Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 253

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (418735) datée du
18 mars 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Suzanne Graves
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 29 avril 2021
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 25 mai 2021
Numéro de dossier : GE-21-587

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie.

[2] L’appelante (prestataire) n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle était aux études jusqu’au 27 février 2021. Cela signifie qu’elle est inadmissible au bénéfice des prestations pour la période du 11 janvier au 27 février 2021.

[3] La prestataire a démontré qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle était aux études à compter du 28 février 2021. Cela signifie qu’elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations du 28 février au 24 avril 2021.

Aperçu

[4] Une partie prestataire doit être disponible pour travailler afin d’obtenir des prestations d’assurance-emploi régulières. La disponibilité est une exigence permanente; une partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi. La Commission a jugé que la prestataire était inadmissible aux prestations d’assurance-emploi du 11 janvier au 24 avril 2021 parce qu’elle était aux études à temps plein et n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler à temps plein.

[5] Je dois trancher si la prestataire a démontré qu’elle était disponible pour travaillerNote de bas page 1. La Commission estime que la prestataire n’était pas disponible pour travailler parce qu’elle était aux études à temps plein. La prestataire est en désaccord et mentionne qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, et cherchait activement un emploi. De plus, elle a actuellement un emploi à temps partiel dans l’industrie hôtelière, mais est rarement appelée pour travailler en raison de la pandémie de COVID-19 en cours.

Documents présentés après l’audience

[6] Après l’audience, la prestataire a envoyé des documents liés à ses démarches de recherche d’emploi. J’ai accepté les documents comme preuve puisqu’ils sont pertinents à la question de savoir si elle était disponible pour travailler. La Commission a répondu avec une argumentation supplémentaire. J’ai transmis la réponse de la Commission à la prestataire et lui ai accordé du temps pour répondre.

Question en litige

[7] Est-ce que la prestataire était disponible pour travailler pendant qu’elle étudiait à temps plein du 11 janvier au 24 avril 2021?

Analyse

[8] La loi exige que les prestataires démontrent qu’ils sont disponibles pour travaillerNote de bas page 2. De plus, un nouvel article temporaire de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une partie prestataire qui étudie à temps plein ne peut pas recevoir de prestations à moins de démontrer qu’elle est capable de travailler et disponible à cette finNote de bas page 3.

[9] Les tribunaux ont également établi qu’il y a présomption de non-disponibilité pour travailler chez les prestataires qui étudient à temps pleinNote de bas page 4. Il n’y a pas de jurisprudence pour m’orienter quant à savoir si la présomption s’applique selon le nouvel article de la Loi sur l’assurance-emploi. Cependant, j’examinerai si la prestataire a réfuté cette présomption. Ensuite, j’examinerai la notion de disponibilité dans la loi.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[10] La présomption de non-disponibilité s’applique uniquement aux personnes qui étudient à temps plein. La prestataire reconnaît qu’elle étudie à temps plein, et rien ne démontre que ce n’est pas le cas. J’accepte donc le fait que la prestataire est aux études à temps plein.

[11] Cette présomption peut être réfutée, ce qui signifie qu’elle ne s’appliquerait pas. La prestataire peut réfuter la présomption que les étudiants à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler en démontrant qu’elle a déjà travaillé à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas page 5 ou en prouvant qu’il existe des circonstances exceptionnellesNote de bas page 6.

[12] La Commission mentionne que le visa de travail de la prestataire ne l’autorisait pas à travailler à temps plein et elle n’a pas démontré qu’elle était prête à laisser tomber ses études s’il y avait un conflit d’horaire entre ses heures de travail et ses cours.

[13] La prestataire a déclaré que son visa lui permettait de travailler jusqu’à 20 heures par semaine à l’extérieur du campus pendant qu’elle étudiait à temps plein. Elle mentionne qu’elle a travaillé 20 heures par semaine tout en étudiant depuis le début de ses études en 2018.

[14] Elle mentionne qu’actuellement, ses cours sont offerts en ligne en mode asynchrone en raison de la COVID-19. Elle a donc un horaire de cours flexible et étudie lorsqu’elle a du temps libre. Elle a déclaré qu’elle avait mentionné à la Commission qu’elle ne quitterait pas l’école en cas de conflit d’horaire avec le travail puisque son horaire de cours est si flexible qu’elle n’a pas besoin de s’absenter des cours.

