Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – erreur de compétence – période de disponibilité – conversion de prestations par la Commission
Lorsque le prestataire s’est blessé alors qu’il recevait des prestations régulières, la Commission a converti ses prestations régulières en prestations de maladie. Quand il a épuisé toutes ses semaines de prestations de maladie, il a recommencé à toucher des prestations régulières. Cependant, la Commission a établi par la suite qu’il était encore blessé à ce moment-là, et lui a donc demandé de rembourser ces prestations régulières. La division générale (DG) a confirmé la décision de la Commission selon laquelle il ne pouvait pas recommencer à toucher des prestations régulières de nouveau. En faisant cela, la DG a également refusé de tenir compte de l’état de santé du prestataire plus tôt au cours de sa période de prestations, au moment de la conversion initiale de ses prestations par la Commission. Le prestataire a fait appel à la division d’appel (DA).

Devant la DA, la Commission a convenu avec le prestataire que la DG avait commis une erreur de compétence en refusant de tenir compte de son état de santé au moment où la Commission avait d’abord converti ses prestations. La DG aurait dû examiner ce qui avait causé le passage des prestations régulières aux prestations de maladie en premier lieu. Il en est ainsi parce que ce changement était étroitement lié aux autres enjeux survenus plus tard dans le cadre de la demande. La DA a accueilli l’appel et a renvoyé l’affaire à la DG, afin que le prestataire ait une occasion équitable de plaider pleinement sa cause.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : DK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 135

Numéro de dossier du Tribunal: AD-21-22

ENTRE :

D. K.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


DÉCISION RENDUE PAR : Stephen Bergen
DATE DE LA DÉCISION : Le 6 avril 2021

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] J’accueille l’appel. La division générale a omis d’exercer sa compétence et je retourne donc l’affaire à la division générale aux fins de réexamen.

Aperçu

[2] Le demandeur, D. K. (prestataire), recevait des prestations d’assurance-emploi régulières lorsqu’il s’est blessé à la cheville le 4 janvier 2020. La cheville du prestataire le gênait, mais il a attendu à la mi-février 2020 pour aller consulter un médecin. C’est à ce moment qu’il a su qu’il avait une fracture à la cheville. Il s’est ensuite fait opérer à la cheville et il a eu un plâtre. En juillet 2020, le prestataire a dit à l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, ce qui s’était passé avec sa cheville.

[3] La Commission a converti les prestations régulières du prestataire en prestations de maladie à compter du 5 janvier 2020Note de bas de page 1, et elle lui a versé des prestations jusqu’à ce qu’il atteigne le nombre maximal de semaines de prestations de maladie pour sa période de prestations. La Commission a ensuite envoyé au prestataire une lettre de décision confirmant qu’il n’était pas admissible aux prestations régulières après le 23 mars 2020. À cette date, le prestataire avait épuisé ses prestations de maladie. Toutefois, la Commission n’a pas reconnu que le prestataire s’était rétabli au point de pouvoir travailler, alors elle a décidé qu’elle n’aurait pas dû lui verser des prestations régulières après le 23 mars. Elle a ensuite demandé au prestataire de rembourser les prestations régulières qu’elle lui avait versées pour la période après le 23 mars 2020.

[4] Le prestataire a demandé à la Commission de faire une révision, mais la Commission a maintenu sa décision. Le prestataire a fait appel à la division générale, qui a conclu que le prestataire n’était pas capable de travailler du 23 mars 2020 au 14 juin 2020.

[5] Le prestataire fait maintenant appel à la division d’appel. Il soutient que la division générale a commis une erreur en concluant que ses prestations de maladie étaient correctes. Il affirme qu’il était capable de travailler entre sa blessure du 4 janvier et la date de son opération. Il estime que la Commission n’aurait pas dû convertir ses prestations régulières en prestations de maladie avant la mi-février. Il aurait ainsi pu être admissible à des prestations de maladie pendant une période qui aurait commencé plus tard, et qui se serait donc terminée plus tard.

Quels moyens d’appel puis-je prendre en considération?

[6] Les « moyens d’appel » sont les motifs de l’appel. Pour accueillir l’appel, je dois juger que la division générale a commis un des types d’erreurs suivantsNote de bas de page  2 :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable.
  2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher, ou elle a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une importante erreur de fait.
  4. La division générale a commis une erreur de droit au moment de rendre sa décision.

Question en litige

[7] La division générale a-t-elle commis une erreur de compétence en refusant de tenir compte de la nature de l’admissibilité aux prestations du prestataire durant la période avant le 23 mars 2020?

Analyse

Compétence

[8] La division générale comprenait que le prestataire n’était pas d’accord avec la décision de la Commission de convertir ses prestations régulières en prestations de maladie pour les six semaines immédiatement après sa blessure à la cheville.

[9] Toutefois, la membre de la division générale a dit au prestataire qu’elle pouvait seulement évaluer s’il était capable de travailler et disponible à cette fin à partir du 23 mars 2020. Elle a expliqué que son pouvoir se limitait à examiner la période après le 23 mars 2020. La membre a explicitement dit au prestataire de se concentrer sur la période après le 23 mars 2020.

[10] La Commission reconnaît que la division générale a omis d’exercer sa compétence. La Commission reconnaît aussi qu’elle a fondé sa propre décision de rendre le prestataire inadmissible aux prestations sur une conclusion selon laquelle le prestataire était toujours incapable de travailler lorsqu’il a épuisé ses prestations de maladie. La Commission affirme que la décision portée en appel par le prestataire à la division générale était [traduction] « intrinsèquement liée » à la décision de la Commission de convertir ses prestations régulières en prestations de maladie à compter du 4 janvier 2020.

