Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 365

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (417871) datée du
10 mars 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Raelene R. Thomas
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 9 avril 2021
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 12 avril 2021
Numéro de dossier : GE-21-438

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec la prestataire.

[2] La prestataire, M.C., a démontré qu’elle était fondée (c’est-à-dire, qu’elle avait une raison acceptée par la loi) à quitter son emploi lorsqu’elle l’a fait. Elle était fondée à quitter son emploi puisque son départ constituait la seule solution raisonnable.

[3] Cela signifie qu’elle n’est pas exclue du bénéfice des prestations de l’assurance-emploi.

Aperçu

[4] La prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 8 avril 2020. À la fin des prestations d’assurance-emploi d’urgence, sa demande a été convertie en prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 4 octobre 2020. La prestataire travaillait à temps partiel tout en suivant une formation en ligne de préposée aux services de soutien à la personne. Elle devait faire un stage non rémunéré pour terminer le cours. Son dernier jour de travail a été le 28 novembre 2020. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons qui ont mené la prestataire à quitter son emploi. La Commission a décidé que la prestataire avait volontairement quitté son emploi, ou avait choisi de le faire, sans justification. Elle n’était donc pas en mesure de lui verser des prestations d’assurance-emploi.

[5] Je dois décider si la prestataire a démontré que le départ de son travail constituait la seule solution raisonnable.

[6] La Commission affirme que la prestataire aurait pu continuer à travailler les fins de semaine, discuter de son stage avec son employeur et chercher à obtenir un congé.

[7] La prestataire n’est pas de cet avis et mentionne qu’elle n’aurait pas pu continuer à travailler les fins de semaine et qu’elle n’était pas en mesure de prendre un congé. 

Question que je dois examiner en premier

La Commission a fait une erreur administrative

[8] La Commission a soutenu avoir fait deux erreurs. Elle n’a pas envoyé à la prestataire la lettre de la décision initiale, et a mentionné que la décision initiale avait été rendue le 2 mars 2021 dans sa lettre de décision découlant de la révision. La Commission a déclaré que la décision initiale avait été rendue le 11 février 2021 et que cette date aurait dû être mentionnée dans la lettre de décision découlant de la révision.

[9] Lorsqu’une erreur ne peut nuire ou porter un préjudice, elle n’est pas fatale à la décision faisant l’objet de l’appelNote de bas de page 1. Je conclus donc que l’erreur de la Commission ne porte aucunement préjudice à la prestataire, car elle ne l’a pas empêchée de demander la révision de la décision initiale de la Commission ni d’interjeter appel de la décision subséquente.

Question en litige

[10] Est-ce que la prestataire est exclue du bénéfice des prestations, car elle a volontairement quitté son emploi sans une justification?

[11] Pour répondre à cette question, je dois d’abord examiner le départ volontaire de la prestataire. Je dois ensuite trancher si la prestataire était fondée à quitter son emploi. 

Analyse

Les parties conviennent que la prestataire a quitté volontairement son emploi

[12] Les parties sont la Commission et la prestataire.

[13] J’admets que la prestataire a volontairement quitté son emploi. La prestataire convient qu’elle a quitté son emploi. Rien ne vient contredire ce fait.

Les parties ne conviennent pas de la justification de la prestataire

[14] Les parties ne conviennent pas de la justification de la prestataire pour avoir quitté volontairement son emploi au moment où elle l’a fait.

[15] La loi précise qu’on est exclu du bénéfice des prestations si l’on quitte volontairement un emploi sans justificationNote de bas de page 2. Avoir une bonne raison de quitter un emploi ne suffit pas à démontrer qu’il y a une justification à le faire.

[16] La loi définit ce qu’on entend par « justification ». Selon la loi, vous avez une justification si votre départ constitue la seule solution raisonnable au moment des faits. La loi précise que je dois tenir compte de toutes les circonstancesNote de bas de page 3.

[17] Il incombe à la prestataire de démontrer qu’elle a une justificationNote de bas de page 4. Il incombe à la prestataire de le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que sa démission était la seule solution raisonnable. Lorsque je juge si la prestataire a une justification, je dois examiner toutes les circonstances au moment de sa démission. 

[18] La prestataire était employée d’un magasin au détail national. Elle travaillait à temps partiel comme caissière selon les besoins de son employeur. Elle recevait son horaire de la semaine suivante le jeudi ou le vendredi en soirée. La prestataire travaillait habituellement toutes les deux fins de semaine en sachant qu’elle pouvait travailler des heures supplémentaires si on l’appelait.

