Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

assurance-emploi – compétence – emploi à l’étranger – La division générale a excédé sa compétence en examinant si l’emploi à l’étranger était assurable ou non

Le prestataire a travaillé en Irlande de novembre 2019 à août 2020. À son retour au Canada, il a demandé des prestations régulières de l’assurance-emploi (AE). Le prestataire voulait utiliser les heures de travail qu’il avait effectuées en Irlande pour avoir droit aux prestations d’AE. La Commission a refusé sa demande parce qu’elle a conclu que le travail en Irlande ne pouvait pas compter pour être admissible aux prestations d’AE.

La division générale (DG) a rejeté l’appel du prestataire et a décidé qu’un accord international (Accord sur la sécurité sociale entre le Canada et l’Irlande) ne s’appliquait pas aux affaires d’AE. En général, lorsqu’un prestataire croit que son travail est « assurable » pour l’aider à être admissible aux prestations d’AE, la DG demande habituellement à la Commission de demander à l’Agence du revenu du Canada (ARC) de trancher la question de savoir si l’emploi du prestataire en Irlande était « assurable » en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi. La DG a demandé à la Commission de demander à l’ARC de trancher la question, mais la Commission n’a pas répondu avant que la DG ne statue sur l’appel. La DG a décidé que le Règlement sur l’assurance-emploi ne permettait pas au prestataire de compter sur les heures qu’il avait travaillées en Irlande et qu’il ne s’agissait pas d’un emploi assurable.

Le prestataire a fait appel à la division d’appel (DA) qui a accueilli l’appel. La DA a décidé que la DG avait excédé son pouvoir légal (ou sa « compétence ») lorsqu’elle a décidé que l’emploi du prestataire en Irlande était un emploi assurable. Seule l’ARC a le droit légal de décider de cette question. La DA a retourné l’appel à la DG pour réexamen avec des directives. La DG doit maintenant attendre que l’ARC décide si le travail en Irlande du prestataire était un « emploi assurable » avant de rendre une décision finale.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : MG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 661

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : M. G.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Jordan Fine

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 9 août 2021 (GE-21-1072)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 8 novembre 2021
Numéro de dossier : AD-21-293

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Décision

[1] L’appel est accueilli. La division générale a excédé sa compétence en décidant si l’emploi du prestataire à l’étranger était assurable ou non et en déterminant le nombre d’heures d’emploi assurable qu’il avait accumulées. J’annule la décision de la division générale et je renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives.

Aperçu

[2] L’appelant, M. G. (prestataire), a fait appel de la décision de la division générale.

[3] La division générale a conclu que l’Accord sur la sécurité sociale entre le Canada et l’IrlandeNote de bas page 1 ne s’appliquait pas aux questions liées à l’assurance-emploi. Par conséquent, le prestataire ne satisfaisait pas aux exigences prévues par le Règlement sur l’assurance-emploiNote de bas page 2 (Règlement) qui lui auraient permis de faire de son emploi à l’étranger un emploi assurable. Autrement dit, la division générale a conclu que le prestataire ne pouvait pas se fier aux heures qu’il avait travaillées en Irlande. Il n’aurait donc pas accumulé d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi au Canada.

[4] Le prestataire soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs de droit et de fait. Il fait valoir que la division générale n’a pas reconnu que l’Accords’appliquait. Il soutient qu’il aurait dû pouvoir se fier à ses heures travaillées en Irlande. Il prétend aussi que la division générale ne lui a pas offert un processus équitable, parce qu’elle a rendu sa décision avant d’obtenir une décision de l’Agence du revenu du Canada (ARC).

[5] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, soutient que la décision de la division générale était prématurée. Elle fait valoir que seule l’ARC est autorisée par le ministre du Revenu national à déterminer le nombre d’heures d’emploi assurable d’une partie prestataire. Autrement dit, la Commission soutient que la division générale a excédé sa compétence. Elle convient que l’appel doit être accueilli et que l’affaire doit être renvoyée à la division générale.

[6] La Commission a entre-temps obtenu une décision de l’ARC confirmant que l’emploi du prestataire à l’étranger ne remplit pas les conditions énoncées à l’article 5 du Règlement. Autrement dit, le prestataire ne peut pas se fier à ses heures travaillées en Irlande. Le prestataire fait appel de cette décision. Il soutient que la division d’appel devrait attendre l’issue de son appel avant de rendre une décision puisque de [traduction] « nouveaux arguments peuvent être invoqués dans le cadre du débatNote de bas page 3 ».

Question en litige

[7] Le prestataire soulève plusieurs questions, mais une seule doit être abordée pour trancher l’affaire : la division générale a-t-elle excédé sa compétence?

Analyse

[8] La division d’appel peut remettre en cause les décisions de la division générale s’il elles contiennent des erreurs de compétence, de procédure, de droit ou de faitNote de bas page 4.

Contexte

[9] Le prestataire a travaillé comme chargé de cours et professeur adjoint de droit et de gestion des affaires à la National University of Ireland à Dublin de novembre 2019 à août 2020. Une fois de retour au Canada, il a demandé des prestations d’assurance‑emploi. Le prestataire se fie à ses heures d’emploi en Irlande pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Il n’a accumulé aucune autre heure d’emploi assurable.

