Assurance-emploi (AE)

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Citation : RH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 161

[TRADUCTION]

Numéro de dossier du Tribunal: AD-21-93

ENTRE :

R. H.

Appelante

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


DÉCISION RENDUE PAR : Pierre Lafontaine
DATE DE LA DÉCISION : Le 22 avril 2021

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal rejette l’appel de la prestataire.

Aperçu

[2] L’appelante (prestataire) a travaillé comme enseignante pendant l’année scolaire 2017-2018. Elle a demandé des prestations pendant la période du congé estivale du 2 juillet 2018 au 31 août 2018. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que la prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations parce qu’elle ne répondait à aucune des conditions qui permettent aux enseignantes et enseignants de recevoir des prestations d’assurance-emploi au cours de la période de congé.

[3] La prestataire a demandé une révision et la Commission a maintenu sa décision initiale. Elle a fait appel de la décision découlant de la révision à la division générale.

[4] La division générale a conclu que le contrat d’enseignement de la prestataire n’avait pas pris fin et qu’elle n’exerçait pas son emploi en enseignement sur une base occasionnelle ou de suppléance. La division générale a aussi conclu que la prestataire ne remplissait pas les conditions requises quant au nombre d’heures passées à travailler dans un autre emploi que celui d’enseignante. La division générale a conclu qu’aucune des exceptions prévues à l’article 33(2) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE) ne s’appliquait à la prestataire.

[5] La permission d’en appeler a été accordée à la prestataire. La division d’appel a estimé que la division générale n’avait pas pris en compte la preuve de la prestataire montrant que son contrat de travail pouvait prendre fin à tout moment avant la fin du trimestre en juin 2018.Elle a accueilli l’appel de la prestataire pour la période de congé allant de la fin de juin 2018 au début de septembre 2018.

[6] La Commission a demandé un contrôle judiciaire de la décision de la division d’appel. La Cour fédérale a jugé que la division d’appel avait commis une erreur en concluant que la division générale n’avait pas tenu compte de la preuve de la prestataire puisqu’elle l’avait expressément admise. La Cour a annulé la décision et renvoyé l’affaire à la division d’appel pour qu’elle soit réexaminée par un autre membre.

[7] J’ai demandé aux parties de déposer d’autres observations à la suite de la décision de la Cour d’appel fédérale. Les deux parties m’ont informé qu’elles n’avaient pas d’autres observations à présenter et qu’elles voulaient que la décision soit rendue sur la foi du dossier.

[8] Je dois décider si la division générale a commis une erreur de fait ou de droit dans son interprétation l’article 33(2) du Règlement sur l’AE.

[9] Je rejette l’appel de la prestataire.

Question en litige

La division générale a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit dans son interprétation l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[10] La Cour d’appel fédérale a jugé que la division d’appel instruit les appels conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et que son mandat en la matière émane des articles 55 à 69 de cette loiFootnote 1.

[11] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieureFootnote 2.

[12] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait rendu une décision entachée d’une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE?

[13] La prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait ou de droit. Elle fait valoir que son nouveau contrat n’a commencé que le 4 septembre 2018 et qu’elle n’a pas reçu d’argent pour ce contrat pendant la période estivale. La prestataire soutient qu’elle n’a pas travaillé pendant l’été à la suite d’un [traduction] « manque de travail », peu importe ce que son employeur a déclaré dans son relevé d’emploi. Elle soutient également qu’elle devrait avoir droit aux prestations d’assurance-emploi, indépendamment de sa profession.

[14] La division générale devait se prononcer sur l’inadmissibilité imposée à la prestataire en application de l’article 33(2) du Règlement sur l’AE pour la période du 2 juillet 2018 au 3 septembre 2018.

[15] Selon l’article 33(2) du Règlement sur l’AE, une personne qui exerce un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour les semaines de chômage comprises dans toute période de congé. L’expression « toute période de congé » comprend les vacances d’été.

[16] L’article 33(2) du Règlement sur l’AE contient trois exceptions à cette règle générale. Il s’agit de trois exceptions distinctes et non d’une exception assortie de trois conditions. Ces trois exceptions sont les suivantes :

  1. a) le contrat de travail de la prestataire dans l’enseignement a pris fin;
  2. b) son emploi dans l’enseignement était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance;
  3. c) elle remplit les conditions requises pour recevoir des prestations à l’égard d’un emploi dans une profession autre que l’enseignement.

[17] Les éléments de preuve non contestés présentés à la division générale montrent que la prestataire a exercé l’emploi d’enseignante pendant sa période de référence. Elle a enseigné à X et à X. Elle a accepté un contrat occasionnel à long terme à X à compter du 19 janvier 2018, ne devant pas dépasser la fin de l’année scolaire en cours. Son dernier jour de travail était le 29 juin 2018. Avant la fin de l’année scolaire, X lui a offert un poste d’enseignante à temps plein, qu’elle a accepté.

