Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 330

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (422524) datée du
29 avril 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 17 juin 2021
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 24 juin 2021
Numéro de dossier : GE-21-897

Sur cette page

Décision

[1] M. M. est la prestataire. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’elle n’était pas admissible aux prestations de l’assurance-emploi. Elle fait appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] J’accueille l’appel de la prestataire. J’estime qu’elle a prouvé qu’elle était disponible pour travailler pendant ses études.

Aperçu

[3] Une partie prestataire doit être disponible pour travailler pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi. Il s’agit d’une exigence permanente; la partie prestataire doit se chercher un emploi. La Commission a décidé que la prestataire n’était pas admissible à recevoir des prestations d’assurance-emploi à partir du 4 janvier 2021 parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler.

[4] Je dois décider si la prestataire a démontréNote de bas page 1 qu’elle était disponible pour travailler. La Commission affirme que la prestataire n’est pas disponible puisqu’elle étudie à temps plein. La prestataire est en désaccord. Elle affirme qu’elle est disponible pour travailler même si elle est étudiante. Elle mentionne que son horaire de cours est flexible et qu’elle a travaillé tout en étudiant dans le passé.

Question en litige

[5] Est-ce que la prestataire est disponible pour travailler tout en étant étudiante?

Analyse

[6] Deux articles différents de la loi obligent les prestataires à démontrer qu’ils sont disponibles pour travaillerNote de bas page 2. La Commission a déclaré la prestataire inadmissible à recevoir des prestations conformément aux deux articles. De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les prestataires qui étudient à temps plein sont présumés être non disponibles pour travaillerNote de bas page 3. Je commencerai par examiner si la présomption s’applique à la prestataire. Ensuite, j’examinerai les deux articles de la loi portant sur la disponibilité.

Présomption de non-disponibilité pour travailler des étudiants à temps plein

[7] La présomption s’applique seulement aux personnes qui étudient à temps plein. La Commission et la prestataire conviennent qu’elle est une étudiante à temps plein. Rien ne me démontre le contraire. Je reconnais que la prestataire est une étudiante à temps plein. Cela signifie que la présomption de non-disponibilité pour travailler s’applique à la prestataire.

[8] La prestataire peut réfuter cette présomption. Alors, la présomption ne s’appliquera pas à elle. Elle peut réfuter la présomption en démontrant qu’elle a déjà travaillé à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas page 4. Elle peut également réfuter la présomption en démontrant qu’il y a des circonstances exceptionnellesNote de bas page 5.

[9] La Commission affirme que la prestataire n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité pour travailler. La Commission mentionne que la prestataire ne cherche pas de travail. La Commission mentionne également que l’horaire de ses cours rend trop difficile la recherche de travail.

[10] La prestataire affirme que la présomption ne devrait pas s’appliquer à elle. Elle dit qu’elle a déjà travaillé tout en étudiant dans le passé. Elle mentionne qu’elle n’a pas à assister aux cours prévus à l’horaire.

[11] La prestataire a donné des renseignements contradictoires sur l’horaire de ses cours. Elle a affirmé à la Commission qu’elle accordait 34 heures par semaine pour assister aux cours et étudier. Pendant l’audience, elle a mentionné qu’elle ne savait pas de quelle façon répondre à la question et a estimé le temps qu’elle accordait à ses études. Après avoir parlé à la Commission, elle a pris en note le temps accordé à ses études. Elle a réalisé qu’elle accordait environ 10 heures par semaine à ses études. Elle a affirmé que ses cours étaient préenregistrés et qu’elle pouvait les suivre durant ses temps libres. Elle devait assister à un cours de 75 minutes chaque jeudi et à un autre de 3 heures un mardi sur deux.

[12] La prestataire a affirmé qu’elle n’avait jamais eu de conflit d’horaire entre son travail et ses cours. Certains de ses camarades de classe ont eu des conflits d’horaire entre le travail et les cours, et les professeurs leur ont permis de compenser en suivant les cours en ligne. Elle a affirmé être certaine que ses professeurs lui laisseraient faire la même chose.

[13] La prestataire a affirmé que son employeur avait également regardé l’horaire de ses cours en planifiant son horaire de travail. Elle a affirmé avoir travaillé de 30 à 35 heures par semaine comme technicienne en pose de cils. Elle travaillait du lundi au samedi entre 9 h et 18 h. Elle a mentionné qu’elle avait des rendez-vous tout au long de la journée et qu’elle effectuait des travaux scolaires entre les rencontres avec les clients.

[14] La prestataire a affirmé qu’elle avait commencé à travailler à temps partiel pour son employeur pendant ses études secondaires. Elle a commencé à travailler à temps plein au cours de l’été et a ensuite commencé des études postsecondaires en septembre 2020. Elle a mentionné avoir prévu de continuer à travailler à temps plein tout en étudiant, mais son employeur a fermé en raison de la pandémie.

