Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AR c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 780

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. R.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (436007) datée du 4 octobre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 30 novembre 2021
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 2 décembre 2021
Numéro de dossier : GE-21-2022

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie.

[2] Je conclus que la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. La prestataire n’est donc pas exclue du bénéfice des prestations pour ce motif.

[3] Je conclus également que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Par conséquent, l’inadmissibilité imposée par la Commission à partir du 8 septembre 2021 est maintenue.

Aperçu

[4] La prestataire n’a pas continué à travailler, car elle a déménagé dans une autre ville pour suivre un cours sur les services policiers et correctionnels et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’elle avait choisi de quitter son emploi) sans justification. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[5] La Commission a également décidé que la prestataire n’était pas disponible pour travailler puisqu’elle suivait un cours, et elle l’a rendue inadmissible à des prestations à partir du 8 septembre 2021.

[6] La prestataire affirme avoir quitté son emploi pour suivre son cours afin de pouvoir obtenir un meilleur emploi et ne pas être contrainte de travailler au salaire minimum.

[7] La prestataire affirme également qu’elle cherche un emploi tout en suivant son cours et qu’elle peut travailler les soirs et les fins de semaine.

[8] Je dois décider si la prestataire a quitté volontairement son emploi, et si oui, si elle était fondée à le faire.

[9] Je dois également décider si la prestataire était disponible pour travailler pendant qu’elle suivait son cours.

Question que je dois examiner en premier

[10] Dans ses observations, la Commission déclare qu’elle a exclu la prestataire conformément à l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. Cet article porte sur une personne qui n’est pas en mesure de prouver à la Commission qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[11] En examinant la preuve, je n’ai vu aucune requête de la Commission demandant à la prestataire de prouver qu’elle avait fait des démarches habituelles et raisonnables. Je n’ai pas non plus vu de déclaration de la Commission selon laquelle la preuve de la prestataire était insuffisante, si elle avait fourni une telle preuve.

[12] Je constate également que la Commission n’a pas présenté d’observations détaillées sur la façon dont la prestataire n’a pas réussi à leur prouver qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables; la Commission a seulement résumé ce que l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit et ce que la loi prévoit au sujet des démarches habituelles et raisonnables.

[13] En raison de l’absence de preuve selon laquelle la Commission a demandé à la prestataire de prouver qu’elle avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable conformément à l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission n’a pas rendu la prestataire inadmissible aux termes de cet article. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une question que je dois examiner.

Questions en litige

[14] La prestataire est-elle exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a quitté volontairement son emploi sans justification?

[15] La prestataire est-elle disponible pour travailler?

Analyse

La prestataire était-elle fondée à quitter volontairement son emploi sans justification?

[16] J’estime que la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. Son contrat de travail a expiré, et elle n’a reçu aucune offre de renouvellement.

[17] La prestataire déclare qu’un ami de la famille lui avait demandé si elle pouvait les aider dans leur restaurant pendant le mois d’août 2021. La prestataire dit qu’elle a accepté d’aider cet ami de la famille.

[18] L’accord de travail qu’ils avaient conclu était donc que la prestataire n’aiderait cet ami que pendant le mois d’août 2021. La prestataire affirme qu’il s’agissait d’un accord entièrement verbal.

[19] La prestataire dit qu’une fois le mois d’août terminé, elle a déménagé et a commencé à aller à l’école comme prévu.

[20] Je note qu’il y a trois éléments qui vont à l’encontre du témoignage de la prestataire. Le premier élément est que, dans sa demande, elle a déclaré avoir démissionné pour aller à l’écoleNote de bas de page 1. Le deuxième élément est que son relevé d’emploi indique « Départ volontaire/Retour aux études »Note de bas de page 2. Le troisième élément est qu’elle a dit à la Commission qu’elle avait quitté son emploiNote de bas de page 3.

