Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : NB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 152

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : N. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (443013) datée du 8 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 1er février 2022
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 2 février 2022
Numéro de dossier : GE-21-2578

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’il a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] Le prestataire travaillait comme agent de sécurité et a perdu son emploi. L’employeur du prestataire a déclaré que le prestataire avait été congédié parce qu’il s’était endormi au travail.

[4] La Commission a accepté la raison du congédiement que l’employeur a fournie. Elle a conclu que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle l’a donc exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[5] Le prestataire affirme que même s’il s’est endormi au travail, c’était la cinquième nuit où il faisait un quart de douze heures, que ce n’était pas intentionnel, que cela n’a duré que quelques secondes et que d’autres employés ont fait la même chose, mais n’ont pas été congédiés. Ils ont seulement été suspendus.

[6] Le prestataire affirme également que l’employeur ne l’aimait pas et a donc utilisé cet incident comme excuse pour se débarrasser de lui.

Question en litige

[7] Le prestataire a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] Pour décider si le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison le prestataire a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi le prestataire a-t-il perdu son emploi?

[9] J’estime que le prestataire a perdu son emploi parce qu’il s’est endormi au travail.

[10] Le prestataire affirme qu’il a lutté avec acharnement pour s’assurer que les travailleurs aient de bonnes conditions de travail et pour remédier à ce qu’il considérait comme des lacunes dans le traitement des travailleurs par l’employeur, ayant même soulevé des problèmes directement auprès du directeur général.

[11] Le prestataire dit que le fait qu’il ait parlé des problèmes dérangeait son employeur. Ainsi, même s’il reconnaît s’être endormi, il dit que cela n’a duré que quelques secondes et que son employeur s’en est servi comme excuse pour se débarrasser de lui.

[12] Le prestataire dit également que son superviseur ne l’aimait pas et qu’il a menti sur la durée de son sommeil, disant même aux autres personnes présentes de se taire pour s’assurer qu’elles ne réveillent pas le prestataire afin de permettre au gestionnaire de dire que le prestataire dormait depuis longtemps et de le faire mal paraître.

[13] J’estime que le prestataire n’a pas fourni suffisamment de preuves pour soutenir qu’il a été congédié pour une raison autre que le fait de s’être endormi au travail.

[14] Peut-être que le superviseur du prestataire ne l’aimait pas, peut-être que l’employeur du prestataire ne l’aimait pas. Cependant, j’estime que la preuve à l’appui du fait que le prestataire a été congédié pour s’être endormi au travail est beaucoup plus convaincante. Cette preuve est la suivante :

  • Le prestataire a convenu qu’il s’était endormi au travail.
  • Son employeur a dit à la Commission que le prestataire s’était endormi au travail et que c’était la raison pour laquelle il avait été congédiéNote de bas de page 2.
  • La lettre de congédiement fournie par l’employeur indique que le prestataire a été congédié pour s’être endormi au travailNote de bas de page 3.

[15] De plus, je note que la politique de l’employeur précise qu’un employé peut être immédiatement congédié s’il s’endort au travailNote de bas de page 4, ce qui confirme que le prestataire a été congédié parce qu’il s’est endormi, plutôt que pour une autre raison, car le fait d’être congédié était clairement parmi les résultats possibles du fait que le prestataire s’est endormi au travail.

[16] J’estime que le témoignage du prestataire selon lequel il n’a aucun antécédent disciplinaire avec son employeur appuie davantage le fait que le prestataire a été congédié pour s’être endormi au travail, puisque son dossier disciplinaire indique qu’il était un bon employé et qu’il n’était pas une source d’irritation pour son employeur.

La raison du congédiement du prestataire est-elle une inconduite selon la loi?

[17] Selon la loi, la raison du congédiement du prestataire est une inconduite.

[18] Pour être considérée comme une inconduite selon la loi, la façon d’agir doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 5. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 6. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que le prestataire ait eu une intention coupableNote de bas de page 7 (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal).

[19] Il y a inconduite si le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’il soit congédié pour cette raisonNote de bas de page 8.

[20] La Commission doit prouver que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 9.

[21] La Commission affirme que le fait que le prestataire se soit endormi au travail constituait un manquement à ses obligations, comme cité dans la politique de l’employeur, et qu’il s’agit d’une inconduite puisque le prestataire savait, ou aurait dû savoir, que le fait de dormir au travail entraînerait un congédiementNote de bas de page 10.

[22] Le prestataire affirme que même s’il s’est endormi, il ne l’a pas fait exprès.

[23] Le prestataire dit qu’il en était à son cinquième quart de travail de douze heures, passant de l’équipe de nuit à l’équipe de jour, que son cycle de sommeil était perturbé, qu’il était fatigué et qu’il s’est endormi pendant quelques secondes, juste au moment où le superviseur passait.