[15] La prestataire a mentionné qu’elle pouvait travailler en tout temps entre 7 h et minuit puisqu’elle n’a pas à assister à des cours en classe. Bien que son visa lui permette de travailler à temps plein sur le campus pendant ses études, il est actuellement fermé en raison de la COVID-19. Lorsqu’elle n’est pas à ses cours, son visa n’impose aucune restriction concernant ses heures de travail.

[16] Je conclus que la prestataire a réfuté la présomption de non-disponibilité pendant ses études. Elle a démontré qu’elle avait travaillé constamment pendant qu’elle était inscrite à des cours pour le même nombre d’heures qu’elle a travaillées pour cotiser au programme d’assurance-emploi. Il s’agit du nombre maximal d’heures qu’elle peut travailler en toute légalité. Cette restriction liée au permis de travail est un facteur qui est hors de la portée de la prestataire.

[17] Si le campus avait été ouvert, la prestataire aurait pu travailler à temps plein en toute légalité. Cependant, c’était impossible en raison des fermetures liées à la COVID-19. Depuis que ses cours sont offerts en ligne pendant la pandémie, son horaire lui assure une grande disponibilité, elle peut travailler entre 7 h et minuit. Elle a donc démontré qu’il y avait des circonstances exceptionnelles dans son cas.

[18] La prestataire a réfuté la présomption qu’elle était non disponible pour travailler. Toutefois, le fait de réfuter la présomption signifie seulement qu’on ne présume pas que la prestataire n’est pas disponible. Je dois encore examiner la législation et décider si la prestataire est réellement disponible.

Capable de travailler et disponible à cette fin, incapable de trouver un emploi convenable

[19] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, la loi précise que les prestataires doivent être capables de travailler et disponibles à cette fin, et incapables de trouver un emploiNote de bas page 7. Les parties conviennent que la prestataire est capable de travailler.

[20] La prestataire doit démontrer trois éléments pour prouver qu’elle était disponible pour travailler :

  1. a) elle veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. b) elle fait des démarches pour trouver un emploi convenable; 
  3. c) elle évite d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas page 8.

[21] Je dois prendre en considération chacun de ces éléments pour trancher la question de la disponibilitéNote de bas page 9 ainsi qu’examiner l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas page 10.

La prestataire voulait-elle retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert?

[22] La prestataire a démontré qu’elle voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert. Elle a affirmé qu’elle voulait retourner travailler et en avait besoin pour payer son loyer et subvenir à ses besoins.

[23] Les parties sont du même avis, la prestataire a actuellement un emploi dans le spa d’un hôtel, mais a rarement été contactée pour travailler au cours des derniers mois en raison d’une baisse de la demande durant la COVID-19. Elle a déclaré qu’elle s’était inscrite à des sites de recherche d’emploi en ligne et regardait régulièrement des offres d’emploi. Son attitude et sa conduite pour chercher un emploi démontrent qu’elle voulait retourner sur le marché du travail dès que possible.  

La prestataire a-t-elle fait des démarches pour trouver un emploi convenable?

[24] La Commission affirme que la prestataire n’a pas fait suffisamment de démarches pour essayer de trouver un emploi. La prestataire n’est pas de cet avis. Elle affirme que les démarches qu’elle a faites étaient suffisantes pour démontrer qu’elle était disponible pour travailler.

[25] Il existe une liste d’activités de recherche d’emploi à examiner au moment de déterminer la disponibilité au sens d’un autre article de la loiNote de bas page 11. La Commission n’a pas demandé de dossier de recherche d’emploi à la prestataire pour démontrer qu’elle a fait des démarches raisonnables et habituelles pour trouver un emploiNote de bas page 12. Toutefois, j’ai examiné cette liste d’activités de recherche d’emploi à titre indicatif pour m’aider à trancher si la prestataire a démontré qu’elle a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.

[26] Il y a neuf activités : évaluer les possibilités d’emploi; rédiger un curriculum vitæ ou une lettre de présentation; s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, des banques d’emploi en ligne ou auprès de bureaux de placement; participer à des ateliers sur la recherche d’emploi ou à des salons de l’emploi; faire du réseautage; communiquer avec des employeurs éventuels; présenter des demandes d’emploi; participer à des entrevues et participer à des évaluations des compétences.

