Assurance-emploi (AE)

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Citation : ML c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2021 TSS 871

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (436742) datée du 27 octobre 2021 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 21 décembre 2021
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 22 décembre 2021
Numéro de dossier : GE-21-2384

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Je conclus que la demande de prestations déposée par l’appelante ne peut être considérée comme ayant été présentée le 4 décembre 2017.

Aperçu

[3] L’appelante a présenté une demande de prestations spéciales pour proches aidants d’adulte le 27 juillet 2021 et une période de prestations a été établie au 25 juillet 2021. Le 27 juillet 2021, elle a également demandé à la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) de considérer rétroactivement sa demande afin de recevoir des prestations pour proches aidants à compter du 4 décembre 2017.

[4] Le 27 octobre 2021, la Commission a conclu que l’appelante n’avait pas droit aux prestations spéciales au 4 décembre 2017 parce qu’il n’y a pas eu d’arrêt de la rémunération et que les conditions requises n’étaient pas satisfaites pour établir une période antérieure de prestations à compter de cette date.

[5] L’appelante n’est pas d’accord. Elle admet qu’elle était en congé à traitement différé entre le 31 juillet 2017 et le 29 juillet 2018, cependant, elle fait valoir qu’elle n’avait pas cumulé d’heures de travail avant son congé permettant de différer le traitement de son salaire. Pour cette raison, elle considère le montant versé par son employeur pendant son congé comme un prêt et non comme une rémunération.

[6] Je dois déterminer si la demande de prestations de l’appelante doit être considérée comme ayant été présentée le 4 décembre 2017.

Question en litige

[7] Les conditions requises pour l’admissibilité aux prestations étaient-elles satisfaites au 4 décembre 2017 ?

[8] L’appelante avait-elle une explication raisonnable à fournir justifiant son retard ?

Analyse

Les conditions requises pour l’admissibilité aux prestations étaient-elles satisfaites au 4 décembre 2017 ?

[9] Une période de prestations peut être établie à une date antérieure lorsque deux conditions sont remplies : le demandeur de prestations remplit les conditions requises pour l’admissibilité aux prestations à cette date antérieure et il a, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.Note de bas page 1

[10] Afin de pouvoir recevoir des prestations, un travailleur doit démontrer que les conditions requises sont satisfaites; à savoir s’il y a eu un arrêt de la rémunération provenant de son emploi et s’il a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant au moins 420 heures.Note de bas page 2

[11] Les conditions requises pour l’admissibilité de l’appelante aux prestations sont contestées par la Commission. Celle-ci soutient qu’il n’y a pas eu d’arrêt de la rémunération conformément au paragraphe 14(3) de la Loi. Elle fait également valoir le paragraphe 11(3) de la Loi qui se lit comme suit :

Une semaine totale ou partielle, qui, en conformité avec une entente entre un employeur et un employé, fait partie d’une période de congé durant laquelle l’employé demeure employé de cet employeur et pour laquelle il reçoit, indépendamment du moment du versement, la partie de sa rétribution qui a été mise de côté n’est pas une semaine de chômage.

[12] La Commission fait également valoir qu’en choisissant de participer à un régime de congé avec salaire différé, l’appelante a consenti à recevoir un salaire moins élevé pendant qu'elle travaille, de manière à pouvoir toucher un salaire pendant son congé.

[13] Elle explique qu’en vertu de dispositions spéciales, les employés en congé avec salaire différé ne subissent pas d'arrêt de rémunération pendant leur période de congé, à moins qu'un arrêt de rémunération puisse être établi en fonction d'un autre emploi. La Commission affirme que les employés en congé de ce genre sont réputés travailler des semaines de travail entières pour chaque semaine de leur congé avec salaire différé.

[14] Ainsi, la Commission soutient que le dossier de l’appelante ne satisfaisait pas à une des conditions requises à la date antérieure du 4 décembre 2017. Elle explique que pour pouvoir établir une période de prestations, il doit y avoir une période d’arrêt de rémunération pendant 7 jours consécutifs à l’égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi, autre que celle visant les congés fériés, ne lui est payable ni attribuée.

[15] Elle démontre que le relevé d’emploi présenté au dossier indique que l’appelante a reçu un salaire entre le 23 juillet 2017 et le 29 juillet 2018 et qu’aucun arrêt de rémunération entre le 23 juillet 2017 et le 3 décembre 2017 n’a eu lieu.

[16] L’appelante admet qu’elle était en congé, mais elle soutient qu’elle n’avait pas cumulé les heures de travail lui permettant d’autofinancer ce congé avant de le prendre. Elle explique que dans la plupart des cas, lorsque l’employeur autorise un congé à traitement différé, les employés ont déjà cumulé les heures de travail requises, ce qui n’était pas son cas.

