Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Assurance-emploi – arrêt de rémunération – répartition de l’indemnité de départ – article 35(6) du Règlement sur l’assurance-emploi

Le prestataire a été mis à pied en janvier 2020. Il a demandé des prestations d’assurance-emploi (AE). La Commission a établi une période de prestations qui commençait le 12 janvier 2020. Selon les calculs de la Commission, le prestataire pouvait avoir 36 semaines de prestations (aussi appelées semaines d’admissibilité) selon le taux de chômage dans la région où il vivait à ce moment-là. Lorsqu’il a été mis à pied de son emploi, le prestataire a reçu une indemnité de départ, c’est-à-dire qu’il a reçu un montant d’argent parce qu’il a quitté ou perdu son emploi. La Commission a réparti l’indemnité de départ du prestataire sur les semaines de sa période de prestations, à compter de la semaine de sa mise à pied. En général, cela veut dire que la Commission doit déduire l’argent que le prestataire a reçu comme indemnité de départ des prestations d’AE qu’il devait recevoir. La Commission effectue ce calcul pour chaque semaine jusqu’à ce que l’indemnité de départ soit épuisée. Autrement dit, durant la période où le prestataire est censé recevoir des prestations, il doit d’abord utiliser tout l’argent qu’il a reçu comme indemnité de départ avant de pouvoir toucher des prestations d’AE. C’est ce qu’on appelle la « répartition ». Par conséquent, le prestataire a commencé à recevoir des prestations régulières d’AE seulement quand il ne restait plus un sou de son indemnité de départ en mai 2020. À ce moment-là, le taux de chômage de la région où il vivait avait augmenté en mai 2020 et le prestataire croyait pouvoir obtenir un plus grand nombre de semaines de prestations. La Commission n’était pas d’accord avec lui et n’a donc pas modifié sa décision après révision.

L’appel du prestataire à la division générale (DG) a été accueilli. Celle-ci a conclu que le nombre de semaines de prestations auquel le prestataire avait droit aurait dû être calculé selon le taux de chômage de mai 2020. Par conséquent, le prestataire aurait dû avoir 45 semaines de prestations.

La Commission a porté la décision en appel à la division d’appel (DA). Celle-ci a décidé que la DG avait commis une erreur de droit (c’est-à-dire qu’elle avait fait une erreur en interprétant ce que dit la loi) lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’avait pas cessé d’être rémunéré dans le cadre de son emploi (ce qu’on appelle un arrêt de rémunération) avant la fin de la répartition de son indemnité de départ en mai 2020. Aux termes de l’article 12(2) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE), le nombre maximal de semaines pour lesquelles les prestataires peuvent recevoir des prestations pendant leur période de prestations dépend du nombre d’heures pendant lesquelles les prestataires ont occupé un emploi assurable durant leur période de référence et du taux de chômage dans la région où les prestataires vivent. La Commission doit utiliser le taux de chômage régional en vigueur soit à la date de l’arrêt de rémunération ou à la date de la demande de prestations, selon la date qui vient en dernier. Toutefois, au titre des articles 36(9) et 35(6) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE), l’indemnité de départ est une somme d’argent provenant de l’emploi, mais elle ne sert pas à déterminer la date de l’arrêt de rémunération.

Cette erreur a permis à la DA de rendre la décision que la DG aurait dû rendre. L’article 35(6) du Règlement sur l’AE précise que la rémunération visée à l’article 36(9) du Règlement sur l’AE n’est pas comptée pour l’application de l’article 14 du Règlement sur l’AE, qui décrit les situations où survient un arrêt de rémunération. Par exemple, quand un prestataire ne travaille pas pour son employeur pendant une période d’au moins sept jours consécutifs et ne touche aucune rémunération de l’emploi. Comme l’indemnité de départ n’est pas prise en compte, l’arrêt de rémunération a eu lieu lorsque le prestataire a été mis à pied et qu’il n’a pas travaillé pour son employeur pendant sept jours consécutifs. C’était le 10 janvier 2020. Le prestataire devait avoir 36 semaines de prestations parce que le taux de chômage dans la région où il vivait le 10 janvier 2020 s’élevait à 4,9 %. La DA a accueilli l’appel de la Commission et a annulé la décision de la DG avant de rendre sa propre décision : le prestataire a subi un arrêt de rémunération le 10 janvier 2020 et aurait dû recevoir des prestations d’AE pendant 36 semaines.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c DC, 2021 TSS 451