La division générale a-t-elle excédé sa compétence?

[10] La division générale a examiné si l’emploi du prestataire à l’étranger était assurable. Elle a examiné si le prestataire répondait aux exigences prévues à l’article 5 du Règlement. Cet article porte sur le fait de savoir si l’emploi d’une partie prestataire à l’étranger constitue un emploi assurable.

[11] Le prestataire soutient que la [traduction] « Commission a choisi de s’emparer de la compétence de la division générale en ne respectant pas la décision provisoire datée du 8 juillet 2021 qui l’obligeait à demander une décision de l’ARC sur l’assurabilité de [ses] heures d’emploi en IrlandeNote de bas page 5 ».

[12] La Commission convient que la division générale a excédé sa compétence lorsqu’elle a examiné si l’emploi de l’appelant à l’étranger constituait un emploi assurable au titre de l’article 5 du Règlement. La Commission soutient que seuls les fonctionnaires de l’ARC autorisés par le ministre du Revenu national peuvent déterminer les heures d’emploi assurable de l’appelant, comme le prévoit l’article 90(1) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

[13] Selon l’article 90(1) de la Loi, la Commission, de même que toute personne employée, peut demander aux fonctionnaires de l’ARC autorisés par le ministre de rendre une décision sur différentes questions, dont celle de savoir si un emploi est assurable.

[14] L’article est clair. La division générale a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher. Elle n’aurait pas dû décider si l’emploi du prestataire à l’étranger constituait un emploi assurable. La compétence pour trancher une telle question appartient exclusivement au ministre du Revenu nationalNote de bas page 6.

[15] Compte tenu de la nature de l’erreur de la division générale, il n’est pas nécessaire d’examiner le reste des arguments du prestataire.

Réparation

[16] Comment puis-je réparer l’erreur de la division générale? Deux choix s’offrent à moiNote de bas page 7 : je peux substituer ma propre décision à celle de la division générale ou je peux renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives. Si je rends ma propre décision, cela signifie que je peux tirer des conclusions de faitNote de bas page 8.

[17] L’ARC a rendu une décision le 21 octobre 2021Note de bas page 9 confirmant que l’emploi du prestataire à l’étranger ne respecte pas les conditions énoncées à l’article 5 du Règlement. Autrement dit, le prestataire ne peut pas se fier aux heures qu’il a travaillées à l’étranger.

[18] Comme la division d’appel ne tient pas compte de nouveaux éléments de preuve, la Commission soutient qu’elle ne devrait pas prendre en considération la récente décision de l’ARC. La Commission fait également valoir qu’il serait approprié que la division d’appel renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen.

[19] Le prestataire confirme qu’il est au courant de la récente décision de l’ARC. Il fait appel de cette décision devant le chef des appels de la Division des appels du Régime de pensions du Canada (RPC) et de l’assurance-emploi de l’ARCNote de bas page 10. Les décisions de la Division des appels du RPC et de l’assurance-emploi sont définitives et ont force exécutoire. Seule la Cour canadienne de l’impôt peut les annuler.

[20] Dans sa lettre du 29 octobre 2021, le prestataire demande à la division d’appel [traduction] « d’exercer sa compétence et de trancher l’affaire elle-même ».

[21] Dans sa dernière correspondance, le prestataire soutient plutôt que la division d’appel devrait s’abstenir de rendre une décision sur l’affaire, [traduction] « étant donné que de nouveaux arguments [découlant de son appel de la décision de l’ARC] peuvent être invoqués dans le cadre du débatNote de bas page 11 ».

[22] Le prestataire a d’abord demandé à la division d’appel d’exercer sa compétence et de [traduction] « trancher l’affaire ». Toutefois, comme je l’ai mentionné précédemment, seul le ministre du Revenu national a compétence pour décider si l’emploi du prestataire est assurable. Les parties ont maintenant reçu la décision de l’ARC, et celle-ci fait présentement l’objet d’un appel.

[23] L’issue de l’appel de la décision de l’ARC interjeté par le prestataire n’aura aucune incidence sur la présente affaire. Une décision de la Division des appels du RPC et de l’assurance-emploi ne peut en quelque sorte réparer l’erreur de compétence de la division générale. Ma décision sur le présent appel sera la même, quelle que soit la décision du ministre du Revenu national. Je ne vois aucune raison de retarder le renvoi de l’affaire à la division générale pour réexamen.

[24] Je renvoie l’affaire à la division générale, avec directive qu’elle attende l’issue de l’appel du prestataire devant le ministre du Revenu national et qu’elle soit liée par cette décision, sous réserve de tout appel que l’une ou l’autre des parties pourrait interjeter devant la Cour canadienne de l’impôt.

Conclusion

[25] L’appel est accueilli. J’annule la décision de la division générale. Je renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen, avec directive qu’elle mette l’appel en suspens jusqu’à ce que les parties reçoivent une décision définitive de l’ARC. Cette décision aura force exécutoire sur la division générale.

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