémunération doit être répartie sur certaines semaines. Ces semaines sont sélectionnées selon la raison pour laquelle une personne touche cette rémunérationNote de bas de page 1

[4] La Commission a réparti la rémunération à partir de la semaine du 17 juin 2018, à raison de 3 586 $ par semaine. Selon la Commission, il s’agit de la semaine au cours de laquelle le prestataire a perdu son emploi. La Commission affirme que le prestataire a touché des prestations parce qu’il avait perdu son emploi.

[5] Le prestataire ne conteste pas le salaire hebdomadaire et les sommes des indemnités de départ et de vacances.

Questions en litige

[6] Je dois trancher les questions suivantes.

Question en litige no 1 : Les indemnités de départ et de vacances modifiées reçues par le prestataire sont-elles considérées comme une rémunération au titre du Règlement sur l’AE?

Question en litige no 2 : Dans l’affirmative, est-ce que cette rémunération devait être répartie?

Question en litige no 3 : Dans l’affirmative, est-ce que cette rémunération a été répartie adéquatement?

Analyse

Les indemnités de départ et de vacances modifiées reçues par le prestataire sont-elles considérées comme une rémunération au titre du Règlement sur l’AE?

[7] Oui. Voici mes motifs de ma décision selon laquelle ces sommes étaient une rémunération.

[8] Selon la loi, la totalité des revenus d’un prestataire découlant d’un emploi constitue une rémunérationNote de bas de page 2. La loi définit les termes « revenu » et « emploi ».

[9] Une rémunération peut être tout revenu qu’une personne a reçu ou recevra d’un employeur ou d’une autre personne. Ce n’est pas forcément de l’argent, mais souvent, ça l’estNote de bas de page 3. Selon la loi, une indemnité de départ est une rémunérationNote de bas de page 4.

[10] Un emploi est tout emploi faisant l’objet d’un contrat de louage de services ou de tout autre contrat de travailNote de bas de page 5.

[11] L’ancien employeur du prestataire lui a versé une indemnité de départ et une indemnité de vacances. La Commission a décidé que ces sommes étaient une rémunération au titre de la loi.

[12] L’article 35 définit clairement ce qui constitue une rémunération : un revenu en espèces ou non que la personne reçoit ou recevra d’un employeur ou de toute autre personne, y compris un syndic de faillite. Les indemnités de départ entrent dans cette définition puisqu’elles découlent directement d’un emploi.

[13] Le prestataire soutient qu’il a suivi toutes les directives de la Commission pendant le processus de demande et de demande d’antidatation, mais a tout de même fini par devoir rembourser un important versement excédentaire. Il a fait le choix d’accepter les indemnités, sans peut-être toutefois tenir compte de toutes les conséquences. Cela ne change pas le fait que la somme est considérée, en totalité, comme étant une rémunération. Je conclus que les indemnités révisées de départ et de vacances du prestataire sont une rémunération.

La Cour d’appel fédérale a réaffirmé le principe selon lequel les sommes versées du fait de la rupture de la relation employeur-employé constituent une rémunération au titre de l’article 35 du Règlement sur l’AE et doivent être réparties conformément au paragraphe 36(9) du Règlement sur l’AE. Canada (PG) c Boucher Dancause, 2010 CAF 270; Canada (PG) c Cantin, 2008 CAN 192.

Dans l’affirmative, est-ce que cette rémunération devait être répartie?

[14] Oui.

[15] Sous réserve des articles 36(10) et 136(11), toute rémunération payée ou payable au prestataire en raison de son licenciement ou de la cessation de son emploi est, abstraction faite de la période pour laquelle elle est présentée comme étant payée ou payable, répartie sur un nombre de semaines qui commence par la semaine du licenciement ou de la cessation d’emploi, de sorte que la rémunération totale tirée par lui de cet emploi dans chaque semaine consécutive, sauf la dernière, soit égale à sa rémunération hebdomadaire normale provenant de cet emploi.

[16] Je conclus que puisque la situation du prestataire ne correspond à aucune des exceptions prévues à l’article 35(7) du Règlement sur l’AE, les revenus du prestataire doivent être « répartis sur les semaines pour lesquelles ils sont payés ou payables » conformément à l’article 36(12) du Règlement.

Dans l’affirmative, la Commission a-t-elle réparti la rémunération correctement?

[17] Selon la loi, toute rémunération doit être répartie sur certaines semaines. Ces semaines sont sélectionnées selon la raison pourquoi une personne touche cette rémunérationNote de bas de page 6.