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Partie intimée : D. C.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 7 mars 2021;
GE-21-297

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Mode d’audience : Téléconférence
Date d’audience : Le 17 août 2021
Personne présente à l’audience : Isabelle Thiffault
Représentante de la partie appelante
Date de la décision : Le 27 août 2021
Numéro de dossier : AD-21-100

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel. La division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a établi la date de l’arrêt de la rémunération du prestataire. Il y a eu arrêt de la rémunération du prestataire le 10 janvier 2020 et il était admissible à 36 semaines de prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[2] L’intimé, D. C. (prestataire), a été mis à pied en janvier 2020 et a demandé des prestations d’assurance-emploi (AE). La Commission de l’assurance-emploi du Canada a établi une période de prestations à partir du 12 janvier 2020. Elle a décidé que le prestataire était admissible à 36 semaines de prestations en fonction du taux de chômage de sa région à ce moment-là.  

[3] Le prestataire a aussi reçu des versements parce qu’il a cessé d’être au service de son employeur (indemnité de départ). La Commission a réparti cette indemnité de départ sur les semaines comprises dans la période de prestations du prestataire, à partir de la première semaine suivant sa mise à pied. Le prestataire a seulement commencé à recevoir des versements de prestations régulières d’assurance-emploi après la pleine répartition de son indemnité de départ par la Commission en mai 2020.

[4] Le taux de chômage de la région du prestataire avait augmenté en mai 2020; il estimait donc pouvoir être admissible à plus de semaines de prestations. La Commission a maintenu sa décision après révision. Le prestataire a obtenu gain de cause en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a conclu que l’on aurait dû décider des semaines auxquelles le prestataire avait droit en se servant du taux de chômage de mai 2020, qui le rendait admissible à 45 semaines de prestations.

[5] La Commission fait maintenant appel de la décision de la division générale devant la division d’appel. Elle soutient que la division générale a commis une erreur de droit.

[6] J’ai conclu que la division générale avait commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’avait pas eu d’arrêt de rémunération avant la répartition complète de son indemnité de départ en mai 2020. J’ai également décidé de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Il y a eu arrêt de la rémunération du prestataire le 10 janvier 2020 et il avait droit à 36 semaines de prestations d’assurance-emploi.

Questions préliminaires

[7] Le prestataire n’était pas présent à l’audience. Il a écrit au Tribunal le 16 août 2021 pour dire qu’il ne participerait pas à l’audience. Je suis convaincue que le prestataire a reçu l’avis d’audience et je suis allée de l’avant sans lui.

Question en litige

[8] La question en litige dans le présent appel est de savoir si la division générale a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a conclu qu’il y avait eu arrêt de la rémunération du prestataire seulement une fois que son indemnité de départ a été entièrement répartie le 26 mai 2020

Analyse

[9] Je peux seulement intervenir en l’espèce si la division générale a commis une erreur pertinente. Je dois donc vérifier si la division générale :

  • a agi de manière inéquitable;
  • a omis de trancher une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  • a mal interprété ou mal appliqué la loi;
  • a fondé sa décision sur une importante erreur se rapportant aux faits en causeNote de bas de page 1.

La division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a établi la date de l’arrêt de la rémunération

[10] L’article 12(2) de la Loi sur l’assurance-emploi indique le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées à une partie prestataire au cours de la période de prestations. Le nombre varie en fonction des heures d’emploi assurable accumulées par la partie prestataire pendant sa période de référence et du taux régional de chômage.

[11] Selon l’article 17(1)(1.1)(a) du Règlement sur l’assurance-emploila Commission doit utiliser le taux régional de chômage de la région du prestataire « au cours de la semaine à laquelle il est fait référence à l’article 10(1) de la Loi sur l’assurance-emploi ».

[12] L’article 10(1) de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la période de prestations débute, selon le cas :

  1. a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
  2. b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est présentée la demande initiale de prestationsNote de bas de page 2.

[13] La Commission doit utiliser le taux de chômage régional applicable à celle des dates suivantes qui survient en dernier, à savoir la date de l’arrêt de rémunération ou la date de la demande.

