Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 641

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : D. H.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (422132) datée du
30 avril 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Raelene R. Thomas
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 28 juin 2021
Personne présente à l’audience : Prestataire
Date de la décision : Le 6 juillet 2021
Numéro de dossier : GE-21-912

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] D. H., la prestataire, n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler du 31 janvier au 1er avril 2021.

[3] Elle ne peut donc pas recevoir de prestations d’assurance-emploi du 31 janvier au 1er avril 2021.

Aperçu

[4] La prestataire travaille comme infirmière auxiliaire autorisée. Elle fournissait des soins à un client au domicile de ce dernier. Lorsque la pandémie de COVID-19 a commencé, elle a cessé de travailler en mars 2020 en raison de problèmes de santé chroniques et du fait qu’elle est immunodéprimée. Elle a poursuivi une période de prestations en cours, puis a présenté une nouvelle demande de prestations de maladie de l’assurance-emploi le 18 juillet 2020. Le 4 octobre 2020, la Commission a automatiquement inscrit la prestataire aux prestations faisant suite à la prestation canadienne d’urgence. La prestataire a reçu 15 semaines de prestations de maladie de l’assurance-emploi jusqu’au 30 janvier 2021.

[5] La Commission a parlé avec la prestataire après la fin de ses prestations de maladie de l’assurance-emploi. Elle a mentionné à la Commission qu’elle n’était pas disponible pour travailler en raison de ses problèmes de santé. La Commission a décidé que la prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations régulières d’assurance-emploi, et ce, de la fin de ses prestations de maladie jusqu’au 1er avril 2021, parce qu’elle n’avait pas démontré qu’elle était disponible pour travailler. La prestataire n’est pas d’accord avec cette décision. Elle ne savait pas qu’elle devait chercher du travail en dehors de sa profession ou un emploi moins rémunérateur. Une fois qu’elle a su que c’était le cas, elle l’a fait. Elle mentionne qu’on devrait lui accorder un délai raisonnable avant de lui demander de chercher un emploi en dehors de sa profession ou qui est moins rémunérateur.

Question en litige

[6] La prestataire était-elle disponible pour travailler du 31 janvier au 1er avril 2021?

Analyse

[7] La loi exige que la personne démontre qu’elle est disponible pour travaillerNote de bas de page 1.

Emploi convenable

[8] Pour déterminer la disponibilité de la prestataire, je dois d’abord définir ce qui est considéré comme un emploi convenable pour elle. La loi énonce les critères dont je dois tenir compte au moment de déterminer ce qui constitue un emploi convenable, notamment :

  1. a) Si l’état de santé et les capacités physiques de la prestataire lui permettent de se rendre au lieu de travail et d’effectuer le travail;
  2. b) Si l’horaire de travail n’est pas incompatible avec les obligations familiales de la prestataire ou ses croyances religieuses;
  3. c) Si la nature du travail n’est pas contraire aux convictions morales ou aux croyances religieuses de la prestataireNote de bas de page 2.

[9] La prestataire a déclaré qu’elle était infirmière auxiliaire autorisée. Elle travaille pour un service de soins à domicile. Le superviseur est au courant de ses limitations. Avant la pandémie de COVID-19, la prestataire travaillait de nuit pour fournir des soins à un client, au domicile de ce dernier. Elle avait très peu d’interactions avec ses collègues, car elle remplissait ses rapports au moyen d’un ordinateur. La prestataire vit avec des membres de sa famille. Ce travail convenait à ses problèmes de santé.

[10] La prestataire a déclaré qu’elle était atteinte de fibromyalgie et d’un autre problème de santé chronique qui l’oblige à prendre des médicaments immunodépresseurs. En raison de la fibromyalgie, il est difficile pour elle d’effectuer des activités intenses, elle se fatigue facilement et elle a souvent besoin de périodes de repos. Les médicaments qu’elle prend pour un autre problème de santé chronique affaiblissent son système immunitaire, ce qui la rend vulnérable aux infections.

[11] Le médecin de la prestataire lui a prescrit un arrêt de travail en mars 2020 en raison de la pandémie de COVID-19. Le médecin a convenu qu’elle était à risque à la fin de mars 2020. La prestataire et son médecin ont discuté de son état et de sa capacité à travailler en mai 2021. Le médecin de la prestataire a dit qu’elle n’était pas en mesure de travailler à temps plein, mais qu’elle pouvait travailler à temps partiel.

[12] Le médecin de la prestataire lui a dit que si elle se sentait en état de travailler, elle pouvait retourner travailler. C’était à elle de décider. Entre-temps, elle avait l’autorisation de son médecin de demeurer en arrêt de travail. La prestataire a mentionné que son médecin n’était pas en mesure de juger de l’intensité de l’anxiété et de la crainte qu’elle avait de retourner travailler. Elle a consulté un professionnel pour gérer ses inquiétudes.

