Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 296

Numéro de dossier du Tribunal: GE-21-200

ENTRE :

A. P.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de l’assurance-emploi


DÉCISION RENDUE PAR : Teresa M. Day
DATE DE L’AUDIENCE : Le 22 février 2021
DATE DE LA DÉCISION : Le 17 mars 2021

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant a démontré qu’il était disponible pour travailler alors qu’il était en congé de maladie. Par conséquent, il n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations de maladie de l’assurance-emploi.

Aperçu

[3] L’appelant a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi alors qu’il était en congé de maladie autorisé depuis le 5 octobre 2020. Il a dit à la Commission de l’assurance‑emploi du Canada qu’il était incapable de travailler pour cause de maladie, mais qu’il poursuivrait ses études à temps plein à l’Université York même s’il était en congé de maladie. Une fois rétabli, il avait l’intention de poursuivre ses études et de reprendre son emploi chez X dans la même mesure qu’avant sa maladie.

[4] Afin de recevoir des prestations de maladie, l’appelant doit être autrement disponible pour travailler. En d’autres mots, la maladie de l’appelant doit être la seule raison pour laquelle il n’est pas disponible pour travailler. Il existe une présomption selon laquelle une personne qui suit un programme d’études à temps plein n’est pas disponible pour travaillerNote de bas de page 1 . La Commission a décidé que l’appelant n’était pas admissible aux prestations de maladie parce qu’il suivait un programme d’études universitaires à temps plein et qu’il n’avait pas prouvé qu’il aurait été disponible pour travailler à temps plein s’il n’était pas malade. L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme qu’il a déjà travaillé alors qu’il était aux études et que les exigences liées à son programme ne l’empêchent pas de continuer à le faire. Il a repris son travail chez X à la fin de son congé de maladie.

[5] Je dois décider si, n’eût été sa maladie, l’appelant a prouvé qu’il était sans cela disponible pour travailler pendant la période pour laquelle il demande des prestations de maladie.

Question en litige

[6] L’appelant était incapable de travailler pour cause de maladie du 5 octobre 2020 au 9 décembre 2020. Toutefois, était-il sans cela disponible pour travailler pendant cette période?

Analyse

[7] Il est évident qu’une personne malade ou blessée n’est pas réellement disponible pour travailler. La loi qui prévoit le versement des prestations de maladie de l’assurance-emploi tient compte de cette réalité. Toutefois, la loi exige que la personne qui demande des prestations de maladie soit disponible pour travailler si ce n’était sa maladie. Cela signifie que l’appelant doit prouverNote de bas de page 2 que sa maladie est la seule raison pour laquelle il n’était pas disponible pour travaillerNote de bas de page 3 .

[8] Pour être admissible aux prestations de maladie du 5 octobre 2020 au 9 décembre 2020, l’appelant doit prouver que, mis à part sa maladie, il était sans cela disponible pour travailler.

[9] Pour démontrer qu’il était disponible pour travailler, l’appelant doit satisfaire aux trois éléments du critère suivant :

  1. avoir le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert;
  2. exprimer ce désir par des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. ne fixer aucune condition personnelle pouvant limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 4 .

[10] Je dois décider si l’appelant aurait été capable de satisfaire aux trois éléments du critère s’il n’avait pas été en congé de maladie. Pour obtenir gain de cause, l’appelant doit démontrer que sa maladie était la seule chose qui l’empêchait de satisfaire à chaque élément.

Question en litige no 1 : L’appelant a-t-il satisfait aux deux premiers éléments du critère?

[11] L’appelant a déclaré qu’il avait commencé à travailler chez X le 4 juillet 2019 et qu’il y travaillait encore. Il a toujours occupé le même poste à temps partiel dans l’entrepôt de distribution et reçu un salaire horaire. Il a toujours travaillé 24 heures par semaine lorsqu’il était aux études, et 40 heures (ou plus) par semaine lorsqu’il était en congé scolaire. Cet arrangement a été mis en place au début de son emploi et demeure encore valide à ce jour. La seule fois où il s’est absenté du travail depuis qu’il a commencé à travailler chez X en juillet 2019 est lors de son congé de maladie du 5 octobre 2020 au 9 décembre 2020. Il a eu des problèmes de santé mentale à la suite du décès de sa mère. Cependant, il est retourné au travail tout de suite après.