[11] Je suis d’accord avec la Commission pour dire que la division générale a commis une erreur de compétence en refusant de tenir compte de la période avant le 23 mars 2020.

[12] La décision découlant d’une révision a confirmé que le prestataire n’était pas admissible aux prestations après le 23 mars parce qu’il n’était pas capable de travailler, et qu’il n’était donc pas disponible. Implicitement, cette décision comprenait aussi l’arrêt du versement des prestations de maladie au prestataire. La date à laquelle les prestations de maladie d’une partie prestataire doivent prendre fin dépend de la date à laquelle leur versement débute, car seulement un certain nombre de semaines de prestations de maladie sont disponibles au total. Dans le présent cas, la fin des prestations de maladie du prestataire dépendant de la date à laquelle la Commission a converti ses prestations régulières en prestations de maladie. Aucune autre décision n’aborde la date à laquelle la Commission a initialement converti ses prestations régulières en prestations de maladie.

[13] En omettant de tenir compte de la période avant le 23 mars, la division générale n’a pas évalué si la Commission avait bien converti les prestations régulières du prestataire en prestations de maladie aussi tôt que le 4 janvier 2020. Le prestataire conteste la date de conversion de ses prestations. Il soutient qu’il est demeuré capable de travailler entre la date de sa blessure jusqu’à la mi-février 2020. Si la Commission avait retardé la conversion aux prestations de maladie jusqu’à la mi-février 2020, le prestataire aurait peut-être pu être admissible à plusieurs semaines de prestations de maladie après le 23 mars 2020.

[14] Je note que la division générale a aussi jugé que la Commission avait correctement établi l’admissibilité du prestataire aux prestations de maladie. J’ai déjà conclu que la division générale avait commis une erreur de compétence. Toutefois, si cette conclusion de la division générale m’avait convaincu que la division générale avait évalué si la Commission avait correctement converti les prestations du prestataire, j’aurais tout de même conclu qu’une erreur avait été commise. La conclusion de la division générale ne correspondrait pas à sa propre perception de sa compétence ou à ses instructions au prestataireNote de bas de page 3. J’aurais décidé soit que la division générale avait commis une erreur de droit en fournissant des motifs intrinsèquement incohérents, soit qu’elle avait commis une erreur de justice naturelle en interférant avec ce qui aurait pu être un témoignage pertinent concernant la période avant le 23 mars.

Autres questions en litige

[15] Le prestataire a soutenu que la Commission avait commis plusieurs erreurs dans la façon dont elle a initialement converti ses prestations régulières en prestations de maladie. Il estime que sa preuve a été mal interprétée et que la Commission a omis d’enquêter sur les circonstances de sa blessure.

[16] Toutefois, j’ai conclu que la division générale avait commis une erreur de compétence lorsqu’elle a refusé d’examiner la date à laquelle les prestations de maladie du prestataire auraient dû commencer. La division générale a interféré avec la capacité du prestataire à fournir des éléments de preuve additionnels concernant les circonstances de sa blessure.

[17] Selon moi, le prestataire n’a soulevé aucune préoccupation concernant la décision même de la division générale qui ne serait pas abordée par le refus de la division générale de prendre en considération le contexte plus large de la décision découlant d’une révision de la Commission.

Résumé des erreurs

[18] J’ai décidé que la division générale avait commis une erreur de compétence. Cela signifie que je dois maintenant décider comment corriger cette erreur.

Réparation

[19] J’ai le pouvoir de modifier la décision de la division générale ou de rendre la décision qu’elle aurait dû rendreNote de bas de page 4. Je peux également renvoyer l’affaire à la division générale afin qu’elle procède à un réexamen de sa décision.

[20] Puisque la division générale a interféré avec la capacité du prestataire à témoigner au sujet de la période avant le 23 mars 2020, la Commission a suggéré que je renvoie l’affaire à la division générale. La Commission a aussi reconnu qu’elle n’avait pas mené une enquête complète sur les circonstances de la blessure du prestataire ou sur le moment où il est devenu incapable de travailler à cause de sa blessure. La Commission juge que le prestataire n’a pas eu suffisamment d’occasions de fournir des éléments de preuve pour appuyer son argument selon lequel ses prestations régulières auraient dû être converties en prestations de maladie jusqu’à ce qu’il se fasse opérer à la cheville.

[21] Je comprends que le prestataire préférerait que je rende une décision afin que le processus d’appel puisse prendre fin. Toutefois, je suis d’accord avec la Commission pour dire que je dois renvoyer l’affaire à la division générale aux fins de réexamen. Je ne crois pas que le prestataire ait eu une véritable occasion de présenter des éléments de preuve concernant le début de son incapacité, donc je ne peux pas rendre une décision en me fondant sur la preuve qui était devant la division générale.

Conclusion

[22] J’accueille l’appel et je renvoie l’affaire à la division générale aux fins de réexamen.

[23] Dans le cadre de son réexamen, la division générale évaluera si le prestataire est devenu incapacité par sa blessure à la cheville, et l’incidence de cela sur la date à laquelle il aurait épuisé ses prestations de maladie.

 

Date de l’audience :

Le 25 mars 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

D. K., appelant

Jose Lachance, représentant de l’intimée

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