Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 488

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. S.
Représentant : W. K
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission
de l’assurance-emploi du Canada (379404) datée du
16 janvier 2020 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Suzanne Graves
Mode d’audience : Téléconférence
Date d’audience : Le 12 août 2021
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Représentant de la partie appelante
Date de la décision : Le 26 août 2021
Numéro de dossier : GE-21-1040

Sur cette page

Décision

[1] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler et capable de le faire du 15 juillet 2018 au 2 février 2019. Cela signifie qu’il ne peut pas recevoir des prestations d’assurance-emploi.  

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada n’a pas prouvé que le prestataire a déclaré en toute connaissance de cause des renseignements faux ou trompeurs. Par conséquent, j’estime que l’avertissement et l’avis de violation doivent être retirés.

[3] Cela signifie que l’appel est accueilli en partie.

Aperçu

[4] Le prestataire a perdu son emploi le 17 juillet 2018. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance‑emploi du 15 juillet 2018 au 2 février 2019, parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, la partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie que la partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[5] La Commission affirme que le prestataire était incapable de travailler en raison des blessures subies lors d’un accident. Le prestataire dit qu’il a eu un accident d’automobile la journée après avoir quitté son emploi, mais il cherchait quand même un emploi parce qu’il croyait être capable de travailler malgré ses limitations physiques.

[6] La Commission a aussi décidé que le prestataire a déclaré des renseignements faux ou trompeurs. Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, la partie prestataire remplit des déclarations en ligne. Les déclarations posent une série de questions. La Commission dit qu’elle a examiné les réponses du prestataire concernant sa disponibilité pour le travail. Elle a décidé qu’il avait déclaré en toute connaissance de cause des renseignements faux ou trompeurs en disant qu’il était disponible pour travailler. La Commission a infligé un avertissement et un avis de violation.

[7] Le prestataire dit qu’il n’a pas sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs. Il dit qu’il croyait pouvoir travailler à l’époque et ne comprenait pas ce que l’on exigeait de sa part, en partie parce qu’il y avait une barrière linguistique. 

Questions en litige

[8] Je dois examiner les deux questions suivantes :

  1. a) Le prestataire était-il capable de travailler et disponible pour le faire?
  2. b) La Commission a-t-elle prouvé que le prestataire a déclaré en toute connaissance de cause des renseignements faux ou trompeurs dans ses déclarations en ligne? Si c’est le cas, je dois donc décider si la Commission avait raison d’infliger un avertissement et un avis de violation.

Analyse

Le prestataire était-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[9] Deux articles de loi exigent que la partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travailler. La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible selon ces deux articles. Il doit répondre aux critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[10] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1 . Le Règlement sur l’assurance-emploi présente des critères qui aident à expliquer les « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 2  ». Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[11] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit aussi que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 3 . La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 4 .

[12] La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’il n’était pas capable de travailler et disponible pour le faire selon ces deux articles de loi. Je vais maintenant examiner ces deux articles pour décider si le prestataire était disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[13] Le droit énonce les critères que je dois prendre en considération pour décider si les démarches du prestataire étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 5 . Je dois décider si ces démarches étaient soutenues et si elles visaient à trouver un emploi convenable. Autrement dit, le prestataire doit avoir continué à chercher un emploi convenable.

[14] Je dois aussi évaluer les démarches que le prestataire a faites pour se trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi présente une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte, comme préparer un curriculum vitae ou une lettre de présentation, postuler pour des emplois et s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, à des banques d’emploi en ligne ou auprès de bureaux de placementNote de bas de page 6 .  

[15] La Commission affirme que les démarches du prestataire n’étaient pas suffisantes pour trouver un emploi. Elle a demandé au prestataire de fournir un dossier de ses démarches de recherche d’emploiNote de bas de page 7 . Le dossier du prestataire comportait seulement des demandes d’emploi à Mississauga et il a dit qu’il ne pouvait pas se déplacer aussi loin.

