Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 402

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : R. P.
Représentante ou représentant : D. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Melanie Allen

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 30 avril 2021
(GE-21-595)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Mode d’audience : Téléconférence
Date d’audience : Le 12 août 2021
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentante de l’appelante
Représentante de l’intimée
Date de la décision : Le 18 août 2021
Numéro de dossier : AD-21-184

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] Le 30 août 2020, la prestataire a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi. Elle a précisé qu’elle était enceinte et voulait que ses prestations de maladie soient versées immédiatement après ses prestations de maladie. Une période de prestations commençant le 16 août 2020 a été établie pour elle.

[3] La prestataire a reçu la Prestation canadienne d’urgence (PCU) de l’assurance-emploi pendant deux semaines, puis son enfant est né le 11 septembre 2020. Elle est donc passée aux prestations de maternité de l’assurance-emploi. Elle a alors commencé à recevoir 55 % de sa rémunération hebdomadaire, au lieu des 500 $ par semaine offerts par la PCU.

[4] La prestataire a demandé à l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, de réviser son taux de prestations. La prestataire affirmait que de nouvelles mesures temporaires étaient entrées en vigueur le 27 septembre 2020 et que, grâce à celles-ci, les prestations de maternité et les prestations parentales pouvaient être versées à un taux minimum de 500 $ par semaine. La Commission a maintenu sa décision : le taux de prestations de la prestataire correspondait à 55 % de sa rémunération puisque sa période de prestations avait débuté avant le 27 septembre 2020.

[5] La division générale a constaté que les mesures temporaires étaient entrées en vigueur le 27 septembre 2020. Comme la période de prestations de la prestataire avait été établie avant leur entrée en vigueur, elle n’était pas admissible au taux de 500 $. La division générale a conclu que la Commission avait correctement calculé que la prestataire bénéficiait d’un taux hebdomadaire de 213 $ pour ses prestations de maternité et ses prestations parentales.

[6] La division d’appel a accordé à la prestataire la permission de faire appel de cette décision. La prestataire affirme que la division générale a commis une erreur de fait ou de droit en concluant qu’elle n’était pas admissible au taux de prestations de 500 $.

[7] Je dois décider si la division générale a commis une erreur de fait ou de droit.

[8] Je rejette l’appel de la prestataire.

Questions en litige

[9] Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle erré parce qu’elle n’a pas considéré que la loi traitait la prestataire différemment des autres prestataires et violait ainsi ses droits à l’égalité, garantis par la Charte canadienne des droits et libertés?

[10] Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle mal interprété les mesures législatives d’urgence, si l’on tient compte du site Web de la Commission qui ne précise nulle part que le taux de la prestation d’urgence temporaire pour la COVID-19 serait réservé aux parents dont les enfants sont nés à compter du 27 septembre 2020, ou réservé aux périodes pour des prestations de maternité et des prestations parentales seulement, qui commencent le 27 septembre 2020 ou plus tard?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[11] La Cour d’appel fédérale a conclu que le mandat de la division d’appel se limite à celui que lui donnent les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, lorsqu’elle juge des appels en vertu de l’article 58(1) de cette loiFootnote 1.

[12] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel par rapport aux décisions rendues par la division générale. Elle ne peut pas appliquer un pouvoir de surveillance, comme le ferait un peu un tribunal supérieurFootnote 2.

[13] Par conséquent, si la division générale n'a pas manqué à un principe de justice naturelle, commis une erreur de droit ou fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je dois rejeter l’appel.

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle erré parce qu’elle n’a pas considéré que la loi traitait la prestataire différemment des autres prestataires et violait ainsi ses droits à l’égalité, garantis par la Charte?

[14] La prestataire soutient que la division générale a commis une erreur du fait qu’elle n’a pas considéré que la loi la traitait différemment des autres prestataires et violait ses droits à la même protection et au même bénéfice de la loiFootnote 3.

[15] J’ai voulu savoir si la prestataire soulevait cette question liée à la Charte pour la première fois, à la division d’appel. J’ai donc écouté l’enregistrement de son audience devant la division générale.

[16] La prestataire n’a invoqué aucun argument lié à la Charte durant son audience devant la division générale. Ni sa demande de révision ni son avis d’appel ne soulèvent la question de la discrimination. Je remarque aussi qu’aucun avis ne signale qu’une question constitutionnelle aurait été présentée à la division généraleFootnote 4.

[17] Je conclus que la prestataire soulève une question liée à la Charte pour la première fois, à la division d’appel.

[18] D’après le principe général, une question liée à la Charte ne peut pas être soumise à la division d’appel pour une première fois, puisque la division générale a le pouvoir de trancher une telle questionFootnote 5.

