Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

AE – inadmissibilité – formation à temps plein – disponibilité – avertissement – employeur habituel – COVID 19

Le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission a décidé qu’il ne pouvait pas en recevoir (il était inadmissible) parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Il suivait une formation à temps plein et n’avait fait aucune démarche pour trouver du travail. La Commission a maintenu sa décision initiale quand le prestataire lui a demandé de faire une révision.
La division générale (DG) a conclu que le prestataire voulait retourner au travail, mais qu’il n’avait pas fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi. La DG a également constaté qu’il voulait retourner travailler à temps partiel pour son employeur habituel. Il n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). La division d’appel (DA) a accordé au prestataire la permission d’appeler de la décision de la DG à la DA.
La DA a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler même s’il s’attendait à ce que son employeur habituel le rappelle bientôt. La Loi sur l’AE prévoit clairement que pour recevoir des prestations, il faut démontrer qu’on est disponible pour travailler. Pour ce faire, les prestataires doivent chercher du travail. Le fait de croire qu’une recherche d’emploi a peu de chances de réussite ou que la période de chômage sera courte importe peu. Les éléments de preuve présentés à la DG montrent que le prestataire n’a pas fait assez de démarches pour trouver du travail. Il voulait retourner travailler à temps partiel pour son employeur habituel. Le prestataire a dit à la Commission qu’il n’avait fait aucune démarche pour trouver du travail parce qu’il avait déjà un emploi. Il a ajouté qu’il n’aurait pas été disponible pour travailler à temps plein même sans la pandémie de la COVID 19. Dans sa demande de prestations, il a écrit qu’il n’avait pas cherché du travail et qu’il accepterait un emploi à temps plein seulement s’il pouvait en repousser la date de début de façon à pouvoir terminer sa formation. De plus, la Commission n’avait pas à avertir le prestataire qu’il devait élargir sa recherche d’emploi. Un avertissement pourrait être nécessaire si un prestataire démontrait que ses démarches pour trouver un bon travail étaient raisonnables. Ici, ce n’est certainement pas nécessaire puisque le prestataire ne cherchait pas vraiment du travail. Il attendait de retourner travailler pour son employeur habituel et ne cherchait pas activement un autre emploi. L’appel a été rejeté.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : JP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 319

Numéro de dossier du Tribunal: AD-21-129

ENTRE :

J. P.

Appelant

et

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Intimée


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


DÉCISION RENDUE PAR : Pierre Lafontaine
DATE DE LA DÉCISION : Le 6 juillet 2021

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelant (prestataire) a demandé des prestations d’assurance-emploi. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler parce qu’il suivait une formation à temps plein et n’avait pas fait de démarches pour trouver un emploi. Elle a décidé que le prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 28 septembre 2020. Le prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision, mais celle-ci a maintenu sa décision initiale. Le prestataire a fait appel à la division générale.

[3] La division générale a jugé que le prestataire voulait retourner au travail, mais qu’il n’avait pas fait de démarches suffisantes pour trouver un emploi. Elle a conclu que le prestataire n’avait pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[4] La division d’appel a accordé au prestataire la permission de faire appel de la décision de la division générale. Il soutient que la division générale a commis une erreur de droit dans son interprétation de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE.

[5] Je dois décider si la division générale a commis une erreur de fait ou de droit lorsqu’elle a conclu que le prestataire n’était pas disponible au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE.

[6] Je rejette l’appel du prestataire pour les motifs qui suivent.

Question en litige

[7] La division générale a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit lorsqu’elle a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[8] La Cour d’appel fédérale a établi que quand la division d’appel juge des appels en se fondant sur l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, le mandat de la division d’appel lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loiNote de bas page 1.

[9] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieureNote de bas page 2.

[10] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait commis une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je dois rejeter l’appel.

La division générale a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit lorsqu’elle a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE?

[11] Le prestataire fait valoir que la division générale a commis une erreur dans son interprétation de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’AE et dans l’application du critère de FaucherNote de bas page 3.

[12] Le prestataire soutient que la division générale aurait dû appliquer la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire MacDonald, dans laquelle une étudiante universitaire à temps plein avait également une relation d’emploi continue avec son employeur et était en mise à pied temporaire au moment de la demande. La Cour a maintenu une décision selon laquelle une partie prestataire était disponible même si elle n’était disposée à accepter que du travail de l’employeur avec lequel elle avait travaillé [traduction] « de façon intermittente » depuis un certain tempsNote de bas page 4.

[13] Le prestataire soutient qu’il estimait que son employeur allait le rappeler de manière imminente. Au moment où il a fait sa demande d’AE, il avait déjà été rappelé à la suite du premier confinement. Il fait valoir qu’il a pris la décision de conserver son emploi actuel en raison des bouleversements survenus dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, ce qui a entraîné la fermeture de nombreux restaurants et le congédiement permanent de membres du personnel.

