Assurance-emploi (AE)

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Citation : TB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 149

[TRADUCTION]

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (334905) rendue le 4 juin 2019
par la Commission de l’assurance-emploi du Canada
(délivrée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 30 mars 2021
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 6 avril 2021
Numéro de dossier : GE-21-381

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Décision

[1] T. B. est le prestataire. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a rendu des décisions relativement à ses prestations d’assurance-emploi. Il porte ces décisions en appel devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] J’accueille son appel. Je conclus que le prestataire a seulement travaillé et reçu une rémunération durant la semaine du 24 mai 2015. Il n’a pas travaillé ni reçu une rémunération durant la semaine du 31 mai 2015.

Aperçu

[3] Le prestataire a reçu des prestations d’assurance-emploi en mai 2015. Quelques jours à peine après avoir commencé un nouvel emploi, le prestataire est tombé malade. Quand il a rempli ses déclarations, il a inscrit une rémunération provenant de cet emploi pour une seule semaine. Des années plus tard, la Commission a réexaminé son dossier de prestations. La Commission a alors décidé que le prestataire avait reçu une rémunération pendant deux semaines plutôt qu’une. La Commission a donc rajusté sa rémunération et demandé au prestataire de rembourser des prestations.  

[4] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission. Il affirme qu’il a travaillé et reçu une rémunération durant une seule semaine. Il affirme ne pas avoir travaillé la semaine suivante.

[5] Selon la Commission, le relevé d’emploi du prestataire est correct. La Commission dit que le prestataire a travaillé et touché une rémunération durant deux semaines. La Commission affirme que le prestataire doit rembourser des prestations.

Questions en litige

[6] Le prestataire n’est pas d’accord avec les décisions de la Commission sur ses prestations. Il croit que la Commission ne devrait pas pouvoir retourner autant d’années en arrière pour réévaluer des prestations déjà versées. Il croit aussi que la Commission a fait une erreur par rapport aux semaines où il a travaillé et reçu une rémunération. Pour juger cet appel, je vais examiner les deux questions suivantes :

  • La Commission peut-elle revenir en arrière pour réévaluer les prestations que le prestataire a reçues en 2015?
  • Le prestataire a-t-il travaillé et reçu une rémunération durant deux semaines, soit celle du 24 mai 2015 et celle du 31 mai 2015?

Analyse

Question no 1 : La Commission peut-elle revoir les prestations versées au prestataire en 2015?

[7] Le prestataire affirme que la Commission ne devrait pas avoir le droit de retourner jusqu’en 2015 pour réexaminer ses décisions. La Commission n’est pas d’accord. Elle affirme qu’elle peut retourner jusqu’en 2015 puisque le prestataire avait donné de fausses informations sur sa rémunération.  

[8] La Commission a le pouvoir de revoir ses décisions en matière de prestations. Pour ce faire, elle doit quand même respecter les limites que lui impose la loi. Normalement, la Commission peut réexaminer une décision dans un délai maximum de trois ansNote de bas de page 1. Si une personne a reçu des prestations auxquelles elle n’avait pas droit, la Commission peut lui demander de rembourser ces prestationsNote de bas de page 2.

[9] Parfois, la Commission peut même reculer plus loin que trois ans. En effet, si elle croit que la personne a fait une déclaration inexacte, elle peut réexaminer une décision remontant jusqu’à six ans plus tôtNote de bas de page 3. La Commission n’a pas besoin de prouver que la personne a menti volontairement; il lui suffit d’avoir un motif raisonnable de croire qu’une affirmation par rapport aux prestations était inexacte. Il peut donc s’agir d’une erreur de bonne foi.

[10] Le prestataire a soumis des déclarations pour les semaines du 24 et du 31 mai 2015. Dans la première, le prestataire a déclaré avoir reçu une rémunération de 900 $. Dans la déclaration pour la semaine du 31 mai, il a noté qu’il n’avait pas du tout travaillé parce qu’il avait été malade.