[21] Cependant, j’estime qu’aucune de ces questions n’est déterminante en ce qui concerne le témoignage de la prestataire et je choisis d’accorder plus de poids à son témoignage qu’à sa demande, à son relevé d’emploi et à une déclaration faite à la Commission selon laquelle elle avait démissionné.

[22] Le fait qu’un relevé d’emploi ou une demande de prestations indique qu’une personne a « démissionné » ne constitue pas la fin de l’analyse. Toutes les circonstances entourant la fin de l’emploi de la prestataire doivent être prises en compte afin de décider si elle a quitté volontairement son emploi. Il est tout à fait possible qu’une personne remplisse un formulaire en indiquant qu’elle a « démissionné », car elle estime qu’une fin d’emploi équivaut à une démission, que ce soit ou non la description la plus exacte de ce qui s’est passé dans le cadre de son emploi.

[23] Lorsque je considère la déclaration que la prestataire a faite à la Commission le 22 septembre 2021, je constate que celle-ci appuie son témoignage selon lequel elle avait une entente pour ne travailler que pendant un moisNote de bas de page 4.

[24] La prestataire a dit à la Commission qu’elle n’allait travailler pour son employeur que pendant un mois, soit en août 2021, car elle allait à l’école, et son employeur était au courant. J’estime que cela correspond à son témoignage selon lequel elle avait une entente pour ne travailler que pendant un mois, car son employeur savait qu’elle allait à l’école en septembre.

[25] Je note que la déclaration de la prestataire à la Commission est antérieure à la décision initiale rejetant la demande de prestations de la prestataire. Ce n’est donc pas comme si la prestataire était consciente qu’elle devrait peut-être modifier son histoire quant à la raison pour laquelle elle n’était plus employée afin d’essayer d’éviter d’être exclue du bénéfice des prestations.

[26] Afin de décider si la prestataire a quitté volontairement son emploi, il faut se demander si elle avait le choix de rester ou de quitterNote de bas de page 5.

[27] Je conclus que la prestataire n’a pas eu le choix de rester ou de quitter. Son contrat de travail verbal était d’un mois. Lorsqu’il a pris fin, aucune prolongation n’a été offerte à la prestataire, car l’employeur savait qu’elle allait déménager pour aller à l’école. Ainsi, sans autre offre d’emploi, la prestataire n’aurait pas pu continuer à travailler. Elle n’avait donc aucun choix quant à la poursuite de son emploi.

[28] Cependant, j’estime que même si un autre contrat de travail était proposé à la prestataire et qu’elle le refusait, cela ne signifierait pas pour autant qu’elle a quitté volontairement son emploi, car la Cour a soutenu qu’il ne s’agit pas d’un départ volontaire si une personne choisit de ne pas renouveler son contrat de travailNote de bas de page 6.

[29] Je conclus que puisque la prestataire n’a pas eu le choix de rester ou de quitter, son départ n’était pas volontaire.

[30] Je conclus également que puisque la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi, il n’est pas nécessaire que je décide si elle avait été fondée à quitter volontairement son emploi.

La prestataire est-elle disponible pour travailler?

[31] La loi exige qu’une partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travaillerNote de bas de page 7. Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, la partie prestataire doit être capable de travailler, être disponible pour le faire et être incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 8.

[32] Pour déterminer si une personne qui est aux études est disponible conformément à l’article 18 de la Loi sur l’assurance-emploi, la Cour d’appel fédérale a déclaré en 2010 qu’il existe une présomption selon laquelle les prestataires qui fréquentent l’école à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler.

[33] La Loi sur l’assurance-emploi a été récemment modifiée, et les nouvelles dispositions s’appliquent à la prestataireNote de bas de page 9. Au moment de ma lecture des nouvelles dispositions, la présomption d’indisponibilité a été déplacée. Une personne qui étudie à temps plein n’est pas présumée indisponible, mais doit prouver sa disponibilité comme tout autre prestataire.