[19] La prestataire a mentionné qu’elle avait été initialement mise à pied en avril 2020 lorsque le magasin a fermé en raison de la pandémie de COVID-19. Elle est retournée travailler environ un mois plus tard. En juin 2020, la prestataire a commencé une formation en ligne pour devenir préposée aux services de soutien à la personne. Le gérant principal et le propriétaire du magasin savaient qu’elle suivait cette formation. 

[20] La prestataire a témoigné avoir expliqué au propriétaire qu’elle commençait un stage à compter du 3 décembre 2020. Elle a témoigné que le propriétaire lui avait demandé : « Tu vas donc démissionner? ». Elle a alors répondu qu’elle pouvait travailler une semaine de plus, mais il a dit : « Non, c’est fini pour toi. » La dernière journée de travail de la prestataire a été le samedi 28 novembre 2020. Elle devait participer à une séance d’orientation de préposés aux services de soutien à la personne les jeudi 3 décembre et vendredi 4 décembre 2020.  

[21] La prestataire a affirmé qu’elle n’avait pas une bonne relation avec l’employeur. Elle croit qu’il était flagrant qu’il ne souhaitait pas la voir travailler à cet endroit. Elle a eu cette impression à la suite de conversations avec le propriétaire. La prestataire a mentionné qu’environ un mois avant son arrêt de travail, il y avait des offres d’emploi de caissières bilingues affichées dans le magasin. La prestataire est bilingue, elle parle l’anglais et l’American Sign Language (langue des signes américaine). Elle a mentionné que le propriétaire n’aimait pas qu’elle ne parle pas le français. La prestataire a affirmé que, selon la règle, vous ne pouviez travailler que pour le magasin et que vous ne pouviez pas avoir un emploi à temps partiel ailleurs. Lorsqu’un poste de première caissière était à pourvoir, la prestataire a été convoquée en entrevue, mais n’a pas obtenu le poste. Pendant l’entrevue, il y a eu un commentaire lié à la loyauté et le propriétaire a dit qu’il ne comprenait pas le sens de ce mot. Le poste a été offert à un nouveau membre du personnel qui avait un poste à temps partiel ailleurs et qui était bilingue.

[22] La prestataire a mentionné que le stage de préposée aux services de soutien à la personne exigeait qu’elle travaille 200 heures. Elle devait conduire 75 minutes de son lieu de résidence jusqu’à l’endroit du stage. Si elle manquait un quart pendant la semaine, on s’attendait à ce qu’elle le reprenne pendant une fin de semaine. La prestataire ne croyait pas qu’il aurait été possible de continuer à travailler les fins de semaine tout en effectuant le stage. Cela aurait été trop exigeant sur le plan physique. Elle n’a pas demandé de congé puisque dès le début, lorsqu’elle parlait au propriétaire au sujet de la formation et du stage, il répondait toujours : « Tu vas démissionner une fois que tu auras terminé [la formation]? »

[23] La Commission mentionne que la prestataire n’avait pas de justification, car elle avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi. Plus précisément, la Commission affirme que la prestataire aurait pu continuer à travailler les fins de semaine, parler de ses besoins liés au stage avec son employeur et obtenir un congé.

[24] J’estime que la prestataire a démontré qu’elle avait une justification pour quitter son emploi au moment où elle l’a fait, car elle a prouvé qu’il n’y avait pas d’autre solution raisonnable que de le quitter.

[25] La prestataire a témoigné qu’au moment de discuter du stage à venir avec son employeur, il a répondu : « Tu vas donc démissionner. » Elle a offert de travailler la fin de semaine suivante, mais il a refusé en répondant « Non, c’est fini pour toi. » Cet élément de preuve m’indique que l’employeur n’aurait pas permis à la prestataire de continuer à travailler les fins de semaine lorsqu’elle effectuait le stage de préposée aux services de soutien à la personne. Par conséquent, j’estime que la prestataire n’avait pas la solution de travailler la fin de semaine. Cet élément de preuve m’indique également que l’employeur n’aurait pas autorisé un congé à la prestataire pour lui permettre de faire son stage de préposée aux services de soutien à la personne. Je conclus alors que la solution d’un congé n’était pas offerte à la prestataire.

[26] Les solutions qui ne sont pas offertes à une partie prestataire ne peuvent pas être considérées comme raisonnables. Par conséquent, la prestataire a démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle avait une justification pour quitter volontairement son emploi puisqu’il n’y avait pas de solutions raisonnables autres que de partir au moment où elle l’a fait.   

Conclusion

[27] Je conclus que la prestataire n’est pas exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[28] Cela signifie que l’appel est accueilli.

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