[12] J’accepte le témoignage de l’appelant selon lequel il était [traduction] « légitimement » incapable de travailler alors qu’il était en congé de maladie. Cependant, n’eût été sa maladie, il aurait continué à travailler chez Agropur. Je suis convaincue qu’il a prouvé qu’il désirait retourner sur le marché du travail aussitôt qu’il était capable de le faire (puisque c’est exactement ce qu’il a fait) et qu’il aurait travaillé n’eût été son incapacité.

[13] L’appelant a aussi fait les déclarations suivantes :

  • Il avait déjà terminé la première année de son programme d’études universitaires de quatre ans en kinésiologie lorsqu’il a commencé à travailler chez Agropur le 4 juillet 2019.
  • Il a travaillé à temps plein (de 40 à 48 heures par semaine) en juillet et en août 2019.
  • Lorsque ses cours ont commencé en septembre 2019, il a commencé à travailler à temps partiel (24 heures par semaine). Il a continué à travailler à temps partiel jusqu’en avril 2020. Il a toutefois fait des heures supplémentaires et travaillé à temps plein pendant les Fêtes et la semaine de lecture.
  • Il a suivi un cours en mai et en juin 2000 [sic]. Il a donc travaillé à temps partiel pendant cette période.
  • Il a ensuite recommencé à travailler à temps plein en juillet et en août 2020.
  • Lorsque ses cours ont commencé en septembre 2020, il a repris le travail à temps partiel.
  • Il travaillait 24 heures par semaine jusqu’à ce qu’il soit en congé de maladie. Lorsque son congé a pris fin en décembre, il a une fois de plus fait des heures supplémentaires et travaillé à temps plein pendant les Fêtes.
  • Son poste est qualifié d’emploi à temps partiel [traduction] « sur papier ». Cependant, la [traduction] « convention collective » exige qu’il soit disponible pour travailler 40 heures par semaine lorsqu’il n’est pas à l’écoleNote de bas de page 5 .
  • Cela signifie qu’il doit travailler à temps plein de mai à septembre et qu’il aura un horaire à temps partiel seulement s’il a une preuve d’inscription à un cours.
  • Il y a trois quarts de travail à l’entrepôt, et l’employeur est flexible quant à son horaire.
  • Il suit des cours en ligne de 10 à 16 heures par semaine et consacre de 20 à 25 heures par semaine à ses devoirs et à ses études.
  • Il n’a jamais eu de mal à travailler 24 heures par semaine chez Agropur alors qu’il était aux études. De plus, il profite de toutes les occasions pour travailler à temps plein pendant les congés scolaires.

[14] J’estime que le poste à temps partiel de l’appelant chez X est un emploi convenable dans sa situation. La Loi sur l’assurance-emploi n’exige pas qu’il cherche un emploi à temps plein. Il travaille de manière constante chez X alors qu’il est aux études, et ce depuis juillet 2019. Il travaille à temps partiel et fait régulièrement 24 heures de travail par semaine lorsqu’il est à l’école. Plus important encore, il a la chance de convertir automatiquement son poste en un travail à temps plein pendant les congés scolaires. L’appelant a fait le choix judicieux de conserver ce travail polyvalent pour s’assurer de ne jamais se retrouver sans emploi à temps partiel ou à temps plein alors qu’il est aux études.

[15] J’estime donc que l’appelant a satisfait aux deux premiers éléments du critère.

[16] Je me pencherai maintenant sur le troisième élément.

Question en litige no 2 : Les études de l’appelant étaient-elles une condition personnelle qui, n’eût été sa maladie, limitait indûment ses chances de reprendre un emploi convenable?

