Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 46

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de permission d’en appeler

Partie demanderesse : R. S.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 8 décembre 2021 (GE-21-2046)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Date de la décision : Le 3 février 2022
Numéro de dossier : AD-22-17

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Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée, car l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, R. S. (prestataire), fait appel de la décision de la division générale. La division générale a conclu que le prestataire n’était pas admissible aux prestations de pêcheur de l’assurance-emploi qu’il a reçues à compter du 25 avril 2021. La division générale a conclu que le prestataire devait rembourser ces prestations.

[3] Le prestataire fait valoir que la division générale n’a pas respecté les règles d’équité procédurale. Le prestataire dit qu’il a demandé des renseignements à la division générale, mais que celle-ci ne les lui a pas donnés. En d’autres mots, il ne disposait pas de tous les faits qui, selon lui, étaient nécessaires pour son appel. Il ne prétend pas par ailleurs que la division générale a commis des erreurs de droit ou de fait.

[4] Je dois décider si l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1. Avoir une chance raisonnable de succès équivaut à avoir une cause défendableNote de bas de page 2.

Question en litige

[5] Peut-on soutenir que la division générale n’a pas respecté les règles d’équité procédurale?

Analyse

[6] La division d’appel doit accorder la permission d’en appeler sauf si l’appel « n’a aucune chance raisonnable de succès ». Une chance raisonnable de succès existe s’il est possible que la division générale ait commis une erreur de compétence, de procédure, de droit ou un certain type d’erreur de faitNote de bas de page 3.

[7] Une fois qu’une partie demanderesse a obtenu la permission de la division d’appel, elle peut passer à l’appel en tant que tel. C’est là que la division d’appel décide si la division générale a commis une erreur. Si la division d’appel décide que la division générale a commis une erreur, elle décide alors comment réparer cette erreur.

Contexte factuel

[8] Le prestataire a présenté deux demandes d’assurance-emploi :

  1. Octobre 2020Note de bas de page 4 – il a reçu des prestations d’assurance-emploi pour la période du 11 octobre 2020 au 24 avril 2021.
  2. Mai 2021Note de bas de page 5 – il a reçu huit semaines de prestations pour pêcheur de l’assurance-emploi pour cette deuxième demande.

[9] Le prestataire a présenté la deuxième demande parce que la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, lui a dit qu’il était admissible à une prolongation de ses prestations.

[10] Plus tard, la Commission a établi que le prestataire n’était pas admissible à une prolongation de ses prestations. Elle a constaté qu’il n’avait pas touché une rémunération suffisante de la pêche pour établir une nouvelle période de prestations. La Commission a également avisé le prestataire qu’elle avait utilisé les mesures législatives temporaires pour sa demande précédente et qu’il ne pouvait donc pas les utiliser une deuxième foisNote de bas de page 6.

[11] Le prestataire a répondu. Il a demandé à la Commission d’expliquer pourquoi elle avait rejeté sa demande. Il a déclaré qu’il disposait de la rémunération requise et qu’il ne devait pas compter sur les mesures législatives temporairesNote de bas de page 7.

[12] L’employeur du prestataire a préparé un relevé d’emploi en date du 23 octobre 2020. Il révélait que le prestataire avait touché une rémunération de plus de 15 000 $Note de bas de page 8.

Peut-on soutenir que la division générale n’a pas respecté les règles d’équité procédurale?

[13] Le prestataire fait valoir que la division générale ne lui a pas fourni les renseignements dont il avait besoin pour son appel.

La première question du prestataire à la Commission

[14] Dans son avis d’appel à la division générale, le prestataire a soulevé la même question qu’il avait précédemment posée à la Commission. Il a demandé pourquoi la Commission avait rejeté sa demande alors qu’elle l’avait acceptée en premier lieu.

[15] Le prestataire a soutenu dans son avis d’appel qu’il avait la rémunération requise pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi dans le cadre d’une deuxième demande. Il affirme également que la Commission aurait dû éviter de recourir aux mesures législatives temporaires lorsqu’il a été admis pour la première fois à des prestations puisqu’il avait la rémunération requise. Il a demandé pourquoi sa demande d’octobre 2020 avait été [traduction] « trafiquée et contaminéeNote de bas de page 9 ».

[16] Le prestataire laisse entendre, en d’autres mots, que la Commission aurait peut-être pu utiliser les mesures temporaires pour sa deuxième demande afin de le rendre admissible aux prestations.

[17] Le prestataire avait le droit de savoir pourquoi la Commission avait rejeté sa deuxième demande. Le prestataire a estimé que l’explication de la Commission dans sa lettre du 20 juillet 2021Note de bas de page 10 soulevait plus de questions qu’elle n’apportait de réponses.

[18] La Commission a répondu à la question du prestataire dans les observations qu’elle a présentées à la division généraleNote de bas de page 11. La Commission a déposé ses observations auprès du Tribunal de la sécurité sociale le 4 novembre 2021. Le Tribunal a rapidement envoyé par courriel une copie des observations de la Commission au prestataire le même jour.