[18] La Cour d’appel fédérale a confirmé que les personnes qui enseignent occasionnellement ou en suppléance et qui concluent un contrat temporaire en enseignement régulier au cours de l’année scolaire ne répondent plus à la définition d’exercer sur une base « occasionnelle » ou « de suppléance » au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE, même si elles conservent leur statut occasionnel ou de suppléance au sein du conseil scolaireFootnote 3. L’exception consentie à l’article 33(2)(b) met l’accent sur l’exercice de l’emploi et non sur le statut de la personne qui l’exerceFootnote 4.

[19] De plus, la Cour d’appel fédérale a établi qu’un contrat d’enseignement à temps plein pour une longue période ne peut pas être considéré comme étant sur une base « occasionnel » ou « de suppléance » au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AEFootnote 5.

[20] Je comprends qu’il y avait une certaine précarité à la durée de l’emploi de la prestataire à X. Cependant, la preuve montre qu’elle a accepté un contrat à long terme pendant sa période de référence. Elle a accepté un contrat à compter du 5 février 2018 pour les cinq mois restants de l’année scolaire. Elle a terminé le contrat et son dernier jour de travail était le 29 juin 2018.

[21] La preuve démontre clairement que son emploi d’enseignante était régulier et exercé de façon continue et prédéterminée et non sur une base occasionnelle ou de suppléance au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

[22] Pour les motifs susmentionnés, j’estime que la division générale n’a pas commis d’erreur de fait ou de droit en ce qui concerne l’interprétation et la portée de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 33(2)(a) du Règlement sur l’AE?

[23] En ce qui a trait à l’article 33(2)(a) du Règlement sur l’AE, la Cour d’appel fédérale a établi le critère juridique applicable : y a-t-il eu une rupture claire dans la continuité de l’emploi de la prestataire, faisant en sorte qu’elle soit devenue chômeuse?

[24] La prestataire se fonde surtout sur le fait qu’elle n’a reçu aucune somme d’argent pendant la période de congé et qu’elle n’a pas travaillé pendant l’été à la suite d’un [traduction] « manque de travail ». Elle devrait donc recevoir des prestations, indépendamment de sa profession.

[25] La Cour d’appel fédérale a à maintes reprises déclaré que même si une personne qui exerce un emploi dans l’enseignement n’est pas payée pendant la période de congé, cela n’est pas suffisant en soi pour conclure que le contrat a pris finFootnote 6.

[26] Il apparaît à l’examen de la décision de la division générale que cette dernière a correctement cherché à savoir s’il y avait eu une véritable rupture dans la continuité de l’emploi de la prestataire de sorte qu’elle soit devenue chômeuse.

[27] La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe selon lequel l’exception prévue par l’article 33(2)(a) du Règlement sur l’AE vise à aider le personnel enseignant dont la relation avec l’employeur est véritablement rompue à la fin de la période d’enseignement. Les personnes qui ont vu leur contrat d’enseignement renouvelé pour la nouvelle année scolaire avant ou peu de temps après l’expiration de leur contrat ne sont pas en chômage et il y a continuité de l’emploi même en présence d’un intervalle entre les contratsFootnote 7.

[28] La preuve qui a été présentée à la division générale ne démontre pas une rupture claire dans la continuité de l’emploi d’enseignante de la prestataire.

[29] La prestataire a travaillé comme enseignante au cours de l’année scolaire 2017‑2018 et a accepté un contrat à long terme du 5 février 2018 au 29 juin 2018. Le 20 juin 2018, X a offert à la prestataire un poste d’enseignante permanent à temps plein à compter du 4 septembre 2018, qu’elle a accepté. La prestataire a confirmé son retour pour la nouvelle année scolaire dans sa demande de prestations présentée en juillet 2018.

[30] Par conséquent, la preuve n’appuie pas les prétentions de la prestataire selon lesquelles il y a eu une rupture claire dans la continuité de son emploi d’enseignante au sens de l’article 33(2)(a) du Règlement sur l’AE.

[31] Pour les motifs susmentionnés, j’estime que la division générale n’a pas commis d’erreur de fait ou de droit en ce qui concerne l’interprétation et la portée de l’article 33(2)(a) du Règlement sur l’AE.

Question en litige no 3 : La division générale a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit dans son interprétation de l’article 33(2)(c) du Règlement sur l’AE?

[32] La prestataire a confirmé lors de l’audience de la division générale qu’elle n’avait accumulé aucune heure d’emploi assurable dans une profession autre que l’enseignement lui permettant de remplir les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[33] Par conséquent, la division générale n’a pas commis d’erreur de fait ou de droit en ce qui concerne l’interprétation et la portée de l’article 33(2)(c) du Règlement sur l’AE.

Conclusion

[34] L’appel est rejeté.

Mode d’instruction :

Sur la foi du dossier

Comparutions :

R. H., appelante
Suzanne Prud’homme, représentante de l’intimée

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