Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 164

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale – Section de l’assurance-emploi

Décision

Appelant (Prestataire) : A. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (444432) datée du 20 décembre 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gerry McCarthy
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 7 février 2022
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 8 février 2022
Numéro de dossier : GE-22-139

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Le prestataire a montré qu’il était fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait étant donné qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable. Cela signifie qu’il n’est pas exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[2] Le prestataire a quitté son emploi comme nettoyeur d’automobile chez « X » le 11 septembre 2020. Le prestataire a d’abord demandé la Prestation canadienne d’urgence (PCU) le 23 mars 2020. On s’est ensuite servi de sa demande pour établir le 4 octobre 2020 une période de prestations pour les prestations régulières de l’assurance-emploi.

[3] La Commission a examiné les raisons pour lesquelles le prestataire a démissionné. Elle a décidé qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification, et qu’elle ne pouvait donc pas lui verser des prestations.

[4] La Commission dit que le prestataire n’a pas prouvé que conserver son emploi n’était pas une solution raisonnable. Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme que son superviseur a abusé verbalement de lui et qu’il devait démissionner pour son bien-être personnel et sa santé.

Question en litige

[5] Je dois décider si le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi puisqu’il a volontairement quitté son emploi sans justification. Pour ce faire, je dois d’abord examiner la question de son départ volontaire. Je dois ensuite décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Personne ne conteste le fait que le prestataire a volontairement quitté son emploi

[6] J’accepte que le prestataire ait quitté volontairement son emploi. Le prestataire convient qu’il a démissionné (autrement dit, qu’il a quitté volontairement son emploi) en date du 11 septembre 2020. Je ne constate aucun élément de preuve qui vient contredire cela.

Les parties ne s’entendent pas sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi

[7] Les parties ne s’entendent pas sur le fait que le prestataire était fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait.

[8] La loi énonce qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle a quitté volontairement son emploi et qu’elle n’avait pas de motif valableNote de bas page 1. Avoir une bonne raison de quitter un emploi ne suffit pas à démontrer qu’il existait un motif valable. Une personne est fondée à quitter son emploi si, compte tenu de toutes les circonstances, aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à la personne que celle de quitter son emploi au moment où elle l’a faitNote de bas page 2. Il incombe au prestataire de prouver celaNote de bas page 3. Le prestataire doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi au moment où il l’a faitNote de bas page 4.

[9] Pour trancher cette question, je dois examiner l’ensemble des circonstances qui existaient au moment où le prestataire a quitté son emploi. Certaines des circonstances que je dois examiner sont prévues par la loiNote de bas page 5. Une fois que j’ai décidé quelles circonstances s’appliquent au prestataire, ce dernier doit ensuite démontrer qu’aucune autre solution raisonnable que le départ ne s’offrait à lui à ce moment-làNote de bas page 6.

Les circonstances au moment de la démission du prestataire

[10] Le prestataire affirme qu’une des circonstances prévues par la loi s’applique à sa situation. Il invoque la circonstance d’une relation conflictuelle avec un superviseur – si le prestataire n’était pas essentiellement responsable du conflit.

[11] Le prestataire a témoigné que son superviseur (R. A.) a abusé verbalement de lui à plusieurs reprises. Le prestataire a témoigné que R. A. lui a dit [traduction] « qu’il allait trouver quelqu’un pour me faire du mal ».

[12]  La Commission a parlé à l’employeur du prestataire (R. A./Responsable du nettoyage) le 20 décembre 2021. Elle a soulevé la question de l’abus allégué. R. A. a déclaré qu’il ne se souvenait pas du prestataire et a affirmé n’avoir jamais abusé d’un employé (GD3-23).

[13] J’accorde plus d’importance au témoignage du prestataire concernant la relation conflictuelle avec R. A. (et les menaces de ce dernier), car ses déclarations étaient cohérentes et détaillées. De plus, la réponse de R. A. selon laquelle il ne se souvenait pas du prestataire était invraisemblable, étant donné qu’il l’a embauché et interagissait directement avec lui dans le milieu de travail.

