Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Assurance-emploi – choix des prestations parentales – analyse approfondie – caractère irrévocable – article 23(1.2) de la Loi sur l’assurance-emploi

Lorsque la prestataire a demandé des prestations parentales, elle a choisi l’option des prestations prolongées dans le formulaire de demande. Elle a demandé 57 semaines de prestations. La prestataire s’est rendu compte de son erreur dans le formulaire de demande quand le taux (la somme) de prestations parentales hebdomadaires qu’elle a obtenu s’est révélé inférieur à la somme hebdomadaire de prestations de maternité qu’elle avait reçue. La prestataire a demandé à la Commission de passer de l’option des prestations prolongées à l’option des prestations parentales standards. La Commission a dit non. La prestataire ne pouvait pas modifier son choix parce qu’elle avait déjà commencé à recevoir des versements de prestations parentales prolongées. Elle a donc fait appel à la division générale (DG).

La DG a conclu que la prestataire avait toujours eu l’intention de prendre congé du travail pendant un peu plus d’un an. Elle a à tort demandé 57 semaines de prestations, en pensant qu’elle demandait un total de 52 semaines de prestations. Elle ne s’est pas rendu compte qu’elle demandait seulement des prestations parentales et que sa demande n’incluait pas 15 semaines de prestations de maternité. La DG a conclu que la prestataire avait choisi de recevoir les prestations parentales standards parce qu’elle avait l’intention de prendre congé du travail pendant un an, car elle croyait demander un total d’un an de prestations (comprenant à la fois les prestations de maternité et les prestations parentales). La DG a conclu qu’il aurait été déraisonnable pour la prestataire de choisir les prestations parentales prolongées qui rapportent une somme hebdomadaire de prestations inférieure à celle des prestations standards. La Commission a porté la décision de la DG en appel devant la division d’appel (DA).

Avant que l’audience de la DA ait lieu, la prestataire a avisé la DA qu’elle acceptait de garder les prestations parentales prolongées au lieu des prestations standards, malgré la décision de la DG selon laquelle elle avait choisi les prestations standards. Elle retournera au travail plus tard que prévu et ne demandait plus les prestations parentales standards. Elle a demandé le retrait de son appel, mais c’était la Commission qui cherchait à faire appel et qui ne souhaitait pas se retirer.

La DA est allée de l’avant avec l’appel. La DA a décisé que la DG avait négligé (ignoré) la preuve de la prestataire selon laquelle elle n’avait pas compris les différences entre les deux types de prestations parentales quand elle avait rempli le formulaire de demande. Cela aurait pu être suffisamment important si elle avait en fait choisi un type de prestations parentales plutôt qu’un autre. La DG aurait dû analyser l’ensemble de cette preuve de manière approfondie (utile). Malgré cela, les parties ont convenu de ce qu’il fallait faire avec l’appel. Elles étaient d’accord pour dire que la prestataire devrait continuer de recevoir les prestations parentales prolongées, comme elle l’avait fait dès le départ. Les parties ont donc essentiellement convenu d’annuler la décision de la DG. Pour cette raison, la DA a accueilli l’appel de la Commission, a mis de côté la décision de la DG et a décidé que la prestataire continuerait de recevoir les prestations parentales prolongées.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c JC, 2021 TSS 514

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentant : A. F.
Partie intimée : J. C.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 14 mai 2021 (GE-21-688)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 23 septembre 2021
Numéro de dossier : AD-21-188

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. J’annule la décision de la division générale. La prestataire recevra des prestations parentales prolongées.

Aperçu

[2] La partie appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, fait appel de la décision de la division générale. La division générale a conclu que la prestataire avait choisi des prestations parentales standards plutôt que des prestations parentales prolongées.  

[3] La Commission fait valoir que la division générale a commis des erreurs de compétence, de droit et de fait. Par exemple, elle fait valoir que la division générale n’a pas bien analysé la preuve. La Commission soutient que la prestataire a choisi des prestations parentales prolongées.