[11] Dans le relevé d’emploi du prestataire, l’employeur a déclaré une rémunération totale de 817 $, soit 714 $ gagnés durant la semaine du 24 mai 2015 et 104 $ gagnés durant la semaine du 31 mai 2015.

[12] Les renseignements inscrits par l’employeur dans le relevé d’emploi ne sont pas identiques à ceux qui figurent dans les déclarations du prestataire. Selon l’employeur, la rémunération du prestataire était inférieure à 900 $ et avait été gagnée sur une période de deux semaines.

[13] Le relevé d’emploi est habituellement un document fiable. À mon avis, il était donc raisonnable que la Commission pense que le prestataire lui avait donné des renseignements fautifs sur son travail et sa rémunération. C’est ainsi que la Commission a pu retourner plus de trois ans en arrière pour réexaminer les prestations du prestataire. Je ne crois pas que la Commission ait excédé sa compétence en utilisant le délai prolongé pour revoir les prestations versées en 2015 au prestataire.

Question no 2 : Le prestataire a-t-il travaillé et reçu une rémunération durant deux semaines, soit celle du 24 mai 2015 et celle du 31 mai 2015?

[14] Je crois le prestataire. Je juge probable qu’il a seulement travaillé et reçu une rémunération durant la semaine du 24 mai 2015.

[15] Le prestataire et la Commission s’entendent pour dire que le prestataire a travaillé peu de temps pour l’employeur. Les deux parties sont d’accord sur le fait que le prestataire a travaillé et reçu un salaire et que ce salaire a valeur de rémunération. Elles conviennent aussi que la Commission doit répartir la rémunération sur les semaines de travail du prestataire. Leur désaccord porte sur les semaines où le prestataire a effectivement travaillé.

[16] La Commission se base sur le relevé d’emploi. Elle dit que le prestataire a travaillé et reçu une rémunération sur une période de deux semaines. La Commission veut donc répartir 714 $ sur la semaine du 24 mai 2015 et 104 $ sur la semaine du 31 mai 2015.

[17] Le prestataire n’est pas d’accord avec la Commission. Il affirme qu’il a seulement travaillé et reçu une rémunération pendant la semaine du 24 mai 2015.

[18] Face à différentes versions des faits, je dois décider de l’explication la plus probable. Pour ce faire, je dois tenir compte de l’ensemble de la preuve, puis rendre une décision selon la prépondérance des probabilitésNote de bas de page 4. Je dois me poser la question suivante : est-il plus probable qu’improbable que le prestataire a travaillé et reçu une rémunération pendant une semaine seulement?

[19] Le relevé d’emploi est la seule preuve de la Commission. Le relevé d’emploi montre que le prestataire a travaillé du 28 mai au 1er juin 2015. Il précise aussi que l’employeur a versé au prestataire 713,60 $ la semaine du 28 mai 2015 et 103,80 $ la semaine du 31 mai 2015. Le prestataire a travaillé 14 heures et reçu une rémunération de 817,40 $.

[20] La Commission n’a pas parlé à l’employeur. Elle se base uniquement sur le relevé d’emploi.

[21] Le prestataire a soumis des déclarations en 2015. Pour la semaine du 24 mai, il a déclaré avoir travaillé 20 heures et touché une rémunération de 900 $. Pour la semaine du 31 mai, il a déclaré ne pas avoir travaillé du tout, parce qu’il avait été malade durant cinq jours.

[22] À l’audience, le prestataire s’est montré très certain des dates où il avait travaillé. Il a dit qu’il s’agissait d’un emploi sur un chantier. Il s’y était rendu par avion le mercredi 27 mai. Il avait participé à une journée complète d’orientation le jeudi 28 mai. Il avait participé à une partie de l’orientation le vendredi 29 mai, mais il avait été trop malade pour continuer de travailler. Son employeur l’avait donc renvoyé chez lui. Il avait repris l’avion le samedi 31 mai pour rentrer à la maison. Il n’a pas travaillé depuis à cause de son état de santé. Le prestataire a affirmé que l’employeur ne l’avait pas rémunéré pour son temps de déplacement, mais seulement pour les heures passées sur le chantier, durant l’orientation.

