Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 259

Numéro de dossier du Tribunal: GE-21-70

ENTRE :

A. S.

Appelant / prestataire

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée / Commission


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Raelene R. Thomas
DATE DE L’AUDIENCE : Le 2 février 2021
DATE DE LA DÉCISION : Le 9 février 2021

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] Le prestataire a démontré qu’il est disponible pour travailler. Cela signifie qu’il n’est pas exclu du bénéfice des prestations.

Aperçu

[3] Le prestataire est un travailleur étranger temporaire qui travaille dans une usine de traitement. Ses heures de travail changent chaque semaine et dépendent de la quantité de produits disponibles pour la transformation. Ses heures de travail ont diminué, alors il a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission a examiné ce que faisait le prestataire pour chercher du travail et a décidé qu’il n’était pas admissible aux prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Le prestataire n’est pas d’accord avec cette décision. Il dit qu’il cherche du travail et qu’il est disponible pour travailler.

Questions préliminaires

[4] Comme la langue maternelle du prestataire n’est pas l’anglais ou le français, il a communiqué à l’audience avec l’aide d’un interprète. La sœur du prestataire a participé à l’audience. Comme sa langue n’est pas non plus le français ou l’anglais, elle a communiqué à l’audience avec l’aide du même interprète. L’interprète a affirmé qu’il traduirait fidèlement et au mieux de sa capacité les déclarations du prestataire et de sa sœur.

Question en litige

[5] Le prestataire est-il disponible pour travailler?

Analyse

[6] Deux articles de loi exigent qu’une partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible selon ces deux articles. La loi dit qu’il doit répondre aux critères des deux articles pour obtenir des prestations.

[7] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableFootnote 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE) contient une liste d’actions et d’activités qui aident à expliquer ce que signifie « efforts raisonnables et habituelsFootnote 2 ». Je vais les examiner ci dessous.

[8] Deuxièmement, la Loi sur l’AE prévoit aussi que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableFootnote 3. La jurisprudence énonce trois éléments qu’une partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensFootnote 4. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[9] La Commission a décidé que le prestataire n’était pas admissible aux prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler selon ces deux articles de la loi.

[10] Je vais maintenant examiner ces deux articles pour décider si le prestataire est disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[11] La loi énonce les critères que je dois prendre en considération pour décider si les démarches du prestataire sont habituelles et raisonnablesFootnote 5. Je dois vérifier si ses démarches sont soutenues et si elles visent l’obtention d’un emploi convenable. Autrement dit, le prestataire doit continuer à chercher un emploi convenable.

[12] Je dois aussi évaluer les démarches que le prestataire a faites pour se trouver un emploi. Le Règlement sur l’AE présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. Voici quelques exemples de ces activitésFootnote 6 : évaluation des possibilités d’emploi; préparation d’un curriculum vitæ ou d’une lettre de présentation; inscription à des outils de recherche d’emploi ou à des banques d’emplois ou à des agences d’emploi en ligne; réseautage; communication avec les employeurs éventuels; postuler pour des emplois.

[13] La Commission affirme que les démarches du prestataire ne sont pas suffisantes pour trouver un emploi. Elle dit que le permis de travail du prestataire lui permet de travailler pour un employeur à un endroit pendant une période déterminée. Il dit que, même s’il travaille à temps partiel avec l’employeur sur son permis de travail et qu’il a dit qu’il était disponible et qu’il cherchait du travail auprès d’autres employeurs, il a contredit ces déclarations. La Commission a déclaré que les contradictions étaient les suivantes : le prestataire a dit qu’il était trop occupé pour chercher du travail, qu’il n’irait pas à l’extérieur pour chercher du travail en raison de la COVID-19, qu’il n’avait pas fait de demande d’emploi ni parlé à d’autres employeurs, et que lorsqu’il avait demandé à des amis ce qu’ils faisaient, il ne leur avait pas demandé le nom de leur employeur.