[4] Avant l’audience, la prestataire a informé le Tribunal de la sécurité sociale qu’elle acceptait de recevoir les prestations parentales prolongées comme prévu. Elle retournera travailler après la date qu’elle avait d’abord prévue. Elle ne souhaite plus changer ses prestations pour des prestations parentales standards. Elle demande à ce que l’appel soit retiré. Toutefois, le présent appel est celui de la Commission et celle-ci ne souhaite pas le retirer.

[5] Je dois quand même examiner les questions en litige dans cet appel. Je suis d’accord avec la Commission que la division générale n’a pas bien analysé la preuve. Elle a négligé la preuve de la prestataire selon laquelle elle n’ait pas compris les différences entre les deux types de prestations parentales lorsqu’elle a rempli le formulaire de demande.

[6] Les deux parties sont d’accord sur le recours et les résultats. Elles sont d’accord que la prestataire devrait continuer à recevoir des prestations parentales prolongées. Essentiellement, elles sont d’accord pour annuler la décision de la division générale. Pour cette raison, j’annule la décision de la division générale. La prestataire continuera à recevoir des prestations parentales prolongées.

Question en litige

[7] La Commission a soulevé plusieurs questions, mais je me concentrerai sur la question de savoir si la division générale a omis de bien analyser la preuve.

Analyse

[8] La division d’appel peut modifier une décision si des erreurs de compétence, de droit ou de fait ont été commises. La Commission fait valoir que la division générale a commis des erreurs de compétence, de droit et de fait.  

Faits contextuels

[9] Il existe deux types de prestations parentales :

  • Les prestations parentales standards – le taux de prestations est de 55 % de la rémunération hebdomadaire du demandeur jusqu’à concurrence d’un montant maximal. Jusqu’à 35 semaines de prestations payables à un parent.
  • Les prestations parentales prolongées – Le taux de prestations est de 33 % de la rémunération hebdomadaire assurable du demandeur jusqu’à concurrence d’un montant maximal. Jusqu’à 61 semaines de prestations payables à un parent.  

[10] Lorsque la prestataire a fait une demande de prestations parentales, elle a choisi l’option des prestations prolongées dans le formulaire. Elle a demandé 57 semaines de prestations.

[11] La prestataire a réalisé qu’elle avait fait une erreur dans le formulaire de demande lorsqu’elle a commencé à toucher des prestations parentales. Le taux de prestations parentales hebdomadaires était inférieur à celui des prestations de maternité qu’elle avait reçues.  

[12] La prestataire a demandé à la Commission de changer l’option des prestations parentales prolongée pour celle des prestations standards. La Commission a refusé la demande de la prestataire. La Commission a informé la prestataire qu’elle ne pouvait pas changer son choix de prestations parentales parce qu’elles avaient déjà commencé à lui être versées. Par conséquent, elle a fait appel de la décision devant la division générale.

[13] La division générale a conclu que la prestataire avait toujours envisagé d’être en congé un peu plus qu’une année. Elle a demandé par erreur 57 semaines de prestations en pensant qu’elle demandait au total 52 semaines de prestations. Elle n’a pas réalisé qu’elle demandait seulement des prestations parentales et que sa demande ne comprenait pas 15 semaines de prestations de maternité.  

[14] La division générale a conclu que la prestataire avait choisi de recevoir des prestations standards parce qu’elle comptait être en congé pendant un an et qu’elle croyait demander au total une année de prestations (ce qui comprend les prestations de maternité et parentales). La division générale a estimé qu’il n’aurait pas été sensé que la prestataire choisisse des prestations prolongées lui offrant un taux hebdomadaire inférieur à celui des prestations standards.

[15] La Commission fait valoir que la division générale a commis plusieurs erreurs, notamment :

  • Elle n’a pas bien analysé la preuve.
  • Elle n’a pas appliqué l’article 23(1) de la Loi sur l’assurance-emploi.
  • Elle n’a pas appliqué les principes établis dans l’affaire KarvalNote de bas de page 1 .
  • Elle a outrepassé ses compétences en décidant quelle option la prestataire avait choisie et en établissant la validité de ce choix.

[16] Je me concentrerai sur I’argument de la Commission voulant que la division générale n’a pas bien analysé la preuve. Cela ne signifie aucunement que j’ai tiré des conclusions sur le poids des arguments de la Commission.  