[16] Le prestataire soutient qu’il ressentait de la douleur, mais a quand même postulé pour des emplois. Il a dit qu’il ne comprenait pas ce qu’on exigeait de lui, en partie à cause d’une barrière linguistique. Il affirme qu’il ne s’était pas rendu compte que ses blessures étaient sérieuses et croyait pouvoir travailler malgré ses limitations physiques. Plus tard, il a découvert qu’il avait une déchirure musculaire et ne pouvait pas travailler du tout. Il ne pouvait pas travailler dans un entrepôt parce qu’il n’avait pas de force musculaire. Il a affirmé que plusieurs entreprises de transport n’embauchaient pas et qu’il ne pouvait pas trouver d’emploi de conducteur de camion à une distance raisonnable de chez lui.

[17] Après avoir examiné le dossier de recherches d’emploi du prestataire, je constate que le prestataire n’a pas démontré qu’il a fait assez de démarches pour trouver un emploi. Selon son dossier de recherches d’emploi, il a postulé à cinq postes en deux semaines, et a signalé qu’il a refusé deux offres d’emploi parce que les emplois se trouvaient trop loin de sa maison.

[18] J’estime que le prestataire n’a pas démontré que les démarches qu’il a faites pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnables.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[19] La loi exige que la partie prestataire prouve qu’elle est capable de travailler et disponible pour le faire. Selon la jurisprudence, il y a trois éléments à examiner avant de décider si le prestataire était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable. Le prestataire doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas de page 8  : 

  1. a) Il veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. b) Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. c) Il a évité d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire limiteraient trop) ses chances de retourner travailler.

[20] Les arguments clés dans ce cas portent sur le fait de savoir si le prestataire était capable de travailler, donc je vais aborder cette question en premier.  

[21] La Commission affirme que le prestataire était incapable de travailler en raison des blessures qu’il a subies lors d’un accident d’automobile en juillet 2018. Les notes médicales dans le dossier montrent qu’il était blessé et incapable de travailler à compter du 20 juillet 2018Note de bas de page 9 . Le 6 mars 2019, il a dit à la Commission qu’il était incapable de travailler depuis le 20 juillet 2018Note de bas de page 10 .

[22] Lors de l’audience, le prestataire a affirmé qu’il avait eu un accident la journée après avoir perdu son emploi. Il a dit qu’il croyait pouvoir travailler à l’époque, mais il a reconnu que ses blessures physiques ont fait en sorte qu’il était incapable de travailler depuis l’accident.

[23] J’estime que le prestataire n’était pas capable de travailler du 15 juillet 2018Note de bas de page 11 au 2 février 2019. J’ai fondé cette conclusion sur les preuves médicales dans le dossier de la Commission, les déclarations du prestataire à la Commission et le témoignage du prestataire devant le Tribunal.

[24] Puisque j’ai décidé que le prestataire n’était pas capable de travailler en raison de ses blessures, je ne dois pas décider s’il a démontré qu’il était disponible pour travailler selon les trois éléments ci-dessus.

[25] J’estime que le prestataire n’a pas prouvé qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire.

Est-ce que le prestataire a déclaré en toute connaissance de cause des renseignements faux ou trompeurs?

[26] Pour infliger une pénalité, la Commission doit prouver que le prestataire a déclaré en toute connaissance de cause des renseignements faux ou trompeursNote de bas de page 12

[27] Il ne suffit pas que les renseignements soient faux ou trompeurs. Pour infliger une pénalité, la Commission doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a fourni les renseignements tout en sachant qu’ils étaient faux ou trompeursNote de bas de page 13

[28] Si, d’après les preuves, il est clair que les questions étaient simples et que le prestataire a répondu de manière incorrecte, je peux déduire que le prestataire savait que les renseignements étaient faux ou trompeurs. Ensuite, le prestataire doit expliquer pourquoi il a fourni des réponses incorrectes et démontrer qu’il ne l’a pas fait sciemmentNote de bas de page 14 . La Commission peut infliger une pénalité pour chaque déclaration fausse ou trompeuse que le prestataire a faite en toute connaissance de cause. 