[17] L’appelante explique que son congé a eu lieu entre le 31 juillet 2017 et le 29 juillet 2018 et qu’il n’a pas été décidé à l’avance; le congé a été décidé dans l’urgence. Elle mentionne avoir demandé à son employeur l’autorisation de prendre un congé et qu’une entente a été conclue. Cette entente lui garantissait le versement de sommes périodiques qu’elle s’engageait à rembourser une fois son congé terminé.

[18] Elle indique avoir commencé à rembourser, à même son salaire, les sommes versées à l’avance par son employeur seulement à compter de son retour au travail à la fin du mois de juillet 2018. Pour cette raison, elle compare le versement des sommes par l’employeur pendant son congé à un prêt plutôt qu’à du salaire versé.

[19] Je suis d’accord avec la Commission.

[20] La Loi prévoit que des prestations sont versées à un membre de la famille d’un adulte gravement malade qui doit en prendre soin et lui offrir du soutien lorsqu’un médecin ou une infirmière autorisée délivre un certificat. L’appelante a demandé ces prestations spéciales, mais comme le prévoit cet article, elle doit satisfaire aux conditions d’admissibilité.Note de bas page 3

[21] Conformément au paragraphe 14(1) du Règlement sur l’assurance-emploi (le Règlement),

(…) un arrêt de rémunération se produit lorsque, après une période d’emploi, l’assuré est licencié ou cesse d’être au service de son employeur et se trouve à ne pas travailler pour cet employeur durant une période d’au moins sept jours consécutifs à l’égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi, autre que celle visée au paragraphe 36(13), ne lui est payable ni attribuée.

[22] L’appelante n’a pas été licenciée et une rémunération lui a été attribuée pendant son congé. Bien que je comprenne que l’employeur a accepté de conclure une telle entente de congé à traitement différé même si l’appelante n’avait pas cumulé les heures travaillées requises avant le congé, elle a assuré à l’employeur qu’elle rembourserait les sommes reçues à même son salaire après son congé. L’appelante se trouvait dans une situation urgente et cette situation lui a permis de recevoir une rémunération en avance pour laquelle elle n’avait pas encore travaillé ou fourni les services.

[23] Cette situation démontre le lien entre l’appelante et son employeur. Il n’y a pas eu d’arrêt de la rémunération pendant cette période. Au contraire, il était convenu qu’un congé à traitement différé lui soit accordé du 31 juillet 2017 au 29 juillet 2018. L’entente prévoyait que l’appelante était rémunérée à 80% de sa rémunération pendant toute la durée du congé.Note de bas page 4

[24] En ce sens, le paragraphe 14(6) du Règlement précise qu’une période de congé visée au paragraphe 11(3) de la Loi ne constitue pas un arrêt de rémunération, quel que soit le moment ou le mode de versement de la rétribution.

[25] De plus, bien que la rémunération reçue par l’appelante était versée pendant un congé et qu’elle était différée (même si le remboursement de la rémunération a eu lieu après le congé), l’appelante n’est pas considérée comme étant en chômage pendant les semaines pour lesquelles elle a conclu une telle entente avec son employeur.Note de bas page 5

[26] Les conditions requises permettant de faire établir une période de prestations ne sont pas satisfaites. Il n’y a pas eu d’arrêt de la rémunération au 4 décembre 2017.

[27] Même si je comprends les explications de l’appelante et les raisons pour lesquelles elle a pris un tel congé, les faits démontrent que pendant son congé elle a reçu une rémunération versée par son employeur. Comme la Commission le fait valoir, le paragraphe 11(3) de la Loi indique qu’une période de congé ne constitue pas un arrêt de rémunération, quel que soit le moment ou le mode de versement de la rétribution.

[28] Puisque le premier critère du paragraphe 10(4) de la Loi n’est pas rempli, il n’est pas utile de répondre au deuxième critère à savoir si l’appelante avait une explication raisonnable justifiant son retard parce qu’une période de prestations ne peut être établie.

[29] Cependant, je voudrais tout de même fournir des éléments de réponse à l’appelante et je précise que même si elle ne savait pas qu’elle pouvait avoir droit à des prestations spéciales, la bonne foi et l’ignorance de la Loi ne constituent pas en elles-mêmes un motif valable pour justifier le retard à déposer une demande.

[30] En ce sens, lors de l’audience, l’appelante a mentionné qu’elle n’avait pas présenté sa demande de prestations avant le 27 juillet 2021 parce qu’elle ne connaissait pas cette information et qu’elle ne savait pas que ces prestations existaient.

[31] Je conclus que la demande de prestations de l’appelante ne peut être considérée comme ayant été présentée le 4 décembre 2017.

Conclusion

[32] L’appel est rejeté.

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