[18] La rémunération du prestataire est une indemnité de départ et une indemnité de vacances. L’employeur du prestataire lui a versé ces indemnités parce que l’emploi du prestataire a pris fin en raison d’une restructuration d’entreprise.

[19] Selon la loi, la rémunération qui découle de la cessation d’un emploi doit être répartie à partir de la semaine ou l’emploi a pris fin. Peu importe le moment où une personne a réellement reçu cette rémunération. La rémunération doit être répartie sur un nombre de semaines qui commence par la semaine de la cessation d’emploi, même si la personne n’a pas obtenu cette rémunération pendant cette semaineNote de bas de page 7.

[20] Je constate que l’emploi du prestataire a pris fin la semaine du 17 juin 2018. C’est ma conclusion, puisque la preuve le montre et qu’aucune des parties ne la conteste.

[21] La somme d’argent qui doit être répartie à partir de cette semaine est de 3 586 $. Il s’agit de la rémunération hebdomadaire normale du prestataire. Les parties ne contestent pas cette somme. Je reconnais que c’est un fait. Cela signifie qu’à partir de la semaine du 17 juin 2018, la somme de 3 586 $ doit être répartie sur chaque semaine. S’il y a une somme de gains restante, elle sera répartie à la dernière semaine.

[22] Après avoir examiné attentivement les calculs, je conclus que la Commission a correctement calculé la somme à répartir et le nombre de semaines.

[23] Je conclus aussi que la Commission a agi de façon judicieuse et a respecté les exigences de la loi lorsqu’elle a fait ses calculs et pris ses décisions.

[24] La seule raison pour laquelle la Commission a versé des prestations du 8 mars 2020 au 7 juin 2020, pour un total de 7 111 $, est que toutes les demandes de prestations d’AE ont automatiquement été converties à des demandes de PCU et les personnes demandeuses ont touché des prestations. Dans ce cas-ci, la conversion a entraîné un versement excédentaire, mais il n’en est pas moins vrai que le prestataire a touché des prestations auxquelles il n’avait pas droit.

[25] En ce qui concerne la demande du prestataire de faire annuler le remboursement, il s’agit d’une décision que seule la Commission peut prendre. Le Tribunal n’a pas compétence à cet égard et la décision de la Commission sur cette question ne peut pas être portée en appel devant le Tribunal. La Commission affirme ce qui suit : [traduction] « Malheureusement, bien que le prestataire ait prévu que sa demande se règle d’elle-même lors du rajustement dû à la modification de ses indemnités de départ, sa demande d’exemption de remboursement ne peut pas être acceptée, car la décision relative au remboursement a été rendue de façon appropriée. »

[26] Je n’ai pas la compétence de réduire ou de faire annuler le versement excédentaire. Le Tribunal n’a pas la compétence de trancher des questions relatives à la réduction ou l’annulation de dettes. C’est la Commission qui peut réduire ou annuler un versement excédentaire.

[27] Le prestataire demande que son versement excédentaire soit annulé. Il affirme qu’il a demandé à la Commission d’annuler son versement excédentaire, mais qu’elle a refusé, comme elle a le droit de le faire. Je suis d’accord avec la Commission et je souligne que la loi indique que sa décision concernant l’annulation ou non d’une somme due ne peut pas être portée en appel devant le Tribunal de la sécurité sociale. Cela signifie que je ne peux pas trancher des questions relatives à une demande d’annulation ou de réduction d’un versement excédentaire.

[28] La Cour d’appel fédérale du Canada a la compétence d’instruire les appels relatifs à l’annulation d’une dette. Cela signifie que si le prestataire souhaite porter en appel cette décision concernant sa demande d’annulation du versement excédentaire, il doit se tourner vers la Cour d’appel fédérale du Canada.

[29] Finalement, je ne vois aucune preuve au dossier selon laquelle la Commission aurait orienté le prestataire vers le programme de remise de dettes de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Si le remboursement immédiat du versement excédentaire au titre de l’article 44 de la Loi sur l’AE entraîne des difficultés financières au prestataire, il peut téléphoner au centre d’appel des services de recouvrement de l’ARC au 1-866-864-5823. Il est possible qu’il puisse conclure une entente de paiement adapté à ses circonstances financières individuelles.

Conclusion

[30] Après avoir tenu compte de l’ensemble des circonstances, je conclus que les indemnités de vacances et de départ révisées du prestataire étaient une rémunération au sens du Règlement sur l’AE et qu’ainsi, elle doit être répartie sur sa période de prestations. Je conclus aussi que la répartition a correctement été effectuée par la Commission. L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Le 10 février 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

S. J., appelant/prestataire

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