[24] Le prestataire affirme que son employeur ne lui a pas accordé de pause pendant ce quart de travail et qu’il avait travaillé pendant quatre heures d’affilée.

[25] Le prestataire dit que pour obtenir une pause, il aurait dû appeler son superviseur et attendre que ce dernier se rende sur place pour le remplacer. Le prestataire dit qu’il n’a jamais appelé son superviseur pour demander de prendre une pause.

[26] Le prestataire dit que son superviseur lui en veut. Le superviseur a menti sur la durée de son sommeil, car le prestataire affirme que ses yeux se sont fermés pendant quelques secondes tout au plus.

[27] Le prestataire soutient que son superviseur a également dit aux autres personnes dans son secteur de se taire afin qu’elles ne le réveillent pas pour permettre au superviseur de dire que le prestataire a dormi pendant une longue période et de le faire mal paraître.

[28] Le prestataire affirme que les quelques secondes où il a dormi n’ont causé aucun dommage, car personne ne peut entrer dans l’aéroport s’il ne les laisse pas entrer. De plus, il dit qu’il est autorisé à s’absenter pour aller aux toilettes. Il y a donc un problème s’il s’est endormi pendant quelques secondes, car c’est exactement la même chose.

[29] Le prestataire affirme qu’il était au courant de la politique de l’entreprise concernant le fait de dormir au travail.

[30] Le prestataire déclare qu’il n’aurait pas dû être congédié, car d’autres employés se sont endormis au travail dans le passé et n’ont pas été congédiés, mais simplement suspendus.

[31] Je note que l’employeur du prestataire a dit à la Commission que si quelqu’un vient à l’aéroport et que l’employé est parti pour aller aux toilettes, cette personne attendra que l’employé revienne et la laisse entrer. Cependant, l’employeur a noté que dans le cas du prestataire, il n’a pas verrouillé l’entrée, comme s’il était en pause ou aux toilettes : il s’est simplement endormi au travailNote de bas de page 11.

[32] Je peux comprendre l’argument du prestataire selon lequel s’il est autorisé à quitter son poste pour aller aux toilettes, il n’y a aucune différence au niveau de la sécurité de la situation s’il s’endort pendant une seconde.

[33] Cependant, je ne suis pas ici pour juger si l’employeur doit changer ses règles ou ses politiques concernant les raisons de congédiement.

[34] Je ne suis pas non plus ici pour décider si le congédiement du prestataire était justifié, ou si c’était la punition appropriée. Je dois plutôt établir si la conduite du prestataire constitue une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 12.

[35] Je peux accepter que les actions du prestataire n’étaient pas intentionnelles, c’est-à-dire qu’il n’a pas décidé qu’il allait délibérément dormir au travail. Cependant, j’estime que le prestataire a eu la conduite pour laquelle il a été congédié et que sa conduite était si imprudente qu’elle était presque délibérée.

[36] Le prestataire dit s’être endormi au travail; il ne le conteste pas.

[37] Le prestataire affirme également qu’il était au courant de la politique de son employeur concernant le fait de dormir au travail et que la politique prévoit qu’il pourrait être immédiatement congédié s’il agissait ainsiNote de bas de page 13, bien qu’il affirme qu’on n’aurait pas dû lui faire cela.

[38] Le prestataire dit qu’il se sentait fatigué parce que son horaire de sommeil était perturbé par le passage de l’équipe de nuit à l’équipe de jour et qu’il en était à son cinquième quart de travail de douze heures.

[39] Pourtant, il n’a pris aucune mesure pour tenter de remédier à cette situation, telle que demander de prendre sa pause comme il l’a dit, ou signaler à son employeur son incapacité à continuer à travailler, bien qu’il savait que s’il s’endormait, il pouvait être immédiatement congédié. J’estime que cela montre que ses actions étaient si imprudentes qu’elles étaient délibérées, car il était bien conscient que s’endormir était une possibilité réelle dans son état, et que cela pouvait entraîner un congédiement, mais il n’a pas pris de mesures raisonnables pour essayer d’empêcher que cela ne se produise.

[40] J’estime en outre que ses actions constituent une inconduite, car il dit qu’il était au courant de la politique de son employeur concernant le fait de dormir au travail, et cette politique dit clairement qu’il pouvait être immédiatement congédié pour avoir dormi au travail, de sorte qu’il aurait dû savoir qu’il pouvait perdre son emploi s’il s’endormait au travail.

[41] Je note que le prestataire a soutenu qu’il s’était endormi pendant une très courte période et que son superviseur a menti sur la durée de son sommeil, mais quoi qu’il en soit, il n’y a aucune distinction dans la politique de l’employeur sur la durée pendant laquelle un employé doit être endormi pour pouvoir être congédié.

Alors, le prestataire a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[42] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[43] La Commission a prouvé que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[44] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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