[13] Compte tenu des problèmes de santé de la prestataire, j’estime qu’un emploi convenable pour elle est un emploi qui peut être exercé en tenant compte des limitations physiques causées par sa fibromyalgie et son système immunitaire affaibli. Un emploi qui respecterait ces limitations ne serait pas exigeant sur le plan physique, permettrait des périodes de repos et limiterait les contacts avec d’autres personnes.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[14] La Commission a fait référence à l’inadmissibilité imposée selon les articles 18 et 50 de la Loi sur l’assurance-emploi et les articles 9.001 et 9.002 du Règlement sur l’assurance-emploi.

[15] Aux termes de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission peut exiger que les personnes prouvent qu’elles ont fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi conformément aux critères énoncés à l’article 9.001 du Règlement sur l’assurance-emploi. L’article 9.001 précise que les critères y figurant visent l’application de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 9.001 ne précise pas que les critères servent à déterminer la disponibilité d’une personne au sens de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi.

[16] Si une personne ne se conforme pas à une demande faite en vertu de l’article 50(8) qui exige qu’elle prouve avoir effectué des démarches habituelles et raisonnables, alors elle peut devenir inadmissible aux prestations au titre de l’article 50(1) de la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 50(1) prévoit que les personnes ne sont pas admissibles au bénéfice des prestations jusqu’à ce qu’elles satisfassent à une demande présentée au titre de l’article 50(8) et fournissent les renseignements exigés.

[17] Le dossier d’appel montre que la prestataire a reçu des prestations de maladie de l’assurance-emploi du 4 octobre 2020 au 30 janvier 2021. La Commission a communiqué avec elle le 24 février 2021 lorsqu’un agent de Service Canada a remarqué qu’elle avait mentionné ne pas être disponible pour travailler en raison d’un système immunitaire affaibli.

[18] La Commission a ensuite communiqué avec la prestataire le 1er avril 2021. Un agent de Service Canada lui a alors parlé de ses responsabilités précises en vertu de l’article 18 et l’a informée qu’elle ne les respectait pas. L’agent a demandé à la prestataire d’apporter des changements à sa recherche d’emploi et a dit qu’il communiquerait avec elle dans cinq jours ouvrables. Le 9 avril 2021, la prestataire a informé l’agent qu’elle avait postulé à des emplois. Il l’a déclarée disponible pour travailler à compter du 1er avril 2021.

[19] Cet élément de preuve me laisse croire que la Commission a d’abord exigé, le 1er avril 2021, que la prestataire démontre ses démarches pour chercher un emploi aux termes de l’article 50, selon le critère « habituelles et raisonnables » décrit à l’article 9.001. La Commission lui a donné cinq jours ouvrables pour le faire. Elle s’est conformée à cette demande le 9 avril 2021. Par conséquent, j’estime que les démarches de recherche d’emploi de la prestataire satisfont aux articles 50 et 9.001 et qu’une inadmissibilité n’a pas été imposée pour avoir omis de démontrer ses démarches pour trouver un emploiNote de bas de page 3.

[20] Dans ce cas, je n’ai qu’à décider si la prestataire était disponible pour travailler aux termes de l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi.

Capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable

[21] Pour recevoir des prestations de l’assurance-emploi, les personnes doivent être capables de travailler et disponibles pour le faire, mais incapables de trouver un emploi convenableNote de bas de page 4. La prestataire doit prouver les trois éléments suivants pour démontrer qu’elle était disponible pour travailler :

  1. Montrer qu’elle veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. Le manifester en prenant des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. Éviter d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 5.

[22] Je dois tenir compte de chacun de ces facteurs pour trancher la question de la disponibilitéNote de bas de page 6, et examiner l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 7.

La prestataire avait-elle le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable s’offrait à elle?

[23] Oui, j’estime que la prestataire a démontré un désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable s’offrait à elle.

[24] La prestataire a déclaré avoir occupé différents emplois pendant plus de 40 ans. Elle a une petite pension et a besoin de ce revenu. Elle a mentionné qu’il ne serait pas bon pour elle, physiquement ou mentalement, d’être à la maison toute la journée. Il est préférable pour elle de travailler.

La prestataire a-t-elle fait des démarches pour trouver un emploi convenable?

[25] Non, j’estime que la prestataire n’a pas fait de démarches pour trouver un emploi convenable.

[26] Selon un autre article de la loi, il y a une liste d’activités de recherche d’emploi à prendre en compte pour décider de la disponibilitéNote de bas de page 8. Cet autre article ne s’applique pas à l’appel de la prestataire. Toutefois, je choisis d’examiner cette liste pour m’aider à décider si la prestataire a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.

[27] Il y a neuf activités de recherche d’emploi : l’évaluation des débouchés professionnels, la préparation d’un curriculum vitæ ou d’une lettre d’accompagnement, l’inscription à des outils de recherche d’emploi ou à des banques d’emplois électroniques ou à des agences de recherche d’emplois, la participation à des ateliers de recherche d’emplois ou des foires de l’emploi, le réseautage, les contacts avec des employeurs éventuels, la présentation de demandes d’emploi, la présence à des entrevues et la réalisation d’évaluations des compétences.