[14] Pour prouver sa disponibilité au travail, la partie prestataire doit démontrer qu’elle est capable de travailler, qu’elle est disponible pour travailler et qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas page 5.

[15] Puisque la Loi sur l’AE ne fournit aucune définition précise, la Cour d’appel fédérale a déclaré à de nombreuses occasions que la disponibilité doit être déterminée en analysant trois facteurs :

  1. le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert;
  2. l’expression de ce désir par des efforts pour se trouver un emploi convenable;
  3. le non-établissement de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances d’un retour sur le marché du travailNote de bas page 6.

[16] De plus, la disponibilité est déterminée pour chaque jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel la partie prestataire peut prouver qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire et incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas page 7.

[17] La division générale a conclu qu’il n’y avait aucune preuve que le prestataire avait postulé pour un emploi ou approché d’autres employeurs à partir du 28 septembre 2020. Elle a conclu que le prestataire cherchait du travail d’une certaine manière, mais qu’il n’avait pas démontré qu’il cherchait du travail de manière significative.

[18] La division générale a également conclu que le prestataire souhaitait maintenir sa relation avec son employeur, sachant qu’il reprendrait son emploi à temps partiel à un moment donné.

[19] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable, parce qu’il n’avait pas fait de démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable.

[20] La jurisprudence présentée par le prestataire soutient la position selon laquelle une partie prestataire qui attend d’être rappelée par son employeur est exemptée, au moins pour une période raisonnable, de l’obligation de démontrer qu’elle recherche activement un emploi. Le prestataire serait justifié, pendant une période raisonnable, de considérer la promesse d’être rappelé pour travailler comme le moyen le plus probable d’obtenir un nouvel emploi, et d’agir en conséquence. Par conséquent, il ne serait pas approprié d’exiger automatiquement une recherche d’emploi étant donné l’imminence du rappel au travailNote de bas page 8.

[21] Il existe toutefois une jurisprudence plus récente que celle présentée par le prestataire et qui établit qu’une partie prestataire ne peut pas se contenter d’attendre d’être rappelée au travail et doit chercher un emploi pour avoir droit à des prestations.

[22] La Loi sur l’AE énonce clairement que pour être admissible à des prestations, une partie prestataire doit prouver qu’elle est disponible pour travailler, et pour ce faire, elle doit chercher du travail. La disponibilité doit être évaluée pour chaque jour ouvrable d’une période de prestations. Cette exigence ne disparaît pas si la période de chômage est de courte durée. De plus, peu importe la faible probabilité de succès qu’une partie prestataire estime avoir dans ses recherches d’emploi, la Loi sur l’AE est conçue de telle sorte que seules les personnes qui sont véritablement sans emploi et activement à la recherche d’un travail toucheront des prestations. Une partie prestataire doit prouver qu’elle est disponible pour travailler, et cette disponibilité ne doit pas être limitée indûmentNote de bas page 9.

[23] Le prestataire a initialement déclaré à la Commission qu’il n’avait fait aucune démarche pour trouver un emploi, car il en avait déjà un. Le prestataire a également déclaré que même s’il n’y avait pas eu de pandémie, il n’aurait pas été disponible pour travailler à temps plein. Dans sa demande de prestations, le prestataire a mentionné qu’il ne cherchait pas de travail et qu’il n’accepterait un emploi à temps plein que s’il pouvait reporter la date de début pour lui permettre de terminer son cours/programmeNote de bas page 10.  

[24] Dans ces circonstances, le prestataire était-il disponible au sens de l’article 18(1) de la Loi sur l’AE parce qu’il attendait que son employeur habituel le rappelle de façon imminente? Je ne crois pas.  

[25] La preuve prépondérante dont disposait la division générale montre que le prestataire n’a pas fait de démarches suffisantes pour trouver un emploi parce qu’il voulait retourner travailler à temps partiel pour son employeur habituel.

[26] La Commission avait-elle l’obligation d’avertir le prestataire qu’il devait élargir le champ de sa recherche d’emploi?

[27] Je suis d’avis qu’un avertissement pourrait être exigé lorsqu’une partie prestataire a démontré que ses démarches pour trouver un emploi convenable étaient raisonnables. Dans la présente affaire, ce n’est certainement pas nécessaire puisque le prestataire ne cherchait pas vraiment d’emploi, car il attendait de retourner travailler pour son employeur habituel et ne cherchait pas activement un autre emploiNote de bas page 11.

[28] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments du prestataire, je conclus que la division générale a appliqué correctement les facteurs de Faucher lors de son évaluation de la disponibilité du prestataire. Je n’ai pas d’autre choix que de rejeter l’appel du prestataire.

Conclusion

[29] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Le 29 juin 2021

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

J. P., appelant
Josée Lachance, représentante de l’intimée

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