Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 392

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : D. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (417518) datée du
2 mars 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Katherine Wallocha
Date d’audience : Le 8 avril 2021
Mode d’audience : Téléconférence
Personnes présentes à l’audience : D. B., appelant
Date de la décision : Le 9 avril 2021
Numéro de dossier : GE-21-417

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le prestataire a perdu son emploi à cause de son inconduite. Il est donc exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[2] Le prestataire travaillait dans l’équipe de calfeutrage d’une compagnie d’installation de fenêtres. Le 20 mars 2020, il a demandé des prestations de maladie. Il a alors commencé à toucher la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Quand le programme de la PCU a pris fin, le 3 octobre 2020, il a commencé à recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, comme les autres prestataires.

[3] Par contre, le prestataire a été exclu du bénéfice des prestations régulières. En effet, la Commission de l’assurance-emploi avait décidé qu’il avait perdu son emploi en raison de son inconduite. Le prestataire a alors demandé de convertir ses prestations régulières en prestations de maladie. Sa demande a été approuvée, et il a reçu des prestations de maladie durant 15 semaines.

[4] Le prestataire a ensuite demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 16 janvier 2021. Le 26 février 2021, il a demandé à la Commission de réviser sa décision. Croyant à la version de l’employeur, la Commission a toutefois décidé de maintenir sa décision après révision. Selon l’employeur, le prestataire avait été congédié parce qu’il s’était absenté du travail à répétition et sans préavis.

[5] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme que sa mise à pied était due à la pandémie de COVID-19. Il était retourné au travail une semaine en mai 2020 pour aider son employeur, car personne d’autre ne pouvait ou ne voulait travailler. Le prestataire dit que l’employeur ne l’aimait pas et qu’il avait inscrit des informations inexactes dans son relevé d’emploi.

Question que je dois trancher

[6] Le prestataire a-t-il perdu son emploi à cause de son inconduite?

Motifs de ma décision

[7] Pour décider si le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite, je dois d’aborder établir la raison pour laquelle il ne travaille plus. Je dois ensuite décider si cette raison est une inconduite selon la loi.

Pourquoi le prestataire a-t-il perdu son emploi?

[8] Le prestataire a perdu son emploi parce qu’il s’absentait sans donner de préavis à son employeur.

[9] Au début, l’employeur a fourni un relevé d’emploi montrant que le prestataire avait travaillé jusqu’au 18 mars 2020 inclusivement, et que la raison du relevé était une maladie ou une blessure. Un relevé subséquent, daté du 3 juin 2020, précisait que le prestataire avait travaillé du 8 avril 2020 au 26 mai 2020. La raison de ce relevé était un départ volontaire.

[10] La Commission a communiqué avec le prestataire. Celui-ci a expliqué qu’il avait été mis à pied à cause de la COVID-19. Il a dit qu’il n’y avait pas de travail et que tout le monde avait été mis à pied. Il a affirmé qu’un manque de travail aurait dû être indiqué comme raison du relevé.

[11] La Commission a communiqué avec l’employeur, qui a affirmé que la version des faits du prestataire n’était pas juste du tout. Le prestataire s’était absenté sans préavis à de nombreuses occasions. L’employeur, sans nouvelle, l’avait congédié. L’employeur ajoute que personne n’avait été mis à pied à cause de la COVID-19.

[12] La Commission a rapporté au prestataire la déclaration de l’employeur. Le prestataire a dit que l’employeur mentait. Il n’y avait pas de travail, l’employeur ne l’aimait pas et ne lui donnait pas de quarts. La Commission a demandé au prestataire pourquoi il avait dit que tout le monde avait été mis à pied, alors que l’employeur disait que personne ne l’avait été. Le prestataire a affirmé que son équipe avait été la seule à être mise à pied, et que les employés ayant plus d’ancienneté n’avaient pas connu le même sort.