[19] Selon moi, rien ne justifie ici de déroger à ce principe généralFootnote 6. La prestataire aurait pu présenter cette question à la division générale, mais elle ne l’a pas fait. Par ailleurs, la division d’appel ne dispose pas d'une preuve suffisante pour trancher une question liée à la Charte.  

[20] Je dois donc rejeter ce motif d’appel.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle mal interprété les mesures législatives d’urgence, si l’on tient compte du site Web de la Commission qui ne précise nulle part que le taux de la prestation d’urgence temporaire pour la COVID-19 serait réservé aux parents dont les enfants sont nés à compter du 27 septembre 2020, ou réservé aux périodes pour des prestations de maternité et des prestations parentales seulement, qui commencent le 27 septembre 2020 ou plus tard?

[21] Je note que le site Web de la Commission précise seulement que des changements temporaires seront apportés au régime d’assurance-emploi à compter du 27 septembre 2020, dans le but de faciliter l’accès aux prestations de maternité et aux prestations parentales. Il est précisé que le changement, à savoir le taux de 500 $, [traduction] « pourrait s’appliquer à vousFootnote 7 ».

[22] À mes yeux, l’information fournie sur le site Web incite les prestataires à se renseigner davantage et à communiquer avec la Commission pour connaître leur admissibilité possible à ce changement temporaire relatif aux prestations de maternité et aux prestations parentales. On ne prétend pas fournir des informations qui permettraient de régler chaque cas particulier.

[23] De plus, un prestataire ne peut pas raisonnablement traiter les informations du site Web de la Commission comme si elles lui avaient personnellement été données par un représentant de la Commission qui l'aviserait sur son admissibilité d'après des faits précisFootnote 8.

[24] Je conclus que la division générale n’a pas commis une erreur de fait ou de droit. Qui plus est, je juge qu’il n’y a aucune contradiction entre les informations figurant sur le site Web de la Commission et la façon dont la division générale a interprété les mesures législatives d’urgence.

[25] La prestataire a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi le 30 août 2020. Elle a précisé qu’elle était enceinte et voulait que ses prestations de maladie soient versées immédiatement après ses prestations de maladie. Une période de prestations commençant le 16 août 2020 a été établie.

[26] Conformément à la loi spéciale qui est entrée en vigueur le 15 mars 220, une période de prestations commençant le 16 août 2020 a été établie, pour la PCU.

[27] Plus tard, la prestataire a informé la Commission que son bébé était né prématurément, le 11 septembre 2020. Il était seulement prévu qu'elle accouche durant la dernière semaine d’octobre 2020. La prestataire a reçu la PCU pendant deux semaines, puis est passée aux prestations de maternité à compter du 6 septembre 2020Footnote 9. Elle a alors bénéficié d’un taux de prestations correspondant à 55 % de sa rémunération hebdomadaire assurableFootnote 10.

[28] Malheureusement pour la prestataire, les modifications apportées aux prestations de maternité et aux prestations parentales sont entrées en vigueur le 27 septembre 2020. À ce moment, sa période de prestations avait déjà été établie et son enfant était déjà né. La division générale n’a commis aucune erreur en concluant que la prestataire n’était pas admissible à un taux de prestations de 500 $Footnote 11.

[29] La prestation invoque la date réelle à laquelle il était prévu qu’elle accouche, soit la dernière semaine d’octobre 2020. Elle avance qu’elle aurait pu attendre et faire commencer sa période de prestations le 27 septembre 2020.

[30] Selon la Loi sur l’assurance-emploi, les prestations de maternité doivent être payées la semaine de l’accouchement. La période de prestations de maternité de la prestataire a donc commencé le 6 septembre 2020, soit la semaine où son enfant est né. La Commission ne pouvait donc pas fixer le début de sa période de prestataire au 27 septembre 2020 pour la faire bénéficier de la mesure législative d’urgence.

[31] Même si je compatis avec la situation de l’appelante, il était impossible que la division générale lui accorde le taux de prestations de 500 $ qu’elle réclamait sans commettre une erreur de droit. Le fait que la Commission pourrait avoir mal renseigné la prestataire n’empêche aucunement l’application de la Loi.

[32] Je dois souligner que la loi spéciale ne permet aucun écart et ne me donne aucun pouvoir discrétionnaire pour l’appliquerFootnote 12.

[33] Je comprends l’argument de la prestataire, qui soutient que l’application de cette loi spéciale la pénalise parce que son enfant est né prématurément. Néanmoins, ni la division générale ni la division d’appel n’ont le pouvoir de s’écarter des règles établies par le législateur pour l’admissibilité aux prestations.

[34] Ce motif d’appel est rejeté.

Conclusion

[35] L’appel est rejeté.

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