Est-ce que la division générale a omis de bien analyser la preuve?

[17] Les réponses de la prestataire sur le formulaire de demande laissent entendre qu’elle voulait des prestations parentales prolongées. Elle a mentionné qu’elle comptait retourner au travail après 13 mois de congé. Elle a choisi l’option des prestations prolongées plutôt que l’option des prestations standards et elle a demandé 57 semaines de prestations parentales. Même si les 57 semaines comprennent les prestations de maternité, cela représentait quand même plus qu’une année de prestations.  

[18] Malgré la preuve, la division générale a conclu que la prestataire avait en fait choisi l’option standard. La division générale s’est fiée au moment où la prestataire comptait retourner travailler. La division générale a également accepté la preuve de la prestataire voulant qu’elle ait cru à tort que le nombre de semaines demandées était le total des semaines de prestations qu’elle obtiendrait. De plus, la division générale a conclu qu’il aurait été déraisonnable que la prestataire choisisse de recevoir un taux hebdomadaire de prestations parentales moins élevé.

[19] La Commission fait valoir que la division générale n’a pas bien analysé la preuve lorsqu’elle a conclu que la prestataire avait choisi l’option standard. Tout particulièrement, elle mentionne que la division générale a ignoré de l’information sur le formulaire de demande.

[20] La Commission fait valoir que sur le formulaire de demande, il est clairement indiqué que les prestations de maternité sont différentes des prestations parentales, et que les prestations de maternité sont  versées avant les prestations parentales. La Commission fait également valoir que l’information sur le formulaire de demande précise les différences entre les prestations parentales standards et prolongées, y compris les taux des paiementsNote de bas de page 2 .

[21] Il pouvait être déraisonnable que la prestataire choisisse l’option offrant un taux hebdomadaire moins élevé, comme la division générale l’a conclu. Toutefois, la Commission fait valoir que la prestataire aurait dû savoir qu’elle recevrait des prestations parentales moins élevées si elle choisissait l’option prolongée. De toute évidence, selon le formulaire de demande, les prestations parentales prolongées offrent un taux hebdomadaire moins élevé en comparaison aux prestations standards.

[22] La preuve a démontré que la prestataire ne comprenait simplement pas les différences entre les deux types de prestations parentalesNote de bas de page 3 , surtout les différences entre les prestations de maternité et les prestations parentales.

[23] La prestataire a avoué qu’elle était confuse. Elle pensait obtenir 35 semaines de prestations de maternité, même s’il est mentionné sur le formulaire de demande qu’il y a au plus 15 semaines de prestations de maternité. De plus, la seule mention de 35 semaines figurant sur le formulaire de demande concerne les prestations parentales.   

[24] La prestataire pensait que 35 semaines de prestations parentales standards seraient insuffisantes puisqu’elles ne totalisaient pas un an, la durée de la période qu’elle souhaitait être en congé. Ainsi, cette interprétation l’a menée à choisir des prestations parentales prolongéesNote de bas de page 4 , sans tenir compte du taux de prestations hebdomadaire de chaque type de prestations parentales.

[25] Il était important d’examiner cette preuve. En effet, si la prestataire ne comprenait pas les différences entre les deux types de prestations parentales, cet élément aurait pu être un facteur à considérer pour déterminer si elle avait choisi délibérément un type de prestations plutôt qu’un autre. La division générale aurait dû bien analyser l’ensemble de la preuveNote de bas de page 5 .

Réparation

[26] Les deux parties sont d’accord sur la réparation et l’issue de l’appel. Elles conviennent que la prestataire devrait continuer à recevoir des prestations parentales prolongées. Essentiellement, elles sont d’accord pour annuler la décision de la division générale. Pour cette raison, j’annule la décision de la division générale. La révision de la décision de la Commission demeure donc en vigueur. Pour cette raison, la prestataire recevra des prestations parentales prolongées.  

Conclusion

[27] L’appel est accueilli. J’annule la décision de la division générale. La prestataire doit continuer à recevoir des prestations parentales prolongées.

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