[14] La Commission a déclaré que le prestataire a limité ses recherches à la ville où il vit parce qu’il n’a pas de voiture et qu’il voyage avec sa sœur, qu’il a utilisé Internet sur son téléphone pour chercher du travail, mais qu’il n’utilise pas les moteurs de recherche d’emploi et qu’il n’est pas abonné aux alertes de recherche d’emploi. La Commission a souligné qu’à l’exception d’une demande présentée le 17 décembre 2020, les autres demandes présentées par le prestataire avec son appel ont été faites après qu’on lui ait dit, au moment de la révision, qu’il ne recevrait pas de prestations d’AE. Par conséquent, elle affirme que le véritable objectif du prestataire est de continuer à travailler avec son employeur actuel plutôt que d’essayer d’obtenir un emploi à temps plein auprès d’un autre employeur.

[15] Le prestataire n’est pas d’accord. Il dit avoir cherché du travail. Il a présenté des demandes dans des magasins de détail et dans un restaurant d’alimentation rapide. Le prestataire affirme avoir affiché son curriculum vitae en ligne. Le prestataire a joint à son appel des copies de demandes qu’il a présentées à plusieurs employeurs. Il y avait deux courriels à un restaurant et une installation d’entreposage et des demandes d’emploi à quatre magasins. Le prestataire a déclaré avoir également présenté une demande dans un restaurant d’alimentation rapide et une usine de transformation de fruits de mer en octobre 2020. Il a frappé aux portes pour trouver du travail. Il a également fait une recherche sur Google sur quatre autres entreprises de transformation du poisson pour voir si elles embauchaient en octobre et en novembre 2020. Le prestataire a également cherché du travail en utilisant le Guichet emplois et un site Web appelé « Inworks ». Le prestataire a un curriculum vitae, mais il ne l’a pas affiché sur un site d’emploi. La sœur du prestataire a dit qu’elle l’aidait à chercher du travail en demandant à ses amis qui travaillent avec elle dans le domaine des soins à domicile s’il y avait du travail disponible.

[16] Le prestataire a déclaré que son permis de travail avait été prolongé et qu’il avait un numéro d’assurance sociale valide. Le prestataire a expliqué que son permis de travail continue d’être pour le même employeur et le même emploi où il travaille actuellement. Il a dit qu’il peut obtenir un permis de travail pour un autre employeur si celui-ci peut lui remettre une étude d’impact sur le marché du travail (EIMT). C’est à l’employeur de demander une EIMT. L’EIMT doit être émise au prestataire avant qu’il puisse faire modifier son permis de travail.

[17] J’estime que le prestataire a fait des efforts raisonnables et habituels pour trouver du travail. Il a commencé à chercher du travail en octobre lorsqu’il a présenté une demande d’emploi dans un restaurant d’alimentation rapide et une usine de transformation de fruits de mer. En décembre 2020, il a postulé pour des emplois dans des magasins de détail. Il a un curriculum vitae. Il a consulté le Guichet emplois et un autre site Web pour trouver du travail, puis il a cherché sur Google pour trouver d’autres employeurs de sa région qui transforment le poisson pour voir s’ils embauchaient. La sœur du prestataire l’aide également à chercher du travail en demandant à ses amis s’ils connaissent des endroits où on embauche. Ces éléments de preuve me portent à croire que le prestataire a fait des efforts soutenus pour trouver du travail. Par conséquent, je juge que le prestataire a prouvé avoir fait des efforts raisonnables et habituels pour trouver du travail.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[18] La jurisprudence établit trois éléments que je dois examiner pour décider si le prestataire est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable. Le prestataire doit satisfaire aux trois critères suivantsFootnote 7 :

  1. Il veut travailler dès qu’un emploi convenable est disponible.
  2. Il a fait des efforts pour trouver un emploi convenable.
  3. Il n’a pas établi de conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de trouver du travail.

[18] Au moment d’examiner chacun de ces critères, je dois prendre en considération l’attitude et le comportement du prestataireFootnote 8.

Avoir le désir de travailler

[19] Le prestataire a démontré qu’il veut travailler. Le prestataire a déclaré qu’il devait travailler pour aider à nourrir et à prendre soin de sa famille. Il est prêt à accepter n’importe quel type de travail. Il a continué de travailler chez son employeur actuel. Il a aussi cherché du travail pendant qu’il travaillait. J’en conclus donc que le prestataire souhaite travailler. Par conséquent, j’estime que l’attitude et le comportement du prestataire relativement à la recherche d’emploi témoignent d’un désir de travailler. Ainsi, je conclus que le prestataire a satisfait à ce critère.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[20] Le prestataire a fait suffisamment d’efforts pour trouver un emploi convenable.

