Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 303

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. P.
Représentante : Rebecca Leclerc
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (420944) datée du
27 avril 2021 (communiqué par Service Canada)

Membre du Tribunal : Nathalie Léger
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 31 mai 2021
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’appelant
Date de la décision : Le 8 juin 2021
Numéro de dossier : GE-21-770

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler. Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance‑emploi à partir du 2 novembre 2018 au 2 mars 2019, parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, la partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que la partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[4] La Commission a également demandé au prestataire de rembourser l’argent qu’il lui doit parce qu’il n’a pas déclaré en temps opportun sa rémunération pendant sa période de prestations. Le prestataire affirme qu’on lui a dit et qu’il a cru qu’il n’avait pas à déclarer sa rémunération s’il travaillait moins de sept heures par semaine, mais que c’était faux. Cette question n’est pas en litige dans la présente affaire puisque le prestataire a accepté de rembourser tout l’argent dû.

[5] Je dois décider si le prestataire a démontré qu’il était disponible pour travailler. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[6] La Commission affirme que le prestataire n’était pas disponible parce qu’il n’offrait que sept heures de disponibilité par semaine à son employeur et qu’il n’a pas cherché de travail pendant sa période de mise à pied.

[7] Le prestataire n’est pas d’accord et affirme qu’il n’y avait aucun emploi disponible dans son domaine très spécialisé durant l’hiver et qu’il a cherché du travail en demandant à sa famille et à ses amis de le tenir au courant de toutes les possibilités d’emploi. Il ajoute qu’il n’a pas limité sa disponibilité à sept heures par semaine. Il faut noter que le prestataire ne parle et ne comprend pas très bien le français ou l’anglais1. Sa langue maternelle est le portugais. C’est pour cela qu’il était représenté à l’audience.

Question en litige

[8] Le prestataire était-il disponible pour travailler?

Analyse

[9] Deux articles de loi exigent que la partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible selon ces deux articles. Ce dernier doit donc répondre aux critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[10] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenable2. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer ce que signifie « démarches habituelles et raisonnables3 ». Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[11] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit aussi que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin4 », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenable. La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sens5. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[12] La Commission a établi que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler selon ces deux articles de loi.

[13] Je vais maintenant examiner ces deux articles pour décider si le prestataire était disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[14] La loi énonce des critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches du prestataire étaient habituelles et raisonnables6. Je dois décider si ces démarches étaient soutenues et si elles visaient à trouver un emploi convenable. Autrement dit, le prestataire doit avoir continué à chercher un emploi convenable.

[15] Je dois aussi évaluer les démarches que le prestataire a faites pour se trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte, comme7 :

  • faire du réseautage;
  • communiquer avec des employeurs éventuels;
  • présenter des demandes d’emploi.

[16] La Commission affirme que les démarches du prestataire n’étaient pas suffisantes pour trouver un emploi. Premièrement, le prestataire a dit à la Commission qu’il ne voulait pas travailler plus de sept heures par semaine8. Cette information a été confirmée par son employeur9. De plus, le prestataire n’a pas été en mesure d’expliquer le type de travail qu’il cherchait ou les démarches qu’il a faites pour se trouver un emploi. Par conséquent, la Commission a conclu qu’il n’avait pas fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[17] Le prestataire n’est pas d’accord. Tout d’abord, il affirme n’avoir jamais dit à la Commission10 qu’il ne voulait pas travailler plus de sept heures par semaine et il ne comprend pas pourquoi son employeur dit cela. Il a répété cette affirmation à l’audience et a ajouté qu’il voulait travailler pour améliorer ses conditions de vie. Il a également dit à l’audience qu’il avait cherché du travail, principalement en demandant à des amis et à des membres de sa famille de lui dire s’ils entendaient parler d’une possibilité d’emploi. Le prestataire a dit qu’il n’avait pas envoyé de curriculum vitae ou présenté de demandes d’emploi puisqu’il y avait très peu de postes disponibles dans son domaine de travail durant l’hiver. Il estime que ses démarches étaient suffisantes pour démontrer qu’il était disponible pour travailler.