[14] La circonstance qui s’applique au moment de la démission du prestataire est celle d’une relation conflictuelle avec un superviseur – si le prestataire n’était pas essentiellement responsable du conflit.

Aucune solution raisonnable

[15] Je dois maintenant examiner la question de savoir si le prestataire n’avait aucune autre solution raisonnable que de démissionner lorsqu’il l’a fait. Le prestataire dit qu’il n’en avait aucune parce que son superviseur (R. A.) le contrariait à un tel point que son bien-être personnel et sa santé étaient affectés.

[16] La Commission n’est pas d’accord et affirme que le prestataire aurait pu conserver son emploi pendant qu’il cherchait un autre travail. La Commission ajoute que le prestataire aurait pu discuter de la question avec le service des ressources humaines de son employeur ou refuser le travail et déposer une plainte officielle auprès du ministère du Travail de l’Ontario.

[17] J’estime qu’aucune autre solution raisonnable ne s’offrait au prestataire au moment de son départ. Mes motifs sont les suivants.

[18] Premièrement : Le prestataire a témoigné qu’il a parlé à son employeur (A./propriétaire) et son fils (A./propriétaire) au sujet de la relation conflictuelle avec son superviseur et ils ont dit qu’ils songeraient à quoi faire. Le prestataire a témoigné qu’il a attendu environ deux ou trois semaines que quelque chose se produise, et lorsqu’on n’a rien fait, il a décidé de présenter sa démission. Je reconnais que la Commission a avancé que le prestataire aurait pu conserver son emploi et discuter de la question avec le service des ressources humaines de son employeur ou le ministère du Travail de l’Ontario. Néanmoins, le prestataire a tenté de résoudre le problème en parlant au propriétaire et à son fils. Étant donné que le prestataire a parlé directement aux propriétaires, l’idée de lancer une plainte officielle auprès du ministère du Travail n’était pas une solution raisonnable vu les circonstances.

[19] Deuxièmement : Le prestataire a présenté sa lettre de démission (avec un préavis de deux semaines) à son superviseur (R. A.), mais il a affirmé que son superviseur lui a relancé la lettre et lui a dit de s'en aller. Je reconnais que la Commission a avancé que le prestataire aurait pu conserver son emploi en cherchant un autre emploi. Toutefois, le prestataire a fourni à son superviseur un préavis de deux semaines en toute bonne foi et il espérait obtenir un autre emploi avant la fin de ce délai. En somme, le prestataire n’a pas eu la chance de conserver son emploi pendant qu’il essayait d’obtenir un autre emploi.

Observations supplémentaires de la Commission

[20] Je sais que la Commission a indiqué qu’elle comprenait que le prestataire traversait une situation difficile. Néanmoins, la Commission a maintenu que le prestataire n’avait pas prouvé que le fait de conserver son emploi n’était pas une autre solution raisonnable. Cependant, il faut tenir compte des circonstances importantes dans ce cas. Par exemple, le prestataire a été non seulement contrarié par son superviseur, mais à un moment donné, il a même été menacé. Le prestataire a témoigné que la relation conflictuelle avec son superviseur affectait son bien-être personnel et sa santé. Dans ces circonstances, je ne peux tout simplement pas accepter que le prestataire n’a pas prouvé qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi; surtout à la lumière de l’abus verbal que son superviseur lui a fait subir.

[21] Étant donné les circonstances qui existaient au moment où le prestataire a quitté volontairement son emploi, le prestataire n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi au moment où il l’a fait pour les raisons énoncées ci-dessus. Cela signifie que le prestataire était fondé à quitter son emploi.

Conclusion

[22] Je conclus que le prestataire n’est pas exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. Cela signifie que l’appel est accueilli.

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