[23] Le prestataire a raconté à la Commission les mêmes choses par rapport aux jours où il avait travaillé. Durant l’audience, il a affirmé qu’il avait essayé d’obtenir davantage d’information de la part de l’employeur, sans succès. La personne responsable de la paie qui avait fait son relevé d’emploi ne travaillait plus à cet endroit.

[24] L’employeur a envoyé au prestataire une copie de son talon de chèque de paie. Ce document concerne uniquement la semaine du 24 mai 2015. Il y est écrit que le prestataire avait travaillé 12 heures pour un salaire de 713,60 $. La Commission en déduit donc que l’employeur avait versé 103,80 $ au prestataire pour deux heures de travail effectuées durant la semaine du 31 mai 2015.

[25] Le prestataire croit que son employeur a dû faire une erreur. À l’audience, il a dit que l’employeur s’est peut-être rendu compte qu’il lui devait encore de l’argent et qu’il lui avait donc versé le reste la semaine suivante. Il affirme toutefois qu’il n’a pas travaillé durant la semaine du 31 mai 2015, alors qu’il était déjà rentré chez lui.

[26] Je juge que le prestataire a donné une explication convaincante pour justifier les deux périodes de paie sur son relevé d’emploi, surtout vu sa certitude quant aux jours où il a travaillé. Malgré l’explication plausible du prestataire, la Commission n’a pas cherché à obtenir plus d’informations auprès de l’employeur. Il n’y a aucune feuille de temps montrant que le prestataire a effectivement travaillé durant la semaine du 31 mai 2015. La Commission n’a pas consulté l’employeur pour savoir si la somme versée au prestataire représentait autre chose qu’un salaire. La Commission se fonde uniquement sur le relevé d’emploi. Bien que les relevés d’emploi soient des documents fiables, ils ne sont pas toujours parfaits. Il arrive que les employeurs fassent des erreurs.

[27] Lorsque je compare le relevé d’emploi aux affirmations et aux déclarations du prestataire, je conclus que le prestataire est plus fiable. Je le crois. Je pense qu’il a seulement travaillé durant la semaine du 24 mai 2015. Je ne crois pas qu’il ait véritablement fait du travail ou rendu des services durant la semaine du 31 mai 2015.

[28] Lorsqu’une personne travaille et reçoit un salaire, ce salaire correspond à une rémunération. La Commission est chargée de répartir la rémunération versée sous forme de salaire sur la période pendant laquelle la personne a réellement fait le travailNote de bas de page 5. Le Commission doit donc répartir la rémunération du prestataire sur la semaine du 24 mai 2015, celle où il a réellement travaillé.

[29] Il existe différentes informations sur le montant de la rémunération du prestataire. À l’audience, le prestataire a dit qu’il avait inscrit une rémunération de 900 $ dans sa déclaration parce qu’il ignorait la somme exacte de son indemnité de vacances à venir. Il a estimé sa rémunération, car son employeur ne l’avait pas encore payé. Selon son relevé d’emploi et son T4, la rémunération tirée de cet emploi s’élevait plutôt à 817,40 $. Je juge probable que le prestataire a effectivement reçu une rémunération de 817,40 $ pour cet emploi, et non de 900 $.

[30] Je conclus que le prestataire a travaillé et gagné un salaire seulement durant la semaine du 24 mai 2015. Ainsi, la totalité de la rémunération pour son travail, soit 817,40 $, doit être répartie sur la semaine du 24 mai 2015. Je conclus que le prestataire n’a pas travaillé durant la semaine du 31 mai 2015 et qu’il n’a donc reçu aucune rémunération pour cette semaine.

Conclusion

[31] J’accueille l’appel du prestataire. Je conclus qu’il a travaillé et reçu une rémunération seulement durant la semaine du 24 mai 2015. Il n’a pas travaillé ni reçu une rémunération durant la semaine du 31 mai 2015.

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