[15] Je crois la prestataire. À l’audience, elle a répondu aux questions en détail et avec attention. Je crois que son explication sur les renseignements contradictoires relatifs à l’horaire de ses cours est raisonnable.

[16] Je crois que la prestataire a déjà travaillé à temps plein tout en en étudiant. Je crois aussi que l’horaire de ses cours est suffisamment flexible pour qu’elle puisse étudier dans ses temps libres. Je crois également que l’horaire de son travail est assez flexible pour lui permettre de travailler entre ses cours prévus à l’horaire.

[17] Je suis d’avis que la prestataire a démontré que sa situation est exceptionnelle. J’estime qu’elle a déjà travaillé à temps plein tout en étudiant dans le passé. J’estime également que son travail et l’horaire de ses cours sont suffisamment flexibles pour lui permettre un équilibre entre un travail à temps plein et des études. J’estime que la prestataire a invalidé la présomption de non-disponibilité pour travailler.

[18] La réfutation de la présomption signifie seulement que je n’ai pas à présumer que la prestataire est non disponible pour travailler. J’ai encore à examiner les articles de la loi qui s’appliquent à ce dossier. Je dois maintenant décider si la prestataire a démontré sa disponibilité pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[19] Le premier article de la loi dont je tiendrai compte établit que les prestataires doivent prouver qu’ils font des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploiNote de bas page 6.

[20] La Commission affirme qu’elle a utilisé cette partie de la loi pour déclarer la prestataire inadmissible. Je suis d’accord avec la Commission. La Commission a posé des questions à la prestataire à propos de sa recherche d’emploi, et je conviens que la Commission a demandé à la prestataire si elle faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[21] La loi énonce les critères que je dois prendre en considération lorsque je décide si les démarches de la prestataire sont habituelles et raisonnablesNote de bas page 7. Je dois vérifier si ses démarches sont soutenues et orientées vers la recherche d’un emploi convenable. Je dois également tenir compte des démarches de demande d’emploi de la prestataire au moyen de différentes activités. Par exemple, voici différentes activités décrites dans la loi : évaluer les possibilités d’emploi, rédiger un curriculum vitæ et une lettre de présentation, et s’inscrire à des outils de recherche d’emploi ou à des banques d’emplois électroniques.

[22] La Commission affirme que la prestataire n’en a pas fait assez pour trouver un emploi. La prestataire est en désaccord. Elle mentionne que ses démarches étaient raisonnables et orientées pour trouver un emploi convenable.

[23] Je suis du même avis que la prestataire. J’estime que ses démarches étaient raisonnables et habituelles compte tenu des circonstances.

[24] La prestataire a mentionné à la Commission qu’elle n’avait pas postulé à d’autres emplois. À l’audience, elle a affirmé qu’elle cherchait d’autres emplois en ligne, mais qu’il n’y avait pas d’offres dans son domaine habituel. Tout a été fermé en raison de la pandémie. Elle possède une licence dans son domaine et elle se considère comme étant une travailleuse douée. Elle a mentionné que son emploi régulier était ce qui lui convenait le plus. Elle s’attendait à être rappelée pour son poste habituel à la réouverture de son lieu de travail. Elle était prête à commencer des recherches pour d’autres types d’emploi si le confinement continuait.

[25] En fait, la prestataire est retournée travailler chaque fois que son employeur rouvrait. Elle a travaillé d’août à décembre 2020. Son lieu de travail a ensuite fermé jusqu’au 16 février 2021, elle est retournée travailler pendant six semaines, pour ensuite arrêter de nouveau au moment d’un autre confinement en avril 2021.

[26] Je comprends que la prestataire n’a pas postulé à d’autres emplois lorsque son employeur était fermé. Toutefois, je suis d’avis que la prestataire a fait des démarches qui étaient habituelles et raisonnables pour trouver un emploi dans les circonstances particulières. Je suis d’avis qu’elle orientait ses démarches pour trouver un emploi convenable. Elle avait un emploi. Elle est restée en contact avec son employeur et elle était prête à retourner travailler dès la réouverture de son lieu de travail. La seule raison pour laquelle elle ne travaillait pas était la fermeture exigée par la province. Elle a recommencé à travailler dès qu’elle l’a pu.

[27] Parfois, distribuer son curriculum vitæ et postuler à plusieurs postes sont les façons les plus habituelles et raisonnables de trouver un emploi convenable. Mais à certains moments, vous aurez une meilleure chance de trouver un emploi convenable en attendant qu’on vous rappelle pour votre emploi régulier. Dans ce cas, l’attente d’être rappelé en restant en contact avec son employeur est la façon la plus habituelle et raisonnable de trouver un emploi convenableNote de bas page 8.

[28] Selon moi, les démarches de la prestataire pour trouver un emploi convenable étaient habituelles et raisonnables en raison des circonstances particulières.

Capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable

[29] Je dois également évaluer si la prestataire a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas page 9. Selon l’article de loi en question, la prestataire doit prouver trois choses pour démontrer qu’elle était disponible :

  1. qu’elle avait le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert;
  2. qu’elle manifestait ce désir en faisant des démarches pour se trouver un emploi convenable;
  3. qu’aucune condition personnelle n’aurait pu nuire indûment à ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas page 10.

[30] Je dois tenir compte de chacun de ces facteurs pour trancher la question de la disponibilitéNote de bas page 11, en examinant l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas page 12.

La prestataire avait-elle le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable est offert?

[31] La prestataire a toujours affirmé qu’elle souhaitait travailler. Elle est retournée travailler une fois son employeur rouvert. Je la crois. Je pense que ses démarches et son attitude démontrent qu’elle souhaite retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable est offert.

La prestataire a-t-elle fait des démarches pour trouver un emploi convenable?

[32] J’estime que la prestataire a fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi compte tenu des circonstances.

[33] J’ai déjà expliqué les raisons pour lesquelles je crois que la prestataire a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. Pour les mêmes raisons, j’estime qu’elle a démontré qu’elle faisait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable.

[34] Je comprends que la prestataire n’a pas postulé à de nouveaux emplois. Toutefois, je conclus qu’elle est restée en contact avec son employeur habituel. Elle était prête à retourner travailler dès la réouverture de son lieu de travail, et elle est retournée travailler dès qu’elle l’a pu.

[35] Selon la situation de la prestataire, j’estime qu’il était raisonnable d’attendre un rappel au travail de son employeur. C’était la façon la plus raisonnable pour elle de retourner travailler le plus rapidement possibleNote de bas page 13.

La prestataire a-t-elle établi des conditions personnelles qui pourraient avoir limité indûment ses chances de retourner sur le marché du travail?

[36] La prestataire a des conditions personnelles puisqu’elle est étudiante. Cependant, j’estime que ces conditions personnelles ne limiteront pas indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[37] La Commission fait valoir que la prestataire comptait trop de conditions personnelles puisqu’elle était étudiante. La Commission affirme qu’elle a un horaire de cours qui limite de manière déraisonnable sa disponibilité pour travailler.

[38] La prestataire est en désaccord. Elle mentionne qu’une grande partie de son horaire de cours est flexible et qu’elle peut visionner les enregistrements des cours dans ses temps libres. Bien qu’elle ait des classes prévues, son employeur et ses professeurs sont flexibles. Elle mentionne que ses études n’affectent pas sa disponibilité pour travailler.

[39] Je suis d’accord avec la prestataire. Je crois qu’elle a certaines conditions personnelles en raison de son horaire de cours. Toutefois, j’estime que ces conditions personnelles ne limiteront pas indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[40] À l’audience, la prestataire a parlé de ses horaires de cours et de travail. Elle a mentionné que la plupart de ses cours étaient préenregistrés. Elle les visionnait habituellement en soirée ou entre deux clients lorsqu’elle était au travail. Elle avait deux cours en classe, chaque mardi et un jeudi sur deux. Elle a mentionné qu’elle n’avait jamais eu de conflit d’horaire entre son travail et ses cours en classe puisqu’elle adaptait son horaire de travail en tenant compte de ses cours. Toutefois, elle a dit que ses professeurs étaient flexibles et avaient adapté les exigences pour ses camarades de classe. Elle s’attendait à ce que les professeurs fassent de même pour elle en cas de conflit d’horaire.

[41] La prestataire a mentionné qu’elle avait réussi à travailler de 30 à 35 heures par semaine et à assister à ses cours. Elle a affirmé qu’elle aurait continué à travailler si son lieu de travail était resté ouvert.

[42] Je crois la prestataire. J’admets qu’elle a certaines conditions personnelles qui affectent sa disponibilité pour travailler en raison de ses cours. Cependant, j’estime qu’elle avait déjà trouvé un moyen d’équilibrer ses obligations professionnelles et scolaires pour lui permettre de travailler à temps plein. Selon moi, elle a démontré que ses obligations scolaires ne limitaient pas indûment ses occasions de travailler puisqu’elle avait déjà travaillé tout en allant à l’école.

La prestataire était-elle capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable?

[43] J’estime que la prestataire souhaitait travailler. Ses démarches pour trouver un travail étaient raisonnables en raison des circonstances. Elle avait des conditions personnelles puisqu’elle étudie, mais j’estime que ces conditions n’affectaient pas indûment ses chances de trouver un emploi.

[44] Lorsque je regarde l’ensemble de ces facteurs, je conclus que la prestataire a démontré qu’elle est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas page 14.

Conclusion

[45] J’accueille l’appel de la prestataire. J’estime qu’elle a démontré sa disponibilité pour travailler à compter du 4 janvier 2021.

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