Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : ML c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 384

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission d’en appeler

Partie demanderesse : M. L.
Représentante : Colleen Evans
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 15 juin 2021 GE-
21-253

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 28 juillet 2021
Numéro de dossier : AD-21-242

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Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur (prestataire) a perdu son emploi. L’employeur a affirmé qu’il avait été impliqué dans une altercation au travail qui enfreignait leur politique sur la violence. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné l’information présentée et a décidé au départ que le prestataire n’avait pas perdu son emploi en raison d’une inconduite. La Commission a commencé à verser des prestations régulières d’assurance-emploi (AE) au prestataire.

[3] La Commission a informé l’employeur de sa décision. Celui-ci a demandé une révision et a fourni une vidéo de l’altercation ainsi que d’autres documents à la Commission. La Commission a procédé à une révision et a changé sa décision. Elle a conclu que le prestataire avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. La Commission lui a donc imposé une exclusion rétroactive. Il en est découlé un trop-payé de prestations. Le prestataire a fait appel de la décision découlant d’une révision de la Commission à la division générale.

[4] La division générale a conclu que le prestataire avait perdu son emploi parce qu’il avait eu une altercation physique avec un collègue, ce qui contrevient à la politique sur la non-discrimination et le respect en milieu de travail de l’employeur. Elle a jugé que le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite entraînerait son congédiement. La division générale a conclu que le comportement du prestataire constituait une inconduite.

[5] La prestataire cherche maintenant à obtenir la permission d’appeler de la décision de la division générale à la division d’appel. Il soutient que la division générale a fondé sa décision sur de nombreuses conclusions de fait erronées qui ont été tirées de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissance.

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur révisable qui pourrait conférer à l’appel une chance raisonnable de succès.

[7] Je rejette la demande de permission d’en appeler parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès? 

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social(Loi sur le MEDS) énumère les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont les suivantes :

  1. La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. La division générale n’a pas statué sur une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a statué sur une question qu’elle n’aurait pas dû trancher.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a commis une erreur de droit en rendant sa décision.

[10] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. C’est une première étape que la partie prestataire doit franchir, mais où la responsabilité est moindre que celle dont elle devra s’acquitter durant l’instruction de l’appel sur le fond. À l’étape de la permission d’en appeler, la partie prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. Autrement dit, elle doit démontrer la possibilité de soutenir qu’il y a eu une erreur révisable pouvant faire que l’appel soit accueilli.

[11] Ainsi, avant d’accorder la permission, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés plus haut, et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.

Le prestataire soulève-t-il une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

[12] Dans sa demande de permission d’en appeler, le prestataire soutient que la division générale a commis d’importantes erreurs de fait et qu’elle n’a pas suivi les principes d’équité procéduraleNote de bas de page 1.

[13] Je ne suis pas convaincu qu’au moins un des moyens d’appel mentionnés par l’employeur confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[14] La division générale devait décider si le prestataire avait perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 2.

[15] La notion d’inconduite ne signifie pas qu’il est nécessaire que le comportement fautif soit le résultat d’une mauvaise intention; il suffit que l’inconduite soit consciente, délibérée ou intentionnelle. En d’autres termes, pour qu’il y ait inconduite, l’acte reproché doit être délibéré ou, à tout le moins, d’une nature si négligente qu’on pourrait dire que la personne a volontairement fait fi des effets que ses actes auraient sur son rendementNote de bas de page 3.

[16] Le rôle de la division générale n’est pas de juger de la sévérité de la peine imposée par l’employeur, ou de déterminer si l’employeur est coupable d’inconduite parce qu’il a congédié le prestataire de telle façon que ce congédiement était injustifié, mais plutôt de décider si le prestataire était coupable d’inconduite et si cette inconduite a entraîné la perte de son emploiNote de bas de page 4.

[17] Après avoir examiné les éléments de preuve, la division générale a conclu que le prestataire avait perdu son emploi parce qu’il avait été impliqué dans une altercation physique avec un collègue, ce qui contrevient à la politique sur la non-discrimination et le respect en milieu de travail de l’employeur. Elle a également conclu que l’employeur avait expliqué la politique au prestataire avant l’altercation.

[18] La division générale a jugé qu’en agissant ainsi, le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite entraînerait son congédiement.

[19] La division générale était également convaincue que l’employeur avait congédié le prestataire pour cette raison. L’employeur l’a renvoyé chez lui le jour même. Le prestataire a perdu son emploi le lendemain.

[20] La division générale a conclu, à partir de la preuve prépondérante, que le comportement du prestataire constituait une inconduite au titre de la Loi sur l’AE.

[21] Le prestataire a admis qu’il avait mis sa main sur la visière de son collègue et qu’il l’avait poussé. Toutefois, il a affirmé qu’il avait agi ainsi par frustration, et que sa participation à l’altercation était une réaction automatique à [traduction] « de multiples actions provocatrices et incendiaires de la part de son collègue ». Il a soutenu que ses actions n’étaient donc pas conscientes ou délibérées.

[22] Le fait que le prestataire ait manqué momentanément de jugement en raison du comportement répréhensible de son collègue n’est pas pertinent au moment de décider si sa propre conduite constitue une inconduite au titre de la Loi sur l’AENote de bas de page 5.

[23] La division générale a conclu que le prestataire avait intentionnellement marché vers son collègue pour poursuivre l’interaction, plutôt que de quitter la zone de travail et de signaler le comportement de son collègue à son superviseur dès que son collègue a amorcé l’interaction en lui enlevant un outil qu’il tenait dans sa main.

[24] La division générale a aussi conclu que le prestataire a eu une deuxième occasion de s’éloigner, mais qu’il a choisi de marcher vers son collègue et de continuer de lui parler jusqu’à ce que cela se transforme en altercation physique.

[25] Un comportement agressif ou violent au travail constitue une inconduite au titre de la Loi sur l’AENote de bas de page 6.

[26] Une violation délibérée des instructions et du code de conduite de l’employeur constitue également une inconduite au sens de la Loi sur l’AENote de bas de page 7.

[27] Dans sa demande de permission d’en appeler, le prestataire n’a soulevé aucune erreur révisable, comme une erreur de compétence ou un manquement à un principe de justice naturelle de la part de la division générale. Il n’a pas relevé d’erreurs de droit ni de conclusions de fait erronées, que la division générale aurait pu tirer de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissance, qui auraient eu une incidence sur sa décision.

[28] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments que le prestataire a présentés pour appuyer sa demande de permission d’en appeler, je conclus que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[29] La demande de permission d’en appeler est rejetée. L’appel n’ira pas de l’avant.

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