Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : LL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 379

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : L. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (421868) datée du
4 mai 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 20 juillet 2021
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 22 juillet 2021
Numéro de dossier : GE-21-1010

Sur cette page

Décision

[1] L. L. est la prestataire. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a rendu des décisions concernant ses prestations d’assurance-emploi. Elle fait appel de ces décisions devant le Tribunal de la sécurité sociale.   

[2] J’accueille l’appel. Je suis d’accord avec la prestataire. J’estime qu’elle a démontré qu’elle était disponible pour travailler. Cela signifie qu’elle devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi. 

[3] Voici les raisons de ma décision.

Aperçu

[4] La prestataire recevait des prestations de maladie de l’assurance-emploi. Elle a alors demandé à recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 23 février 2020. La Commission lui a versé des prestations d’assurance-emploi. Après quelques mois, la Commission a révisé ses décisions. La Commission a changé ses décisions quelques fois et a finalement décidé que la prestataire état indisponible pour travailler. La Commission a rendu cette décision de façon rétroactive. Cela signifie que la Commission a donné une date antérieure à la décision. La Commission a demandé à la prestataire de rembourser les prestations qu’elle avait déjà reçues.

[5] La Commission affirme que la prestataire était indisponible pour travailler à compter du 23 février 2020. La Commission soutient que la prestataire n’a pas accepté le travail offert par son ancien employeur et qu’elle n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler.

[6] Selon la prestataire, la Commission a tort. Elle estime qu’elle était disponible pour travailler. Elle mentionne que son ancien employeur a refusé de lui donner des heures de travail, mais qu’elle a cherché du travail auprès de différents employeurs. Elle estime qu’elle a fait tout son possible pour trouver du travail, mais la pandémie a compliqué les choses.

Question en litige

[7] Est-ce que la prestataire était disponible pour travailler?

Analyse

Quelles sont les questions dans le cadre de cet appel?

[8] Je vais rédiger un compte rendu du dossier de la prestataire. Nous avons abordé cela à l’audience, mais je veux m’assurer que la prestataire comprend ce qui est survenu avec ses prestations d’assurance-emploi. Beaucoup de choses se sont passées avec ses prestations d’assurance-emploi et je veux m’assurer qu’elle comprenne ce qui s’est produit avant que son dossier ne se rende jusqu’au Tribunal.

[9] La prestataire recevait des prestations de maladie de l’assurance-emploi. Son médecin a affirmé qu’elle était prête à retourner travailler. La prestataire a demandé à la Commission de commencer à lui verser des prestations régulières d’assurance-emploi. La Commission a changé le type de prestations pour qu’elle reçoive des prestations régulières à compter du 23 février 2020.  

[10] Ensuite, l’ancien employeur de la prestataire lui a émis un relevé d’emploi. Sur le relevé d’emploi, l’ancien employeur a mentionné qu’elle avait arrêté de travailler parce qu’elle avait quitté son emploi. La Commission a cru l’employeur. Elle a décidé de rendre inadmissible la prestataire aux prestations d’assurance-emploi. Ainsi, la Commission a demandé à la prestataire de rembourser toutes les prestations d’assurance-emploi qu’elle a reçues après le 23 février 2020.  

[11] La prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision. Elle a déclaré ne pas avoir quitté son emploi. La Commission a enquêté, puis s’est dite du même avis que la prestataire. Elle a convenu que la prestataire n’avait pas quitté son emploi et a donc retiré le statut d’inadmissibilité de la prestataire.

[12] Cependant, l’ancien employeur de la prestataire a déclaré à la Commission qu’il avait du travail pour elle. Il a mentionné qu’elle continuait à refuser le travail qu’il lui offrait. La Commission a cru l’employeur. La Commission a décidé que la prestataire était indisponible pour travailler parce qu’elle n’acceptait pas le travail offert par son ancien employeur. La Commission a conclu que la prestataire était exclue du bénéfice des  prestations à compter du 30 septembre 2019. Cela signifie que la Commission a demandé à la prestataire de rembourser toutes les prestations d’assurance-emploi qu’elle a reçues après le 30 septembre 2019.

[13] Ensuite, la prestataire a fait appel devant le Tribunal. La Commission a révisé le dossier de la prestataire à nouveau. Cette fois, la Commission a conclu que la prestataire était admissible aux prestations du 30 septembre 2019 au 22 février 2020. Néanmoins, la Commission est toujours d’avis que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler à compter du 23 février 2020.  

[14] Ainsi, je dois trancher si la prestataire a démontré qu’elle était disponible pour travailler. Il s’agit de la seule question sur laquelle je me pencherai dans ma décision.

[15] Je ne rendrai aucune décision à savoir si la prestataire a quitté son emploi. La prestataire ainsi que la Commission conviennent que la prestataire n’a pas quitté son emploi en 2019. La Commission a révisé sa décision en faveur de la prestataire. Elle ne tente pas de faire appel de la révision de la Commission à ce stade.

Disponibilité

[16] Je vais maintenant expliquer pourquoi j’ai décidé que la prestataire était disponible pour travailler. J’expliquerai ce que prévoit la loi à propos de la disponibilité pour travailler. J’expliquerai comment j’ai appliqué la loi à la situation de la prestataire.  