[13] La Commission a téléphoné au superviseur du prestataire, que le prestataire accusait de ne pas lui donner de quarts de travail. Le superviseur a lui aussi affirmé que personne n’avait été mis à pied à cause de la COVID-19. Il a dit qu’il avait congédié le prestataire parce qu’il ne se présentait pas au travail. Voici son dernier message à l’intention du prestataire : [traduction] « Je n’ai plus le choix de te congédier. Tu n’arrives jamais à l’heure, ton taux d’absentéisme est épouvantable, et tu ne m'appelles même pas pour me prévenir de tes absences. » L’employeur a dit que le prestataire connaissait bien les règles.

[14] L’employeur a fourni sa politique d’absentéisme, que l’on peut lire comme suit :

[traduction]
Un employé qui doit s’absenter en raison d’une maladie, d’une blessure, du décès d’un proche parent ou ami, ou pour toute autre raison, ou qui doit arriver en retard à son quart de travail est tenu de communiquer avec son superviseur immédiat par téléphone, courriel ou texto avant le début de son quart de travail pour signaler et motiver son absence. À défaut de respecter ces modalités, il pourrait être considéré que l’employé ait démissionné, et l’employé pourrait être congédié.

[15] L’employeur a également fourni la liste des heures de travail du prestataire pour mai 2020. Cette liste montre des absences non motivées les 12, 22, 27, 28 et 29 mai 2020. On peut aussi constater qu’il ne se présentait pas systématiquement à la même heure.

[16] J’ai interrogé le prestataire sur les informations fournies par l’employeur. Selon lui, l’employer n’était pas crédible et ces informations n’étaient pas fiables. Je lui alors demandé pourquoi la version des faits du superviseur confirmait ce que l’employeur avait dit, à savoir que personne n’avait été mis à pied à cause de la COVID-19. Le prestataire a répondu que l’employeur avait dit au superviseur quoi dire.

[17] J’ai demandé au prestataire s’il avait reçu le texto où son superviseur lui expliquait qu’il n’avait plus le choix de le congédier parce qu’il n’était jamais à l’heure, avait un taux d’absentéisme épouvantable et ne l’appelait jamais pour l’aviser de ses absences. Le prestataire a dit avoir reçu ce texto, mais que l’employeur avait dit au superviseur quoi écrire. Je lui ai demandé comment il savait que l’employeur avait forcé le superviseur à lui envoyer ce message. Le prestataire a répondu que son superviseur lui avait dit qu’il avait été obligé de l’envoyer, sans quoi l’employeur l’aurait congédié.

[18] J’ai demandé au prestataire comment il avait été informé de sa mise à pied. Il dit qu’on l’en avait informé par texto, mais qu’il n’avait plus ce téléphone et ne pouvait donc pas en fournir la preuve.

[19] À mes yeux, les déclarations et le témoignage du prestataire ne sont pas crédibles. Il admet être retourné travailler pour l’employeur, mais seulement pendant une semaine. Par contre, il avait d’abord dit à la Commission que tout le monde avait été mis à pied. Il lui avait ensuite dit que seule son équipe de calfeutrage l’avait été. Puis, à l’audience, le prestataire m’a dit qu’il avait seulement appris en octobre 2020 que tout le monde avait été renvoyé sauf deux personnes. Son histoire a changé.

[20] Le prestataire et le superviseur disent tous les deux que personne n’avait été mis à pied à cause de la COVID-19. L’employeur a fourni deux relevés d’emploi et la liste des heures du prestataire en mai 2020. Ces documents montrent que le prestataire avait travaillé plus d’une semaine et qu’il avait été absent sans préavis à de multiples occasions. Le prestataire veut me faire croire, ainsi qu’à la Commission, que l’employeur ne l’aimait pas et qu’il avait donc fabriqué de toutes pièces le relevé d’emploi et la liste de ses heures de travail pour mai 2020. Je ne le crois pas.

[21] Je juge que la preuve de l’employeur est plus crédible. Les relevés d’emploi montrent que le prestataire avait été en congé de maladie pendant trois semaines au début de la pandémie. Il avait ensuite repris le travail le 8 avril 2020. L’arrêt des activités dans son secteur d’emploi, la construction, n’était pas censé durer. Bien qu’il dise ne pas avoir travaillé ces heures, le prestataire m’a confirmé qu’il avait reçu une indemnité de vacances de 726,88 $, comme l’indique son relevé d’emploi daté du 3 juin 2020. Ce relevé indique aussi le 26 mai 2020 comme dernière journée de travail.