[29] Je ne dois pas décider si le prestataire avait l’intention de frauder ou tromper la Commission quand je décide s’il devrait faire l’objet d’une pénalitéNote de bas de page 15 .

[30] Chaque déclaration en ligne pose la question suivante [traduction] : « Étiez-vous prêt et disposé à travailler, et capable de le faire chaque jour, du lundi au vendredi, pendant chaque semaine de cette déclaration? » Dans les quinze déclarations en ligne, le prestataire a répondu « Oui » à cette questionNote de bas de page 16 . Étant donné cette réponse dans chaque déclaration, la Commission affirme que le prestataire a fait quinze déclarations fausses ou trompeuses en toute connaissance de cause. Selon la Commission, il savait qu’il s’était blessé à la suite de son accident, donc qu’il était incapable de travailler, mais a faussement déclaré qu’il était disponible pour travailler.

[31] La Commission a initialement infligé une pénalité pécuniaire. Mais après une révision, elle a décidé de plutôt donner un avertissement. La Commission a aussi infligé un avis de violation. Une violation signifie que la partie prestataire doit travailler plus d’heures d’emploi assurable pour être admissible pour des prestations d’assurance-emploi.   

[32] Le prestataire affirme qu’il n’a pas sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs dans ses déclarations. Il dit qu’après l’accident il ne s’était pas rendu compte à quel point sa blessure était sérieuse. Il soutient que s’il avait su qu’il était incapable de travailler, il aurait présenté une demande de prestations d’invalidité plutôt que d’assurance-emploi.

[33] Il affirme qu’il croyait pouvoir travailler à l’époque, malgré ses limitations physiques. Il a continué ses recherches d’emploi parce qu’il devait gagner sa vie. Il a dit que ce n’est qu’en mars 2019 qu’il a compris qu’il souffrait d’une grave blessure physique et qu’il était incapable de retourner au travail.

[34] La question dans les déclarations que le prestataire remplit toutes les deux semaines est simple et directe. Toutefois, j’estime que le prestataire a fourni une explication raisonnable concernant ses réponses dans ses déclarations. Cette explication concorde avec le fait qu’il a présenté quelques demandes d’emploi pendant la période en question. En conséquence, j’estime que la Commission n’a pas prouvé qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a fourni en toute connaissance de cause des renseignements faux ou trompeurs dans ses déclarations.

[35] Puisque la Commission n’a pas prouvé que le prestataire a déclaré sciemment des renseignements faux ou trompeurs, un avertissement et un avis de violation ne peuvent pas être infligés.

[36] Puisque j’estime que le prestataire n’a pas déclaré sciemment des renseignements faux ou trompeurs, je ne dois pas décider si la Commission a correctement exercé son pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle a infligé l’avertissement et l’avis de violation. 

[37] Le prestataire m’a demandé si je pouvais lui donner une dispense ou réduire le montant de son paiement en trop des prestations d’assurance-emploi qu’il a reçues. En ce qui concerne le paiement en trop de prestations, je n’ai pas l’autorité de réduire le montant ou de donner une dispense. Seule la Commission est en mesure de défalquer une somme due aux termes de l’article 43 de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 17 .

[38] Je sympathise avec le prestataire, étant donné sa situation financière. Toutefois, je dois suivre les règlements établis dans la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne peux pas faire une exception pour les cas spéciaux malgré mon souci de compassionNote de bas de page 18 .

Conclusion

[39] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire comme l’entend la loi. J’estime donc que le prestataire ne peut pas recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi du 15 juillet 2018 au 2 février 2019. Par conséquent, sur la question de la disponibilité, l’appel est rejeté. 

[40] J’estime que le prestataire ne doit pas faire l’objet d’un avertissement ou d’un avis de violation. Donc, sur la question de l’avertissement et de la violation, l’appel est accueilli.

[41] L’appel est accueilli en partie.

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