[17] Vous devez démontrer que vous êtes disponible pour travailler si vous souhaitez recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi.

[18] Deux articles de la loi abordent la question de la disponibilité pour travailler. La Commission affirme qu’elle a appliqué les deux articles de la loi et a décidé que la prestataire était indisponible pour travailler en vertu de ces deux articles.

[19] Le premier de ces articles de la loi prévoit que la Commission peut vous demander de prouver que vous faites des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1.

[20] Des démarches habituelles et raisonnables sont des choses que font la plupart des gens lorsqu’ils cherchent un emploi. Vous devriez régulièrement faire des démarches de recherche d’emploi pendant que vous cherchez du travail. Il y a des exemples dans la loi qui aident à comprendre les types de démarches considérées habituelles et raisonnables.

[21] Dans le deuxième de ces articles, la loi indique que la partie prestataire doit démontrer qu’elle est capable de travailler, mais qu’elle a été incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 2. Je dois examiner trois éléments lorsque j’examine si la partie prestataire est indisponible selon cet article de la loiNote de bas de page 3. Je décrirai ces trois éléments plus loin dans cette décision.

[22] Je vais maintenant examiner ces deux articles pour décider si la prestataire était disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[23] La Commission affirme avoir appliqué l’article de la loi abordant les « démarches habituelles et raisonnables » pour établir que la prestataire était indisponible pour travailler. La Commission mentionne que je devrais également tenir compte de cet article pour prendre ma décision.

[24] Je suis en désaccord avec la Commission. Je ne crois pas qu’elle a démontré avoir appliqué cet article de la loi. Je ne tiendrai pas compte de cet article au moment de rendre ma décision sur la disponibilité pour travailler de la prestataire.

[25] La Commission a parlé avec la prestataire au sujet de sa demande de révision de la décision. La Commission a ajouté ses notes de conversations avec la prestataire au dossier d’appel. À leur lecture, je ne vois pas à quel moment la Commission a posé des questions à la prestataire sur sa recherche d’emploi. La Commission n’a pas posé de questions à la prestataire sur les démarches qu’elle faisait pour trouver un emploi. La Commission ne lui a pas demandé un dossier de ses antécédents de recherche d’emploi. La Commission n’a même pas informé la prestataire qu’elle souhaitait examiner si elle faisait ou non des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[26] La division d’appel a rendu une décision dans laquelle on mentionne que la Commission devrait être prudente lorsqu’elle utilise la loi pour demander si vous faites des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. La division d’appel soutient que la Commission devrait vous informer si elle compte vous demander ces renseignements. La division d’appel mentionne que la Commission devrait vous décrire ce que signifient «  des démarches habituelles et raisonnables »Note de bas de page 4.

[27] Je représente la division générale du Tribunal. La division d’appel est l’instance supérieure par rapport à moi. Elle rend également des décisions sur des questions liées à l’assurance-emploi. Les décisions de la division d’appel ne font pas jurisprudence, et ainsi, je ne suis pas tenue de suivre leurs décisions si j’estime qu’elles sont inutiles. Toutefois, de façon générale, leurs décisions me sont utiles. Leurs décisions me permettent de réfléchir sur la manière dont je peux appliquer la loi dans différents dossiers. Leurs décisions aident à faire en sorte que tous les membres du Tribunal rendent des décisions semblables concernant les prestations d’assurance-emploi.

[28] Dans ce dossier, j’estime que la décision de la division d’appel est utile. Je suis d’avis que la Commission n’a jamais informé la prestataire qu’elle comptait examiner si ses démarches de recherche d’emploi étaient habituelles et raisonnables. La Commission n’a pas demandé de dossier des antécédents de recherche d’emploi. Selon les arguments de la Commission, elle a seulement utilisé le deuxième article de la loi pour établir si la prestataire était indisponible pour travaillerNote de bas de page 5.  

[29] Je n’examinerai pas si la prestataire prenait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. J’estime que la Commission n’a pas démontré qu’elle a appliqué cet article de la loi pour rendre sa décision sur la disponibilité de la prestataire pour travailler.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[30] Plus tôt, j’ai mentionné qu’il y avait un deuxième article de la loi qui aborde la disponibilité pour travailler. Cet article précise que vous devez démontrer que vous êtes capable de travailler, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 6.

[31] Je dois examiner trois éléments quand je décide si vous avez démontré votre disponibilité à travailler au titre de cet article de la loi. Vous devez respecter ces trois éléments pour prouver que vous êtes disponible pour travailler :

  1. Vous devez montrer que vous souhaitez retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable vous sera offert. Votre attitude et vos actions doivent démontrer que vous voulez retourner au travail dès que vous le pouvez.
  2. Vous devez faire des efforts raisonnables pour trouver un emploi convenable.
  3. Vous ne devez pas fixer de limites qui pourraient vous empêcher de trouver un emploi. Si vous fixez des limites à votre recherche d’emploi, celles-ci doivent être raisonnablesNote de bas de page 7.