[22] Le prestataire est venu à l'audience accompagné de sa petite amie, à titre de témoin. Elle m’a confirmé qu’elle avait vu le texto du superviseur expliquant au prestataire qu’il avait été congédié à cause de ses absences. J’en conclus que le prestataire n’avait pas été mis à pied. Il avait été plutôt congédié le 26 mai 2020 à cause de son absentéisme.

La raison du congédiement du prestataire est-elle une inconduite selon la loi?

[23] Oui, la raison pour laquelle le prestataire a été congédié est considérée comme une inconduite selon la loiNote de bas de page 1

[24] Pour être une inconduite au sens de la loi, la conduite en cause doit être volontaire, c’est-à-dire consciente, délibérée ou intentionnelleNote de bas de page 2 . Une inconduite peut aussi être une conduite d’une insouciance telle qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas de page 3 . Une intention malveillante, chez le prestataire, n’est pas nécessaire pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 4 .

[25] Il y a inconduite si le prestataire savait, ou aurait dû savoir, que sa conduite pourrait nuire à l’exécution de ses obligations envers son employeur et, par conséquent, que son congédiement était une réelle possibilitéNote de bas de page 5 .

[26] La Commission doit prouver qu’il est plus probable qu’improbableNote de bas de page 6 que le prestataire a perdu son emploi à cause de son inconduiteNote de bas de page 7

[27] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite puisque le prestataire a manqué à sa relation d’emploi et était personnellement responsable de ce manquement. Le prestataire a délibérément choisi de ne pas se présenter à ses quarts de travail et de ne pas motiver ses absences auprès de son superviseur. Ce choix appartenait entièrement au prestataire, qui connaissait les conséquences possibles de ses actes après en avoir été informé durant son orientation. Ses actes étaient intentionnels et négligents au point d'être un manquement à une obligation contenue dans son contrat de travail. Le prestataire a continué de s’absenter sans appeler l’employeur pour motiver ses absences. Il s’agit d’une inconduite puisque ses actes étaient délibérés et intentionnels et sont la cause directe de son congédiement. Le prestataire devait raisonnablement savoir qu’il risquait d’être congédié.

[28] Le prestataire nie qu'il s'était présenté en retard au travail ou s'était absenté sans donner de préavis à son employeur. Il m’a dit qu’il connaissait la politique de l’employeur et savait qu’il devait informer son superviseur de tout retard ou absence avant le début de son quart de travail. Il m’a dit que son superviseur et lui avaient leur propre entente, et qu’il n’était pas obligé de l'aviser de ses retards s’il se présentait au travail à une heure raisonnable, comme 8 h. Il a dit qu’il pouvait quitter le boulot plus tôt que prévu s’il avait terminé son travail.

[29] J’ai déjà jugé que les déclarations et le témoignage du prestataire ne sont pas crédibles. Je crois donc à la version de l’employeur, voulant que le prestataire n’arrivait jamais au travail à la même heure et qu’il avait été absent sans préavis les 12, 22, 27, 28 et 29 mai 2020.

[30] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il a eu inconduite, puisque le prestataire avait manqué à l’un de ses devoirs élémentaires envers son employeur, soit celui de se présenter au travail pour ses quarts assignés, et à l’heure prévue. En s’absentant sans donner de préavis à son employeur, le prestataire a consciemment et délibérément ignoré la politique de son employeur en matière d’absentéisme. Le prestataire a admis qu'il connaissait cette politique. Il devait donc savoir qu’il risquait d’être congédié en s’absentant de façon répétée, et ce, sans préavis. Au sens de la loi, il a commis une inconduite.

Conclusion

[31] L’appel est rejeté. Le prestataire ne peut donc pas recevoir de prestations de l’assurance-emploi.

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