[17] Une partie prestataire qui suit des cours ou un programme de formation à temps pleinNote de bas de page 6 n’est généralement pas considérée comme étant disponible pour travailler et n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi. Pour satisfaire au troisième élément du critère de la décision Faucher, citée plus haut, l’appelant doit invalider la présomption selon laquelle il n’est pas disponible alors qu’il suit des cours universitaires à temps plein.

[18] Pour ce faire, il doit démontrer que sa principale intention est d’accepter sans tarder un emploi convenable et que ses études ne sont pas un obstacle pour chercher et accepter un tel travail. Habituellement, l’appelant devrait continuer à chercher un emploi et démontrer que les exigences liées à son programme d’études n’ont pas imposé à sa disponibilité des restrictions qui limiteraient indûment ses chances de trouver un emploi.

[19] Toutefois, dans le cas de l’appelant, il occupait un emploi et a seulement cessé de travailler temporairement pour cause de maladie pendant une période définie. Il a repris son travail aussitôt son congé de maladie terminé. J’estime que son lien d’emploi continu avec X et le fait qu’il ait repris rapidement le travail prouvent qu’il avait l’intention d’accepter sans tarder un emploi convenable.

L’appelant s’est-il fixé des conditions personnelles réduisant ses possibilités de travailler?

[20] L’appelant ne s’est pas fixé de conditions personnelles pouvant limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail à compter du 5 octobre 2019.

[21] La Commission soutient que l’appelant n’a pas réfuté la présomption selon laquelle il n’était pas disponible alors qu’il était aux études à temps plein, parce qu’il a déclaré qu’il avait l’intention de poursuivre son programme d’études et de chercher un emploi à temps partiel seulement s’il n’était pas maladeNote de bas de page 7 . Je ne partage pas cet avis. La disponibilité peut exister en dehors des heures normales généralement reconnues lorsque la partie prestataire a prouvé qu’elle avait des antécédents professionnels correspondant à ces heures irrégulièresNote de bas de page 8 . De plus, la partie prestataire peut prouver qu’elle est disponible en démontrant ses antécédents de travail à temps plein ou à temps partiel en dehors des heures de classeNote de bas de page 9 .

[22] J’accepte le témoignage de l’appelant en entier, car il était détaillé, cohérent et corroboré par le relevé d’emploi et la convention collective. Son emploi chez Agropur convenait à ses heures d’études. Ses études n’ont jamais été un obstacle à son travail chez Agropur, qu’il soit à temps partiel ou à temps plein. L’appelant a démontré qu’il a travaillé tout en étant aux études pendant plus d’un anNote de bas de page 10 . Pour les motifs énoncés au paragraphe 14, j’estime que le poste à temps partiel de l’appelant chez X est un « emploi convenable » pour l’application du critère établi dans la décision Faucher, citée plus haut. J’estime donc que ni les études de l’appelant ni son emploi à temps partiel n’étaient des conditions qui limitaient indûment ses chances de retourner sur le marché du travail à compter du 5 octobre 2019. Dans le contexte de la demande de prestations de maladie de l’appelant, cela signifie que ni ses études ni son emploi à temps partiel chez Agropur n’ont limité indûment ses chances de travailler pendant la période pour laquelle il demande des prestations de maladie.

[23] Je conclus que l’appelant a satisfait au troisième élément du critère de la décision Faucher, citée plus haut, car le fait de suivre son programme de formation n’a pas limité indûment ses chances de travailler chez Agropur. Par conséquent, l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler, n’eût été sa maladie.

Conclusion

[24] L’appelant a réfuté la présomption selon laquelle il n’était pas disponible alors qu’il était aux études à temps plein.

[25] Par conséquent, il a prouvé que, n’eût été sa maladie, il était disponible pour travailler du 5 octobre 2020 au 9 décembre 2020. Cela signifie qu’il n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations de maladie pendant cette période.

[26] L’inadmissibilité imposée dans le cadre de sa demande du 5 octobre 2020 au 9 décembre 2020 doit être levée.

[27] L’appel est accueilli.

 

Date de l’audience :

Le 22 février 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparution :

A. P., appelant

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