[19] L’audience de la division générale a eu lieu le 1er décembre 2021. Le prestataire disposait donc des arguments de la Commission depuis un peu plus de trois semaines. Il ne prétend pas qu’il n’a pas eu la copie des arguments de la Commission ou qu’il ne l’a pas reçue à temps pour se préparer à l’audience.

[20] La Commission a exposé dans ses observations ce qu’elle considérait être les faits pertinents et le droit applicable. Elle a ensuite expliqué comment elle a établi que le prestataire n’était pas admissible à des prestations après le 25 avril 2021.

[21] La Commission a expliqué que le prestataire devait avoir touché 2 500 $ de rémunération pendant la période de référence. Bien que le prestataire ait gagné 15 000 $ de la pêche, la Commission a expliqué qu’il ne pouvait pas compter sur cette rémunération dans le cadre d’une deuxième demande. Cette rémunération avait été utilisée dans le cadre de sa première demande. La Commission a expliqué que les mesures temporaires pouvaient être utilisées une seule fois pour établir une période de prestations d’été pour pêcheur et une seule fois pour établir une période de prestations d’hiver pour pêcheur.

[22] Même si le prestataire n’était pas d’accord avec la position de la Commission, celle-ci a exposé sa position et expliqué pourquoi elle avait rejeté la deuxième demande du prestataire. Par conséquent, le prestataire devait être conscient de la cause qu’il devait défendre. Je ne suis pas convaincue qu’il existe une cause défendable selon laquelle la division générale n’a pas veillé à ce que le prestataire reçoive les renseignements dont il avait besoin pour son appel.

La deuxième question du prestataire à la Commission

[23] Dans un courriel daté du 9 novembre 2021, le prestataire a soulevé une autre question. Il a dit qu’il avait besoin d’une réponse que ni Service Canada ni le ministère de l’Emploi et du Développement social n’ont pu lui donner. Il a demandé ce qui suit :

[traduction]
Si je m’étais présenté personnellement à un Centre Service Canada plutôt que d’utiliser le processus automatisé de demande par Internet pour ma demande de prestations d’assurance-emploi, aurais-je eu la possibilité de préparer ma demande à partir de ma rémunération réelle au lieu de la mesure temporaire?

[24] En fait, la Commission a répondu à cette deuxième question avant que l’audience de la division générale n’ait lieu. La Commission a fourni une explication dans ses observations supplémentairesNote de bas de page 12. La Commission a dit au prestataire que cela n’avait pas d’importance qu’il ait fait sa demande en personne ou en ligne. La Commission a expliqué que présenter une demande des deux façons aurait déclenché le recours aux mesures temporaires.

[25] Bien que le prestataire puisse ne pas être d’accord avec la réponse de la Commission, je ne suis pas convaincue que le prestataire a une cause défendable selon laquelle il n’a pas eu tous les renseignements de la Commission dont il avait besoin pour son appel.

Équité du processus

[26] Le prestataire semble également soutenir que le processus de la division générale n’était pas équitable et que la membre n’était ni impartiale ni indépendante.

[27] Plus particulièrement, il affirme que le processus n’était pas équitable, car la Commission, puis la division générale n’ont pas répondu à ses questions. Il affirme avant tout que si le processus avait été vraiment équitable, la division générale aurait accueilli son appel.

[28] Dans le cadre d’une instance, l’équité implique généralement que les parties soient informées de manière adéquate des audiences, qu’elles aient pleinement la possibilité de plaider leur cause et que l’instance soit équitable et exempte de partialité ou de crainte raisonnable de partialité. L’équité se rapporte à des questions d’équité procédurale plutôt qu’à la question de savoir si un résultat est équitable.

[29] Dans la présente affaire, le prestataire soutient que la membre n’était ni impartiale ni indépendante. Toutefois, outre le fait qu’il n’est pas d’accord avec le résultat de l’affaire, il n’a fait état d’aucune conduite ni d’aucun comportement de la part de la membre. Par exemple, rien ne permet de penser que la membre lui a [traduction] « coupé la parole » pendant l’audience et ne lui a pas donné l’occasion de plaider sa cause.

[30] Le prestataire affirme également que la division générale n’a pas répondu à ses questions. Le prestataire a droit à une décision dans laquelle il est expliqué de manière adéquate comment et pourquoi la membre est arrivée à la conclusion qu’elle a tirée. Je vais me pencher sur la question de savoir si la division générale a donné des raisons suffisantes pour permettre au prestataire de comprendre comment la membre est arrivée à sa décision.

Prestations de pêcheur au titre du Règlement sur l’assurance-emploi (pêche)

[31] Tout comme la Commission l’avait fait, la division générale a d’abord cherché à savoir si le prestataire était admissible aux prestations, conformément au Règlement sur l’assurance-emploi (pêche) (Règlement (pêche)). Au titre du Règlement (pêche), le prestataire devait avoir touché un certain niveau de rémunération pendant sa période de référenceNote de bas de page 13.