[14] La division générale a décidé que l’arrêt de rémunération du prestataire était survenu seulement le 26 mai 2020 parce qu’il s’agit du moment auquel son indemnité de départ avait été entièrement répartieNote de bas de page 3. La division générale s’est fondée sur l’article 14(1) du Règlement sur l’assurance-emploi, qui prévoit que certains critères soient remplis pour qu’il y ait arrêt de rémunération. L’un de ces critères est que l’on doit compter au moins sept jours consécutifs pendant lesquels aucune rémunération provenant d’un emploi n’est répartie.

[15] La division générale s’est référée à l’article 36(9) du Règlement sur l’assurance-emploi et a conclu que l’indemnité de départ est considérée comme une rémunération provenant d’un emploi et qu’il faut la répartir. La division générale a considéré que l’indemnité de départ était une rémunération à répartir pour l’application de l’article 14 du Règlement sur l’assurance-emploi et a conclu que, par conséquent, l’arrêt de rémunération est seulement survenu le 26 mai 2020.

[16] La division générale a appliqué cette compréhension du moment où l’arrêt de rémunération est survenu à l’article 10(1) de la Loi sur l’assurance-emploi. La division générale a établi que la période de prestations a débuté à la date survenue en dernier, soit lorsque le prestataire a demandé des prestations le 10 janvier 2020 ou lorsqu’il y a eu arrêt de la rémunération le 26 mai 2020. Selon la division générale, le 31 mai 2020 était le dimanche de la semaine au cours de laquelle le prestataire comptait sept jours consécutifs sans rémunération. La division générale a conclu qu’il s’agissait de la date à laquelle la période de prestations du prestataire a été établie.

[17] Le 31 mai 2020, le taux de chômage de la région du prestataire était de 10,1 %. Le 10 janvier 2020, lorsque le prestataire a demandé des prestations, le taux de chômage était de 4,9 %. L’utilisation de la date la plus récente signifie que le prestataire avait droit à 45 semaines de prestations plutôt qu’à 36.

[18] La division générale a omis d’appliquer l’article 35(6) du Règlement sur l’assurance-emploi au moment de décider de la date d’arrêt de la rémunération. Selon cet article, la rémunération visée à l’article 36(9) n’est pas prise en compte au moment de décider s’il y a eu un arrêt de la rémunération. Comme l’a conclu la division générale, les versements d’indemnité de départ étaient une rémunération visée à l’article 36(9). En omettant d’appliquer l’article 35(6) et en utilisant les versements d’indemnité de départ pour établir la date de l’arrêt de la rémunération du prestataire, la division générale a commis une erreur de droit.

Réparation

[19] Différentes options s’offrent à moi en ce qui concerne la façon de remédier à l’erreur de la division généraleNote de bas de page 4. Je peux remplacer sa décision par la mienne ou renvoyer l’affaire à la division générale aux fins de réexamen.

[20] La Commission me demande de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Je trouve que c’est approprié parce que j’ai conclu que la division générale n’avait pas correctement appliqué la loiNote de bas de page 5. La preuve est complète, claire et explicite.

L’arrêt de rémunération est survenu le 10 janvier 2020

[21] J’estime que l’article 35(6) s’applique dans le présent cas. Il dit clairement que les types de rémunérations visés à l’article 36(9) du Règlement sur l’assurance-emploine sont pas pris en compte aux termes de l’article 14, qui définit le moment où survient un arrêt de rémunération. Ainsi, il ne faut pas tenir compte des versements d’indemnité de départ que le prestataire a reçus pour décider du moment où est survenu un arrêt de la rémunération.

[22] Étant donné qu’il ne faut pas tenir compte des versements d’indemnité de départ, l’arrêt de rémunération est survenu quand le prestataire a été mis à pied et qu’il y a eu sept jours consécutifs durant lesquels il n’a effectué aucun travail pour son employeur. C’était le 10 janvier 2020.

[23] Le prestataire est admissible à 36 semaines de prestations parce que le taux de chômage de sa région le 10 janvier 2020 était de 4,9 %Note de bas de page 6.

Conclusion

[24] L’appel est accueilli. La division générale a commis une erreur de droit. J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. Il y a eu arrêt de la rémunération du prestataire le 10 janvier 2020 et celui-ci est admissible à 36 semaines de prestations.

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