[21] Pour m’aider à tirer une conclusion par rapport à ce deuxième critère, j’ai examiné les activités de recherche d’emploi mentionnées plus haut. Ces activités servent seulement de points de repère pour rendre une décision par rapport à ce critèreFootnote 9.

[22] Parmi les efforts déployés par le prestataire pour trouver un nouvel emploi, mentionnons la recherche d’emploi en ligne en faisant une recherche d’employeurs sur Google et en consultant le Guichet emplois. Il a également postulé pour un emploi dans un restaurant d’alimentation rapide, un autre restaurant, plusieurs magasins de détail et une installation d’entreposage. J’ai expliqué ces raisons plus tôt lorsque j’ai évalué si les efforts que le prestataire avait faits pour trouver un emploi étaient raisonnables et habituels.

[23] J’estime que ces efforts sont suffisants pour satisfaire aux exigences de ce deuxième critère, car le prestataire a fait des efforts raisonnables et continus pour trouver un emploi convenable le plus rapidement possible.

Limiter indûment les chances de travailler

[24] Le prestataire n’a pas fixé de conditions personnelles pouvant limiter indûment ses chances de travailler.

[25] La Commission dit que le prestataire pourrait se voir accorder un nouveau permis de travail pour un autre employeur. Toutefois, elle dit que, dans la présente affaire, le prestataire lui-même n’a pas prouvé qu’il cherche activement un emploi à temps plein en dehors de son emploi à temps partiel chez son employeur actuel. La Commission affirme qu’il serait difficile d’obtenir un autre emploi sans une recherche active d’emploi. Elle affirme que dans le cas du prestataire, l’exigence conditionnelle d’obtenir un nouveau permis de travail est une restriction, bien qu’elle souligne que le permis de travail échappe au contrôle du prestataire.

[26] Le prestataire a déclaré que son permis de travail a été prolongé et qu’il a un numéro d’assurance sociale. Il est prêt à accepter n’importe quel type de travail et il postule pour des emplois depuis octobre 2020. Il a dit avoir accès à un moyen de transport pour se rendre au travail, qu’il ne s’est imposé aucune limite quant à la distance qu’il doit parcourir chaque jour pour se rendre au travail, qu’il n’y a aucun moment de la journée ou jour de la semaine où il est incapable de travailler, et qu’il n’a aucun problème de santé qui l’empêcherait de travailler. Le prestataire a déclaré qu’il est diplômé du secondaire, qu’il a travaillé dans une boulangerie, comme aide domestique, comme serveur et aussi dans une usine de transformation du poisson. Il est prêt à accepter un emploi à son taux salarial actuel ou à un taux inférieur, et il est également prêt à accepter un emploi qui l’obligerait à suivre une formation en cours d’emploi. Le prestataire a avisé le ministre qu’il souhaitait retourner travailler à temps.

[27] Le permis de travail du prestataire n’est pas une condition personnelle qu’il a établie, parce qu’il n’a aucun contrôle sur la question de savoir si un employeur obtiendra une EIMT afin de pouvoir, à son tour, être employé en vertu d’un nouveau permis de travail. Le prestataire a renouvelé son permis de travail afin de pouvoir continuer à travailler. Il a cherché du travail auprès de ces employeurs, comme des usines de transformation de poisson, qui pourraient être en mesure d’obtenir une EIMT.

[28] J’estime que le prestataire n’a pas établi de conditions personnelles qui pourraient indûment limiter ses chances d’aller travailler. Le témoignage du prestataire au sujet de ses efforts de recherche d’emploi appuie le fait qu’il n’a aucunement limité sa recherche d’emploi.

Alors, le prestataire est-il capable de travailler et disponible à cette fin?

[29] À la lumière de mes conclusions relativement aux trois critères, j’estime que le prestataire a démontré qu’il est capable de travailler et disponible à cette fin, mais qu’il est incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[30] Le prestataire a démontré qu’il est disponible pour travailler au sens de la loi. Pour cette raison, je conclus que le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations.

[31] Cela signifie que l’appel est accueilli.

Date de l’audience :

Le 2 février 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

A. S., appelant

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