[34] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, une partie prestataire doit être capable de travailler et disponible pour le faire, et incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 10. La prestataire doit prouver les trois éléments suivants pour démontrer qu’elle est disponible : 

  1. le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert;
  2. l’expression de ce désir par des démarches pour trouver un emploi convenable;   
  3. l’absence de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travailNote de bas de page 11.

[35] Je dois évaluer chacun de ces éléments pour trancher la question de la disponibilitéNote de bas de page 12, cela en examinant l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 13.

La prestataire avait-elle le désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert?

[36] La prestataire a manifesté le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.

[37] La prestataire a témoigné qu’elle fait des demandes d’emploi depuis le début de son cours, car elle a besoin de travailler.

[38] La prestataire dit qu’elle n’a que quelques économies pour couvrir le loyer, la nourriture et autres dépenses, et qu’elle doit donc travailler pour aider à couvrir ses dépenses mensuelles.

[39] Je n’ai aucun doute sur le fait que la prestataire a besoin de travailler et veut travailler. Je conclus que la prestataire a le désir de retourner sur le marché du travail, car elle veut travailler afin de couvrir ses dépenses mensuelles.  

La prestataire fait-elle des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable?

[40] La prestataire fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable.

[41] La prestataire a déclaré qu’elle cherchait du travail, et ce, depuis qu’elle a commencé son cours.

[42] La prestataire a soutenu qu’elle n’avait pas encore trouvé d’emploi pour lequel elle pouvait postuler, car aucun des emplois qu’elle a vus n’avait des horaires compatibles avec son horaire scolaire, mais elle examine toutes les possibilités d’emploi.

[43] Je conclus que la prestataire fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable en cherchant continuellement du travail, et ce, en regardant les annonces en ligne et en évaluant ces possibilités d’emploi.  

La prestataire a-t-elle établi des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail?

[44] La prestataire a établi des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[45] La prestataire dit que son cours a lieu du lundi au vendredi, mais que ses heures de cours sont irrégulières. Elle explique que le cours commence entre 8 h 30 et 10 h 30 et se termine entre 15 h et 17 h 30, selon ce qui se passe dans la classe ce jour-là.

[46] La prestataire dit qu’elle n’a pas encore trouvé d’emploi pour lequel elle peut postuler, car aucun emploi n’a jusqu’à présent des horaires compatibles avec son horaire de cours.

[47] La prestataire dit qu’elle peut travailler le soir et la fin de semaine, et qu’elle cherche n’importe quel type d’emploi pourvu qu’il soit compatible avec son horaire de cours.

[48] Je note que la prestataire a dit qu’elle pouvait travailler la fin de semaine, mais pour déterminer sa disponibilité, je dois examiner les jours ouvrables, et la loi dit qu’un jour de fin de semaine n’est pas un jour ouvrableNote de bas de page 14. Donc, je vais examiner sa disponibilité du lundi au vendredi.

[49] Je conclus que le cours de la prestataire constitue une condition personnelle qui limiterait indûment ses chances de retourner sur le marché du travail. J’estime que cela limite indûment ses chances, car son cours occupe une quantité importante de temps dans la semaine et tout emploi devrait être adapté à ces heures, ce qui limiterait considérablement les emplois que la prestataire pourrait accepter.

[50] Je note que la prestataire a soutenu cette affirmation dans son témoignage puisqu’elle a dit qu’elle n’a pas encore postulé pour un emploi, car elle n’a pas été en mesure d’en trouver un qui convienne à son horaire de cours.

La prestataire était-elle capable de travailler et disponible pour le faire, et incapable de trouver un emploi convenable?

[51] Compte tenu de mes conclusions sur ces trois éléments pris ensemble, je conclus que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, et incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 15.

Conclusion

[52] L’appel est accueilli en partie.

[53] Je conclus que la prestataire n’a pas quitté volontairement son emploi. La prestataire n’est donc pas exclue du bénéfice des prestations pour ce motif.

[54] Je conclus également que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Par conséquent, l’inadmissibilité imposée par la Commission à partir du 8 septembre 2021 est maintenue.

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