[32] La division générale a donc dû établir la période de référence du prestataire. La période de référence est calculée différemment selon qu’il s’agit d’une période de prestations d’été pour pêcheur ou une période de prestations d’hiver pour pêcheur.

[33] La division générale devait donc examiner si le prestataire avait fait une demande concernant des prestations d’été ou des prestations d’hiver pour pêcheur. Dans le formulaire de demande, il était expliqué qu’une demande de prestations d’hiver pour pêcheur était une demande pour laquelle le pêcheur avait pêché pendant les mois d’hiver et demandé des prestations pendant les mois d’été.

[34] Même si le prestataire avait coché la case [traduction] « prestations d’été pour pêcheur » dans son formulaire de demande, la division générale a conclu que, si le prestataire voulait que les prestations commencent et se terminent au moment indiqué, il devait faire une demande de prestations d’hiver pour pêcheur.

[35] La division générale s’est ensuite penchée sur les dates de début et de fin de la période de référence pour la demande de prestations d’hiver pour pêcheur. Elle a conclu que la période de référence du prestataire allait du 11 octobre 2020 au 24 avril 2021. La division générale a examiné si le prestataire avait touché une rémunération pendant cette période.

[36] Le prestataire n’a pas touché de rémunération pendant cette période. Par conséquent, le prestataire n’était pas admissible aux prestations au titre du Règlement (pêche).

[37] Je ne constate aucune erreur ni dans l’explication de la division générale ni dans son calcul de la période de référence du prestataire. Puisqu’il n’y avait aucune preuve de rémunération pendant cette période de référence, la division générale a conclu à juste titre que le prestataire n’avait pas droit à des prestations au titre du Règlement (pêche).

Prestations de pêcheur dans le cadre des mesures temporaires

[38] Comme le prestataire n’était pas admissible à des prestations au titre du Règlement (pêche), la division générale a cherché à savoir si le prestataire était admissible à des prestations dans le cadre des mesures temporairesNote de bas de page 14. Les mesures temporaires ont été introduites en réponse à la pandémie. Les prestataires qui n’ont pas droit à des prestations de pêcheur au titre du Règlement (pêche) peuvent avoir droit à des prestations dans le cadre des mesures temporaires.

[39] La division générale a demandé pourquoi la Commission avait décrit la demande du prestataire comme une deuxième demande de prestations d’été alors qu’il s’agissait en fait d’une demande de prestations d’hiver pour pêcheur. C’est pour cette raison que la membre de la division générale n’a pas entièrement accepté l’explication de la Commission concernant le rejet de la deuxième demande du prestataire.

[40] La division générale a convenu que le prestataire ne pouvait pas s’appuyer sur les mesures temporaires pour avoir droit aux prestations. Cependant, ce n’était pas parce qu’il avait utilisé les mesures temporaires dans le cadre d’une demande antérieure de prestations d’été pour pêcheur. (Une partie prestataire peut bénéficier des mesures temporaires une fois pour une demande de prestations d’été pour pêcheur et une fois pour une demande de prestations d’hiver pour pêcheurNote de bas de page 15.)

[41] La division générale a conclu que les mesures temporaires ne pouvaient être utilisées que si une partie prestataire avait reçu des prestations au cours des saisons précédentesNote de bas de page 16. La division générale a conclu que le prestataire n’avait jamais fait de demande de prestations d’hiver pour pêcheur auparavant. Elle a également conclu qu’il n’avait jamais reçu de prestations pendant les mois d’été au cours des saisons précédentes.

[42] Puisque le prestataire n’avait pas fait de demande de prestations d’hiver pour pêcheur auparavant, il n’a pas établi de périodes de prestations dans le cadre d’une demande de prestations d’hiver pour pêcheur en 2020 ou en 2019. La division générale a conclu que cela signifiait que le prestataire ne pouvait pas obtenir de prestations dans le cadre d’une demande de prestations d’hiver pour pêcheur à l’aide des mesures temporaires.

Résumé

[43] Le prestataire affirme que la division générale n’a pas répondu à ses questions ni expliqué pourquoi il n’était pas admissible au bénéfice de prestations pour pêcheur dans le cadre de sa deuxième demande. En fait, la division générale a expliqué pourquoi le prestataire n’était pas admissible aux prestations. Son analyse était méthodique et, plus important encore, le résultat était fondé en droit.

[44] La division générale n’a pas mal interprété ou mal appliqué le Règlement (pêche) ou les mesures temporaires lorsqu’elle a examiné si le prestataire était admissible au bénéfice de prestations de pêcheur après le 25 avril 2021.

[45] Je ne suis pas convaincue que le prestataire a une cause défendable selon laquelle la division générale n’a pas suivi les règles d’équité procédurale ou que le processus était en quelque sorte inéquitable.

Conclusion

[46] La permission d’en appeler est refusée parce que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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