[32] Je vais examiner chacun de ces trois éléments. Je déciderai si la prestataire a satisfait à chacun de ces éléments. Je trancherai ensuite la question de savoir si elle a démontré sa disponibilité pour travailler.

Vouloir retourner travailler

[33] La Commission n’a jamais posé de question à la prestataire sur sa disponibilité pour travailler. La Commission a seulement parlé à l’ancien employeur de la prestataire. La Commission s’est fiée aux déclarations de l’ancien employeur et a déclaré que la prestataire ne voulait pas travailler.

[34] Je suis d’avis que l’ancien employeur n’est pas une source fiable pour examiner la disponibilité de la prestataire pour travailler. Elle m’a donné des copies des courriels qu’elle a envoyés à son ancien employeur. Les courriels démontrent qu’elle a continué à demander des heures de travail à son employeur. Je ne crois pas l’employeur lorsqu’il déclare que la prestataire a refusé de travailler. J’estime que l’information fournie par la prestataire est plus fiable lorsque j’examine son attitude et ses actions. C’est pourquoi je vais tenir compte des déclarations de la prestataire à l’audience. Je n’accorde pas de poids aux déclarations de l’employeur.  

[35] À l’audience, la prestataire a mentionné qu’elle avait toujours voulu travailler. Elle a tenté de parler à son ancien employeur concernant son retour au travail. Elle mentionne que le représentant des ressources humaines ne l’aimait pas et ne voulait pas lui donner des heures de travail. La prestataire a déclaré qu’elle a commencé à chercher du travail auprès d’autres employeurs lorsqu’elle a réalisé que son ancien employeur ne comptait pas lui donner des heures de travail.

[36] Je crois la prestataire. Je suis d’avis qu’elle désirait retourner travailler.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[37] J’estime que la prestataire a fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable.

[38] La prestataire doit démontrer que ses démarches de recherche d’emploi sont raisonnables compte tenu de sa situation. Son attitude et ses actions sont des éléments importants dont je dois tenir compteNote de bas de page 8.

[39] À l’audience, la prestataire a décrit les démarches qu’elle a faites pour trouver un travail. Elle a mentionné avoir utilisé l’application Indeed pour chercher un emploi. Elle a souvent appelé son ancien employeur et lui a envoyé des courriels. Elle a utilisé Facebook. Elle a parlé avec des amis à propos de sa recherche d’emploi. Elle a imprimé et distribué des cartes professionnelles.

[40] La prestataire a mentionné qu’elle avait commencé à chercher un emploi avant la fin de son congé de maladie. Elle a déclaré avoir commencé à chercher un emploi en janvier 2020. Elle a continué à chercher du travail même après la fermeture d’entreprises en mars 2020 en raison de la pandémie. Elle a déclaré avoir continué à chercher du travail pendant tout l’été.

[41] La Commission ne m’a pas donné de preuves qui me font douter des déclarations de la prestataire. Elle a parlé à l’ancien employeur de la prestataire, mais j’ai déjà expliqué les raisons pour lesquelles je ne veux pas tenir compte des déclarations de l’employeur. J’estime que les renseignements présentés par la prestataire sont plus fiables.

[42] Je crois la prestataire. J’estime qu’elle a démontré qu’elle faisait des démarches raisonnables pour trouver un emploi. Je suis d’avis que son attitude et ses actions démontrent qu’elle souhaitait travailler de nouveau.

Ne pas limiter indûment ses chances de retourner travailler

[43] À l’audience, la prestataire a mentionné avoir de l’expérience dans différents types d’emploi. Elle a déclaré être en mesure d’occuper des postes de gardienne de sécurité, de nettoyeuse de maison, de travailleuse de soutien, de chauffeuse-livreuse ou de peintre. Elle a mentionné qu’elle était prête à faire tout type de travail. Elle a déclaré qu’elle accepterait tout type de salaire, car elle savait qu’elle pouvait monter les échelons et éventuellement obtenir un salaire plus élevé. Elle a mentionné qu’elle avait postulé pour différents types d’emploi.   

[44] La Commission ne m’a pas fourni de renseignements qui contredisent les déclarations de la prestataire. La Commission n’a pas de renseignements sur les démarches de la prestataire pour trouver un emploi.

[45] Je suis du même avis que la prestataire. J’estime qu’elle n’a pas établi de limites à sa recherche d’emploi.

Alors, la prestataire était-elle capable de travailler et disponible pour le faire?

[46] La prestataire devait satisfaire aux trois éléments pour démontrer sa disponibilité pour travailler. Selon moi, elle a démontré qu’elle souhaitait retourner travailler. J’estime qu’elle a fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi. Elle a mentionné qu’elle accepterait tout type d’emploi et je la crois. J’estime qu’elle n’a pas établi de limites à sa recherche d’emploi.  

[47] Lorsque j’examine les trois éléments dans leur ensemble, j’estime que la prestataire a démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

Conclusion

[48] J’accueille l’appel de la prestataire. J’estime que la prestataire a démontré qu’elle était disponible pour travailler au sens de la loi. Cela signifie qu’elle devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi.

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