[28] La prestataire a déclaré qu’elle n’avait pas cherché un emploi jusqu’à ce qu’un agent de Service Canada lui dise le 31 mars 2021 qu’elle devait chercher du travail. Elle a dit avoir assisté à une séance d’information de Service Canada alors qu’elle recevait des prestations d’assurance-emploi il y a plusieurs années. La prestataire a mentionné qu’un participant avait demandé s’ils devaient postuler dans un restaurant à service rapide. On leur avait répondu que les prestataires n’avaient pas à chercher en dehors de leur profession pour accepter un emploi moins rémunérateur. La prestataire s’est fiée à ces renseignements pour ne pas chercher de travail.

[29] La prestataire a fait valoir qu’on devrait lui accorder un délai raisonnable avant de lui demander de chercher du travail en dehors de sa profession. La prestataire a mentionné que si le premier agent à qui elle avait parlé en février, après la fin de ses prestations de maladie d’assurance-emploi, lui avait dit qu’elle devait chercher du travail en dehors de sa profession, elle l’aurait fait.

[30] En plus de l’article 9.002 du Règlement sur l’assurance-emploi, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit également que certains emplois ne conviennent pas dans certaines circonstances. Cette partie de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que, pour un délai raisonnable après qu’une personne se retrouve sans emploi, un travail convenable ne comprend pas un travail découlant d’un conflit de travail, moins rémunérateur ou dont les conditions sont moins favorables que l’emploi habituel, ou un travail qui n’est pas dans la profession habituelle de la personne et qui est moins rémunérateur ou dont les conditions sont moins favorables que son emploi habituelNote de bas de page 9.

[31] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit également qu’après un délai raisonnable à partir du moment où une personne devient chômeuse, un emploi n’est plus considéré comme non convenable s’il ne correspond pas à l’emploi habituel de la partie prestataire et qu’il est moins rémunérateur ou offre des conditions moins favorablesNote de bas de page 10.

[32] Je considère que le « délai raisonnable » est de trois mois pour cette partie de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 11.

[33] Cette partie de la loi ne signifie pas qu’une personne ne doit pas chercher un emploi avant la fin d’un délai raisonnable de chômage. Une personne doit quand même chercher un travail pendant qu’elle reçoit des prestations régulières d’assurance-emploi. Elle peut limiter sa recherche à certains types d’emploi pendant un délai raisonnable. Toutefois, elle doit chercher du travail pendant cette période. Après un délai raisonnable, la personne doit élargir ses critères de recherche d’emploiNote de bas de page 12.

[34] Dans la présente affaire, la prestataire n’a fait aucune démarche pour chercher du travail dans sa profession ou en dehors de celle-ci. Par conséquent, je ne pense pas que la prestataire puisse se fonder sur le délai raisonnable pour établir un droit aux prestations.

La prestataire a-t-elle établi des conditions personnelles qui pourraient avoir limité indûment ses chances de retourner sur le marché du travail?

[35] Non, j’estime que la prestataire n’a pas établi de conditions personnelles qui pourraient avoir limité indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[36] La prestataire a déclaré qu’elle détenait un diplôme de premier cycle, elle est une infirmière auxiliaire autorisée, elle a travaillé dans le domaine des soins infirmiers une grande partie de sa carrière et possède un peu d’expérience dans la vente au détail. Elle possède un permis de conduire et a accès à un moyen de transport pour se rendre au travail. La prestataire a mentionné qu’elle pouvait travailler en tout temps.

[37] Les limitations physiques de la prestataire ne sont pas des conditions personnelles qui limitent indûment son retour au travail. Une personne n’a pas à être disponible pour des emplois à moins que ceux-ci soient convenables. Tout emploi qui dépasse les capacités d’une partie prestataire ne serait pas un emploi convenableNote de bas de page 13. Comme je l’ai mentionné précédemment, les limitations physiques de la prestataire limitent ce qui constitue un emploi convenable pour elle. Toutefois, rien n’indique que la prestataire a établi des conditions personnelles autres que celles imposées par son état physique.

La prestataire était-elle capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable?

[38] Non. Une personne doit répondre aux trois facteurs énoncés dans l’affaire Faucher pour démontrer qu’elle est capable de travailler et disponible pour le faire. Comme elle n’a fait aucune démarche pour trouver du travail entre le 31 janvier et le 1er avril 2021, elle n’a pas répondu aux trois facteurs.

[39] Compte tenu des conclusions auxquelles je suis arrivée pour les trois facteurs, j’estime que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable du 31 janvier au 1er avril 2021Note de bas de page 14.

Conclusion

[40] Je conclus que la prestataire ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi du 31 janvier au 1er avril 2021.

[41] L’appel est rejeté.

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