[27] La prestataire a déclaré qu’elle avait commencé à chercher activement un emploi à la fin de février 2021. Elle s’est inscrite aux alertes d’emplois des sites de Indeed et de LinkedIn, et a postulé à des emplois appropriés lorsqu’elle en prenait connaissance. Elle a également fait du réseautage parmi ses contacts et s’est présentée dans des magasins pouvant avoir des possibilités d’emploi. Elle a modifié son curriculum vitæ pour cibler des emplois précis et a postulé à des postes pour travailler dans la restauration, dans une maison de retraite, à la réception d’un hôtel, à l’accueil d’un restaurant et comme réceptionniste.

[28] Après l’audience, la prestataire a transmis des documents en lien avec ses démarches de recherche d’emploi. Elle a envoyé des captures d’écran de ses comptes Indeed et LinkedIn pour démontrer sa disponibilité à travailler immédiatement. Elle a également transmis des documents liés à une demande d’emploi dans un restaurant, une liste de trois employeurs qu’elle a visités pour distribuer son curriculum vitæ, la preuve de la consultation d’un emploi en ligne, des preuves liées à ses activités de réseautage, et les copies de son curriculum vitae en trois styles différents dont deux ayant été adaptés pour des types d’emploi précis.

[29] La prestataire a témoigné avec aplomb et sincérité. Son témoignage correspondait aux réponses qu’elle a fournies dans sa demande de prestations et aux documents qu’elle a présentés après l’audience. J’ai accordé de l’importance à son témoignage assermenté, qui est appuyé par les documents qu’elle a présentés pour démontrer ses démarches de recherche d’emploi, selon lequel elle a commencé à chercher activement un emploi à la fin de février 2021.

[30] J’estime que la prestataire a démontré avoir fait des démarches suffisantes pour chercher un emploi convenable à compter du 28 février 2021. Toutefois, j’estime qu’elle n’a pas démontré avoir fait des démarches suffisantes pour chercher un emploi du 11 janvier au 27 février 2021.

Est-ce que la prestataire a évité d’établir des conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail?

[31] J’estime que la prestataire n’a pas établi de conditions personnelles qui ont pu limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[32] La prestataire déclare ne pas avoir établi de conditions personnelles dans sa recherche d’emploi. Elle mentionne qu’elle pouvait travailler en tout temps entre 7 h et minuit. Son visa lui permet de travailler à temps plein sur le campus pendant ses études, mais celui-ci est fermé en raison de la pandémie de COVID-19.

[33] La Commission mentionne que la prestataire a établi des conditions personnelles dans sa recherche d’emploi puisqu’elle n’était pas prête ou disposée à chercher un emploi à temps plein. Le fait que son visa ne lui permettait pas de travailler à temps plein était une condition personnelle dans sa recherche d’emploi.

[34] La loi ne précise pas si un prestataire doit chercher un travail à temps plein. La prestataire cherchait le même type d’emploi à temps partiel qu’elle avait pendant ses études avant la pandémie. Elle était disponible pour travailler entre 7 h et minuit. À compter du 28 février 2021, elle a cherché un emploi qui avait le même nombre d’heures qu’elle travaillait chaque semaine pendant ses études avant sa demande de prestations.

[35] La restriction de la prestataire pour ses heures de travail n’est pas une condition personnelle puisqu’il s’agit d’un facteur indépendant de sa volonté. Elle a cherché du travail qu’elle pouvait légalement accepter en raison des conditions de son visa. La Commission estime que la prestataire ne savait pas qu’elle pouvait travailler sur le campus et qu’elle n’avait pas envisagé cette option. Toutefois, même si son visa lui permettait de travailler à temps plein sur le campus pendant ses études, il n’en demeure pas moins que la prestataire ne pouvait pas envisager cette option en raison des fermetures liées à la COVID-19.

[36] La prestataire a démontré qu’elle avait postulé à des emplois de différents secteurs, notamment dans la vente au détail, la réception et l’hôtellerie, et elle n’a pas établi de conditions personnelles quant au type de travail qu’elle cherchait.

La prestataire était-elle capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable?

[37] En tenant compte des conclusions auxquelles je suis arrivée après avoir analysé l’ensemble des trois facteurs, j’estime que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable du 11 janvier au 27 février 2021. Elle a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable à compter du 28 février 2021Note de bas page 13.

Conclusion

[38] Je conclus que la prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations du 11 janvier au 27 février 2021.

[39] Je conclus que la prestataire est admissible au bénéfice des prestations du 28 février au 24 avril 2021.

[40] Par conséquent, l’appel est accueilli en partie.

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