[18] J’estime que le prestataire n’a pas fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi convenable. Premièrement, je dois souligner la divergence entre le premier témoignage du prestataire à la Commission et ses témoignages subséquents au sujet du nombre d’heures qu’il était disposé à travailler pendant l’hiver. Compte tenu de sa faible compréhension du français et de l’anglais, il est possible qu’il n’ait pas bien compris la question la première fois. Cependant, son employeur n’a pas été convoqué comme témoin et je n’ai aucune preuve que ce que le prestataire a dit à la Commission n’a pas été bien noté par l’agent. Étant donné que la première déclaration du prestataire et celle de l’employeur concordent, j’estime qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle reflète fidèlement ce qui a été réellement dit. Je conclus donc que le prestataire a limité ses heures de disponibilité à sept heures par semaine.

[19] Je juge aussi que les démarches que le prestataire a effectuées pour trouver du travail se résumaient à demander à sa famille et à ses amis de le tenir informé des possibilités d’emploi dont ils entendaient parler. Il n’a fait aucune des autres démarches auxquelles on pourrait s’attendre d’une personne à la recherche d’un emploi, comme communiquer avec des employeurs éventuels, présenter des demandes d’emploi ou simplement évaluer des offres d’emploi affichées sur des sites Web spécialisés.

[20] La Cour d’appel fédérale a établi dans de nombreuses décisions que c’est à la partie prestataire qu’il incombe de prouver qu’elle a fait des démarches raisonnables et habituelles pour trouver un emploi convenable. Elle a également affirmé que cette exigence est prévue par la loi et ne peut être ignorée11. Puisque j’ai conclu que le prestataire a limité sa disponibilité à sept heures par semaine et qu’il a fait très peu démarches pour trouver un autre emploi, j’estime qu’il ne satisfait pas à cette exigence.

[21] Le prestataire n’a pas démontré que les démarches qu’il a faites pour trouver un emploi étaient raisonnables et habituelles.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[22] La jurisprudence établit trois éléments à examiner quand je dois décider si le prestataire était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable. Le prestataire doit prouver les trois éléments suivants12 :

  1. qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert;
  2. qu’il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. qu’il n’a pas établi des conditions personnelles qui pourraient avoir eu pour effet de limiter indûment (c’est-à-dire trop) ses chances de retourner t.

[23] Au moment d’examiner chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite du prestataire13.

– Vouloir retourner travailler

[24] Le prestataire a montré qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert. Comme je l’ai déjà dit, il a affirmé à l’audience qu’il avait demandé à sa famille et à ses amis de l’aider à trouver un emploi convenable.

– Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[25] Le prestataire n’a pas fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable. Comme je l’ai mentionné dans la dernière section, le problème n’est pas nécessairement sa volonté de retourner travailler, mais plutôt le fait qu’il n’a pas compris qu’il devait chercher un emploi dans un autre domaine que le sien. Cela pourrait être attribuable, du moins dans une certaine mesure, à sa difficulté à bien comprendre le français et l’anglais. De plus, le fait que le prestataire ait reçu des prestations d’assurance-emploi chaque hiver depuis de nombreuses années et qu’il ait vraisemblablement agi de la même façon chaque année me porte à croire qu’il croyait vraiment comprendre ses obligations selon la loi.

[26] Pour m’aider à tirer une conclusion sur ce deuxième élément, j’ai examiné les activités de recherche d’emploi mentionnées ci-dessus. Ces activités me servent seulement de points de repère pour rendre une décision sur cet élément14.

[27] Les démarches que le prestataire a faites pour trouver un emploi consistaient notamment à parler des membres de sa famille et des amis pour savoir si quelqu’un avait du travail pour lui.

[28] Ces démarches n’étaient pas suffisantes pour satisfaire aux exigences liées à ce deuxième élément parce qu’elles étaient trop peu nombreuses et limitées à son domaine de travail. Lorsqu’une partie prestataire reçoit des prestations, elle doit chercher un emploi dans un autre domaine que le sien. Les démarches faites pour retourner travailler doivent être soutenues pendant toute la période de prestations.

– Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[29] Le prestataire a établi des conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner travailler. En disant à son employeur qu’il ne voulait travailler que sept heures par semaine, le prestataire a limité ses chances de retourner travailler.

[30] Le prestataire dit qu’il n’a pas fait cela parce qu’il n’a jamais limité son nombre d’heures de disponibilité. Comme je l’ai expliqué au paragraphe 18 de la présente décision, je préfère sa déclaration antérieure selon laquelle il a effectivement limité sa disponibilité. Par conséquent, j’estime qu’il a limité indûment ses chances de retourner travailler.

– Alors, le prestataire était-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[31] À la lumière de mes conclusions sur les trois éléments, je conclus que le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[32] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. C’est pourquoi je conclus qu’il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi.

[33] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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